------------------------Prophètes et Rois PR 7 1 Préface PR 9 1 Introduction PR 15 1 Chapitre 1 -- Salomon PR 23 1 Chapitre 2 -- Le temple et sa dédicace PR 35 1 Chapitre 3 -- Orgueil dans la prospérité PR 43 1 Chapitre 4 -- Conséquences de la transgression PR 53 1 Chapitre 5 -- Repentance de Salomon PR 63 1 Chapitre 6 -- Division du royaume PR 71 1 Chapitre 7 -- Jéroboam PR 77 1 Chapitre 8 -- L'apostasie nationale PR 85 0 Chapitre 9 -- Elie, le Thischbite PR 93 0 Chapitre 10 -- Sévères paroles de reproche PR 105 0 Chapitre 11 -- Le mont Carmel PR 113 0 Chapitre 12 -- De Jizreel à Horeb PR 123 0 Chapitre 13 -- Que fais-tu ici? PR 133 1 Chapitre 14 -- Avec l'esprit et la puissance d'Elie PR 143 1 Chapitre 15 -- Josaphat PR 153 0 Chapitre 16 -- Ruine de la maison d'Achab PR 163 1 Chapitre 17 -- L'appel d'Elisée PR 173 1 Chapitre 18 -- Elisée assainit les eaux du Jourdain PR 179 0 Chapitre 19 -- Un prophète de paix PR 187 0 Chapitre 20 -- Naaman PR 195 1 Chapitre 21 -- Fin du ministère d'Elisée PR 203 1 Chapitre 22 -- Ninive, la grande ville PR 215 1 Chapitre 23 -- La captivité assyrienne PR 225 1 Chapitre 24 -- Détruit par manque de connaissance PR 231 1 Chapitre 25 -- L'appel d'Esaïe PR 237 1 Chapitre 26 -- Voici votre Dieu PR 245 1 Chapitre 27 -- Achaz PR 253 1 Chapitre 28 -- Ezéchias PR 261 1 Chapitre 29 -- Les ambassadeurs de Babylone PR 269 1 Chapitre 30 -- Délivrance de l'Assyrie PR 283 1 Chapitre 31 -- Espoir pour les païens PR 293 1 Chapitre 32 -- Manassé et Josias PR 301 1 Chapitre 33 -- Le livre de la loi PR 311 1 Chapitre 34 -- Jérémie PR 323 1 Chapitre 35 -- L'approche du jugement PR 335 1 Chapitre 36 -- Le dernier roi de Juda PR 345 1 Chapitre 37 -- La déportation à Babylone PR 355 1 Chapitre 38 -- Lumière dans les ténèbres PR 365 0 Chapitre 39 -- À la cour de Babylone PR 375 0 Chapitre 40 -- Le songe de Nebucadnetsar PR 383 0 Chapitre 41 -- La fournaise ardente PR 391 0 Chapitre 42 -- La vraie grandeur PR 399 0 Chapitre 43 -- Le spectateur invisible PR 411 0 Chapitre 44 -- Dans la fosse aux lions PR 419 1 Chapitre 45 -- Retour de l'exil PR 429 1 Chapitre 46 -- Les prophètes de Dieu les assistaient PR 441 1 Chapitre 47 -- Josué et l'ange PR 451 1 Chapitre 48 -- Ni par la puissance, ni par la force PR 455 1 Chapitre 49 -- Aux jours de la reine Esther PR 461 1 Chapitre 50 -- Esdras, prêtre et scribe PR 469 1 Chapitre 51 -- Réveil spirituel PR 477 0 Chapitre 52 -- L'homme de la situation PR 483 0 Chapitre 53 -- Les réparateurs des murailles PR 491 0 Chapitre 54 -- Blâme de l'extorsion PR 497 0 Chapitre 55 -- Complots des païens PR 503 0 Chapitre 56 -- Lecture solennelle de la loi de Dieu PR 509 0 Chapitre 57 -- Œuvre de réforme PR 517 1 Chapitre 58 -- La venue d'un libérateur PR 533 1 Chapitre 59 -- La maison d'Israël PR 547 1 Chapitre 60 -- Visions de la gloire future ------------------------Préface PR 7 1 Toute l'histoire du peuple élu: les enfants d'Abraham "selon la chair", est d'un intérêt vital, en ce qu'elle révèle les différents aspects du caractère de Dieu: sa compassion infinie, sa parfaite justice, sa sagesse illimitée, sa puissance insondable et son amour éternel. PR 7 2 Mais de toute cette histoire aucune partie n'est plus intéressante que celle dont traite cet ouvrage, c'est-à-dire l'époque où Israël a atteint le faîte des honneurs, jusqu'à sa captivité et son retour en Palestine. PR 7 3 Le but de ce livre n'est pas d'entrer dans les détails de l'histoire de cette époque, ni d'en donner un récit systématique. D'autres l'ont fait depuis longtemps. Mais il s'agit là d'en faire ressortir de plus grandes choses: tirer des leçons morales des triomphes d'Israël, de ses défaites, ses apostasies, sa captivité et ses réformes, de façon à venir en aide d'une manière pratique à ceux qui passent par l'épreuve, en leur montrant la profondeur de l'amour de Dieu et sa grande miséricorde dans tous ses agissements à l'égard d'un peuple obstiné. PR 7 4 L'ouvrage débute avec Israël, au moment où il ne composait qu'un seul royaume, dans sa gloire, avec son temple magnifique: centre mondial du véritable culte. Puis vient la division en deux royaumes: celui du nord composé de dix tribus qui, à cause de leur infidélité, furent emmenées en captivité pour toujours, et celui du sud, avec les tribus de Juda et Benjamin, connu sous le nom de royaume de Juda. PR 8 1 Juda, avec ses principaux rois, bons ou mauvais, sa captivité, ses ressortissants qui pleurent sur les rives de l'Euphrate, leurs harpes suspendues aux saules, les regards tournés vers Jérusalem dévastée -- tout cela est passé en revue. PR 8 2 Ensuite, c'est la vie des captifs à Babylone, leurs saints hommes, leurs prophètes, leur délivrance par suite de la promulgation d'un décret par un puissant monarque, leur retour à Jérusalem, la reconstruction du temple sous la direction divine et le rétablissement des Juifs en Palestine. PR 8 3 L'ouvrage s'arrête longuement sur la vie des rois d'Israël: Salomon, que sa sagesse extraordinaire n'empêche pas de se détourner de Dieu; Jéroboam, qui provoqua la division du royaume et les maux qui en résultèrent; le grand prophète Elie, dont la mission fut si importante; Elisée, son successeur, prophète de paix et de guérison; Achaz, le roi faible et méchant; Ezéchias, le roi timide et débonnaire; Daniel, le prophète "bien-aimé" de Dieu; Jérémie, le prophète de la tristesse; Aggée, Zacharie et Malachie, les prophètes de la restauration. Et au-dessus de tous ces personnages, dans une gloire surnaturelle, vient le Roi des rois, l'"Agneau de Dieu", le Fils unique du Père, en qui s'accomplissent tous les types des cérémonies lévitiques. PR 8 4 Les desseins de Dieu sont immuables. Si le peuple élu ne proclame pas l'Evangile, celui-ci fera son chemin sans lui. Qu'arriva-t-il lorsque Israël fut captif à Babylone? Grâce au témoignage d'une poignée d'hommes fidèles, le puissant monarque de cet empire fut amené à proclamer dans le monde entier la connaissance du vrai Dieu. Puis, ce fut Cyrus, roi de Perse, qui mit un terme à la captivité du peuple élu. La richesse et la puissance des nations sont à la disposition de ce dernier, si Dieu le veut. PR 8 5 Ainsi, nous sommes amenés, dans l'accomplissement des plans divins, du type à l'antitype, des rois éphémères au Roi éternel, de la gloire qui s'évanouit à la gloire qui demeure, du peuple mortel qui pèche et disparaît au peuple juste, immortel. PR 8 6 Puisse cet ouvrage, dont l'auteur est mort lorsqu'il préparait les derniers chapitres, conduire beaucoup d'âmes au seul vrai Dieu, c'est le voeu sincère que forment. Les Editeurs ------------------------Introduction Le vignoble du Seigneur PR 9 1 C'était dans le dessein de procurer à tous les peuples de la terre les meilleurs dons du ciel que Dieu demanda à Abraham de quitter sa patrie et la maison de son père pour aller habiter au pays de Canaan. "Je ferai de toi une grande nation, lui dit-il, et je te bénirai; je rendrai ton nom grand, et tu seras une source de bénédiction."1 Dieu appelait Abraham à un grand honneur: celui d'être le père du peuple qui, pendant des siècles, devait être le dépositaire de la vérité, le peuple grâce auquel toutes les nations de la terre seraient bénies par la venue du Messie promis. PR 9 2 A cette époque, les hommes avaient presque perdu la notion du vrai Dieu. L'idolâtrie obscurcissait leur esprit. Ils s'efforçaient de remplacer la loi divine "sainte, juste et bonne"2 par des lois selon leurs coeurs cruels et égoïstes. Cependant, Dieu, dans sa miséricorde, ne les anéantit pas. Il leur donna l'occasion de le connaître par son Eglise. Il décida que les principes révélés à son peuple contribueraient à restaurer en eux son image. PR 9 3 La loi divine devait être exaltée, son autorité maintenue, et une grande et noble tâche fut confiée à Israël. Le Seigneur sépara celui-ci du monde, afin de lui confier une mission sacrée. Il en fit le dépositaire de sa loi pour qu'il fasse connaître le vrai Dieu. Ainsi, la lumière céleste devait resplendir sur un monde plongé dans les ténèbres. La voix divine se ferait entendre de tous les peuples pour qu'ils se détournent de l'idolâtrie et servent le Dieu vivant. PR 10 1 "Par une grande puissance et par une main forte",3 le Seigneur fit sortir son peuple du pays d'Egypte. "Il envoya Moïse, son serviteur, et Aaron, qu'il avait choisi. Ils accomplirent par son pouvoir des prodiges au milieu d'eux, ils firent des miracles dans le pays de Cham." "Il menaça la mer Rouge, et elle se dessécha; et il les fit marcher à travers les abîmes."4 Il les délivra de l'esclavage pour les conduire dans un bon pays, un pays que, dans sa providence, il avait préparé pour leur servir de refuge contre leurs ennemis. Il voulait les amener à lui pour les entourer de son bras protecteur. En retour de tant de bonté et de miséricorde, les Israélites devaient exalter son nom et le rendre glorieux. PR 10 2 "La portion de l'Eternel, c'est son peuple, Jacob est la part de son héritage. Il l'a trouvé dans une contrée déserte, dans une solitude aux effroyables hurlements; il l'a entouré, il en a pris soin, il l'a gardé comme la prunelle de son oeil, pareil à l'aigle qui éveille sa couvée, voltige sur ses petits, déploie ses ailes, les prend, les porte sur ses plumes. L'Eternel seul a conduit son peuple, et il n'y avait avec lui aucun dieu étranger."5 C'est ainsi que Dieu attirait à lui les Israélites pour qu'ils puissent se reposer à l'ombre du Tout-Puissant. Préservés miraculeusement des périls qui les menaçaient dans leur pérégrination au désert, ils s'établirent enfin au pays de la promesse, comme une nation favorisée. PR 10 3 Au moyen d'une parabole, le prophète Esaïe a parlé du rôle que devait jouer Israël en tant que représentant de Jéhovah. "Je chanterai à mon bien-aimé, dit-il, le cantique de mon bien-aimé sur sa vigne. Mon bien-aimé avait une vigne, sur un côteau fertile. Il en remua le sol, ôta les pierres, et y mit un plant délicieux; il bâtit une tour au milieu d'elle, et il y creusa aussi une cuve. Puis il espéra qu'elle produirait de bons raisins."6 PR 10 4 Dieu se proposait donc par la nation israélite de bénir toute l'humanité. "La vigne de l'Eternel des armées, déclarait le prophète, c'est la maison d'Israël, et les hommes de Juda, c'est le plant qu'il chérissait."7 PR 11 1 C'est à Israël qu'ont été confiés les oracles de Dieu. Ceux-ci étaient comme entourés par les préceptes de la loi divine, principe éternel de vérité et de pureté. L'obéissance à ces préceptes devait être leur sauvegarde, car ceux-ci les protégeraient des pratiques destructrices du mal. Et comme tour dans la vigne, il plaça au beau milieu du terrain son saint temple. PR 11 2 Le Christ était leur pédagogue. Il les avait guidés dans le désert; il resterait avec eux pour les instruire et les conseiller. Sa gloire, la sainte Schekinah, reposait sur le propitiatoire dans le tabernacle, puis au temple. Il ne cessa de manifester en leur faveur les richesses de son amour et de sa patience. PR 11 3 Moïse exposa aux Israélites le dessein de Dieu en des termes qui ne prêtaient à aucune équivoque. "Tu es un peuple saint pour l'Eternel, ton Dieu, dit-il; l'Eternel, ton Dieu, t'a choisi pour que tu fusses un peuple qui lui appartînt entre tous les peuples qui sont sur la face de la terre." PR 11 4 "Aujourd'hui, tu as fait promettre à l'Eternel qu'il sera ton Dieu, afin que tu marches dans ses voies, que tu observes ses lois, ses commandements et ses ordonnances, et que tu obéisses à sa voix. Et aujourd'hui, l'Eternel t'a fait promettre que tu seras un peuple qui lui appartiendra, comme il te l'a dit, et que tu observeras tous ses commandements, afin qu'il te donne sur toutes les nations qu'il a créées la supériorité en gloire, en renom et en magnificence, et afin que tu sois un peuple saint pour l'Eternel, ton Dieu, comme il te l'a dit."8 PR 11 5 Les enfants d'Israël devaient occuper tout le territoire que le Seigneur leur avait assigné. Il fallait déposséder les nations qui avaient rejeté le culte du vrai Dieu. Mais le plan du Seigneur était que par la révélation de son caractère à Israël les hommes soient attirés à lui. L'Evangile était adressé au monde entier. Par le service sacrificiel, le Christ devait être exalté devant la nation, et tous ceux qui le regardaient auraient la vie. Tous les païens, tels que Rahab, la Cananéenne, ou Ruth, la Moabite, étaient invités à s'unir au peuple élu. A mesure qu'augmentaient les Israélites, ils devaient élargir leurs frontières, jusqu'à ce que leur royaume englobe le monde entier. PR 12 1 Mais Israël n'accomplit pas le dessein du Seigneur. Dieu déclarait: "Je t'avais planté comme une vigne excellente et du meilleur plant; comment as-tu changé, dégénéré en une vigne étrangère?" "Israël était une vigne féconde, qui rendait beaucoup de fruits." "Maintenant donc, habitants de Jérusalem et hommes de Juda, soyez juges entre moi et ma vigne! Qu'y avait-il encore à faire à ma vigne, que je n'aie pas fait pour elle? Pourquoi, quand j'ai espéré qu'elle produirait de bons raisins, en a-t-elle produit de mauvais? Je vous dirai maintenant ce que je vais faire à ma vigne. J'en arracherai la haie, pour qu'elle soit broutée; j'en abattrai la clôture, pour qu'elle soit foulée aux pieds. Je la réduirai en ruine; elle ne sera plus taillée, ni cultivée; les ronces et les épines y croîtront; et je donnerai mes ordres aux nuées, afin qu'elles ne laissent plus tomber la pluie sur elle. ... Il avait espéré de la droiture, et voici du sang versé! De la justice, et voici des cris de détresse!"9 PR 12 2 Moïse avait décrit les résultats de l'infidélité. En refusant d'observer les clauses de son alliance, les Israélites se privaient eux-mêmes de la vie de Dieu et de la bénédiction qui en découle. Parfois ils écoutaient ses avertissements, et de riches bénédictions s'ensuivaient, dont ils faisaient profiter les nations voisines. Mais, la plupart du temps, ils oubliaient Dieu et perdaient de vue le grand privilège de le représenter ici-bas. Ils le frustraient du service qu'il réclamait d'eux, et ils frustraient en même temps leurs semblables d'instructions religieuses et d'un saint exemple. Ils désiraient s'approprier eux-mêmes les fruits de la vigne dont ils avaient été faits les économes. Leur convoitise et leur cupidité les firent mépriser des païens. C'est ainsi que les Gentils furent amenés à méconnaître le caractère de Dieu, ainsi que les lois de son royaume. PR 12 3 Mais, avec son coeur de père, Dieu supporta son peuple. Il usa envers lui de miséricorde. Avec patience, il plaça devant les Israélites leurs péchés; et, dans sa longanimité, il attendit qu'ils les reconnaissent. Il leur envoya successivement des prophètes et des messagers pour réclamer les fruits de sa vigne; mais, au lieu de les recevoir avec empressement, ils les traitèrent en ennemis. Ils les maltraitèrent et les tuèrent. Alors il leur envoya encore d'autres messagers, mais ceux-ci reçurent le même accueil que les premiers; ils se montrèrent même plus farouches encore à leur égard. PR 13 1 Le retrait de la faveur divine pendant l'exil en amena plusieurs à la repentance. Cependant, après le retour au pays de la promesse, le peuple juif répéta les mêmes erreurs que les générations précédentes, ce qui le mit en conflit avec les nations qui l'entouraient. Les prophètes envoyés par Dieu pour corriger les maux les plus frappants furent reçus avec la même suspicion et les mêmes moqueries que ceux d'autrefois; et ainsi, de siècle en siècle, les vignerons aggravèrent leur culpabilité. PR 13 2 Le plant délicieux que le divin propriétaire avait mis sur les collines de la Palestine fut méprisé par les hommes d'Israël, et finalement jeté par-dessus la clôture, et foulé aux pieds, avec l'espoir qu'il serait détruit pour toujours. Alors le propriétaire le recueillit pour qu'on ne le voie plus. Puis il le planta de l'autre côté de la clôture. Les branches envahirent alors celle-ci, et purent ainsi être greffées, mais les hommes n'avaient plus accès à la souche pour lui nuire. PR 13 3 Les messages de conseil et d'exhortation donnés par les prophètes pour faire comprendre le dessein éternel de Dieu en faveur de l'humanité ont une grande valeur pour l'Eglise, gardienne de la vigne. Dans les enseignements des prophètes, l'amour de Dieu en faveur du pécheur et son plan pour le sauver sont clairement révélés. L'histoire de l'appel d'Israël, ses succès et ses défaillances, son retour à la faveur divine, son rejet par le maître de la vigne et l'accomplissement du plan des âges par un reste fidèle auquel sont faites toutes les promesses divines -- tout cela a constitué le thème des messages de Dieu à son Eglise à mesure que les siècles se sont écoulés. Et, de nos jours, le message du Seigneur à son Eglise -- à ceux qui s'occupent de sa vigne, comme de fidèles vignerons -- n'est pas différent de celui que donnaient les prophètes d'autrefois: PR 14 1 Chantez un cantique sur la vigne. Moi l'Eternel, j'en suis le gardien, Je l'arrose à chaque instant; De peur qu'on ne l'attaque, Nuit et jour je la garde. PR 14 2 Qu'Israël espère en Dieu! Le maître de la vigne réunit aujourd'hui des hommes de toute nation et de tout peuple, ces fruits précieux sur lesquels il a compté depuis longtemps. Bientôt il viendra lui-même. En ce jour heureux, son dessein éternel envers la maison d'Israël sera enfin accompli. "Dans les temps à venir, Jacob prendra racine, Israël poussera des fleurs et des rejetons, et il remplira le monde de ses fruits."11 ------------------------Chapitre 1 -- Salomon PR 15 1 Sous le règne de David et de Salomon, Israël devint une nation puissante qui eut souvent l'occasion d'exercer une forte influence en faveur de la justice et de la vérité. Le nom de Dieu y était exalté et honoré, et le but pour lequel les Israélites avaient été établis au pays de Canaan promettait de se réaliser pleinement. Les barrières avaient été renversées, et ceux qui venaient des pays païens pour chercher la vérité en Israël n'en repartaient pas déçus. Les conversions se multipliaient et l'Eglise de Dieu sur la terre s'agrandissait et prospérait. PR 15 2 Salomon fut oint et proclamé roi à la fin du règne de son père David, qui abdiqua en sa faveur. Les premières années de sa vie s'annonçaient sous de brillants auspices: il était dans les plans divins que ce monarque, de force en force, de gloire en gloire, reflétât toujours mieux le caractère de Dieu. Il inspirait ainsi à son peuple le désir de remplir la mission sacrée qu'il avait reçue comme dépositaire de la vérité divine. PR 15 3 David savait que le but suprême de Dieu en faveur d'Israël ne serait atteint que si les rois et le peuple cherchaient avec une vigilance inlassable à parvenir à l'idéal qui était placé devant eux. Il savait que si son fils Salomon voulait être digne de la confiance de Dieu, le jeune roi devait être non seulement un guerrier, un homme d'Etat, mais aussi un homme doué de force de caractère, de bonté, un modèle de justice et de fidélité. PR 16 1 David invitait tendrement Salomon à faire preuve de bravoure, de noblesse, de miséricorde et de bonté envers ses sujets, à glorifier le nom de Dieu et à rendre manifeste la beauté de sa sainteté dans tous ses rapports avec les autres nations. PR 16 2 Les expériences douloureuses que David avait faites, au cours de sa vie, lui avaient appris la valeur des plus nobles vertus et l'avaient amené à déclarer, en remettant ses pouvoirs à son fils: "Celui qui règne parmi les hommes avec justice, celui qui règne dans la crainte de Dieu, est pareil à la lumière du matin, quand le soleil brille et que la matinée est sans nuages; ses rayons après la pluie font sortir de terre la verdure."1 PR 16 3 Quelle belle occasion s'offrait à Salomon! S'il suivait les instructions divinement inspirées de son père, son règne serait un règne de justice, semblable à celui décrit au psaume 72: PR 16 4 O Dieu, donne tes jugements au roi, Et ta justice au fils du roi! Il jugera ton peuple avec justice, Et tes malheureux avec équité. ... Il sera comme une pluie qui tombe sur un terrain fauché, Comme des ondées qui arrosent la campagne. En ses jours le juste fleurira, Et la paix sera grande jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de lune. Il dominera d'une terre à l'autre, Et du fleuve aux extrémités de la terre. ... Les rois de Tarsis et des îles paieront des tributs, Les rois de Séba et de Saba offriront des présents. Tous les rois se prosterneront devant lui, Toutes les nations le serviront. Car il délivrera le pauvre qui crie, Et le malheureux qui n'a point d'aide. ... Ils prieront pour lui sans cesse, ils le béniront chaque jour. ... Son nom subsistera toujours, Aussi longtemps que le soleil son nom se perpétuera; Par lui on se bénira mutuellement, Et toutes les nations le diront heureux. Béni soit l'Eternel Dieu, le Dieu d'Israël, Qui seul fait des prodiges! Béni soit à jamais son nom glorieux! Que toute la terre soit remplie de sa gloire! Amen! Amen! PR 17 1 Dans sa jeunesse Salomon suivit la voie tracée par son père; il marcha dans la justice pendant de nombreuses années. Sa vie fut marquée par une stricte obéissance aux commandements de Dieu. Dès le début de son règne, il se rendit avec ses conseillers à Gabaon où se trouvait encore le tabernacle construit dans le désert. Là, avec les "chefs de milliers et de centaines", les "juges", les "princes de tout Israël", les "chefs des mai-sons paternelles",2 il offrit des sacrifices à l'Eternel et se consacra au service du Seigneur. PR 17 2 Se rendant compte de la solennité des devoirs relatifs à la royauté, Salomon comprenait que ceux qui assumaient de lourdes charges devaient chercher à s'abreuver à la source de toute sagesse, s'ils voulaient réussir dans leur tâche. Ceci le poussa à inviter ses conseillers à s'unir à lui de tout coeur pour rechercher la faveur divine. PR 17 3 Salomon désirait par-dessus tous les biens de ce monde la sagesse et l'intelligence, afin de pouvoir accomplir l'oeuvre que le Seigneur lui avait assignée. Il souhaitait ardemment posséder la vivacité d'esprit, la largesse du coeur, la bonté d'âme. PR 17 4 Une nuit, Dieu lui apparut en songe, et lui dit: "Demande ce que tu veux que je te donne." Le jeune monarque, inexpérimenté, et se rendant compte de sa faiblesse, répondit: "Tu as traité avec une grande bienveillance ton serviteur David, mon père, parce qu'il marchait en ta présence dans la fidélité, dans la justice, et dans la droiture de coeur envers toi, tu lui as conservé cette grande bienveillance, et tu lui as donné un fils qui est assis sur son trône, comme on le voit aujourd'hui. Maintenant, Eternel mon Dieu, tu as fait régner ton serviteur à la place de David, mon père; et moi je ne suis qu'un jeune homme, je n'ai point d'expérience. Ton serviteur est au milieu du peuple que tu as choisi, peuple immense, qui ne peut être compté, ni nombré, à cause de sa multitude. Accorde donc à ton serviteur un coeur intelligent, pour juger ton peuple, pour discerner le bien du mal! Car qui pourrait juger ton peuple, ce peuple si nombreux? PR 18 1 "Cette demande de Salomon plut au Seigneur. Et Dieu lui dit: Puisque c'est là ce que tu demandes, puisque tu ne demandes pour toi ni une longue vie, ni les richesses, ni la mort de tes ennemis, et que tu demandes de l'intelligence pour exercer la justice, voici, j'agirai selon ta parole. Je te donnerai un coeur sage et intelligent, de telle sorte qu'il n'y aura eu personne avant toi et qu'on ne verra jamais personne de semblable à toi. Je te donnerai, en outre, ce que tu n'as pas demandé, des richesses et de la gloire, de telle sorte qu'il n'y aura pendant toute ta vie aucun roi qui soit ton pareil. Et si tu marches dans mes voies, en observant mes lois et mes commandements, comme l'a fait David, ton père, je prolongerai tes jours."3 PR 18 2 Ainsi Dieu promit d'être avec Salomon, comme il l'avait été avec David. Si le roi marchait devant Dieu dans la droiture, s'il obéissait aux commandements, son trône serait affermi et son règne exalterait Israël, ce peuple "absolument sage et intelligent",4 lumière des nations d'alentour. PR 18 3 Les paroles prononcées par Salomon, alors qu'il priait devant l'autel de Gabaon, révèlent son humilité et son grand désir d'honorer le Seigneur. Le monarque se rendait compte que sans le secours divin il était aussi faible qu'un petit enfant et ne pouvait assumer les responsabilités qui lui incombaient. Il savait qu'il manquait de discernement, et c'est le sentiment de sa grande faiblesse qui le conduisit à demander à Dieu la sagesse. Il n'y avait nulle aspiration égoïste dans son coeur; il ne désirait pas acquérir une connaissance qui l'élèverait au-dessus de ses semblables. Mais il avait à coeur de s'acquitter fidèlement de ses devoirs. C'est pourquoi il choisit le don qui pouvait attirer sur son règne la gloire de Dieu. Salomon ne fut jamais ni si riche, ni si sage, ni si grand que lorsqu'il fit cette confession: "Je ne suis qu'un jeune homme, je n'ai point d'expérience." PR 18 4 Ceux qui, de nos jours, occupent des positions de confiance devraient chercher à comprendre les leçons qui se dégagent de la prière de Salomon. Plus leur situation sera importante, plus grande sera leur responsabilité; plus leur influence sera étendue, plus aussi se rendront-ils compte de leurs besoins et de leur dépendance de Dieu. Qu'ils ne perdent jamais de vue que celui qui a reçu une charge est appelé à se conduire d'une façon exemplaire avec ses semblables, et doit se comporter devant Dieu comme un homme qui a besoin d'apprendre. La situation ne confère pas la sainteté. C'est en honorant le Seigneur et en obéissant à ses commandements que l'on devient vraiment grand. PR 19 1 Le Dieu que nous servons ne fait point acception de personnes. Celui qui donna à Salomon un esprit de discernement désire accorder la même bénédiction à ses enfants, aujourd'hui. "Si quelqu'un d'entre vous, dit saint Jacques, manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui donne à tous simplement et sans reproche, et elle lui sera donnée."5 PR 19 2 Celui qui, fatigué et chargé, recherche la sagesse plutôt que la richesse, la puissance ou la renommée, ne sera pas déçu. Il apprendra du grand Maître, non seulement ce qu'il doit faire, mais comment le faire, de manière à obtenir son approbation. Aussi longtemps qu'il reste consacré, celui que le Seigneur a doué de discernement et de talent ne convoitera ni position élevée, ni autorité sur ses semblables. Sans doute est-il nécessaire que certains hommes assument des responsabilités; mais, au lieu de s'imposer, les vrais chefs demanderont à Dieu l'intelligence et le discernement entre le bien et le mal. PR 19 3 Le sentier des dirigeants n'est pas facile. C'est pourquoi ils devraient chercher à résoudre leurs difficultés par la prière. Ils ne seront jamais confus s'ils ont recours à la source de toute sagesse. Fortifiés et éclairés par le divin Maître, ils pourront affronter avec succès les mauvaises influences, et discerner entre le bien et le mal, entre le vrai et le faux. Ils approuveront ce que Dieu peut approuver, et lutteront farouchement contre les principes erronés. PR 19 4 Le Seigneur accorda à Salomon la sagesse qu'il désirait avant toute autre chose: la richesse, les honneurs, et une longue vie. La prière qu'il fit monter vers le ciel pour obtenir la vivacité d'esprit, la grandeur d'âme, un coeur intelligent, fut exaucée. "Dieu donna à Salomon de la sagesse, une très grande intelligence, et des connaissances multipliées comme le sable qui est au bord de la mer. La sagesse de Salomon surpassait la sagesse de tous les fils de l'Orient et toute la sagesse des Egyptiens. Il était plus sage qu'aucun homme ... et sa renommée était répandue parmi toutes les nations d'alentour."6 PR 20 1 "Tout Israël ... craignit le roi, car on vit que la sagesse de Dieu était en lui pour le diriger dans ses jugements."7 Le coeur du peuple était tourné vers Salomon, comme il l'avait été vers David, et on lui obéit en toutes choses. "Salomon ... s'affermit dans son règne; l'Eternel, son Dieu, fut avec lui, et l'éleva à un haut degré."8 PR 20 2 Pendant de nombreuses années, la vie de Salomon fut caractérisée par la piété, la droiture, la rigidité dans les principes et une stricte obéissance aux commandements de Dieu. Il dirigeait toutes les affaires importantes, et administrait avec sagesse les intérêts du royaume. Sa prospérité, sa sagacité, les magnifiques constructions élevées au cours des premières années de son règne, l'énergie, la piété, la justice et la magnanimité qu'il déploya en paroles et en actes conquirent la fidélité de ses sujets, ainsi que l'admiration et les hommages des monarques de nombreux pays. PR 20 3 Le nom de Dieu fut exalté pendant la première partie du règne de Salomon. La sagesse et la droiture que possédait le roi rendirent témoignage à toutes les nations de l'excellence des attributs du Dieu qu'il servait. Pendant un certain temps, Israël fut comme la lumière du monde, projetant au loin la grandeur de Dieu. La véritable gloire des premières années du règne de Salomon ne provenait pas de son incomparable sagesse, de ses richesses fabuleuses, de sa grande puissance, de sa renommée universelle, mais de l'honneur dont il entourait le nom du Dieu d'Israël, par l'emploi judicieux des dons qu'il avait reçus du ciel. PR 20 4 A mesure que s'écoulaient les années, et que la gloire de Salomon devenait plus grande, le monarque cherchait à honorer Dieu en enrichissant ses connaissances spirituelles et intellectuelles, tout en faisant part à ses semblables des bénédictions qu'il avait reçues. Nul ne savait mieux que lui que sa sagesse et son intelligence, il les devait à Dieu, et que ces dons lui avaient été accordés pour qu'il puisse faire connaître au monde le Roi des rois. PR 21 1 Salomon s'intéressa vivement à l'étude de l'histoire naturelle, mais ses recherches ne se limitèrent pas à une branche spéciale des sciences. En approfondissant tout ce qui concerne les choses créées, animées ou inanimées, il acquit une conception plus nette du Créateur. Dans les forces de la nature, dans le règne animal et minéral, dans chaque arbre ou chaque arbuste, dans chaque fleur, il discernait la sagesse d'en haut. Et tandis qu'il cherchait à augmenter sa science, sa connaissance de Dieu grandissait sans cesse. PR 21 2 Divinement inspiré, Salomon exprima sa sagesse par des chants de louange et de nombreux proverbes. "Il a prononcé trois mille sentences, et composé mille et cinq cantiques. Il a parlé sur les arbres depuis le cèdre du Liban jusqu'à l'hysope qui sort de la muraille; il a aussi parlé sur les animaux, sur les oiseaux, sur les reptiles et sur les poissons."9 PR 21 3 Les proverbes de Salomon nous donnent un aperçu des principes nécessaires pour obtenir une vie pieuse et un idéal élevé -- principes d'essence divine qui conduisent à la sainteté et devraient diriger tous les actes de notre existence. C'est grâce à la diffusion de ces principes et au témoignage rendu à Dieu, à qui appartiennent la louange et la gloire, que le règne de Salomon débuta dans une atmosphère si élevée, tant au point de vue moral que matériel. PR 21 4 "Heureux l'homme qui a trouvé la sagesse, et l'homme qui possède l'intelligence! écrivait Salomon. Car le gain qu'elle procure est préférable à celui de l'argent, et le profit qu'on en tire vaut mieux que l'or; elle est plus précieuse que les perles, elle a plus de valeur que tous les objets de prix. Dans sa droite est une longue vie; dans sa gauche, la richesse et la gloire. Ses voies sont des voies agréables, et tous ses sentiers sont paisibles. Elle est un arbre de vie pour ceux qui la saisissent, et ceux qui la possèdent sont heureux."10 PR 21 5 "Voici le commencement de la sagesse: acquiers la sagesse, et avec tout ce que tu possèdes acquiers l'intelligence."11 "La crainte de l'Eternel est le commencement de la sagesse."12 "La crainte de l'Eternel, c'est la haine du mal; l'arrogance et l'orgueil, la voie du mal, et la bouche perverse, voilà ce que je hais."13 PR 22 1 Oh! si seulement Salomon avait observé, dans les dernières années de sa vie, ces paroles admirables! Si seulement celui qui avait écrit: "Les lèvres des sages répandent la science",14 et enseigné lui-même aux monarques à rendre au Roi des rois la louange qu'ils adressaient à un souverain terrestre; si seulement il ne s'était pas attribué, avec une "bouche perverse", "arrogance et orgueil", la gloire qui n'était due qu'à Dieu! ------------------------Chapitre 2 -- Le temple et sa dédicace PR 23 1 Le projet caressé depuis longtemps par David, d'élever un temple à l'Eternel, fut réalisé par Salomon. Pendant sept ans, Jérusalem fut envahie par une foule d'ouvriers qui s'activèrent à niveler l'emplacement choisi, à construire des murs de soutènement, à poser de solides fondements, avec de "grandes et magnifiques pierres de taille",1 à façonner de gros arbres apportés des forêts du Liban, pour ériger le majestueux sanctuaire. PR 23 2 Tandis que l'on travaillait le bois et la pierre -- tâche qui absorbait des milliers d'ouvriers -- la fabrication des ornements et de l'ameublement du temple se poursuivait activement sous la direction de Huram, de Tyr, "homme habile et intelligent, ... habile pour les ouvrages en or, en argent, en airain et en fer, en pierre et en bois, en étoffes teintes en pourpre et en bleu, en étoffes de byssus et de carmin".2 PR 23 3 Ainsi, la construction s'élevait sur le mont Morija, silencieusement, avec des "pierres toutes taillées, et ni marteau, ni hache, ni aucun instrument de fer, ne furent entendus dans la maison pendant qu'on la construisait".3 Les magnifiques ornements se perfectionnaient selon les plans fournis par David à son fils Salomon, ainsi que "tous les autres ustensiles pour la maison de Dieu."4 Ceux-ci comprenaient l'autel des parfums, la table des pains de proposition, le chandelier, ainsi que les coupes et les ustensiles se rattachant au service des prêtres dans le lieu saint, le tout "d'or très pur."5 Les ustensiles d'airain: l'autel des parfums, la mer de fonte posée sur douze boeufs, les bassins de petites tailles et plusieurs autres coupes furent fondus "dans la plaine du Jourdain, dans un sol argileux, entre Succoth et Tseréda."6 Ces ustensiles furent fabriqués en abondance, afin de n'en pas manquer. PR 24 1 Ce temple, construit par Salomon et ses collaborateurs, dédié au Seigneur et à son culte, était d'une beauté incomparable, d'une splendeur inégalée. Orné de pierres magnifiques, entouré de spacieux parvis où l'on accédait par de belles avenues, revêtu de cèdre sculpté et d'or poli, le temple, avec ses tentures richement brodées, son mobilier somptueux, était un emblème digne du Dieu vivant, Eglise édifiée selon le plan divin, avec des matériaux semblables à "de l'or, de l'argent, des pierres précieuses", comme "l'ornement des palais".7 Le Christ est "la pierre angulaire. En lui tout l'édifice, bien coordonné, s'élève pour être un temple saint dans le Seigneur."8 PR 24 2 Le temple projeté par David et construit par Salomon fut enfin achevé. Le jeune monarque "réussit dans tout ce qu'il s'était proposé de faire dans la maison de l'Eternel".9 Or, afin que le temple, dominant le mont Morija, puisse être, comme David l'avait si ardemment désiré, une demeure, non "pour un homme, mais ... pour l'Eternel Dieu",10 il restait à célébrer la cérémonie solennelle qui consistait à le dédicacer à l'Eternel et à son culte. PR 24 3 L'emplacement où le temple avait été construit était, depuis longtemps, considéré comme un lieu sacré. C'est là qu'Abraham, le père des croyants, avait manifesté sa volonté de sacrifier son fils unique pour obéir à l'ordre de Dieu. C'est là que le Seigneur lui avait renouvelé l'assurance de sa bénédiction, qui comprenait la glorieuse promesse de la délivrance de l'humanité par le sacrifice du Fils du Très-Haut.11 C'est là que David avait offert des sacrifices d'actions de grâces pour empêcher l'épée vengeresse de l'ange destructeur de faire son oeuvre, et où le Seigneur avait répondu en faisant descendre le feu du ciel.12 Or, maintenant encore les adorateurs du vrai Dieu étaient réunis en ce lieu pour le rencontrer et lui renouveler leurs voeux de fidélité. PR 25 1 L'époque choisie pour la dédicace était des plus favorables. Elle fut fixée au septième mois, où tous les habitants du royaume avaient coutume de se réunir à Jérusalem pour célébrer la fête des tabernacles. Cette fête était réputée par ses réjouissances. La moisson était achevée, et les travaux de l'année nouvelle n'avaient pas encore commencé. Les gens étaient donc libres de tout souci, et pouvaient s'adonner aux joies sacrées du moment. PR 25 2 Au temps fixé, les foules accourues de tous les points du pays et les représentants des nations voisines, richement vêtus, s'assemblèrent dans les parvis du temple. Le spectacle était d'une splendeur exceptionnelle. Salomon, les anciens d'Israël et les principaux chefs du peuple transportèrent "de la cité de David, qui est Sion, l'arche de l'alliance de l'Eternel". Du sanctuaire situé sur les hauteurs de Gabaon, ils avaient amené "la tente d'assignation, et tous les ustensiles sacrés qui étaient dans la tente".13 Ces souvenirs sacrés, qui rappelaient les débuts de l'histoire d'Israël alors qu'il errait dans le désert, à la conquête de Canaan, avaient enfin trouvé une demeure permanente dans le temple magnifique édifié pour remplacer la construction portative. PR 25 3 Lorsque Salomon avait apporté au temple l'arche sainte où se trouvaient les deux tables de pierre sur lesquelles étaient écrits, par le doigt même de Dieu, les préceptes du Décalogue, il avait suivi l'exemple de son père David. Tous les six pas, il offrit des sacrifices. Ce fut une grande cérémonie, accompagnée de chants et de musique. "Les sacrificateurs portèrent l'arche de l'alliance de l'Eternel à sa place, dans le sanctuaire de la maison, dans le lieu très saint."14 PR 25 4 Lorsqu'ils sortirent du sanctuaire, les sacrificateurs s'installèrent à la place qui leur était assignée. Les chantres -- Lévites revêtus de byssus -- se tenaient à l'orient de l'autel, avec des cymbales, des psaltérions et des harpes. Près d'eux se trouvaient cent vingt prêtres qui sonnaient de la trompette.15 "Et lorsque ceux qui sonnaient des trompettes et ceux qui chantaient, s'unissant d'un même accord pour célébrer et louer l'Eternel, firent retentir les trompettes, les cymbales et les autres instruments, et célébrèrent l'Eternel par ces paroles: Car il est bon, car sa miséricorde dure à toujours! en ce moment, la maison, la maison de l'Eternel fut remplie d'une nuée. Les sacrificateurs ne purent pas y rester pour faire le service, à cause de la nuée; car la gloire de l'Eternel remplissait la maison de Dieu."16 PR 26 1 Salomon comprit la signification de cette nuée, et déclara: "L'Eternel veut habiter dans l'obscurité! Et moi, j'ai bâti une maison qui sera ta demeure, un lieu où tu résideras éternellement!"17 PR 26 2 L'Eternel règne: les peuples tremblent; Il est assis sur les chérubins: la terre chancelle. L'Eternel est grand dans Sion, Il est élevé au-dessus de tous les peuples. Qu'on célèbre ton nom grand et redoutable! Il est saint! ... Prosternez-vous devant son marchepied! Il est saint! PR 26 3 "Au milieu des parvis" du temple, on avait dressé une "tribune d'airain", sorte d'estrade "longue de cinq coudées, large de cinq coudées, et haute de trois coudées". Salomon y monta, et les mains levées vers le ciel, il bénit l'immense assemblée qui se tenait devant lui. "Et toute l'assemblée d'Israël était debout."19 PR 26 4 "Béni soit l'Eternel, le Dieu d'Israël, s'écria Salomon, qui a parlé de sa bouche à David, mon père, et qui accomplit par sa puissance ce qu'il avait déclaré en disant ...: J'ai choisi Jérusalem pour que mon nom y résidât."20 PR 26 5 Salomon s'agenouilla sur l'estrade, et fit monter vers Dieu la prière de dédicace qu'entendit toute l'assemblée. Tandis que la foule se prosternait le visage contre terre, le roi, les mains levées vers le ciel, invoqua le Seigneur, en ces termes: "O Eternel, Dieu d'Israël! Il n'y a point de Dieu semblable à toi, dans les cieux et sur la terre: tu gardes l'alliance et la miséricorde envers tes serviteurs qui marchent en ta présence de tout leur coeur! ... PR 27 1 "Mais quoi! Dieu habiterait-il véritablement avec l'homme sur la terre? Voici, les cieux et les cieux des cieux ne peuvent te contenir: combien moins cette maison que j'ai bâtie! Toutefois, Eternel, mon Dieu, sois attentif à la prière de ton serviteur et à sa supplication; écoute le cri et la prière que t'adresse ton serviteur. Que tes yeux soient jour et nuit ouverts sur cette maison, sur le lieu dont tu as dit que là serait ton nom! Ecoute la prière que ton serviteur fait en ce lieu. Daigne exaucer les supplications de ton serviteur et de ton peuple d'Israël, lorsqu'ils prieront en ce lieu! Exauce du lieu de ta demeure, des cieux, exauce et pardonne!... PR 27 2 "Quand ton peuple d'Israël sera battu par l'ennemi, pour avoir péché contre toi; s'ils reviennent à toi et rendent gloire à ton nom, s'ils t'adressent des prières et des supplications dans cette maison, -- exauce-les des cieux, pardonne le péché de ton peuple d'Israël, et ramène-les dans le pays que tu as donné à eux et à leurs pères! PR 27 3 "Quand le ciel sera fermé et qu'il n'y aura point de pluie, à cause de leurs péchés contre toi; s'ils prient dans ce lieu et rendent gloire à ton nom, et s'ils se détournent de leurs péchés, parce que tu les auras châtiés, -- exauce-les des cieux, pardonne le péché de tes serviteurs et de ton peuple d'Israël, à qui tu enseigneras la bonne voie dans laquelle ils doivent marcher, et fais venir la pluie sur la terre que tu as donnée pour héritage à ton peuple! PR 27 4 "Quand la famine, la peste, la rouille et la nielle, les sauterelles d'une espèce ou d'une autre, seront dans le pays, quand l'ennemi assiégera ton peuple dans son pays, dans ses portes, quand il y aura des fléaux ou des maladies quelconques; si un homme, si tout ton peuple d'Israël fait entendre des prières et des supplications, et que chacun reconnaisse sa plaie et sa douleur et étende les mains vers cette maison, -- exauce-le des cieux, du lieu de ta demeure, et pardonne; rends à chacun selon ses voies, toi qui connais le coeur de chacun, car seul tu connais le coeur des enfants des hommes, et ils te craindront pour marcher dans tes voies tout le temps qu'ils vivront dans le pays que tu as donné à nos pères! PR 28 1 "Quand l'étranger, qui n'est pas de ton peuple d'Israël, viendra d'un pays lointain, à cause de ton grand nom, de ta main forte et de ton bras étendu, quand il viendra prier dans cette maison, -- exauce-le des cieux, du lieu de ta demeure, et accorde à cet étranger tout ce qu'il te demandera, afin que tous les peuples de la terre connaissent ton nom pour te craindre, comme ton peuple d'Israël, et sachent que ton nom est invoqué sur cette maison que j'ai bâtie! PR 28 2 "Quand ton peuple sortira pour combattre ses ennemis, en suivant la voie que tu lui auras prescrite; s'ils t'adressent des prières, les regards tournés vers cette ville que tu as choisie et vers la maison que j'ai bâtie en ton nom, -- exauce des cieux leurs prières et leurs supplications, et fais-leur droit! PR 28 3 "Quand ils pécheront contre toi, car il n'y a point d'homme qui ne pèche, quand tu seras irrité contre eux et que tu les livreras à l'ennemi, qui les emmènera captifs dans un pays lointain ou rapproché; s'ils rentrent en eux-mêmes dans le pays où ils seront captifs, s'ils reviennent à toi et t'adressent des supplications dans le pays de leur captivité, et qu'ils disent: Nous avons péché, nous avons commis des iniquités, nous avons fait le mal! s'ils reviennent à toi de tout leur coeur et de toute leur âme, dans le pays de leur captivité où ils ont été emmenés captifs, s'ils t'adressent des prières, les regards tournés vers le pays que tu as donné à leurs pères, vers la ville que tu as choisie et vers la maison que j'ai bâtie en ton nom, exauce des cieux, du lieu de ta demeure, leurs prières et leurs supplications, et fais-leur droit; pardonne à ton peuple ses péchés contre toi! PR 28 4 "Maintenant, ô mon Dieu, que tes yeux soient ouverts, et que tes oreilles soient attentives à la prière faite en ce lieu! Maintenant, Eternel Dieu, lève-toi, viens à ton lieu de repos, toi et l'arche de ta majesté. Que tes sacrificateurs, Eternel Dieu, soient revêtus de salut, et que tes bien-aimés jouissent du bonheur! Eternel Dieu, ne repousse pas ton oint, souviens-toi des grâces accordées à David, ton serviteur!"21 PR 29 1 Lorsque Salomon eut achevé cette prière, "le feu descendit du ciel et consuma l'holocauste et les sacrifices". Les prêtres ne pouvaient pénétrer dans le temple, "car la gloire de l'Eternel remplit la maison". "Tous les enfants d'Israël virent descendre le feu et la gloire de l'Eternel sur la maison; ils s'inclinèrent le visage contre terre sur le pavé, se prosternèrent et louèrent l'Eternel, en disant: Car il est bon, car sa miséricorde dure à toujours!" PR 29 2 Alors le roi et le peuple offrirent des sacrifices devant l'Eternel. "Ainsi le roi et tout le peuple firent la dédicace de la maison de Dieu."22 Pendant sept jours, une grande multitude venue de toutes les parties du royaume, "depuis les environs de Hamath jusqu'au torrent d'Egypte", célébra la fête. La semaine qui suivit fut consacrée à la joyeuse fête des tabernacles. Lorsque se clôtura cette période de réjouissances et de consécration, le peuple retourna "dans ses tentes, joyeux et content pour le bien que l'Eternel avait fait à David, à Salomon, et à Israël, son peuple."23 PR 29 3 Le roi avait fait tout ce qu'il avait pu pour encourager le peuple à se consacrer entièrement au service de Dieu, et à magnifier son nom. PR 29 4 Or, une fois encore, comme au début de son règne à Gabaon, le chef d'Israël reçut l'assurance de l'approbation et de la faveur divines. Dieu lui apparut "pendant la nuit, et lui dit: J'exauce ta prière, et je choisis ce lieu comme la maison où l'on devra m'offrir des sacrifices. Quand je fermerai le ciel et qu'il n'y aura point de pluie, quand j'ordonnerai aux sauterelles de consumer le pays, quand j'enverrai la peste parmi mon peuple; si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s'humilie, prie, et cherche ma face, et s'il se détourne de ses mauvaises voies, -- je l'exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays. Mes yeux seront ouverts désormais, et mes oreilles seront attentives à la prière faite en ce lieu. Maintenant, je choisis et je sanctifie cette maison pour que mon nom y réside à jamais, et j'aurai toujours là mes yeux et mon coeur."24 PR 30 1 Si la nation israélite était restée fidèle à son Dieu, ce temple merveilleux aurait été le signe perpétuel de la faveur spéciale du Très-Haut envers le peuple élu. "Les étrangers qui s'attachent à l'Eternel, dit le prophète Esaïe, pour le servir, pour aimer le nom de l'Eternel, pour être ses serviteurs, tous ceux qui garderont le sabbat, pour ne point le profaner, et qui persévéreront dans mon alliance, je les amènerai sur ma montagne sainte, et je les réjouirai dans ma maison de prière; leurs holocaustes et leurs sacrifices seront agréés sur mon autel; car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples."25 PR 30 2 Tout en donnant à Salomon l'assurance de son approbation, Dieu lui montra clairement le chemin du devoir. "Et toi, lui dit-il, si tu marches en ma présence comme a marché David, ton père, faisant tout ce que je t'ai commandé, et si tu observes mes lois et mes ordonnances, j'affermirai le trône de ton royaume, comme je l'ai promis à David, ton père, en disant: Tu ne manqueras jamais d'un successeur qui règne en Israël."26 PR 30 3 Si Salomon avait continué à servir le Seigneur avec humilité, son règne aurait exercé une profonde influence sur tous les peuples environnants, qui avaient été favorablement impressionnés par le règne de David, son père, par ses paroles empreintes de sagesse et les oeuvres magnifiques des premières années de son accession au trône. Dieu, qui prévoyait les terribles tentations accompagnant toujours la réussite et la gloire terrestres, mit en garde Salomon contre le danger d'apostasie et les tristes conséquences du péché. Le merveilleux temple, qui venait d'être dédicacé, deviendrait lui-même "un sujet de sarcasme et de raillerie parmi tous les peuples", si les Israélites abandonnaient "le Dieu de leurs pères" et persistaient dans l'idolâtrie.27 PR 30 4 Fortifié et grandement encouragé par le message qu'il avait reçu du ciel, lui prouvant que sa requête en faveur d'Israël avait été entendue, Salomon commença alors la période la plus brillante de son règne. Dès ce moment "tous les rois de la terre" cherchaient à le voir "pour entendre la sagesse que Dieu avait mise dans son coeur".28 Beaucoup vinrent s'inspirer des principes de son gouvernement, afin de savoir comment diriger les affaires difficiles de leur pays. Salomon leur apprenait que le Dieu qu'il servait est le Créateur de toutes choses. Ces rois retournaient alors chez eux avec une conception plus nette du Dieu d'Israël, et de son amour pour l'humanité. Ils pouvaient discerner dans la nature l'expression de cet amour et une révélation de son caractère. Plusieurs furent ainsi amenés à adorer le vrai Dieu. PR 31 1 L'humilité témoignée par Salomon au début de son règne, lorsqu'il reconnut devant Dieu n'être qu'"un jeune homme",29 son amour manifeste pour l'Eternel, sa profonde vénération pour les choses divines, la défiance qu'il éprouvait envers lui-même, sa manière d'exalter le Créateur de toutes choses -- tous ces traits de caractère, dignes d'admiration, se révélèrent dans les cérémonies de la dédicace du temple, alors qu'agenouillé il priait dans l'attitude d'un humble suppliant. PR 31 2 De nos jours, les disciples du Christ feront bien de se mettre en garde contre toute tendance à manquer de révérence et de crainte envers le Seigneur. Les saintes Ecritures nous enseignent comment nous devons nous approcher de notre Créateur: avec humilité et tremblement, par la foi en un Médiateur divin. Le Psalmiste a déclaré: PR 31 3 L'Eternel est un grand Dieu, Il est un grand roi au-dessus de tous les dieux ... Venez, prosternons-nous et humilions-nous, Fléchissons le genou devant l'Eternel, notre Créateur! PR 31 4 Que ce soit dans le culte public ou privé, c'est notre privilège de nous agenouiller devant Dieu pour lui adresser nos requêtes. Jésus, notre divin modèle, "s'étant mis à genoux, ... pria".31 Il est dit de l'apôtre Pierre: "Il se mit à genoux, et pria."32 Paul déclare: "Je fléchis les genoux devant le Père."33 Lorsqu'il confessa devant Dieu les péchés d'Israël, Esdras s'agenouilla.34 Daniel "trois fois le jour se mettait à genoux; il priait, et il louait son Dieu."35 PR 31 5 La véritable révérence envers Dieu est inspirée par le sentiment de son infinie grandeur et la conscience de sa présence. Notre coeur devrait en être profondément pénétré. L'heure et le lieu de la prière sont sacrés, parce que nous sommes en présence de Dieu. En manifestant de la révérence dans notre attitude et notre maintien, le sentiment qui inspire cette révérence gagne en profondeur. "Son nom est saint et redoutable",36 déclare le Psalmiste. Lorsque les anges prononcent ce nom, ils se voilent la face. Avec quelle révérence ne devrions-nous donc pas, nous pécheurs, articuler ce nom! PR 32 1 Il serait bon que jeunes et vieux méditent sur les paroles de l'Ecriture qui indiquent comment considérer le lieu où le Seigneur manifeste sa présence. "Ote tes souliers de tes pieds, dit l'Eternel à Moïse du milieu du buisson ardent, car le lieu sur lequel tu te tiens est une terre sainte."37 Après avoir contemplé la vision de l'échelle qui reliait la terre au ciel, Jacob s'écria: "L'Eternel est en ce lieu, et moi, je ne le savais pas! ... C'est ici la maison de Dieu, c'est ici la porte des cieux!"38 PR 32 2 Les paroles prononcées par Salomon lors de la dédicace du temple étaient destinées à chasser de l'esprit de ceux qui les écoutaient les superstitions concernant le Créateur, qui obscurcissaient l'entendement des païens. Le Dieu des cieux ne ressemble pas aux dieux du paganisme, confinés dans des temples faits de main d'homme. Cependant, il serait par son Esprit avec son peuple lorsqu'il se rassemblerait pour l'adorer, dans la maison qui lui était consacrée. PR 32 3 Des siècles plus tard, Paul enseigne la même vérité lorsqu'il prononce ces paroles: "Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qui s'y trouve, étant le Seigneur du ciel et de la terre, n'habite point dans des temples faits de main d'homme; il n'est point servi par des mains humaines, comme s'il avait besoin de quoi que ce soit, lui qui donne à tous la vie, la respiration, et toutes choses. ... Il a voulu qu'ils cherchassent le Seigneur, et qu'ils s'efforçassent de le trouver en tâtonnant, bien qu'il ne soit pas loin de chacun de nous, car en lui nous avons la vie, le mouvement, et l'être."39 PR 32 4 Le Psalmiste s'exprime en ces termes: PR 32 5 Heureuse la nation dont l'Eternel est le Dieu! Heureux le peuple qu'il choisit pour son héritage! L'Eternel regarde du haut des cieux, Il voit tous les fils de l'homme; Du lieu de sa demeure il observe Tous les habitants de la terre. PR 33 1 L'Eternel a établi son trône dans les cieux, Et son règne domine sur toutes choses. PR 33 2 O Dieu! tes voies sont saintes; Quel dieu est grand comme Dieu? Tu es le Dieu qui fait des prodiges; Tu as manifesté parmi les peuples ta puissance. PR 33 3 Mais bien que le Seigneur n'habite pas dans des temples faits de main d'homme, il honore de sa présence les assemblées de son peuple. Il a promis d'être au milieu des siens par son Esprit chaque fois qu'ils viendraient lui confesser leurs péchés et prier les uns pour les autres. Toutefois, ceux qui s'assemblent pour l'adorer doivent abandonner tout mauvais sentiment. S'ils ne l'adorent en esprit et en vérité, leur assemblée est sans valeur. Dieu a déclaré à ce sujet: "Ce peuple m'honore des lèvres, mais son coeur est éloigné de moi. C'est en vain qu'ils m'honorent."41 "Les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité; car ce sont là les adorateurs que le Père demande."42 PR 33 4 L'Eternel est dans son saint temple. Que toute la terre fasse silence devant lui. ------------------------Chapitre 3 -- Orgueil dans la prospérité PR 35 1 Aussi longtemps que Salomon exalta la loi divine, le Seigneur fut avec lui. La sagesse qu'il avait reçue lui permit de gouverner Israël d'une manière impartiale. Au début, alors que la prospérité et les honneurs terrestres le favorisaient, il resta humble, et grande fut son influence. "Salomon dominait sur tous les royaumes depuis le fleuve [l'Euphrate] jusqu'au pays des Philistins et jusqu'à la frontière d'Egypte. ... Il avait la paix de tous les côtés alentour. Juda et Israël ... habitèrent en sécurité, chacun sous sa vigne et sous son figuier, tout le temps de Salomon."1 PR 35 2 Mais après l'aube d'une vie riche en promesses, ce monarque sombra dans l'apostasie. L'Ecriture nous rapporte ce fait douloureux: celui qui avait reçu "le nom de Jedidja"2 (bien-aimé de l'Eternel), que le Seigneur honora de sa faveur par la sagesse remarquable dont il l'avait doté et qui lui valut une renommée mondiale; celui qui enseigna aux autres à rendre honneur au Dieu d'Israël; celui-là donc se détourna du culte de l'Eternel pour adorer les idoles des païens. PR 36 1 Des siècles avant que Salomon monte sur le trône, le Seigneur, prévoyant les dangers qui assailliraient les rois d'Israël, avait donné à Moïse des instructions pour leur servir de guide. Des ordres prescrivaient que celui qui s'assiérait sur le trône devait "écrire pour lui, dans un livre, une copie de cette loi", qu'il prendrait "auprès des sacrificateurs, les Lévites. Il devrait l'avoir avec lui et y lire tous les jours de sa vie, afin qu'il apprenne à craindre l'Eternel, son Dieu, à observer et à mettre en pratique toutes les paroles de cette loi et toutes ces ordonnances; afin que son coeur ne s'élève point au-dessus de ses frères, et qu'il ne se détourne de ces commandements ni à droite ni à gauche; afin qu'il prolonge ses jours dans son royaume, lui et ses enfants, au milieu d'Israël."3 PR 36 2 En rapport avec ces instructions, le Seigneur avertit tout particulièrement celui qui recevrait l'onction royale de ne pas avoir "un grand nombre de femmes, afin que son coeur ne se détourne point; et qu'il ne fasse pas de grands amas d'argent et d'or".4 PR 36 3 Salomon connaissait bien ces instructions, et il en tint compte pendant un certain temps. Son plus grand désir était de vivre et de gouverner selon les préceptes donnés au Sinaï. La manière dont il dirigea les affaires de son royaume contrastait vivement avec les coutumes des nations de cette époque, qui ne craignaient pas Dieu et dont les chefs foulaient aux pieds sa sainte loi. PR 36 4 Lorsque Salomon chercha à consolider ses rapports avec les puissants royaumes du sud d'Israël, il s'aventura sur un terrain défendu. Satan connaissait les résultats de l'obéissance. C'est pourquoi au début du règne de Salomon, glorieux à cause de sa sagesse, de sa bonté et de sa droiture, ce grand ennemi s'efforça de faire jouer des influences qui mineraient insidieusement la loyauté du monarque, et l'amèneraient à se séparer de Dieu. L'Ecriture nous rapporte comment il réussit à atteindre son but: "Salomon s'allia par mariage avec Pharaon, roi d'Egypte. Il prit pour femme la fille de Pharaon, et il l'amena dans la ville de David."5 PR 37 1 A vues humaines, ce mariage, bien que contraire aux enseignements de la loi divine, semblait être une bénédiction, car la femme païenne de Salomon se convertit et se joignit à lui pour adorer le vrai Dieu. De plus, Pharaon rendit un service important à Israël en s'emparant de Guézer, en tuant "les Cananéens qui habitaient dans la ville", et en la donnant "pour dot à sa fille, femme de Salomon".6 Celui-ci rebâtit cette ville, et fortifia apparemment son royaume sur la côte méditerranéenne. Mais en contractant une alliance avec une nation païenne et un mariage avec une princesse idolâtre, Salomon méprisa imprudemment les sages conseils de Dieu pour maintenir la pureté de son peuple. L'espoir que sa femme, d'origine égyptienne, pourrait se convertir n'était qu'une faible excuse pour son péché. PR 37 2 Pendant un certain temps, Dieu, dans sa miséricorde infinie, limita les conséquences de cette terrible faute. Le roi, par sa conduite irréprochable, aurait du moins pu mettre un frein aux forces du mal déchaînées par son imprudence. Mais Salomon avait commencé à perdre de vue la source d'où lui venaient sa puissance et sa gloire. Alors que ses penchants triomphaient de sa raison, sa confiance en lui-même grandissait, et il cherchait à accomplir les desseins de Dieu selon ses propres vues. Il pensait que, par des traités politiques et commerciaux avec les pays voisins, il ferait connaître à ceux-ci le vrai Dieu. Il contracta donc des alliances avec plusieurs nations. Ces alliances étaient souvent scellées par des mariages avec des princesses païennes. Il ne tenait aucun compte des commandements divins relatifs aux coutumes des peuples étrangers. PR 37 3 Salomon se flattait de pouvoir, par sa sagesse et son exemple, détourner ses femmes de l'idolâtrie, et les amener au culte du Très-Haut. Il pensait aussi que les alliances contractées avec les pays voisins rapprocheraient ceux-ci d'Israël. Mais quel vain espoir! L'erreur commise par Salomon, en se jugeant assez fort pour résister aux influences païennes de ses alliés, lui fut fatale. Fatale aussi l'illusion lui faisant croire que les étrangers révéreraient les préceptes sacrés et les suivraient alors qu'il les méprisait lui-même. PR 38 1 Les alliances et les traités commerciaux contractés par le roi avec les nations païennes lui valurent la gloire, l'honneur et les richesses de ce monde. Il put se procurer ainsi en très grande quantité de l'or d'Ophir et de l'argent de Tarsis. "Le roi rendit l'argent et l'or aussi communs à Jérusalem que les pierres, et les cèdres aussi communs que les sycomores qui croissent dans la plaine."7 La richesse, et avec elle son cortège de tentations, grandissait parmi le peuple, mais l'or pur du caractère était terni et altéré. PR 38 2 L'apostasie de Salomon fut si graduelle qu'avant qu'il ait pu s'en rendre compte il s'était déjà éloigné de Dieu. Insensiblement, il perdit confiance dans la direction divine et les bénédictions qui en découlent pour ne compter que sur lui-même. Il refusa peu à peu d'accorder au Seigneur cette obéissance fidèle qui devait faire d'Israël un peuple particulier, et il se conforma de plus en plus aux coutumes des nations voisines. Il céda aux tentations inhérentes à ses succès et à son rang élevé, et il oublia la source de sa prospérité. Il mit son ambition à surpasser en puissance et en grandeur les autres pays, ce qui l'incita à employer pour des buts égoïstes les dons du ciel qu'il avait jusqu'alors mis au service de Dieu. L'argent qui aurait dû être consacré aux indigents, ou à la diffusion des principes d'une vie sainte dans le monde, fut englouti par des projets égoïstes et ambitieux. PR 38 3 Hanté par le désir de surpasser les autres nations par le faste de sa cour, le roi ne vit plus la nécessité de cultiver la beauté et la perfection du caractère. En cherchant à faire valoir sa propre gloire aux yeux du monde, il vendit son honneur et son intégrité. Les sommes énormes acquises par le commerce avec de nombreux pays furent majorées de lourdes taxes. Ainsi l'orgueil, l'ambition, la prodigalité et le plaisir amenèrent la cruauté et l'exaction. La conscience, la modération qui avaient caractérisé les rapports du roi avec son peuple, pendant la première partie de son règne, avaient maintenant disparu. Celui qui avait été le plus généreux et le plus avisé des monarques s'était transformé en tyran. PR 39 1 Ce roi, jadis compatissant, qui faisait régner la crainte de Dieu parmi son peuple, devint un despote, un potentat. Il leva impôts sur impôts, afin de pouvoir entretenir le luxe de sa maison. Le peuple commença à murmurer. Le respect et l'admiration qu'on lui avait témoignés se transformèrent en mépris et en aversion. Pour les mettre en garde contre la tentation de placer leur confiance dans le bras de la chair, le Seigneur avait averti ceux qui étaient appelés à régner sur Israël de ne pas avoir une trop grande quantité de chevaux. Mais Salomon ne tint aucun compte de cette recommandation. Le récit sacré nous dit: "C'était de l'Egypte que Salomon tirait ses chevaux; une caravane de marchands du roi les allait chercher par troupes à un prix fixe." C'était de "l'Egypte et de tous les pays que l'on tirait des chevaux pour Salomon". "Salomon rassembla des chars et de la cavalerie; il avait quatorze cents chars et douze mille cavaliers, qu'il plaça dans les villes où il tenait ses chars et à Jérusalem près du roi."8 PR 39 2 Salomon considérait de plus en plus le faste, le plaisir et les les faveurs du monde comme des signes de grandeur. Des femmes séduisantes et belles furent amenées d'Egypte, de Phénicie, d'Edom, de Moab et d'ailleurs. Elles se comptaient par centaines. Leur religion consistait à adorer des idoles, et on leur avait enseigné à pratiquer des rites cruels et dégradants. Grisé par leur beauté, le roi négligea ses devoirs envers Dieu et envers son royaume. PR 39 3 Ces femmes exerçaient sur lui une influence si profonde qu'il en arriva petit à petit à s'unir à elles dans le culte des idoles. Il avait méprisé les instructions que Dieu lui avait données pour servir de barrière contre l'apostasie, ce qui le conduisit à adorer les faux dieux. "A l'époque de la vieillesse de Salomon, lisons-nous dans l'Ecriture, ses femmes inclinèrent son coeur vers d'autres dieux; et son coeur ne fut point tout entier à l'Eternel, son Dieu, comme l'avait été le coeur de David, son père. Salomon alla après Astarté, divinité des Sidoniens, et après Milcom, l'abomination des Ammonites."9 PR 39 4 Sur la hauteur méridionale du mont des Oliviers, en face du mont Morija, où se dressait le magnifique temple de l'Eternel, Salomon érigea une série de bâtiments imposants qui servaient de sanctuaires païens. Pour faire plaisir à ses femmes, il fit placer d'immenses statues de bois et de pierre parmi des massifs de myrtes et d'oliviers. Là, devant les autels des divinités païennes, "Kemosch, l'abomination de Moab", et "Moloc, l'abomination des fils d'Ammon",10 se pratiquaient les rites les plus dégradants du paganisme. PR 40 1 La conduite de Salomon ne manqua pas de recevoir son châtiment. Il courut à sa perte en se séparant de Dieu pour être en communion avec les idolâtres. En désobéissant au Seigneur, il perdit la maîtrise de lui-même, sa moralité disparut, sa sensibilité s'émoussa, sa conscience se cautérisa. Celui qui, au début de son règne, avait déployé tant de sagesse et de sympathie envers une mère malheureuse en lui restituant son petit enfant",,11 s'abaissa jusqu'à consentir qu'on élevât une idole à laquelle on offrait en sacrifice des enfants vivants. Celui qui manifesta tant de modestie et de jugement dans sa jeunesse et qui écrivit lors de sa maturité ces lignes inspirées: "Telle voie paraît droite à un homme, mais son issue, c'est la voie de la mort",12 se détourna de la pureté, au point qu'il en vint à encourager la licence et les rites révoltants du culte de Kemosch et d'Astarté. Celui qui avait déclaré au peuple lors de la dédicace du temple: "Que votre coeur soit tout à l'Eternel, notre Dieu13 devint lui-même un renégat qui désavouait, par sa conduite et ses sentiments, ses propres paroles. Il confondit la licence et la liberté. Il essaya -- mais à quel prix! -- d'unir la lumière aux ténèbres, le bien au mal, la pureté à l'impureté, le Christ à Bélial. PR 40 2 Le roi, qui fut l'un des plus grands à porter un sceptre, tomba dans la débauche, et fut le jouet et l'esclave des autres. Son caractère si noble, si viril, s'avilit et s'effémina. Sa foi au Dieu vivant fut supplantée par les doutes de l'athéisme. Le scepticisme assombrit son bonheur, affaiblit ses principes, et dégrada sa vie. La justice et la magnanimité qui avaient caractérisé le début de son règne dégénérèrent en despotisme et en tyrannie. Pauvres et frêles créatures que nous sommes! Le Seigneur ne peut faire grand-chose pour des hommes qui perdent le sentiment de leur dépendance à son égard. PR 41 1 Pendant ces années d'apostasie, le déclin spirituel d'Israël s'aggrava rapidement. Comment aurait-il pu en être autrement, quand son roi unissait ses intérêts à ceux des suppôts de Satan? Par l'intermédiaire de ces derniers, l'ennemi chercha à troubler les esprits concernant le vrai culte et celui des faux dieux. Les Israélites devinrent ainsi une proie facile. Le commerce entre les pays étrangers les mit en contact avec des gens qui ne connaissaient pas le vrai Dieu, ce qui les amena à se détacher de plus en plus de l'Eternel. Leur sens profond du caractère sublime et saint du Seigneur s'évanouit. Ils refusèrent de suivre le sentier de l'obéissance, et portèrent leur affection sur l'ennemi de toute justice. L'habitude de contracter des mariages avec des païens se répandit, et les Israélites perdirent rapidement leur aversion pour l'idolâtrie. La polygamie fut encouragée. Les mères apprirent à leurs enfants à observer les rites païens. Le service religieux institué par Dieu fut remplacé chez certains par la plus noire des idolâtries. PR 41 2 Les croyants doivent se distinguer du monde, et s'en séparer, éviter ses influences, son esprit. Dieu est parfaitement à même de nous garder dans le monde, mais nous ne devons pas être du monde. L'amour du Seigneur n'est ni inconstant, ni incertain. Le Père céleste veille sans cesse sur ses enfants avec une sollicitude extrême. Mais il leur demande, en retour, une soumission totale. "Nul ne peut servir deux maîtres, a dit le Christ. Car ou il haïra l'un, et aimera l'autre; ou il s'attachera à l'un, et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon."14 PR 41 3 Salomon était doué d'une sagesse remarquable, mais le monde le détacha de Dieu. De nos jours, les hommes ne sont pas plus forts que lui. Ils sont tout aussi enclins à céder aux influences qui déterminèrent sa perte. De même que le Seigneur mit en garde Salomon contre le danger qu'il encourait, de même aujourd'hui il avertit les croyants de ne pas s'allier avec le monde de peur qu'ils ne perdent leur âme. "Sortez du milieu d'eux, et séparez-vous, dit le Seigneur; ne touchez pas à ce qui est impur, et je vous accueillerai. Je serai pour vous un père, et vous serez pour moi des fils et des filles."15 PR 42 1 Le danger se cache dans la prospérité. A travers tous les siècles, la richesse et la gloire ont toujours fait courir un grand péril à l'humilité et à la foi. Il n'est pas difficile de porter une coupe vide, c'est la coupe pleine jusqu'au bord qu'on a de la peine à tenir en équilibre. L'affliction et l'adversité peuvent faire naître la douleur, mais c'est la prospérité qui menace le plus la vie spirituelle. Si le chrétien n'est pas constamment soumis à la volonté divine, s'il n'est pas sanctifié par la vérité, la prospérité le poussera irrésistiblement à la présomption. PR 42 2 Dans la vallée de l'humiliation, où l'homme dépend de Dieu pour être guidé à chaque pas, règne une sécurité relative. Mais ceux qui occupent de hautes situations, qui semblent leur conférer une grande sagesse, courent le plus grand danger. S'ils ne se placent pas sous la dépendance de Dieu, ils tomberont fatalement. PR 42 3 Partout où règnent l'orgueil et l'ambition, la vie est faussée, car ces péchés ferment le coeur aux bénédictions infinies du ciel. Celui qui fait de la glorification du moi son but principal, sera privé de la grâce divine, par laquelle s'acquièrent les plus nobles richesses et les joies les plus profondes. Mais celui qui s'abandonne entièrement au Christ, et qui fait tout pour lui, verra l'accomplissement de cette promesse: "C'est la bénédiction de l'Eternel qui enrichit, et il ne la fait suivre d'aucun chagrin."16 Par la douce action de la grâce, le Sauveur bannit de l'âme toute agitation et toute ambition profane, changeant l'inimitié en amour et l'incrédulité en confiance. Lorsque Jésus nous dit: "Suis-moi", le charme des séductions terrestres est rompu. Au son de sa voix, l'esprit de cupidité et d'ambition disparaît du coeur, et, ainsi libérés, les hommes peuvent suivre le Christ. ------------------------Chapitre 4 -- Conséquences de la transgression PR 43 1 Parmi les causes principales qui conduisirent Salomon à la prodigalité et à la tyrannie, il faut citer son abandon de l'esprit de sacrifice. PR 43 2 Lorsque, au pied du Sinaï, Moïse fit part aux Israélites de l'ordre divin: "Ils me feront un sanctuaire, et j'habiterai au milieu d'eux", ils répondirent par des dons appropriés. "Tous ceux qui furent entraînés par le coeur et animés de bonne volonté vinrent et apportèrent une offrande."1 La construction du sanctuaire exigeait des préparatifs considérables, des matériaux coûteux; mais le Seigneur n'acceptait que les offrandes volontaires: "Qu'ils m'apportent une offrande; vous la recevrez pour moi de tout homme qui la fera de bon coeur."2 Ce fut là l'ordre rapporté par Moïse à l'assemblée. La piété et le sacrifice étaient avant tout les qualités requises pour l'érection du sanctuaire, où devait demeurer le Très-Haut. PR 43 3 David fit un appel semblable lorsqu'il chargea Salomon de la responsabilité d'ériger le temple. "Qui veut encore, avait-il dit, présenter volontairement aujourd'hui ses offrandes à l'Eternel?"3 Cet appel à la consécration et au sacrifice volontaire ne devait jamais être perdu de vue par ceux qui contribueraient à l'érection du temple. PR 44 1 En ce qui concerne la construction du tabernacle dans le désert, Dieu avait doté des hommes d'une habileté et d'une sagesse spéciales. "Moïse dit aux enfants d'Israël: Sachez que l'Eternel a choisi Betsaleel, ... de la tribu de Juda. Il l'a rempli de l'Esprit de Dieu, de sagesse, d'intelligence, et de savoir pour toutes sortes d'ouvrages. ... Il lui a accordé aussi le don d'enseigner, de même qu'à Oholiab, ... de la tribu de Dan. Il les a remplis d'intelligence, pour exécuter tous les ouvrages de sculpture et d'art, pour broder et tisser; ... pour faire toute espèce de travaux et d'inventions. Betsaleel, Oholiab, et tous les hommes habiles, en qui l'Eternel avait mis de la sagesse et de l'intelligence pour savoir et pour faire, exécutèrent les ouvrages destinés au service du sanctuaire."4 Les intelligences célestes collaboraient avec les ouvriers que Dieu avait choisis. PR 44 2 Les descendants de ces hommes habiles héritèrent dans une grande mesure des talents de leurs ancêtres. Pendant un certain temps, ces Israélites, des tribus de Juda et de Dan, restèrent humbles et charitables; mais graduellement, presque imperceptiblement, ils s'éloignèrent de Dieu et perdirent le désir de le servir d'une manière désintéressée. Ils exigèrent alors des salaires plus élevés pour le travail qu'ils exécutaient comme spécialistes. Il leur arrivait parfois d'obtenir satisfaction, mais le plus souvent ils allaient chercher du travail chez les nations voisines. Ainsi, au lieu de faire preuve de générosité, comme leurs glorieux ancêtres, ils se complurent dans la cupidité, dans le désir d'obtenir toujours davantage. Pour satisfaire leurs penchants égoïstes, ils mirent les talents que Dieu leur avait accordés au service des monarques païens, et employèrent leur habileté à perfectionner des oeuvres qui déshonoraient leur Maître. PR 44 3 Ce fut parmi ces hommes que Salomon chercha un artisan habile pour diriger la construction du temple sur le mont Morija. Des détails minutieux avaient été donnés par écrit au roi pour chaque partie de l'édifice sacré. Il aurait pu compter sur le Seigneur pour trouver les ouvriers consacrés et habiles, afin de pouvoir exécuter avec précision le travail en question. Mais Salomon ne profita pas de cette occasion pour exercer sa foi en Dieu. Il fit dire au roi de Tyr de lui envoyer "un homme habile pour les ouvrages en or, en argent, en airain et en fer, en étoffes teintes en pourpre, en cramoisi et en bleu, et connaissant la sculpture, afin qu'il travaille avec les hommes habiles qui sont auprès de moi en Juda et à Jérusalem".5 PR 45 1 Le roi phénicien lui répondit en envoyant Huram, "fils d'une femme d'entre les filles de Dan, et d'un père Tyrien".6 Huram descendait, par sa mère, d'Oholiab, à qui, des centaines d'années auparavant, le Seigneur avait accordé une sagesse spéciale pour construire le tabernacle. PR 45 2 Ainsi se trouvait placé, à la tête des ouvriers de Salomon, un homme dont le travail n'était pas inspiré par le désir de servir le Seigneur. Il servait le dieu de ce monde -- Mammon. Chaque fibre de son être était entachée d'égoïsme. PR 45 3 L'adresse exceptionnelle d'Huram lui permit d'exiger un salaire élevé, et les mauvais principes qui l'animaient furent peu à peu adoptés par ses compagnons. En se livrant au même travail, ceux-ci avaient des tendances à comparer leurs salaires avec le sien, perdant ainsi de vue le caractère sacré de leur oeuvre. L'esprit de renoncement disparut de leur coeur et fut remplacé par celui de la convoitise. Il s'ensuivit une réclamation pour une augmentation de salaire, qui leur fut accordée. PR 45 4 Les mauvaises influences qui en résultèrent se firent sentir dans toutes les branches de l'oeuvre de Dieu, et pénétrèrent un peu partout dans le royaume. Un certain nombre de ceux qui avaient réussi à obtenir des salaires élevés en profitèrent pour se laisser aller au luxe et à la prodigalité, et l'esprit de sacrifice disparut presque complètement. Il est triste de constater que l'apostasie de celui qui avait été considéré comme le plus sage des mortels était à l'origine de ces influences néfastes. PR 45 5 Comme l'esprit et les mobiles qui animaient les Israélites dans la construction du tabernacle contrastaient avec ceux des hommes qui édifièrent le temple de Salomon! Il y a là une grande leçon pour nous. L'égoïsme qui caractérisait les ouvriers du temple se retrouve aujourd'hui dans celui qui domine le monde. La cupidité, la recherche des positions en vue et des salaires élevés règnent partout. Le service volontaire, le désintéressement des ouvriers du tabernacle ne se rencontrent que bien rarement. C'est pourtant le seul esprit qui devrait animer les disciples de Jésus. Notre divin Maître en a donné un exemple frappant. A ceux à qui il a dit: "Suivez-moi, et je vous ferai pêcheurs d'hommes",7 il n'offrit pas de salaire déterminé en échange de leurs services. Ils devaient participer à son renoncement, à ses sacrifices. PR 46 1 Nous ne devons pas travailler uniquement pour recevoir un salaire. Au service du Seigneur, l'intérêt personnel ne compte pas. Le renoncement et l'esprit de sacrifice ont toujours été et resteront toujours les premières qualités requises pour accomplir un service agréable à Dieu. Notre Seigneur et Maître ne conçoit pas qu'un seul filament d'égoïsme soit tissé dans son ouvrage. Déployons dans notre travail le tact, l'habileté, la précision et la sagesse que le Dieu de perfection exigea des constructeurs du tabernacle. Il faut se souvenir cependant que les plus grands talents, les services les plus brillants ne sont agréables au Seigneur que si notre moi est déposé sur l'autel du sacrifice. PR 46 2 Salomon fit une autre entorse aux principes de la justice, et c'est ce qui précipita sa ruine: il céda à la tentation de s'attribuer la gloire qui n'appartient qu'à Dieu seul. Du jour où la construction du temple lui fut confiée, jusqu'à son achèvement, il affirma son intention de "bâtir une maison au nom de l'Eternel, le Dieu d'Israël!"8 Cette intention fut clairement exposée en présence des enfants d'Israël rassemblés lors de la dédicace du temple. Dans sa prière, le roi reconnaissait que l'Eternel avait dit: "Là sera mon nom".9 L'un des passages les plus touchants de la prière de dédicace est la supplication adressée à Dieu par Salomon en faveur des étrangers qui viendraient des pays lointains pour mieux connaître celui dont la gloire s'était répandue parmi les nations. "On saura, déclarait le roi, que ton nom est grand, ta main forte, et ton bras étendu." Salomon avait demandé au Seigneur pour chacun des étrangers qui viendraient l'adorer: "Exauce-le des cieux, du lieu de ta demeure, et accorde à cet étranger tout ce qu'il te demandera, afin que tous les peuples de la terre connaissent ton nom pour te craindre, comme ton peuple d'Israël, et sachent que ton nom est invoqué sur cette maison que j'ai bâtie."10 PR 47 1 En terminant le service de la dédicace, Salomon exhorta Israël à demeurer fidèle au vrai Dieu, "afin que tous les peuples de la terre reconnaissent que l'Eternel est Dieu, qu'il n'y en a point d'autre".11 PR 47 2 Quelqu'un de plus grand que Salomon avait conçu le modèle du temple; la sagesse et la gloire divine se révélaient dans sa construction. Ceux qui l'ignoraient admiraient et louaient Salomon qu'ils croyaient être l'architecte et le constructeur; mais le roi déclinait cet honneur. PR 47 3 Ainsi en était-il lorsque la reine de Séba vint rendre visite à Salomon. Ayant entendu parler de sa sagesse et du temple merveilleux qu'il avait fait construire, elle résolut de "l'éprouver par des énigmes" et voir de ses propres yeux ses constructions célèbres. Accompagnée d'une suite nombreuse et de chameaux portant "des aromates, de l'or en très grande quantité, et des pierres précieuses", elle fit le long voyage de son pays à Jérusalem. "Elle se rendit auprès de Salomon, et elle lui dit tout ce qu'elle avait dans le coeur." Elle s'entretint avec lui des mystères de la nature. Salomon lui apprit que le Dieu de la nature, le grand Créateur, habite dans les cieux et dirige toutes choses. Il "répondit à toutes ses questions, et il n'y eut rien que Salomon ne sût lui expliquer".12 PR 47 4 "La reine de Séba vit toute la sagesse de Salomon, et la maison qu'il avait bâtie, et les mets de sa table, et la demeure de ses serviteurs, et les fonctions et les vêtements de ceux qui le servaient, et ses échansons, et ses holocaustes qu'il offrait dans la maison de l'Eternel. Hors d'elle-même, elle dit au roi: C'était donc vrai ce que j'ai appris dans mon pays au sujet de ta position et de ta sagesse! Je ne le croyais pas, avant d'être venue et d'avoir vu de mes yeux. Et voici, on ne m'en a pas dit la moitié. Tu as plus de sagesse et de prospérité que la renommée ne me l'a fait connaître. Heureux tes gens, heureux tes serviteurs qui sont continuellement devant toi, qui entendent ta sagesse!"13 PR 48 1 Salomon avait si bien indiqué à la reine de Séba la source de sa sagesse et de sa prospérité qu'elle fut obligée, en le quittant, non pas d'encenser l'homme, mais de s'exclamer: "Béni soit l'Eternel, ton Dieu, qui t'a accordé la faveur de te placer sur le trône d'Israël! C'est parce que l'Eternel aime à toujours Israël, qu'il t'a établi roi pour que tu fasses droit et justice."14 Voilà l'impression que Dieu désirait produire sur tous les peuples. Alors que "tous les rois de la terre cherchaient à voir Salomon, pour entendre la sagesse que Dieu avait mise dans son coeur",15 ce monarque honorait l'Eternel en leur assurant que c'est le Créateur des cieux et de la terre, le Maître de l'univers, qui possède la toute-sagesse. PR 48 2 Si Salomon avait continué, en toute humilité, à reporter l'intérêt qu'on lui manifestait sur celui qui lui avait donné la sagesse, la richesse et la gloire, quelle merveilleuse histoire aurait été la sienne! Mais si la plume inspirée nous fait le récit de ses vertus, elle nous décrit aussi sa chute. Parvenu au faîte de sa gloire, comblé de richesses et d'honneurs, Salomon fut ébloui; il perdit l'équilibre et tomba. Encensé sans cesse par les hommes du monde, il fut incapable, finalement, de résister à la flatterie. La sagesse qu'il avait reçue pour glorifier l'auteur de tous les dons, le remplit d'orgueil. Il finit par permettre aux hommes de le considérer comme celui qui méritait tous les honneurs à cause de l'incomparable magnificence du temple qu'il avait conçu et érigé pour célébrer "le nom de l'Eternel, le Dieu d'Israël". PR 48 3 C'est ainsi que le temple de Jérusalem finit par être connu de toutes les nations, comme étant "le temple de Salomon". Celui qui n'avait été qu'un instrument dans cette construction s'arrogeait la gloire qui appartient à celui qui est "plus élevé encore".16 Même de nos jours, on parle souvent du temple, dont Salomon disait: "Cette maison que j'ai bâtie",17 non comme de celui de l'Eternel, mais de Salomon. PR 48 4 Il ne saurait y avoir de plus grande faiblesse que de tirer vanité des dons reçus du ciel. Le vrai chrétien placera Dieu dans sa vie avant et après toutes choses et lui accordera la meilleure place. Nul mobile ambitieux ne doit refroidir son amour pour lui. Il fera rejaillir tous les honneurs sur son Père céleste. C'est lorsque nous glorifions fidèlement le nom de Dieu et que nos sentiments sont placés sous le contrôle céleste que nous pouvons développer nos facultés intellectuelles et spirituelles. PR 49 1 Jésus, le divin Maître, exaltait toujours le nom de son Père céleste. Il enseignait à ses disciples à prier ainsi: "Notre Père qui es aux cieux! Que ton nom soit sanctifié."18 Et ils ne devaient pas oublier de confesser: "Car c'est à toi qu'appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire."19 Le Médecin suprême s'appliquait tellement à détourner l'attention de lui-même pour la diriger vers la source de sa puissance que la multitude, "dans l'admiration de voir que les muets parlaient, que les estropiés étaient guéris, que les boiteux marchaient, que les aveugles voyaient", ne glorifiait pas Jésus, mais "le Dieu d'Israël."20 PR 49 2 Dans la magnifique prière prononcée par le Sauveur peu avant sa crucifixion, il déclara: "Je t'ai glorifié sur la terre. ... Glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie. ... Père juste, le monde ne t'a point connu; mais moi je t'ai connu, et ceux-ci ont connu que tu m'as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom, et je le leur ferai connaître, afin que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux, et que je sois en eux."21 PR 49 3 "Ainsi parle l'Eternel: Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le fort ne se glorifie pas de sa force, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse. Mais que celui qui veut se glorifier se glorifie d'avoir de l'intelligence et de me connaître, de savoir que je suis l'Eternel, qui exerce la bonté, le droit et la justice sur la terre; car c'est à cela que je prends plaisir, dit l'Eternel."22 "Je célébrerai le nom de Dieu par des cantiques, je l'exalterai par des louanges." "Tu es digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire et l'honneur et la puissance." "Je te louerai de tout mon coeur, Seigneur, mon Dieu! Et je glorifierai ton nom à perpétuité." "Exaltez avec moi l'Eternel! Célébrons tous son nom!"23 PR 49 4 L'introduction de principes qui détournaient de l'esprit de sacrifice, et favorisaient la glorification du moi, faussait de plus en plus le plan de Dieu envers Israël. Le Seigneur avait destiné son peuple à être la lumière du monde. Ce peuple devait faire resplendir la gloire de sa loi, telle qu'elle se révèle dans la vie pratique. Pour exécuter ce dessein, Dieu lui avait fait occuper une situation stratégique importante dans le monde. PR 50 1 A l'époque de Salomon, le royaume d'Israël s'étendait de Hamath, au nord, jusqu'en Egypte, au sud, et de la Méditerranée à l'Euphrate. Ce territoire était traversé par des voies naturelles ouvertes au commerce du monde, et que des caravanes, venues des pays lointains, empruntaient sans cesse. Ainsi était offerte à Salomon et à son peuple l'occasion de faire connaître aux hommes de maintes contrées le caractère du Roi des rois, et de leur enseigner à le révérer et à lui obéir. Cette connaissance devait être donnée au monde entier. Par le symbole des offrandes sacrificielles, le Christ pouvait être élevé aux yeux de toutes les nations, afin que tous ceux qui le désiraient fussent sauvés. PR 50 2 Placé à la tête d'une nation devant servir de phare aux pays voisins, Salomon aurait dû employer sa grande influence et la sagesse que Dieu lui avait conférée. Il aurait dû organiser et diriger un vaste mouvement pour éclairer ceux qui ne connaissaient pas Dieu et la vérité. Des multitudes auraient ainsi été amenées à obéir aux préceptes divins. Israël aurait été protégé contre les pratiques dégradantes des païens, et le Seigneur de gloire aurait été grandement honoré. Mais Salomon perdit de vue ce but élevé; il n'exploita pas les occasions magnifiques qui lui étaient offertes pour éclairer ceux qui traversaient continuellement son territoire ou s'arrêtaient dans les villes principales du royaume. PR 50 3 L'esprit missionnaire que Dieu avait implanté dans le coeur de Salomon et dans celui de tout véritable Israélite fut supplanté par l'esprit de lucre. Ce roi rebâtit Guézer, près de Joppé, sur la route qui va d'Egypte en Syrie; Beth-Horon, à l'ouest de Jérusalem, ville forte placée sur la route qui conduit du coeur de la Judée à Guézer et à la côte; Meguiddo, située sur la route des caravanes allant de Damas en Egypte et de Jérusalem vers le nord. "Il bâtit Thadmor au désert",24 sur la route des caravanes venant de l'orient. Toutes ces villes étaient puissamment fortifiées. Il développa les avantages commerciaux qu'il retirait d'un débouché sur la mer Rouge, par la construction d'une marine marchande "à Etsjon-Guéber, ... sur les bords de la mer Rouge, dans le pays d'Edom". Des matelots entraînés furent envoyés de Tyr "auprès des serviteurs de Salomon" pour équiper ces vaisseaux qui "allèrent à Ophir, et ils y prirent de l'or ... et une grande quantité de bois de sandal et des pierres précieuses".25 PR 51 1 Les ressources du roi, ainsi que celles d'un grand nombre de ses sujets, s'accroissaient, mais à quel prix! Par la cupidité et l'étroitesse de vue de ceux à qui étaient confiés les oracles de Dieu, les foules innombrables qui parcouraient les voies de passages d'Israël demeuraient dans l'ignorance du vrai Dieu. PR 51 2 Quel contraste entre l'attitude de Salomon et celle du Christ! Lorsqu'il était sur la terre, le Sauveur qui détenait cependant "tout pouvoir" ne l'employa jamais pour son profit personnel. Aucun rêve de conquête ou de grandeur terrestre ne vint entacher la perfection de son service en faveur de l'humanité. "Les renards ont des tanières, disait-il, et les oiseaux du ciel ont des nids; mais le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête."26 Ceux qui répondent à l'appel du Maître doivent bien connaître ses méthodes. Le Seigneur profitait de toutes les occasions qui se présentaient sur les grandes routes fréquentées par les voyageurs. PR 51 3 Entre ses allées et venues, Jésus demeurait à Capernaüm, qui était connue comme "sa ville".27 Située sur la route de Damas à Jérusalem, vers l'Egypte, et sur la voie de la Méditerranée, cette ville était au centre du travail du Seigneur. Des gens de tous les pays passaient à Capernaüm, où ils s'attardaient quelque temps. Jésus avait ainsi l'occasion de rencontrer des voyageurs de toutes les nationalités et de tous les milieux; il les faisait profiter de ses leçons qui se propageaient dans de nombreux foyers d'autres pays. Les prophéties se rapportant à sa venue suscitaient de l'intérêt, et l'attention était attirée sur le Sauveur, ainsi que sur sa mission dans le monde. PR 51 4 De nos jours, les occasions pour entrer en contact avec les hommes et les femmes de toutes classes et de toutes nationalités sont plus fréquentes encore qu'au temps d'Israël. Les voies de communications sont multipliées au centuple. PR 52 1 A l'instar du Christ, les messagers du Très-Haut devraient se placer sur les grandes voies de communications pour rencontrer les foules venant de toutes les parties du globe. Avec l'aide d'en haut, ils répandraient ainsi la semence divine en faisant connaître les vérités de l'Evangile. Cette semence prendrait racine dans les esprits et dans les coeurs; elle lèverait et s'épanouirait ensuite pour la vie éternelle. PR 52 2 Quelles leçons solennelles nous offre la chute d'Israël, à l'époque où son souverain faillit à la noble mission qui lui avait été confiée! Là où Israël se montra faible, jusqu'à provoquer sa propre chute, le peuple de Dieu aujourd'hui doit se montrer fort, car il est la véritable Eglise du Christ. C'est à lui qu'incombe la tâche d'achever l'oeuvre de Dieu, et de hâter le jour des décisions finales. PR 52 3 Les mauvaises influences qui se faisaient sentir en Israël à l'époque de Salomon s'exercent encore aujourd'hui. Les forces de l'ennemi de toute justice sont solidement retranchées, et ce n'est que par la puissance divine que la victoire peut être remportée. Le conflit qui s'annonce exige un esprit de renoncement, de défiance de soi-même et de foi en Dieu seul; il exige aussi un meilleur emploi de toutes les occasions qui se présentent pour sauver des âmes. La bénédiction divine sera accordée à son Eglise lorsque ses membres s'uniront pour révéler à un monde de ténèbres et d'erreur les beautés de la sainteté, telles qu'elles se manifestent dans l'esprit de sacrifice, dans la glorification du divin au lieu de l'humain, et dans l'inlassable charité en faveur de ceux qui ont tant besoin des bienfaits de l'Evangile. ------------------------Chapitre 5 -- Repentance de Salomon PR 53 1 Dieu apparut deux fois à Salomon au cours de son règne pour lui adresser des paroles d'encouragement et d'exhortation: à Gabaon, pendant la nuit, alors qu'il lui promit la sagesse, la richesse et la gloire et lui recommanda de rester humble et obéissant; après la dédicace du temple, pour le supplier de lui demeurer fidèle. Les exhortations du Seigneur avaient été nettes, ses promesses, merveilleuses. Cependant, l'Ecriture sainte nous rapporte que le roi dont la position, le caractère et la vie semblaient richement dotés pour répondre aux exigences de sa charge et aux espérances du ciel, "n'observa point les ordres de l'Eternel". Il détourna "son coeur de l'Eternel, le Dieu d'Israël, qui lui était apparu deux fois. Il lui avait à cet égard défendu d'aller après d'autres dieux."1 L'apostasie de Salomon alla si loin, son coeur s'endurcit tellement dans la transgression, que son cas sembla désespéré. Il se détourna de la communion divine pour se livrer aux plaisirs des sens. Le récit sacré nous rapporte ses propres paroles à ce sujet: "J'exécutai de grands ouvrages: je me bâtis des maisons; je me plantai des vignes; je me fis des jardins et des vergers. ... J'achetai des serviteurs et des servantes. ... Je m'amassai de l'argent et de l'or, et les richesses des rois et des provinces. Je me procurai des chanteurs et des chanteuses, et les délices des fils de l'homme, des femmes en grand nombre. Je devins grand, plus grand que tous ceux qui étaient avant moi dans Jérusalem. ... PR 54 1 "Tout ce que mes yeux avaient désiré, je ne les en ai point privés; je n'ai refusé à mon coeur aucune joie; car mon coeur prenait plaisir à tout mon travail. ... Puis, j'ai considéré tous les ouvrages que mes mains avaient faits, et la peine que j'avais prise à les exécuter; et voici, tout est vanité et poursuite du vent, et il n'y a aucun avantage à tirer de ce qu'on fait sous le soleil. PR 54 2 "Alors j'ai tourné mes regards vers la sagesse, et vers la sottise et la folie. -- Car que fera l'homme qui succédera au roi? Ce qu'on a déjà fait. ... Et j'ai haï la vie. ... J'ai haï tout le travail que j'ai fait sous le soleil."2 PR 54 3 Salomon fit la triste expérience du néant auquel aboutit celui qui place son idéal dans les choses terrestres. Les autels aux dieux païens ne cessèrent de lui rappeler que le repos d'esprit promis par ces fausses divinités n'est qu'un leurre. Des idées tristes et obsédantes le tourmentèrent alors nuit et jour. Il n'y avait plus pour lui de joie, ni de repos d'esprit; l'avenir lui paraissait désormais sombre et désespéré. PR 54 4 Cependant le Seigneur ne l'oubliait pas. Par des reproches sévères, il chercha à faire comprendre au roi les conséquences de sa conduite pécheresse. Il lui retira sa protection, et permit à ses ennemis de harceler et d'affaiblir son royaume. "L'Eternel suscita un ennemi à Salomon: Hadad, l'Edomite. ... Dieu suscita un autre ennemi à Salomon: Rezon, ... chef de bande", qui "avait Israël en aversion. Il régna sur la Syrie. Jéroboam aussi, serviteur de Salomon, ... fort et vaillant. ... Il leva la main contre le roi."3 PR 54 5 Le Seigneur finit par envoyer, par l'intermédiaire d'un prophète, ce message effrayant à Salomon: "Puisque tu as agi de la sorte, et que tu n'as point observé mon alliance et mes lois que je t'avais prescrites, je déchirerai le royaume de dessus toi et je le donnerai à ton serviteur. Seulement, je ne le ferai point pendant ta vie, à cause de David, ton père. C'est de la main de ton fils que je l'arracherai."4 PR 55 1 Comme s'il était tiré d'un songe par ce jugement prononcé contre lui et sa maison, Salomon, dont la conscience se réveillait brusquement, commença à se rendre compte de sa folie. Repris dans son âme, lassé de corps et d'esprit, il se détourna des citernes crevassées de ce monde pour se désaltérer à nouveau à la source de la vie. L'école de la souffrance avait enfin accompli son oeuvre. Longtemps obsédé par la crainte d'une ruine totale provoquée par son incapacité de se détourner de sa folie, il découvrait un rayon d'espoir dans le message qui lui était adressé. Dieu ne l'avait pas tout à fait rejeté; il était prêt à le délivrer d'une servitude plus cruelle que la tombe, et dont il ne pouvait lui-même s'affranchir. PR 55 2 Salomon fut heureux de reconnaître la puissance et la miséricorde de celui qui est au-dessus des "hommes les plus élevés".5 Repentant, il commença à revenir sur ses pas pour s'élever sur les sommets de la pureté et de la sainteté d'où il était tombé. Il ne pouvait espérer échapper aux conséquences désastreuses du péché, ni libérer son esprit du souvenir de sa vie dissipée; mais il s'efforcerait de dissuader les autres de suivre leur propre folie. Il confessa humblement ses erreurs passées, et il avertit ses semblables pour qu'ils ne soient pas irrémédiablement perdus par suite du mauvais exemple qu'il leur avait donné. PR 55 3 Celui qui se repent vraiment n'oublie pas son passé, dès qu'il a obtenu le pardon de ses fautes. Il pense à ceux que sa conduite a poussés au mal, et il s'efforce, par tous les moyens possibles, de les ramener dans le droit sentier. Plus brillante est la lumière qu'il reçoit, plus fort est son désir de guider ses semblables dans la bonne voie. Il ne dissimule pas ses mauvaises actions, mais il avertit les autres du danger qu'ils courent. PR 55 4 Salomon reconnaissait que "le coeur des fils de l'homme est plein de méchanceté, et la folie est dans leur coeur pendant leur vie".6 Et il déclarait aussi: "Parce qu'une sentence contre les mauvaises actions ne s'exécute pas promptement, le coeur des fils de l'homme se remplit en eux du désir de faire le mal. Cependant, quoique le pécheur fasse cent fois le mal et qu'il y persévère longtemps, je sais aussi que le bonheur est pour ceux qui craignent Dieu, parce qu'ils ont de la crainte devant lui. Mais le bonheur n'est pas pour le méchant, et il ne prolongera point ses jours, pas plus que l'ombre, parce qu'il n'a pas de la crainte devant Dieu."7 PR 56 1 Inspiré par le Seigneur, Salomon écrivit pour les générations qui lui succéderaient l'histoire de ses années perdues, ainsi que les leçons qu'elles comportaient; de sorte que si la semence qu'il avait jetée fut récoltée par son peuple en gerbe de mal, l'oeuvre de sa vie ne s'avéra pas totalement stérile. Au déclin de ses jours, avec douceur et humilité, Salomon "a encore enseigné la science au peuple, et il a examiné, sondé, mis en ordre un grand nombre de sentences". Il "s'est efforcé de trouver des paroles agréables; et ce qui a été écrit avec droiture, ce sont des paroles de vérité. Les paroles des sages sont comme des aiguillons; et, rassemblées en un recueil, elles sont comme des clous plantés, données par un seul maître. Du reste, mon fils, tire instruction de ces choses."8 PR 56 2 "Ecoutons la fin du discours, écrivait-il encore: crains Dieu et observe ses commandements. C'est là ce que doit tout homme. Car Dieu amènera toute oeuvre en jugement, au sujet de tout ce qui est caché, soit bien, soit mal."9 PR 56 3 Il ressort des derniers écrits de Salomon que plus il se rendait compte de la perversité de sa conduite, plus il s'efforçait de mettre en garde la jeunesse contre les erreurs qui lui avaient fait gaspiller les dons inestimables prodigués par le ciel. Il confessait avec tristesse et confusion qu'au moment où il aurait dû trouver en Dieu son soutien, sa vie, son réconfort, il s'était détourné de la lumière céleste et de la sagesse divine pour s'adonner à l'idolâtrie. Or, ayant appris par expérience la folie d'une telle vie, son désir le plus ardent était de mettre les autres à l'abri de la cruelle épreuve qui avait été la sienne. PR 56 4 Avec des accents pathétiques, il s'adressait aux jeunes, en leur indiquant les privilèges et les responsabilités qu'ils rencontreraient au service de Dieu. PR 57 1 "La lumière est douce, disait-il, et il est agréable aux yeux de voir le soleil. Si donc un homme vit beaucoup d'années, qu'il se réjouisse pendant toutes ces années, et qu'il pense aux jours de ténèbres qui seront nombreux; tout ce qui arrivera est vanité. Jeune homme, réjouis-toi dans ta jeunesse, livre ton coeur à la joie pendant les jours de ta jeunesse, marche dans les voies de ton coeur et selon les regards de tes yeux; mais sache que pour tout cela Dieu t'appellera en jugement. Bannis de ton coeur le chagrin, et éloigne le mal de ton corps; car la jeunesse et l'aurore sont vanité."10 PR 57 2 "Souviens-toi de ton Créateur pendant les jours de ta jeunesse, avant que les jours mauvais arrivent et que les années s'approchent où tu diras: Je n'y prends point de plaisir; avant que s'obscurcissent le soleil et la lumière, la lune et les étoiles, et que les nuages reviennent après la pluie, temps où les gardiens de la maison tremblent, où les hommes forts se courbent, où celles qui moulent s'arrêtent parce qu'elles sont diminuées, où ceux qui regardent par les fenêtres sont obscurcis, où les deux battants de la porte se ferment sur la rue quand s'abaisse le bruit de la meule, où l'on se lève au chant de l'oiseau, où s'affaiblissent toutes les filles du chant, où l'on redoute ce qui est élevé, où l'on a des terreurs en chemin, où l'amandier fleurit, où la sauterelle devient pesante, et où la câpre n'a plus d'effet, car l'homme s'en va vers sa demeure éternelle, et les pleureurs parcourent les rues; avant que le cordon d'argent se détache, que le vase d'or se brise, que le seau se rompe sur la source, et que la roue se casse sur la citerne; avant que la poussière retourne à la terre, comme elle y était, et que l'esprit retourne à Dieu qui l'a donné."11 PR 57 3 La vie de Salomon est riche d'avertissements, non seulement pour la jeunesse, mais aussi pour les gens d'âge mûr, qui descendent la colline et font face au soleil couchant. Nous entendons dire, et nous le constatons par nous-mêmes, que les jeunes sont instables; ils hésitent entre le bien et le mal; le courant des mauvaises passions est trop fort pour eux. Nous ne nous attendons pas à trouver chez les personnes âgées cette instabilité et cette faiblesse. Nous aimons à croire qu'à leur âge leur caractère est fermement établi et leurs principes profondément enracinés. Mais il n'en est pas toujours ainsi. C'est alors que Salomon aurait dû affirmer un caractère inébranlable, qu'il trébucha et succomba à la tentation. C'est au moment où sa foi devait être le mieux assise qu'elle fut le plus branlante. PR 58 1 Tout ceci nous enseigne que le seul moyen de salut pour les jeunes comme pour les vieux réside dans la prière et la vigilance. La sécurité ne se trouve ni dans la position élevée, ni dans les privilèges exceptionnels. On peut avoir joui pendant de longues années d'une véritable expérience religieuse, et ne pas être à l'abri des assauts de Satan. Dans la lutte contre le péché, qu'il vienne de l'intérieur ou de l'extérieur, le puissant et sage Salomon fut vaincu. Sa chute nous enseigne que les qualités intellectuelles, quelque belles qu'elles puissent être chez un homme, et pour si fidèle qu'il soit, ne lui permettent jamais de se confier en sa propre sagesse et son intégrité. PR 58 2 Le véritable fondement et le modèle sur lesquels on peut former un caractère ont toujours été les mêmes pour toutes les générations et tous les pays. Le divin commandement: "Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée; et ton prochain comme toi-même",12 fut le principe suivi par le Sauveur. C'est le seul fondement solide, le seul guide infaillible. "Tes jours seront en sûreté; la sagesse et l'intelligence sont une source de salut."13 Seule la Parole de Dieu peut nous procurer cette sagesse et cette intelligence. PR 58 3 De nos jours, ce principe a la même importance qu'à l'époque où il fut ordonné au peuple d'Israël: "Vous les observerez (les commandements) et vous les mettrez en pratique; car ce sera là votre sagesse et votre intelligence aux yeux des peuples."14 C'est là le seul moyen de sauvegarder l'intégrité individuelle, la pureté du foyer, le bien-être de la société et la stabilité d'une nation. Dans notre vie de difficultés, de dangers, de luttes, la seule règle infaillible à suivre est celle que le Seigneur nous donne: "Les ordonnances de l'Eternel sont droites."15 "Celui qui se conduit ainsi ne chancelle jamais."16 PR 59 1 Ceux qui savent reconnaître l'avertissement que nous donne l'apostasie de Salomon feront bien de repousser dès l'abord les tentations qui perdirent ce monarque. Seule l'obéissance aux commandements de Dieu préservera l'homme de l'apostasie. Le Seigneur nous a accordé de grandes lumières et de riches bénédictions; mais si nous ne savons pas les apprécier, elles ne sauraient nous préserver de la désobéissance et de l'apostasie. Lorsque ceux que le Seigneur a élevés à un rang social supérieur se détournent de lui pour se confier dans la sagesse des hommes, leur lumière se change en ténèbres. Les dons qu'il leur avait conférés deviennent pour eux un piège. PR 59 2 Il y aura jusqu'à la fin des hommes qui se détourneront de Dieu. Satan profitera de toutes les occasions pour nous faire tomber, si bien que, si nous ne sommes pas gardés par la puissance divine, les bastions de notre âme chancelleront à notre insu. Nous devons nous demander constamment: Est-ce que je suis dans la bonne voie? Tant que nous vivrons, il faudra nous défendre résolument contre nos penchants et nos passions. A moins que nous ne mettions notre confiance en Dieu, nous ne serons jamais en sûreté. C'est en veillant et en priant que nous pouvons conserver notre intégrité. PR 59 3 Tous ceux qui entreront dans la cité céleste passeront par la porte étroite, c'est-à-dire qu'ils lutteront désespérément; car "il n'entrera chez elle rien de souillé."17 Mais que ceux qui sont tombés ne se laissent pas aller au désespoir. Des hommes, jadis honorés de Dieu, peuvent avoir souillé leurs âmes et sacrifié leur vertu sur l'autel du désir. Toutefois, s'ils se repentent, s'ils abandonnent leur péché et reviennent au Seigneur, tout espoir n'est pas perdu pour eux. Celui qui a dit: "Sois fidèle jusqu'à la mort, et je te donnerai la couronne de vie",18 adresse encore cette invitation au pécheur: "Que le méchant abandonne sa voie, et l'homme d'iniquité ses pensées; qu'il retourne à l'Eternel, qui aura pitié de lui, à notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner."19 Dieu abhorre le péché, mais il aime le pécheur. "Je réparerai leur infidélité, affirme-t-il, j'aurai pour eux un amour sincère."20 PR 60 1 La repentance de Salomon fut sincère, mais le mal causé par sa mauvaise conduite subsista. Pendant son apostasie, il y eut dans le royaume des hommes qui restèrent fidèles, maintinrent leur intégrité et leur loyauté. Toutefois, beaucoup suivirent son exemple. Les forces du mal déchaînées par suite de l'idolâtrie et des plaisirs du monde furent si puissantes que la repentance du roi ne réussit pas à les maîtriser facilement. Son influence pour le bien s'était considérablement affaiblie. Un grand nombre de ses sujets hésitaient à lui donner toute leur confiance. PR 60 2 Bien que le roi ait confessé son péché, et relaté pour le profit des générations à venir l'histoire de sa folie et de sa repentance, il ne pouvait s'attendre à neutraliser l'influence de sa mauvaise conduite. Encouragés par son apostasie, beaucoup continuèrent à pratiquer le mal, et le mal seulement. On peut même retrouver cette mauvaise influence dans la pente suivie par les successeurs de Salomon: ils firent un usage dégradant des dons que Dieu leur avait accordés. PR 60 3 Plongé dans les douloureuses réflexions que lui inspirait sa conduite, Salomon fut amené à déclarer: "La sagesse vaut mieux que les instruments de guerre, mais un seul pécheur détruit beaucoup de bien. ... Il est un mal que j'ai vu sous le soleil, comme une erreur provenant de celui qui gouverne: la folie occupe des postes très élevés. ... Les mouches mortes infectent et font fermenter l'huile du parfumeur; un peu de folie l'emporte sur la sagesse et sur la gloire."21 PR 60 4 Parmi les innombrables leçons que nous enseigne la vie de Salomon, aucune ne saurait être plus éloquente que celle de l'influence profonde qu'il exerça, soit en faveur du bien, soit en faveur du mal. PR 60 5 Pour si réduite que soit notre sphère d'action, nous exerçons une influence ou salutaire ou pernicieuse. Cette influence se fait sentir en dehors de notre connaissance ou de notre pouvoir. Elle peut être chargée de rancoeur et d'égoïsme, ou entachée par la souillure mortelle d'un péché caressé; mais elle peut aussi être accompagnée du pouvoir vivifiant de la foi, du courage, de l'espérance et du parfum délicat de l'amour. N'oublions jamais qu'elle agira toujours, soit en bien, soit en mal, sur notre semblable. PR 61 1 La pensée que cette influence peut apporter "une odeur de mort donnant la mort" paraît une chose effroyable, et cependant cela est possible. Comment imaginer qu'une âme soit induite en erreur et privée de l'éternité? Cependant, un acte inconsidéré, une parole irréfléchie de notre part peuvent exercer une influence si profonde dans la vie de notre prochain qu'ils risquent de contribuer à perdre son âme. Une défaillance de caractère suffit parfois pour détourner du Christ. PR 61 2 C'est la semence qui produit la moisson. La nouvelle graine, à son tour, est semée à nouveau, de sorte que le rendement s'en trouve multiplié. Cette loi s'applique aussi dans nos rapports avec nos semblables. Chacune de nos actions, chacune de nos paroles sont autant de graines qui porteront du fruit. Tout acte de bonté, d'obéissance, de désintéressement, se reproduira chez d'autres, et par eux chez d'autres encore. De même tout acte de jalousie, de malice, de dissension, est une semence qui croîtra, et produira des "racines d'amertume",22 faisant du mal au prochain. C'est ainsi que la bonne et la mauvaise semence se perpétuent dans le temps et l'éternité. ------------------------Chapitre 6 -- Division du royaume PR 63 1 "Salomon se coucha avec ses pères, et il fut enterré dans la ville de David, son père. Roboam, son fils, régna à sa place."1 PR 63 2 Peu de temps après être monté sur le trône, Roboam se rendit à Sichem, où il s'attendait à être proclamé roi par toutes les tribus d'Israël. Le récit sacré nous dit: "Roboam se rendit à Sichem, car tout Israël était venu à Sichem pour le faire roi."2 PR 63 3 Or, parmi l'assemblée se trouvait Jéroboam, fils de Nébath -- ce même Jéroboam connu sous le règne de Salomon comme "un homme fort et vaillant", et à qui le prophète Achija, de Silo, avait fait cette impressionnante prédiction: "Voici, je vais arracher le royaume de la main de Salomon, et je te donnerai dix tribus."3 PR 63 4 Par son messager, le Seigneur avait montré clairement à Jéroboam la nécessité de partager le royaume. Ce partage devait avoir lieu, avait-il déclaré, "parce qu'ils m'ont abandonné, et se sont prosternés devant Astarté, divinité des Sidoniens, devant Kemosch, dieu de Moab, et devant Milcom, dieu des fils d'Ammon, et parce qu'ils n'ont point marché dans mes voies pour faire ce qui est droit à mes yeux et pour observer mes lois et mes ordonnances, comme l'a fait David, père de Salomon."4 PR 64 1 Plus tard, Jéroboam reçut des instructions lui indiquant que le royaume ne serait pas divisé avant la fin du règne de Salomon. "Je n'ôterai pas de sa main tout le royaume, car je le maintiendrai prince tout le temps de sa vie, à cause de David, mon serviteur, que j'ai choisi, et qui a observé mes commandements et mes lois. Mais j'ôterai le royaume de la main de son fils, et je t'en donnerai dix tribus."5 PR 64 2 Bien que Salomon ait vivement souhaité préparer Roboam, son successeur légitime, à se montrer sage au cours de la crise prédite par le prophète, il ne put réussir à exercer une influence assez profonde sur lui pour tourner sa pensée vers le bien. Il faut dire que l'éducation première de ce fils avait été gravement négligée. Sa mère, une Ammonite, l'avait doté d'un caractère indécis. Parfois il s'efforçait de servir Dieu, qui lui accordait alors une certaine prospérité; mais il n'était pas stable, et il finissait par céder aux mauvaises influences de ceux qui l'entouraient depuis sa plus tendre enfance. Les fautes qu'il commit pendant son règne, son apostasie finale, nous montrent à quels terribles résultats aboutit Salomon en s'alliant à des femmes idolâtres. PR 64 3 Les tribus d'Israël avaient longtemps subi de cruelles injustices de la part de leur ancien monarque. Les prodigalités auxquelles Salomon se livra au cours de son apostasie l'avaient amené à accabler le peuple de lourds impôts, et à le plonger dans une rude servitude. Avant de couronner un nouveau roi, les chefs des tribus voulurent s'assurer si le fils de Salomon était décidé à alléger leurs lourdes charges. "Alors Jéroboam et tout Israël vinrent à Roboam et lui parlèrent ainsi: Ton père a rendu notre joug dur: maintenant allège cette rude servitude et le joug pesant que nous a imposé ton père. Et nous te servirons." PR 64 4 Roboam voulut consulter ses conseillers avant de se prononcer. Il répondit: "Revenez vers moi dans trois jours. Et le peuple s'en alla." PR 65 1 "Le roi Roboam consulta les vieillards qui avaient été auprès de Salomon, son père, pendant sa vie, et il dit: Que conseillez-vous de répondre à ce peuple? Et voici ce qu'ils lui dirent: Si tu es bon envers ce peuple, si tu les reçois favorablement, et si tu leur parles avec bienveillance, ils seront pour toujours tes serviteurs."6 PR 65 2 Mécontent de cette réponse, Roboam se tourna vers les jeunes gens qui avaient grandi avec lui et qui l'entouraient. Il leur dit: "Que conseillez-vous de répondre à ce peuple qui me tient ce langage: Allège le joug que nous a imposé ton père?"7 Les jeunes gens lui suggérèrent d'user de rigueur avec ses sujets, et de leur dire ouvertement de ne pas s'ingérer dans ses affaires personnelles. PR 65 3 Grisé par la perspective d'exercer le pouvoir suprême, Roboam résolut de mépriser les avis des vieillards de son royaume pour ne suivre que ceux de ses jeunes conseillers. Il arriva donc qu'au jour convenu, lorsque "Jéroboam et tout le peuple vinrent à Roboam" pour être fixés sur les intentions du nouveau monarque, celui-ci "leur répondit durement ... et il leur parla ainsi: Mon père a rendu votre joug pesant, et moi je vous le rendrai plus pesant; mon père vous a châtiés avec des fouets, et moi je vous châtierai avec des scorpions."8 PR 65 4 Si Roboam et ses conseillers inexpérimentés avaient compris le dessein de Dieu au sujet d'Israël, ils auraient tenu compte des revendications du peuple, exigeant des réformes énergiques dans l'administration royale. Mais lors de l'assemblée de Sichem, ils ne comprirent pas la cause profonde de ces revendications et affaiblirent ainsi leur influence auprès de la majorité du peuple. Leur détermination de perpétuer et d'alourdir le joug imposé par Salomon s'opposait formellement au dessein de Dieu, et fit naître chez les Israélites de sérieux doutes sur la sincérité de leurs mobiles. En voulant exercer le pouvoir d'une manière si insensée, le roi et ses conseillers firent preuve d'orgueil et de despotisme. PR 65 5 Mais le Seigneur ne permit pas à Roboam de réaliser le programme politique qu'il s'était tracé. Des milliers de sujets des tribus d'Israël, indignés de l'oppression que leur avait fait subir Salomon, étaient maintenant décidés à se révolter contre la maison de David. "Lorsque tout Israël vit que le roi ne l'écoutait pas, dit le récit sacré, le peuple répondit au roi: Quelle part avons-nous avec David? Nous n'avons point d'héritage avec le fils d'Isaï! A tes tentes, Israël! Maintenant, pourvois à ta maison, David! Et Israël alla dans ses tentes."9 PR 66 1 La rupture provoquée par les paroles violentes de Roboam s'avérait irréparable. Il s'ensuivit une scission: les tribus de Juda et de Benjamin formèrent la partie méridionale du royaume de Juda, sous la domination de Roboam, tandis que les dix tribus du nord constituèrent un gouvernement à part, connu sous le nom de royaume d'Israël, dont Jéroboam fut le roi. Ainsi s'accomplit "la parole que l'Eternel avait dite par Achija. ... Cela fut dirigé par l'Eternel."10 PR 66 2 Lorsque Roboam vit que dix tribus refusaient de lui obéir, il tenta l'impossible pour arranger les choses. Il chargea un homme influent du royaume, "Adoram, qui était préposé sur les impôts", d'intervenir auprès des rebelles. Mais ses tentatives de réconciliation reçurent un accueil qui montrait bien les véritables sentiments des révoltés. "Adoram fut lapidé par tout Israël, et il mourut." Epouvanté par l'ampleur de la révolte, "le roi Roboam se hâta de monter sur un char, pour s'enfuir à Jérusalem."11 Là, il "rassembla toute la maison de Juda et la tribu de Benjamin, cent quatre-vingt mille hommes d'élite propres à la guerre, pour qu'ils combattissent contre la maison d'Israël afin de la ramener sous la domination de Roboam, fils de Salomon. Mais la parole de Dieu fut ainsi adressée à Schemaeja, homme de Dieu: Parle à Roboam, fils de Salomon, roi de Juda, et à toute la maison de Juda et de Benjamin, et au reste du peuple. Et dis-leur: Ainsi parle l'Eternel: Ne montez point, et ne faites pas la guerre à vos frères, les enfants d'Israël! Que chacun de vous retourne dans sa maison, car c'est de par moi que cette chose est arrivée. Ils obéirent à la parole de l'Eternel."12 PR 66 3 Pendant trois ans, Roboam s'efforça de tirer profit de la douloureuse expérience qu'il avait faite en montant sur le trône, et son règne fut prospère. "Il bâtit des villes fortes en Juda", et "il les fortifia, et y établit des commandants, et des magasins de vivres, d'huile et de vin". Il s'appliqua à rendre ces villes "très fortes."13 Mais le secret de la prospérité de Juda pendant les premières années du règne de Roboam ne résidait pas dans ces mesures. C'était grâce au fait que les tribus de Juda et Benjamin reconnurent Dieu comme chef suprême qu'elles furent ainsi favorisées. Les hommes des tribus du nord qui craignaient Dieu vinrent grossir leurs rangs. "Ceux de toutes les tribus d'Israël, nous rapporte l'Ecriture, qui avaient à coeur de chercher l'Eternel, le Dieu d'Israël, suivirent les Lévites à Jérusalem. ... Ils donnèrent ainsi de la force au royaume de Juda, et affermirent Roboam, fils de Salomon, pendant trois ans; car ils marchèrent pendant trois ans dans la voie de David et de Salomon."14 PR 67 1 S'il avait persévéré dans cette voie, Roboam aurait eu l'occasion de se racheter en grande partie des erreurs de son passé, et de redonner à ses sujets confiance en ses dons de chef. Mais la plume inspirée nous a fait le récit douloureux du successeur de Salomon. Bien qu'entêté, orgueilleux, volontaire et porté à l'idolâtrie, si Roboam avait mis toute sa confiance en Dieu, il aurait affermi son caractère et sa foi, répondu aux exigences divines. Mais, à mesure que le temps s'écoulait, il se glorifiait de sa puissance et des forteresses qu'il avait fait construire. Il s'abandonnait petit à petit à ses penchants héréditaires jusqu'à tomber tout à fait dans l'idolâtrie. "Lorsque Roboam se fut affermi dans son royaume et qu'il eut acquis de la force, il abandonna la loi de l'Eternel, et tout Israël l'abandonna avec lui."15 PR 67 2 Comme ces paroles: "Et tout Israël avec lui", nous semblent lourdes de signification! Le peuple que le Seigneur avait choisi pour servir de lumière aux nations voisines se détournait de la source de sa puissance pour imiter les pays qu'il aurait dû éclairer. Ce qui arriva à Salomon se reproduisit chez Roboam: leur mauvais exemple égara une multitude d'âmes. Il en est encore ainsi de nos jours, à un degré plus ou moins grand, avec celui qui se laisse conduire par Satan. Malheureusement, l'influence du mal ne se limite pas à celui qui s'y adonne. Nul ne vit pour lui-même, nul ne souffre seul de son iniquité. Toute vie répand autour d'elle, soit une lumière qui projette ses rayons bienfaisants sur le sentier du prochain, soit une influence sombre et déprimante qui pousse au désespoir et à la mort. Nous conduisons nos semblables vers le bonheur et la vie éternelle, ou vers les abîmes de la tristesse et de la mort éternelle. Et si par nos actes nous aggravons les forces du mal chez ceux qui nous entourent, nous participons à leurs péchés. PR 68 1 Dieu ne permit pas que l'apostasie du roi de Juda demeurât impunie. "La cinquième année du règne de Roboam, Schischak, roi d'Egypte, monta contre Jérusalem, parce qu'ils avaient péché contre l'Eternel. Il avait mille deux cents chars et soixante mille cavaliers; et il vint d'Egypte avec lui un peuple innombrable. ... Il prit les villes fortes qui appartenaient à Juda, et arriva jusqu'à Jérusalem. PR 68 2 "Alors Schemaeja, le prophète, se rendit auprès de Roboam et des chefs de Juda qui s'étaient retirés dans Jérusalem à l'approche de Schischak, et il leur dit: Ainsi parle l'Eternel: Vous m'avez abandonné; je vous abandonne aussi, et je vous livre entre les mains de Schischak."16 PR 68 3 Le peuple ne s'était pas encore adonné à l'apostasie au point de mépriser les jugements de Dieu. Dans les pertes subies au cours de l'invasion de Schischak, il reconnut la main de Dieu, et pendant un certain temps il s'humilia, et dit: "L'Eternel est juste!" PR 68 4 "Quand l'Eternel vit qu'ils s'humiliaient, la parole de l'Eternel fut ainsi adressée à Schemaeja: Ils se sont humiliés, je ne les détruirai pas, je ne tarderai pas à les secourir, et ma colère ne se répandra pas sur Jérusalem par Schischak; mais ils lui seront assujettis, et ils sauront ce que c'est que me servir ou servir les royaumes des autres pays. PR 68 5 "Schischak, roi d'Egypte, monta contre Jérusalem. Il prit les trésors de la maison de l'Eternel et les trésors de la maison du roi, il prit tout. Il prit les boucliers d'or que Salomon avait faits. Le roi Roboam fit à leur place des boucliers d'airain, et il les remit aux soins des chefs des coureurs, qui gardaient l'entrée de la maison du roi. ... Comme Roboam s'était humilié, l'Eternel détourna de lui sa colère et ne le détruisit pas entièrement. Et il y avait encore de bonnes choses en Juda."17 PR 69 1 Mais quand l'affliction eut disparu, et que la nation redevint prospère, un grand nombre oublièrent leurs craintes et retournèrent à l'idolâtrie. Le roi lui-même était de ceux-là. Bien qu'il ait été humilié par l'épreuve, il ne sut pas profiter de ce tournant décisif de sa vie. Il oublia la leçon que le Seigneur avait voulu lui donner, et il retomba dans les péchés qui avaient attiré les jugements divins sur la nation. Après quelques années ignominieuses au cours desquelles le monarque "fit le mal, parce qu'il n'appliqua pas son coeur à chercher l'Eternel, ... Roboam se coucha avec ses pères, et il fut enterré dans la ville de David. Et Abija, son fils, régna à sa place."18 PR 69 2 Avec le partage du royaume, au début du règne de Roboam, la gloire d'Israël commença à décliner pour ne plus jamais se révéler entièrement. Au cours des siècles qui suivirent, le trône de David fut parfois occupé par des hommes doués d'une haute valeur morale et d'un jugement pénétrant. Les bénédictions dont furent alors l'objet les habitants de Juda s'étendirent jusque sur les nations voisines. Parfois, le nom de Dieu fut exalté au-dessus de tous les faux dieux, et sa loi fut honorée. Parfois aussi, de puissants prophètes furent suscités pour affermir ces rois et encourager le peuple à demeurer fidèle au Seigneur. Mais la racine du mal qui avait commencé à croître du temps de Roboam ne fut jamais totalement extirpée, si bien que le peuple de Dieu tombait si bas qu'il était la risée des païens. PR 69 3 Cependant, en dépit de la perversité de ceux qui retournaient aux pratiques idolâtres, Dieu, dans sa miséricorde, faisait tout pour sauver ce royaume divisé. Alors que les années s'écoulaient, et que les plans divins envers Israël semblaient sérieusement contrecarrés par les machinations des hommes inspirés par Satan, le Seigneur continuait néanmoins à manifester sa bienveillance à l'égard de la nation par la captivité et la restauration. PR 69 4 Le partage du royaume n'était que le commencement d'une merveilleuse histoire, où s'inscrivaient à la fois la longue souffrance et la miséricorde divine. Le peuple d'Israël dut passer par l'affliction à cause de ses tendances au mal, héréditaires ou acquises. C'est ainsi que le Seigneur cherchait à le purifier pour en faire une nation particulière, zélée pour les bonnes oeuvres. Ce peuple devait finalement reconnaître que "nul n'est semblable à toi, ô Eternel! Tu es grand, et ton nom est grand par ta puissance. Qui ne te craindrait, roi des nations? C'est à toi que la crainte est due; car, parmi tous les sages des nations et dans tous leurs royaumes, nul n'est semblable à toi. ... L'Eternel est Dieu en vérité, il est un Dieu vivant et un roi éternel."19 Les idolâtres durent enfin apprendre que les faux dieux sont incapables d'élever et de sauver. "Les dieux qui n'ont point fait les cieux et la terre disparaîtront de la terre et de dessous les cieux."20 Seuls ceux qui restent fidèles au Dieu vivant, Créateur et Maître de toutes choses, trouveront le repos et la paix. PR 70 1 D'un commun accord Juda et Israël, meurtris et repentants, renouvelèrent enfin leurs voeux de fidélité envers le Seigneur, le Dieu de leurs pères, et ils proclamèrent alors: PR 70 2 [Dieu] a créé la terre par sa puissance, Il a fondé le monde par sa sagesse, Il a étendu les cieux par son intelligence. A sa voix, les eaux mugissent dans les cieux; Il fait monter les nuages des extrémités de la terre, Il produit les éclairs et la pluie, Il tire le vent de ses trésors. Tout homme devient stupide par sa science, Tout orfèvre est honteux de son image taillée; Car ses idoles ne sont que mensonge, Il n'y a point en elles de souffle, Elles sont une chose de néant, une oeuvre de tromperie; Elles périront, quand viendra le châtiment. Celui qui est la part de Jacob n'est pas comme elles; Car c'est lui qui a tout formé, Et Israël est la tribu de son héritage. L'Eternel des armées est son nom. ------------------------Chapitre 7 -- Jéroboam PR 71 1 Elevé sur le trône par les dix tribus révoltées contre la maison de David, Jéroboam, ancien serviteur de Salomon, aurait pu apporter de sages réformes dans les affaires civiles et religieuses de l'Etat. Il avait fait preuve, sous le règne de Salomon, d'une grande habileté et d'un jugement solide. Les connaissances acquises au cours de son fidèle service lui avaient permis de gouverner avec sagesse. Mais il ne mit pas en Dieu sa confiance. PR 71 2 Ce que Jéroboam redoutait par-dessus tout, c'était que ses sujets ne fussent gagnés par le roi qui occupait le trône de David à Jérusalem. Il se disait que si les dix tribus étaient libres de se rendre fréquemment dans l'ancienne capitale de la monarchie juive, où les services religieux continuaient à se dérouler dans le temple, comme au temps de Salomon, un grand nombre d'Israélites renouvelleraient leur allégeance au gouvernement de Jérusalem. Encouragé par ses conseillers, Jéroboam décida par un coup d'audace de diminuer le plus possible les chances de révolte contre son gouvernement. Il créa à Béthel et à Dan deux centres de culte. Là, les dix tribus seraient invitées à se rassembler pour y adorer Dieu, plutôt qu'à Jérusalem. PR 72 1 Tout en organisant ce changement, Jéroboam chercha à frapper l'imagination des Israélites en plaçant devant eux une représentation symbolique du Dieu invisible. Il fit donc deux veaux d'or qu'il plaça l'un à Béthel, l'autre à Dan. Mais en voulant représenter la divinité, le roi violait le commandement formel de Dieu: "Tu ne te feras point d'image taillée. ... Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point."1 PR 72 2 Jéroboam avait un tel désir d'empêcher les dix tribus de se rendre à Jérusalem qu'il ne s'aperçut pas de la faiblesse fondamentale de ses agissements. Il ne vit pas le grand danger auquel il exposait les Israélites en plaçant devant eux un symbole idolâtre de la divinité, symbole si familier à leurs ancêtres pendant les siècles que dura leur servitude en Egypte. Son récent séjour dans ce pays aurait dû cependant lui faire comprendre combien il était imprudent de placer devant le peuple de telles idoles. Mais son intention arrêtée d'empêcher les tribus du nord de se rendre à la ville sainte l'amena à prendre ces mesures. "Assez longtemps vous êtes montés à Jérusalem, dit-il au peuple; Israël! voici ton Dieu, qui t'a fait sortir du pays d'Egypte."2 Les Israélites étaient ainsi invités à se prosterner devant des idoles, ce qui constituait une étrange manière d'adoration. PR 72 3 Le roi essaya de persuader les Lévites qui vivaient dans son royaume de servir comme prêtres dans les nouveaux sanctuaires de Béthel et de Dan. Mais il se heurta à leur refus. Il fut donc obligé d'élever à la prêtrise des hommes "pris parmi tout le peuple".3 Effrayés par la perspective qui se présentait devant eux, tous ceux qui étaient restés fidèle au Seigneur, y compris un grand nombre de Lévites, s'enfuirent à Jérusalem pour y adorer selon la volonté divine. PR 72 4 "Jéroboam établit une fête au huitième mois, le quinzième jour du mois, comme la fête qui se célébrait en Juda, et il offrit des sacrifices sur l'autel. Voici ce qu'il fit à Béthel, afin que l'on sacrifiât aux veaux qu'il avait faits. Il plaça à Béthel les prêtres des hauts lieux qu'il avait élevés."4 PR 73 1 Mais ce défi lancé au Seigneur en rejetant les institutions sacrées ne devait pas rester impuni. Au moment même où Jéroboam officiait et brûlait des parfums sur l'autel qu'il avait élevé et qu'il dédicaçait, un homme de Dieu lui apparut. Il arrivait de Juda pour l'accuser d'introduire une nouvelle forme de culte. Le prophète "cria contre l'autel ... et dit: Autel! autel! ainsi parle l'Eternel: Voici, il naîtra un fils à la maison de David; son nom sera Josias; il immolera sur toi les prêtres des hauts lieux qui brûlent sur toi des parfums, et l'on brûlera sur toi des ossements d'hommes! PR 73 2 "Et le même jour il donna un signe, en disant: C'est ici le signe que l'Eternel a parlé: Voici, l'autel se fendra, et la cendre qui est dessus sera répandue." Aussitôt l'autel "se fendit, et la cendre qui était dessus fut répandue, selon le signe qu'avait donné l'homme de Dieu, par la parole de l'Eternel".5 PR 73 3 Devant ce spectacle, Jéroboam défia le Seigneur, et essaya de s'opposer à celui qui avait prononcé ces paroles. Furieux, "il avança la main de dessus l'autel, en disant: Saisissez-le!" Ce geste impétueux fut suivi d'un rapide châtiment. La main qu'il étendait encore contre le messager de Dieu "devint sèche, et il ne put la ramener à soi". PR 73 4 Frappé de terreur, le roi supplia alors le prophète d'intercéder pour lui auprès du Seigneur. "Implore l'Eternel, ton Dieu, lui dit-il, et prie pour moi, afin que je puisse retirer ma main. L'homme de Dieu implora l'Eternel, et le roi put retirer sa main, qui fut comme auparavant."6 PR 73 5 C'était donc en vain que Jéroboam essayait de faire solennellement la dédicace de cet autel, destiné à détourner les fidèles du culte de l'Eternel célébré dans le temple de Jérusalem. Le message du prophète aurait dû pousser le roi à se repentir, et à abandonner ses mauvais penchants qui détournaient le peuple du culte du vrai Dieu. Mais il endurcit son coeur, et il décida de suivre sa propre voie. PR 73 6 Au moment où fut célébrée la fête de Béthel, les Israélites nourrissaient encore de bons sentiments. Beaucoup étaient susceptibles d'être influencés par le Saint-Esprit. C'est alors que le Seigneur résolut de mettre un terme, avant qu'il soit trop tard, aux rapides progrès de l'apostasie chez les Israélites. Il envoya son messager pour interrompre leurs pratiques idolâtres, et montrer au roi et au peuple à quels résultats aboutirait cette idolâtrie. Lorsque l'autel se fendit, le Seigneur manifestait son mécontentement à l'égard des abominations qui se commettaient en Israël. PR 74 1 Dieu cherche à sauver les hommes, non à les perdre. Il se plaît à secourir les pécheurs. "Je suis vivant! dit le Seigneur, l'Eternel, ce que je désire, ce n'est pas que le méchant meure."7 Par des supplications et des avertissements, il exhorte le pécheur à abandonner le mal pour retourner à lui et vivre. Il donne à ses messagers une sainte assurance, qui fait naître chez ceux qui l'entendent des sentiments de crainte et de repentance. Avec quel courage le prophète de Dieu réprimanda le roi! Or, ce courage devait se manifester. Le péché qui régnait en Israël n'aurait pu être censuré autrement. Dieu donna à son serviteur de l'audace, afin que ceux qui l'entendraient puissent en conserver une impression durable. Les messagers du Seigneur doivent se tenir résolument du côté du bien, et ne jamais avoir peur d'affronter les hommes. Aussi longtemps qu'ils mettent leur confiance en Dieu, ils n'ont rien à craindre, car celui qui leur a confié une mission les assure aussi de sa protection. PR 74 2 Son message délivré, le prophète se disposait à prendre le chemin du retour lorsque Jéroboam lui dit: "Entre avec moi dans la maison, tu prendras quelque nourriture, et je te donnerai un présent." "Quand tu me donnerais la moitié de ta maison, lui répondit le prophète, je n'entrerais pas avec toi. Je ne mangerai point de pain, et je ne boirai point d'eau dans ce lieu-ci; car cet ordre m'a été donné, par la parole de l'Eternel: Tu ne mangeras point de pain et tu ne boiras point d'eau, et tu ne prendras pas à ton retour le chemin par lequel tu seras allé."8 PR 74 3 Tout se serait bien passé pour le prophète, s'il s'en était tenu à son intention de retourner en Juda sans délai. Mais alors qu'il revenait chez lui par un autre chemin, il fut rejoint par un vieillard se disant prophète, et qui lui fit ce faux rapport: "Moi aussi, je suis prophète comme toi; et un ange m'a parlé de la part de l'Eternel, et m'a dit: Ramène-le avec toi dans ta maison, et qu'il mange du pain et boive de l'eau." Il répéta plusieurs fois cette invitation mensongère; il se montra si pressant qu'il réussit à persuader le prophète, et celui-ci se rendit chez lui. Mais puisqu'il se permettait de suivre une voie contraire à celle qui lui avait été tracée, Dieu allait lui faire subir le châtiment que méritait sa transgression. PR 75 1 Tandis qu'il était à table avec celui qui l'avait invité à revenir à Béthel, la parole de l'Eternel fut adressée au faux prophète, et il "cria à l'homme de Dieu qui était venu de Juda: Ainsi parle l'Eternel: Parce que tu as été rebelle à l'ordre de l'Eternel, et que tu n'as pas observé le commandement que l'Eternel, ton Dieu, t'avait donné, ... ton cadavre n'entrera pas dans le sépulcre de tes pères."9 PR 75 2 Cette sinistre prophétie ne tarda pas à se réaliser. "Quand le prophète qu'il avait ramené eut mangé du pain et qu'il eut bu de l'eau, il sella l'âne pour lui. ... Et il fut rencontré dans le chemin par un lion qui le tua. Son cadavre était étendu dans le chemin; l'âne resta auprès de lui, et le lion se tint à côté du cadavre. Et voici, des gens qui passaient virent le cadavre étendu dans le chemin et le lion se tenant à côté du cadavre; et ils en parlèrent à leur arrivée dans la ville où demeurait le vieux prophète. Lorsque le prophète qui avait ramené du chemin l'homme de Dieu l'eut appris, il dit: C'est l'homme de Dieu qui a été rebelle à l'ordre de l'Eternel."10 PR 75 3 Le châtiment infligé au messager infidèle donnait encore plus de force à la prophétie prononcée sur l'autel de Béthel. Si, après avoir désobéi à l'ordre du Seigneur, le prophète avait pu continuer son chemin sans être inquiété, le roi aurait exploité ce fait pour essayer de justifier sa propre désobéissance. Lorsque l'autel se fendit, que sa main sécha et qu'il vit le sort terrible réservé au prophète qui avait osé enfreindre l'ordre de Dieu, Jéroboam aurait dû comprendre avec quelle promptitude le Seigneur punit ceux qui l'offensent, et les jugements divins, l'avertir de ne pas persister dans le mal. Mais, loin de se repentir, le roi "créa de nouveau des prêtres des hauts lieux parmi tout le peuple; quiconque en avait le désir, il le consacrait prêtre des hauts lieux". Non seulement il commettait lui-même un grave péché, mais "ce fut là une occasion de péché pour la maison de Jéroboam, et c'est pour cela qu'elle a été exterminée et détruite de dessus la face de la terre".11 PR 76 1 Vers la fin de son règne, qui dura vingt-deux ans et connut beaucoup d'agitations, Jéroboam subit une défaite sanglante en guerroyant contre Abija, successeur de Roboam. "Jéroboam n'eut plus de force du temps d'Abija; et l'Eternel le frappa, et il mourut."12 PR 76 2 L'apostasie introduite en Israël sous le règne de Salomon se répandit de plus en plus, si bien qu'elle conduisit le royaume à une ruine totale. Avant la mort de Jéroboam, Achija, le vieux prophète de Silo qui avait prédit longtemps à l'avance son accession au trône, déclara: "L'Eternel frappera Israël, et il en sera de lui comme du roseau qui est agité dans les eaux; il arrachera Israël de ce bon pays qu'il avait donné à leurs pères, et il les dispersera de l'autre côté du fleuve, parce qu'ils se sont fait des idoles, irritant l'Eternel. Il livrera Israël à cause des péchés que Jéroboam a commis et qu'il a fait commettre à Israël."13 PR 76 3 Cependant le Seigneur ne se détourna pas du peuple d'Israël sans avoir tout fait pour le ramener à lui. Pendant de longues et sombres périodes, alors que rois après rois se dressaient pleins d'arrogance contre le ciel, et précipitaient de plus en plus Israël dans l'idolâtrie, Dieu envoyait à son peuple message sur message. Il lui donnait ainsi l'occasion, par ses prophètes, d'endiguer la marée de l'apostasie, et de revenir à lui. Pendant les années qui suivirent le partage du royaume, Elie et Elisée exercèrent leur ministère, tandis que les tendres appels d'Osée, d'Amos et d'Abdias trouvaient un écho dans le pays d'Israël. Il y eut encore là de nobles témoins de la puissance divine pour sauver le peuple de ses péchés. Aux heures les plus sombres, au sein même de l'idolâtrie, un certain nombre d'hommes restèrent fidèles, et furent irrépréhensibles aux yeux du Dieu saint. Ils faisaient partie de ce reste précieux par lequel devait s'accomplir le dessein éternel du Seigneur. ------------------------Chapitre 8 -- L'apostasie nationale PR 77 1 De la mort de Jéroboam au moment où Elie se présenta devant Achab, le peuple d'Israël, gouverné par des hommes qui ne craignaient pas Dieu et encourageaient d'étranges formes de culte, subit un sérieux déclin spirituel. Le plus grand nombre perdit rapidement de vue son devoir de servir le Dieu vivant, et adopta de multiples pratiques idolâtres. PR 77 2 Nadab, fils de Jéroboam, ne régna que deux ans. Une conspiration menée par Baescha, un de ses généraux qui voulait prendre en main le gouvernement du royaume, mit fin brusquement à sa vie de péché. Il fut tué, ainsi que tous les siens qui auraient pu lui succéder, "selon la parole que l'Eternel avait dite par son serviteur Achija de Silo, à cause des péchés que Jéroboam avait commis et qu'il avait fait commettre à Israël".1 PR 77 3 Ainsi périt la maison de Jéroboam. Le culte idolâtre introduit par le roi avait attiré sur les coupables le châtiment de Dieu, ce qui n'empêcha pas les rois qui lui succédèrent: Baescha, Ela, Zimri et Omri, de suivre pendant près de quarante ans la même pente fatale du mal. PR 78 1 Pendant la plus grande partie du temps où l'apostasie triompha dans le royaume d'Israël, Asa occupa le trône du royaume de Juda. Durant de nombreuses années, "Asa fit ce qui est bien et droit aux yeux de l'Eternel, son Dieu. Il fit disparaître les autels de l'étranger et les hauts lieux, il brisa les statues et abattit les idoles. Il ordonna à Juda de rechercher l'Eternel, le Dieu de ses pères, et de pratiquer la loi et les commandements. Il fit disparaître de toutes les villes de Juda les hauts lieux et les statues consacrés au soleil. Et le royaume fut en repos devant lui."2 PR 78 2 Mais la foi d'Asa fut mise à rude épreuve lorsque "Zérach, l'Ethiopien, sortit contre eux avec une armée d'un million d'hommes et trois cents chars"3 et envahit le royaume. Devant ce danger, Asa ne mit sa confiance ni dans les "villes fortes de Juda", qu'il avait bâties avec "des murs, des tours, des portes et des barres", ni dans "les hommes vaillants",4 de son armée bien entraînée, mais dans les armées de l'Eternel, au nom duquel avaient été opérées autrefois de si merveilleuses délivrances. Il rangea ses forces pour la bataille, et il implora le secours d'en haut. PR 78 3 Les deux armées se trouvèrent alors en face l'une de l'autre. Ce fut un moment de rude épreuve pour ceux qui servaient le Seigneur. Tous avaient-ils confessé leurs péchés? Plaçaient-ils toute leur confiance en Dieu pour triompher? Telles étaient les pensées qui agitaient l'esprit des chefs. A vues humaines, l'armée redoutable d'Egypte anéantirait tout devant elle. Mais en temps de paix, Asa ne s'était pas livré aux plaisirs et aux divertissements; il s'était préparé à toute éventualité. Son armée était prête au combat. Il avait fait l'impossible pour amener son peuple à faire la paix avec Dieu. Et maintenant, bien que ses forces fussent inférieures en nombre à celles de l'ennemi, sa foi en celui en qui il avait placé toute sa confiance ne faiblissait pas. PR 78 4 Au temps de la prospérité, le roi avait recherché le Seigneur; maintenant qu'il était dans l'adversité, il pouvait se reposer sur lui. Ses prières montraient que la force merveilleuse de Dieu ne lui était pas étrangère. "Eternel, disait-il, toi seul peux venir en aide au faible comme au fort: viens à notre aide, Eternel, notre Dieu! car c'est sur toi que nous nous appuyons, et nous sommes venus en ton nom contre cette multitude. Eternel, tu es notre Dieu: que ce ne soit pas l'homme qui l'emporte sur toi!"5 PR 79 1 La prière d'Asa est celle que tout chrétien doit adresser à Dieu dans n'importe quelle circonstance. Nous livrons un combat, non "contre la chair et le sang, mais contre les dominations, contre les autorités, contre les princes de ce monde de ténèbres, contre les esprits méchants dans les lieux célestes".6 Dans ce combat de la vie, nous devons faire face aux forces du mal liguées contre le bien. Il faut alors que notre espérance soit placée, non dans les hommes, mais dans le Dieu vivant. Avec la parfaite assurance de la foi, nous pouvons espérer que le Seigneur unira sa toute-puissance aux forces des hommes pour glorifier son nom. Revêtus de l'armure de la justice, nous remporterons la victoire sur tous les ennemis. PR 79 2 La foi d'Asa fut récompensée d'une manière éclatante. "L'Eternel frappa les Ethiopiens devant Asa et devant Juda, et les Ethiopiens prirent la fuite. Asa et le peuple qui était avec lui les poursuivirent jusqu'à Guérar, et les Ethiopiens tombèrent sans pouvoir sauver leur vie, car ils furent détruits par l'Eternel et par son armée."7 PR 79 3 Alors que les armées victorieuses de Juda et de Benjamin revenaient à Jérusalem, "l'Esprit de Dieu fut sur Azaria, fils d'Obed, et Azaria alla au-devant d'Asa et lui dit: Ecoutez-moi, Asa, et tout Juda et Benjamin! L'Eternel est avec vous quand vous êtes avec lui; si vous le cherchez, vous le trouverez: mais si vous l'abandonnez, il vous abandonnera." "Vous donc, fortifiez-vous, et ne laissez pas vos mains s'affaiblir, car il y aura un salaire pour vos oeuvres."8 PR 79 4 Grandement encouragé par ces paroles, Asa entreprit tôt après une seconde réforme dans le royaume de Juda. Il "fit disparaître les abominations de tout le pays de Juda et de Benjamin et des villes qu'il avait prises dans la montagne d'Ephraïm, et il restaura l'autel de l'Eternel qui était devant le portique de l'Eternel. Il rassembla tout Juda et Benjamin, et ceux d'Ephraïm et Manassé et de Siméon qui habitaient parmi eux, car un grand nombre de gens d'Israël se joignirent à lui lorsqu'ils virent que l'Eternel, son Dieu, était avec lui. Ils s'assemblèrent à Jérusalem le troisième mois de la quinzième année du règne d'Asa. Ce jour-là, ils sacrifièrent à l'Eternel, sur le butin qu'ils avaient amené, sept cents boeufs et sept mille brebis. Ils prirent l'engagement de chercher l'Eternel, le Dieu de leurs pères, de tout leur coeur et de toute leur âme. ... Et ils l'avaient trouvé, et l'Eternel leur donna du repos de tous côtés."9 PR 80 1 La longue histoire de la fidélité d'Asa fut cependant entachée par certaines fautes commises parfois lorsqu'il ne mettait pas toute sa confiance en Dieu. Par exemple, quand le roi d'Israël envahit le royaume de Juda et s'empara de Rama, ville forte située à huit kilomètres de Jérusalem, Asa contracta une alliance avec Ben-Hadad, roi de Syrie. Cette absence de confiance en Dieu dans l'adversité fut sévèrement réprimandée par le prophète Hanani, qui vint trouver Asa, et lui dit: "Parce que tu t'es appuyé sur le roi de Syrie et que tu ne t'es pas appuyé sur l'Eternel, ton Dieu, l'armée du roi de Syrie s'est échappée de tes mains. Les Ethiopiens et les Libyens ne formaient-ils pas une grande armée, avec des chars et une multitude de cavaliers? Et cependant l'Eternel les a livrés entre tes mains, parce que tu t'étais appuyé sur lui. Car l'Eternel étend ses regards sur toute la terre, pour soutenir ceux dont le coeur est tout entier à lui. Tu as agi en insensé dans cette affaire, car dès à présent tu auras des guerres."10 PR 80 2 Après avoir entendu ces paroles, Asa aurait dû s'humilier devant Dieu; mais il "fut irrité contre le voyant, et il le fit mettre en prison, parce qu'il était en colère contre lui. Et dans le même temps Asa opprima aussi quelques-uns du peuple."11 PR 80 3 "La trente-neuvième année de son règne, Asa eut les pieds malades au point d'éprouver de grandes douleurs; même pendant sa maladie, il ne chercha pas l'Eternel, mais il consulta les médecins."12 Le roi mourut la quarante et unième année de son règne, et son fils Josaphat lui succéda. PR 81 1 Deux ans avant la mort d'Asa, Achab monta sur le trône d'Israël. Dès son avènement, il fit preuve d'une apostasie effrayante. Son père Omri, fondateur de Samarie, "fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, et il agit plus mal que tous ceux qui avaient été avant lui."13 Mais Achab alla plus loin dans le péché. Il "fit plus encore que tous les rois d'Israël qui avaient été avant lui, pour irriter l'Eternel, le Dieu d'Israël", en agissant "comme si c'eût été peu de chose de se livrer aux péchés de Jéroboam, fils de Nebath."14 Non content d'encourager les formes d'idolâtrie de Béthel et de Dan, il précipita le peuple dans le paganisme le plus grossier en remplaçant le culte de l'Eternel par celui de Baal. Il prit pour femme Jézabel, "fille d'Ethbaal, roi des Sidoniens", et grand prêtre de Baal. Achab "servit Baal, et se prosterna devant lui. Il éleva un autel à Baal dans la maison de Baal qu'il bâtit à Samarie."15 PR 81 2 Achab ne se contenta pas d'introduire le culte de Baal dans la capitale du royaume. A l'instigation de Jézabel, il fit aussi élever des autels dans les "hauts lieux". Là, sous des berceaux de verdure, les prêtres et ceux qui étaient attachés à ce culte envoûtant exerçaient leur influence maléfique; si bien que presque tout Israël suivit Baal. "Il n'y a eu personne qui se soit vendu comme Achab pour faire ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, et Jézabel, sa femme, l'y excitait. Il a agi de la manière la plus abominable, en allant après les idoles, comme le faisaient les Amoréens, que l'Eternel chassa devant les enfants d'Israël."16 PR 81 3 Achab était faible de caractère. Son mariage avec une femme idolâtre, autoritaire et obstinée, le fit courir au désastre, lui et la nation. Dépourvu de tout principe, de tout noble idéal, il fut facilement influencé par l'esprit volontaire de Jézabel. Sa nature égoïste le rendit incapable d'apprécier les grâces du Dieu d'Israël, et de remplir ses devoirs de chef et de gardien du peuple élu. PR 81 4 Sous l'influence néfaste du règne d'Achab, les enfants d'Israël s'éloignèrent du Dieu vivant et péchèrent devant sa face. Depuis de longues années déjà, ils avaient perdu le respect des choses divines; et il semblait maintenant que nul n'oserait risquer sa vie en s'opposant ouvertement à l'idolâtrie qui régnait partout. Les ténèbres de l'apostasie couvraient tout le pays; on y voyait à chaque pas des statues de Baal et d'Astarté. Les temples païens, les bosquets consacrés, où l'on adorait les oeuvres faites de main d'homme, se multipliaient. L'air même était pollué par l'encens des sacrifices offerts aux faux dieux. Collines et vallées retentissaient des cris discordants des prêtres païens qui sacrifiaient au soleil, à la lune et aux étoiles. PR 82 1 Sous l'influence de Jézabel et de ses prêtres impies, on faisait croire au peuple que les statues érigées comme idoles étaient des divinités régissant par leur pouvoir mystique les éléments: la terre, le feu et l'eau. Les dons du ciel -- les ruisseaux bondissants, les fleuves à l'eau vivifiante, la rosée bienfaisante, les ondées rafraîchissantes et fertilisantes -- toutes ces richesses étaient dues à l'obligeance de Baal et d'Astarté, au lieu d'être attribuées à l'auteur de tout bien et de tout don parfait. Le peuple oublia que les collines et les vallées, les rivières et les sources étaient dans la main du Dieu vivant, et que c'est lui qui dirige le soleil, les nuages et toutes les forces de la nature. PR 82 2 Le Seigneur envoya au roi et au peuple, par ses fidèles messagers, des avertissements répétés; mais ces paroles de reproches demeurèrent sans effet. C'est en vain que ces messagers proclamaient que l'Eternel était le seul Dieu d'Israël, en vain qu'ils exaltaient les lois qu'il leur avait confiées. Fasciné par le spectacle grandiose qu'offrait le culte des idoles, séduit par ses rites, le peuple suivait l'exemple du roi et de sa cour. Il se laissait aller aux plaisirs enivrants et avilissants d'un culte qui s'adressait aux sens. Dans leur fol aveuglement, les Israélites préférèrent rejeter Dieu et son culte pour adorer les idoles. La lumière dispensée si généreusement s'était changée en ténèbres. L'or fin s'était terni. PR 82 3 Hélas! comme la gloire d'Israël avait disparu! Jamais auparavant, le peuple élu n'était tombé à ce point dans l'apostasie. Il y avait "quatre cent cinquante prophètes de Baal" et "quatre cents prophètes d'Astarté".17 Seule la puissance miraculeuse de Dieu pouvait préserver la nation d'une destruction totale. Israël s'était volontairement séparé de Dieu, qui, malgré tout, ne cessait de s'intéresser à tous ceux qui s'étaient égarés dans le péché. Il allait leur envoyer l'un de ses plus puissants prophètes, grâce auquel de nombreux rétrogrades reviendraient au Dieu de leurs pères. ------------------------Chapitre 9 -- Elie, le Thischbite PR 85 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 17:1-7. PR 85 1 Dans les montagnes de Galaad, à l'est du Jourdain, vivait sous le règne d'Achab un homme de foi et de prière qui devait, par son ministère intrépide, mettre un frein aux rapides progrès de l'apostasie en Israël. Bien qu'éloigné de toute ville célèbre, et ne jouissant pas d'une situation élevée, Elie le Thischbite accepta sa mission, confiant dans le Seigneur qui lui préparerait la voie et le bénirait abondamment. Ses paroles étaient empreintes de foi et de puissance, et sa vie tout entière consacrée à une oeuvre de réforme. Sa voix était la voix de celui qui crie dans le désert pour censurer le péché et s'opposer à la marée du mal qui déferlait sur le pays. Et tout en se présentant au peuple comme un réprobateur du péché, il apportait par son message le baume de Galaad aux âmes pécheresses qui désiraient être soulagées. PR 85 2 Tandis qu'il voyait le peuple d'Israël sombrer de plus en plus dans l'idolâtrie, il éprouvait à la fois une grande détresse et une profonde indignation. Dieu avait fait des choses merveilleuses pour son peuple; il l'avait délivré de l'esclavage et lui avait donné "les terres des nations ... afin qu'ils gardassent ses ordonnances et qu'ils observassent ses lois".1 Mais les bienfaits du Seigneur étaient maintenant à peu près oubliés. L'incrédulité séparait profondément le peuple élu de la source de sa force. Elie, qui considérait cette apostasie du fond de sa retraite montagnarde, était accablé de douleur. L'âme en détresse, il suppliait Dieu de mettre un terme à la méchanceté de ce peuple, jadis honoré par lui, et de le châtier si c'était nécessaire, afin de l'amener à voir sous son vrai jour son éloignement des choses célestes. L'homme de Dieu désirait ardemment que les rétrogrades se repentent avant de s'enfoncer trop profondément dans le péché, ce qui inciterait le Seigneur à les détruire complètement. PR 86 1 La prière d'Elie fut exaucée. Les appels répétés, les remontrances, les avertissements adressés au peuple d'Israël n'ayant pas réussi à l'amener à la repentance, le moment était venu où Dieu devait lui parler par le moyen du châtiment. Tant que les adorateurs de Baal déclareraient que les richesses du ciel: la rosée et la pluie, ne provenaient pas de Dieu, mais des forces de la nature, et que c'était grâce à l'énergie créatrice du soleil que la terre était fertilisée et rendue productive, la malédiction du Seigneur s'appesantirait lourdement sur le sol maudit. Les tribus apostates d'Israël devaient apprendre combien il était insensé de faire confiance à Baal en ce qui concernait les bénédictions matérielles. Si les Israélites ne revenaient pas à Dieu et ne se repentaient pas, s'ils ne reconnaissaient pas qu'il était l'auteur de toute bénédiction, alors la terre ne recevrait plus ni pluie ni rosée. PR 86 2 Elie reçut l'ordre d'annoncer à Achab le châtiment qui l'attendait. La "parole de l'Eternel lui fut adressée". Jaloux de l'honneur qu'il éprouvait pour la cause de Dieu, il n'hésita pas à obéir à l'appel divin, bien qu'il risquât sa vie de la main même du roi. Le prophète partit sur-le-champ, et dut marcher jour et nuit pour atteindre Samarie. Arrivé au palais royal, il ne sollicita pas une audience particulière; il n'attendit pas non plus d'être introduit selon le protocole. Revêtu d'une tenue grossière, portée généralement par les prophètes de cette époque, il passa devant les gardes sans être remarqué, et se tint debout pendant un moment devant le roi interdit. PR 87 1 Elie ne s'excusa pas pour sa brusque apparition. Un roi plus puissant que celui d'Israël l'avait chargé d'un message. Il leva la main vers le ciel, et déclara par le Dieu vivant que les jugements du Tout-Puissant allaient fondre sur Israël. "L'Eternel est vivant! affirma-t-il, ... il n'y aura ces années-ci ni rosée ni pluie, sinon à ma parole." PR 87 2 Seule une foi puissante dans la Parole infaillible de Dieu pouvait permettre à Elie de délivrer son message. S'il n'avait eu une confiance absolue en celui qu'il servait, il n'aurait jamais osé paraître devant Achab. En se rendant à Samarie, Elie avait longé des ruisseaux intarissables, gravi des collines verdoyantes et traversé des forêts majestueuses qui semblaient défier la sécheresse. Tout ce que l'oeil embrassait était revêtu de beauté. Le prophète aurait pu se demander comment les cours d'eau qui n'avaient jamais cessé de couler pourraient être taris, et comment les collines et les vallées verdoyantes seraient brûlées par la sécheresse. Mais le doute ne l'effleura même pas. Il était profondément convaincu que Dieu avait décidé d'humilier le royaume d'Israël apostat, et que c'était par le châtiment qu'il serait amené à la repentance. L'ordre divin avait été donné; la parole de Dieu ne pouvait faillir, et au péril de sa vie Elie s'acquitta de sa mission. PR 87 3 La nouvelle du châtiment prêt à fondre sur Israël frappa les oreilles du monarque comme un coup de tonnerre dans un ciel sans nuages. Mais avant qu'il fût revenu de sa stupeur ou ait pu formuler une réponse, Elie avait disparu aussi précipitamment qu'il avait fait son apparition, sans attendre l'effet produit par son message. Dieu le précédait pour lui faciliter le chemin. "Dirige-toi vers l'orient, ordonna-t-il au prophète, et cache-toi près du torrent de Kérith, qui est en face du Jourdain. Tu boiras de l'eau du torrent, et j'ai ordonné aux corbeaux de te nourrir là." PR 87 4 Le roi donna aussitôt des ordres pour découvrir le prophète, mais ce fut en vain. La reine Jézabel, irritée par la nouvelle que les richesses du ciel allaient être supprimées, s'empressa d'en informer les prêtres de Baal, qui maudirent avec elle le prophète et défièrent la colère du Seigneur. Mais tous leurs efforts pour découvrir celui qui avait prononcé des paroles de malédiction furent inutiles. Ils ne purent cacher aux Israélites l'annonce de ce châtiment provoqué par leur idolâtrie manifeste. La nouvelle se répandit rapidement dans tout le pays. Ce message divin éveilla les craintes de certains; mais, en général, il fut accueilli par des railleries ou avec mépris. PR 88 1 Les paroles du prophète eurent un effet immédiat. Ceux qui tout d'abord s'étaient gaussés à l'annonce de ce malheur eurent bientôt l'occasion de s'en repentir; car quelques mois plus tard, la terre ne recevant ni rosée, ni pluie, se dessécha, et la végétation se flétrit. A mesure que le temps s'écoulait, les cours d'eau qu'on n'avait jamais vus à sec commencèrent à baisser sérieusement et les sources à tarir. Malgré tout, le peuple fut exhorté par ses chefs à mettre toute sa confiance dans le pouvoir de Baal, et à considérer comme des paroles sans importance la prédiction d'Elie. Les prêtres insistèrent encore sur le fait que la pluie tombait par le pouvoir de Baal. "Ne redoutez pas le Dieu d'Elie, disaient-ils au peuple, ne tremblez pas à ses paroles. C'est Baal qui produit les moissons en leur temps et pourvoit aux besoins des hommes et des animaux." PR 88 2 Le message divin adressé à Achab donna à Jézabel, à ses prêtres et à tous les adorateurs de Baal et d'Astarté l'occasion de montrer le pouvoir de leurs dieux, et en même temps de prouver, si possible, que les paroles d'Elie étaient fausses. Des centaines de prêtres allaient s'y employer. Si, malgré la déclaration du prophète, Baal pouvait encore envoyer la rosée et la pluie, permettre aux cours d'eau de continuer à couler pour produire la végétation, alors le roi ferait bien de l'adorer et le peuple de le proclamer Dieu. PR 88 3 Décidés à maintenir les gens dans l'erreur, les prêtres de Baal continuèrent à offrir des sacrifices à leurs dieux et à les supplier jour et nuit de rafraîchir la terre. Ils s'efforcèrent d'apaiser la colère de ces dieux en leur offrant des sacrifices coûteux. Avec un zèle et une persévérance dignes d'une meilleure cause, ils assiégeaient les autels païens, et priaient ardemment pour qu'il pleuve. On entendait jour et nuit leurs cris et leurs supplications. Mais aucun nuage n'apparaissait à l'horizon pendant le jour pour tempérer les ardeurs d'un soleil brûlant. Pas de rosée, pas de pluie pour rafraîchir la terre desséchée. La parole de Dieu ne se modifiait pas en dépit de tout ce que tentaient les prêtres de Baal. PR 89 1 Une année passe, et toujours pas de pluie. La terre est desséchée comme par le feu. Les rayons ardents d'un soleil implacable font disparaître les dernières traces de végétation. Les cours d'eau tarissent, les troupeaux se lamentent et errent çà et là en détresse. Les champs, jadis prospères, sont devenus comme des déserts. C'est une vaste désolation. Les bosquets dédiés au culte des idoles ont perdu leur feuillage; les arbres de la forêt, squelettes décharnés, n'offrent plus leurs ombrages. L'air est desséché et suffocant; des tempêtes de sable aveuglent, et coupent la respiration. Les villes et les villages sont devenus des lieux désolés. La faim et la soif frappent hommes et bêtes d'une mortalité effroyable. La famine, avec son cortège d'horreurs, se répand de plus en plus. PR 89 2 Cependant, malgré toutes ces preuves de la puissance divine, les Israélites ne se repentirent pas et ne purent profiter des leçons que Dieu leur donnait. Ils ne comprirent pas que celui qui a créé la nature préside à ses lois et peut les utiliser pour en faire des instruments de bénédiction ou de destruction. Le coeur rempli d'orgueil, et fortement épris de leur faux culte, ils ne voulurent pas s'humilier sous la puissante main de Dieu; mais ils cherchèrent à attribuer à une autre cause la raison de leur affliction. PR 89 3 Jézabel refusa catégoriquement de reconnaître dans la sécheresse un châtiment de Dieu. Dans son entêtement à défier le ciel, elle entraîna presque toute la nation à rendre responsable Elie des souffrances qui l'accablaient. N'avait-il pas désapprouvé leurs formes de culte? Si seulement on pouvait arriver à se débarrasser de lui, disait-elle, la colère des dieux s'apaiserait, et les maux dont souffrait Israël prendraient fin. PR 90 1 Poussé par la reine, Achab fit entreprendre les plus actives recherches pour découvrir le lieu où se cachait le prophète. Il envoya des émissaires de tous côtés, même à l'étranger, afin de trouver celui qu'il abhorrait et redoutait en même temps. Dans son acharnement à poursuivre l'homme de Dieu, il fit attester par serment à ces royaumes qu'ils ne savaient rien sur la demeure du prophète. Mais toutes les recherches d'Achab demeurèrent vaines. Elie était à l'abri des méchancetés du roi dont les péchés avaient attiré sur le pays le châtiment d'un Dieu offensé. PR 90 2 Ne réussissant pas à découvrir Elie, Jézabel résolut de se venger en faisant mettre à mort tous les prophètes du Dieu vivant. Aucun ne devait être épargné. Ainsi périrent de nombreux serviteurs de l'Eternel. Cependant, quelques-uns échappèrent au massacre. Abdias, chef de la maison d'Achab, resté fidèle au Seigneur, "prit cent prophètes", et, au péril de sa vie, il les "cacha cinquante par cinquante dans une caverne", et il les nourrit "de pain et d'eau".2 PR 90 3 Deux années s'écoulèrent. Aucun signe de pluie n'étant apparu dans le ciel implacable, la sécheresse et la famine continuaient à dévaster le royaume. Pères et mères, incapables de soulager les souffrances de leurs enfants, assistaient impuissants à leur agonie. Et malgré tout, la nation apostate refusait toujours de s'humilier devant Dieu, et ne cessait de murmurer contre le prophète dont les paroles avaient amené une calamité semblable. Les gens se montraient incapables de discerner dans leur détresse et leur souffrance un appel à la repentance, une intervention divine pour les empêcher de franchir la limite qui les priverait du pardon divin. PR 90 4 L'apostasie d'Israël s'avérait plus effroyable encore que la famine sous ses formes les plus horribles. Dieu cherchait à débarrasser les Israélites de leurs erreurs tout en les amenant à reconnaître celui auquel ils devaient la vie et toutes choses. Il essayait de les aider à retrouver leur foi perdue, et cela au prix d'une grande affliction. PR 90 5 "Ce que je désire, est-ce que le méchant meure? dit le Seigneur, l'Eternel. N'est-ce pas qu'il change de conduite et qu'il vive? ... Rejetez loin de vous toutes les transgressions par lesquelles vous avez péché; faites-vous un coeur nouveau et un esprit nouveau. Pourquoi mourriez-vous, maison d'Israël? Car je ne désire pas la mort de celui qui meurt, dit le Seigneur, l'Eternel. Convertissez-vous donc, et vivez. ... Revenez, revenez de votre mauvaise voie; et pourquoi mourriez-vous, maison d'Israël?"3 PR 91 1 Le Seigneur avait envoyé ses messagers aux Israélites pour les supplier de revenir à lui. S'ils avaient écouté ces appels, s'ils s'étaient détournés du culte de Baal pour retourner au Dieu vivant, le message d'Elie n'aurait jamais été délivré. Mais les avertissements qui auraient dû leur apporter une "odeur de vie donnant la vie", ne produisirent qu'une "odeur de mort donnant la mort". Blessés dans leur orgueil, irrités contre les prophètes, les Israélites nourrissaient maintenant une haine farouche contre Elie. S'il avait pu tomber entre leurs mains, avec quelle joie ils l'auraient livré à la reine Jézabel! Comme si, imposant silence à sa voix, ils pouvaient empêcher l'accomplissement de la prophétie! En présence de la calamité, ils persévéraient dans leur endurcissement. Ils aggravaient ainsi le mal qui avait attiré sur la nation le châtiment de Dieu. PR 91 2 Le seul remède à la situation était de se détourner des péchés qui avaient provoqué le châtiment du Tout-Puissant, et de revenir à lui de tout son coeur. Car cette assurance leur avait été donnée: "Quand je fermerai le ciel et qu'il n'y aura point de pluie, quand j'ordonnerai aux sauterelles de consumer le pays, quand j'enverrai la peste parmi mon peuple; si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s'humilie, prie, et cherche ma face, et s'il se détourne de ses mauvaises voies, je l'exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays."4 C'était pour aboutir à cette victoire triomphale que le Seigneur persistait à retenir la rosée et la pluie jusqu'à ce qu'une réforme radicale s'opérât en Israël. ------------------------Chapitre 10 -- Sévères paroles de reproche PR 93 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 17:8-24; 18:1-19. PR 93 1 Elie demeura caché pendant un certain temps dans les montagnes, près du torrent de Kérith, et il y fut miraculeusement nourri. Puis, comme la sécheresse persistait et que le torrent était à sec, le Seigneur ordonna à son serviteur de se retirer dans un pays païen. "Lève-toi, lui dit-il, va à Sarepta, qui appartient à Sidon, et demeure là. Voici, j'y ai ordonné à une femme veuve de te nourrir." PR 93 2 Cette femme n'était pas Israélite. Elle n'avait jamais joui des privilèges et des bénédictions du peuple élu; mais elle croyait au vrai Dieu, et marchait dans la lumière qui avait éclairé son chemin. Or, maintenant que le prophète n'était plus en sécurité en Israël, le Seigneur l'envoyait vers elle afin qu'il trouvât un asile sous son toit. "Il se leva, et il alla à Sarepta. Comme il arrivait à l'entrée de la ville, voici, il y avait là une femme veuve qui ramassait du bois. Il l'appela, et dit: Va me chercher, je te prie, un peu d'eau dans un vase, afin que je boive. Et elle alla en chercher. Il l'appela de nouveau, et dit: Apporte-moi, je te prie, un morceau de pain dans ta main." PR 94 1 Dans ce foyer en proie au dénuement, la famine se faisait sentir cruellement, et la maigre pitance de la veuve semblait être sur le point de s'achever. La venue d'Elie, le jour même où elle se demandait avec anxiété si elle ne devait pas abandonner la lutte, fit subir une très grande épreuve à la foi de cette pauvre femme, qui comptait sur la puissance du Dieu vivant pour subvenir à ses besoins. Mais même dans sa cruelle misère, elle manifesta sa foi en accédant à la requête de l'étranger qui lui demandait de partager son dernier morceau de pain avec lui. PR 94 2 A la demande d'Elie pour obtenir de la nourriture et de la boisson, la veuve répondit: "L'Eternel, ton Dieu, est vivant! Je n'ai rien de cuit, je n'ai qu'une poignée de farine dans un pot et un peu d'huile dans une cruche. Et voici, je ramasse deux morceaux de bois, puis je rentrerai et je préparerai cela pour moi et pour mon fils; nous mangerons, après quoi nous mourrons." Elie lui dit: "Ne crains point, rentre, fais comme tu as dit. Seulement, prépare-moi d'abord avec cela un petit gâteau, et tu me l'apporteras; tu en feras ensuite pour toi et pour ton fils. Car ainsi parle l'Eternel, le Dieu d'Israël: La farine qui est dans le pot ne manquera point et l'huile qui est dans la cruche ne diminuera point, jusqu'au jour où l'Eternel fera tomber de la pluie sur la face du sol." PR 94 3 Aucune foi ne pouvait être mise à pareille épreuve. Jusqu'alors la veuve avait traité les étrangers avec bonté et largesse; maintenant, sans se soucier de la souffrance que ce geste va entraîner pour elle-même et pour son fils, elle se confie au Dieu d'Israël qui subvient à tous les besoins, et elle exerce généreusement l'hospitalité en agissant "selon la parole que l'Eternel avait prononcée par Elie". PR 94 4 Quelle merveilleuse hospitalité, en effet, manifesta au prophète la femme phénicienne, et comme sa foi et sa générosité furent récompensées! "Pendant longtemps elle eut de quoi manger, elle et sa famille, aussi bien qu'Elie. La farine qui était dans le pot ne manqua point, et l'huile qui était dans la cruche ne diminua point, selon la parole que l'Eternel avait prononcée par Elie." PR 95 1 "Après ces choses, le fils de la femme, maîtresse de la maison, devint malade, et sa maladie fut si violente qu'il ne resta plus en lui de respiration. Cette femme dit alors à Elie: Qu'y a-t-il entre moi et toi, homme de Dieu? Es-tu venu chez moi pour rappeler le souvenir de mon iniquité, et pour faire mourir mon fils? PR 95 2 "Il lui répondit: Donne-moi ton fils. Et il le prit du sein de la femme, le monta dans la chambre haute où il demeurait, et le coucha sur son lit. ... L'Eternel écouta la voix d'Elie, et l'âme de l'enfant revint au-dedans de lui, et il fut rendu à la vie. PR 95 3 "Elie prit l'enfant, le descendit de la chambre haute dans la maison et le donna à sa mère. ... Et la femme dit à Elie: Je reconnais maintenant que tu es un homme de Dieu, et que la parole de l'Eternel dans ta bouche est vérité." PR 95 4 La veuve de Sarepta partagea son morceau de pain avec Elie; en retour, sa vie et celle de son fils furent épargnées. Le Seigneur a promis de riches bénédictions à tous ceux qui, au moment de l'épreuve et de l'affliction, offrent leur sympathie et leur soutien à plus défavorisés qu'eux. Or, il n'a pas changé; sa puissance n'est pas moins forte aujourd'hui qu'aux jours d'Elie. La promesse du Sauveur: "Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète recevra une récompense de prophète",1 est aussi certaine que lorsqu'elle fut faite. PR 95 5 "N'oubliez pas l'hospitalité; car, en l'exerçant, quelques-uns ont logé des anges, sans le savoir."2 Ces paroles n'ont nullement perdu de leur force au cours des siècles. Notre divin Père continue à placer sur la route de ses enfants des occasions qui sont des bénédictions déguisées. Ceux qui en profitent se réservent de grandes joies. "Si tu donnes ta propre subsistance à celui qui a faim, si tu rassasies l'âme indigente, ta lumière se lèvera sur l'obscurité. Et tes ténèbres seront comme le midi. L'Eternel sera toujours ton guide, il rassasiera ton âme dans les lieux arides, et il redonnera de la vigueur à tes membres; tu seras comme un jardin arrosé, comme une source dont les eaux ne tarissent pas."3 PR 96 1 Le Christ dit aujourd'hui à ses fidèles serviteurs: "Celui qui vous reçoit me reçoit, et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m'a envoyé."4 Tout acte de bonté manifesté en son nom ne perdra pas sa récompense. Le Seigneur comprendra dans une même reconnaissance les plus humbles et les plus faibles de la famille de Dieu. "Quiconque, a-t-il dit, donnera seulement un verre d'eau froide à l'un de ces petits (à tous ceux qui sont comme des enfants dans la foi et la connaissance du Christ) parce qu'il est mon disciple, je vous le dis en vérité, il ne perdra point sa récompense."4 PR 96 2 Pendant les longues années de sécheresse et de famine, Elie priait ardemment pour que les Israélites se détournent de l'idolâtrie et reviennent au Dieu vivant. Et alors que la main du Seigneur s'appesantissait sur la terre, le prophète attendait avec impatience ce revirement. En pensant aux souffrances et au dénuement de ses compatriotes, il éprouvait une vive douleur, et il aurait voulu pouvoir opérer une réforme rapide parmi les idolâtres. Mais Dieu réalisait lui-même son plan, et son serviteur n'avait rien d'autre à faire que de persévérer avec foi dans la prière, et à attendre le moment où il entrerait résolument en action. PR 96 3 L'apostasie qui sévissait à l'époque d'Achab était le résultat de nombreuses années de péché. Peu à peu, Israël s'était détourné du droit sentier. Générations après générations refusaient de suivre la voie du bien, et la grande majorité du peuple se livrait aux puissances des ténèbres. PR 96 4 Un siècle environ s'était écoulé depuis que, sous le règne de David, les Israélites avaient chanté des hymnes de louange au Très-Haut, en reconnaissance de leur dépendance totale envers celui qui les comblait de ses grâces jour après jour. Notez les paroles d'adoration qu'ils faisaient alors monter vers le ciel: PR 96 5 Dieu de notre salut ... Tu remplis d'allégresse l'orient et l'occident. Tu visites la terre et tu lui donnes l'abondance, Tu la combles de richesses; Le ruisseau de Dieu est plein d'eau; Tu prépares le blé, quand tu la fertilises ainsi. En arrosant ses sillons, en aplanissant ses mottes, Tu la détrempes par des pluies, tu bénis son germe. Tu couronnes l'année de tes biens, Et tes pas versent l'abondance; Les plaines du désert sont abreuvées, Et les collines sont ceintes d'allégresse; Les pâturages se couvrent de brebis, Et les vallées se revêtent de froment. Les cris de joie et les chants retentissent. PR 97 1 Les Israélites avaient alors reconnu que l'Eternel est celui qui a "posé la terre sur ses fondements". Ils avaient exprimé leur foi par ce chant: PR 97 2 Tu l'avais couverte [la terre] de l'abîme comme d'un vêtement, Les eaux s'arrêtaient sur les montagnes; Elles ont fui devant ta menace, Elles se sont précipitées à la voix de ton tonnerre. Des montagnes se sont élevées, des vallées se sont abaissées, Au lieu que tu leur avais fixé. Tu as posé une limite que les eaux ne doivent point franchir, Afin qu'elles ne reviennent plus couvrir la terre. PR 97 3 C'est par la souveraine puissance de l'Eternel que les éléments de la nature sur la terre, dans la mer et dans le ciel sont maintenus dans leurs limites. Ces éléments, Dieu les emploie pour le bonheur de ses créatures. "Son bon trésor" est généreusement utilisé "pour envoyer la pluie en son temps et pour bénir tout le travail des mains des hommes".7 PR 97 4 [Dieu] conduit les sources dans des torrents, Qui coulent entre les montagnes. Elles abreuvent tous les animaux des champs; Les ânes sauvages y étanchent leur soif. Les oiseaux du ciel habitent sur leurs bords, Et font résonner leur voix parmi les rameaux. De sa haute demeure, il arrose les montagnes; La terre est rassasiée du fruit de tes oeuvres. Il fait germer l'herbe pour le bétail, Et les plantes pour les besoins de l'homme, Afin que la terre produise de la nourriture, Le vin qui réjouit le coeur de l'homme, Et fait plus que l'huile resplendir son visage, Et le pain qui soutient le coeur de l'homme. ... PR 98 1 Que tes oeuvres sont en grand nombre, ô Eternel! Tu les as toutes faites avec sagesse. La terre est remplie de tes biens. Voici la grande et vaste mer: Là se meuvent sans nombre Des animaux petits et grands. ... Tous ces animaux espèrent en toi, Pour que tu leur donnes la nourriture en son temps. Tu la leur donnes, et ils la recueillent; Tu ouvres ta main, et ils se rassasient de biens. PR 98 2 Les Israélites avaient eu d'innombrables occasions de se réjouir. Dieu leur avait donné en partage une terre où coulaient le lait et le miel. Alors qu'ils erraient dans le désert, le Seigneur leur avait promis de les conduire dans un pays où ils ne souffriraient jamais de la sécheresse. PR 98 3 "Le pays dont tu vas entrer en possession, avait-il dit à Israël, n'est pas comme le pays d'Egypte, d'où vous êtes sortis, où tu jetais dans les champs ta semence et les arrosais avec ton pied comme un jardin potager. Le pays que vous allez posséder est un pays de montagnes et de vallées, et qui boit les eaux de la pluie du ciel; c'est un pays dont l'Eternel, ton Dieu, prend soin, et sur lequel l'Eternel, ton Dieu, a continuellement les yeux, du commencement à la fin de l'année." PR 98 4 Cette promesse d'une abondante pluie avait été donnée à condition qu'il y ait obéissance. "Si vous obéissez à mes commandements que je vous prescris aujourd'hui, si vous aimez l'Eternel, votre Dieu, avait déclaré le Seigneur, et si vous le servez de tout votre coeur et de toute votre âme, je donnerai à votre pays la pluie en son temps, la pluie de la première et de l'arrière-saison, et tu recueilleras ton blé, ton moût et ton huile; je mettrai aussi dans tes champs de l'herbe pour ton bétail, et tu mangeras et te rassasieras." PR 98 5 Dieu avait donné à son peuple cet avertissement: "Gardez-vous de laisser séduire votre coeur, de vous détourner, de servir d'autres dieux et de vous prosterner devant eux. La colère de l'Eternel s'enflammerait alors contre vous; il fermerait les cieux, et il n'y aurait point de pluie; la terre ne donnerait plus ses produits, et vous péririez promptement dans le bon pays que l'Eternel vous donne."9 PR 99 1 "Mais si tu n'obéis point à la voix de l'Eternel, ton Dieu, si tu n'observes pas et ne mets pas en pratique tous ses commandements et toutes ses lois que je te prescris aujourd'hui, voici toutes les malédictions qui viendront sur toi et qui seront ton partage: ... Le ciel sur ta tête sera d'airain, et la terre sous toi sera de fer. L'Eternel enverra pour pluie à ton pays de la poussière et de la poudre; il en descendra du ciel sur toi jusqu'à ce que tu sois détruit."10 PR 99 2 Dieu donnait, entre autres, à Israël ce conseil précieux: "Mettez dans votre coeur et dans votre âme ces paroles que je vous dis." Et il lui ordonnait: "Vous les lierez comme un signe sur vos mains, et elles seront comme des fronteaux entre vos yeux. Vous les enseignerez à vos enfants, et vous leur en parlerez quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras."11 Ces commandements étaient clairs. Et cependant, alors que les siècles s'écoulaient, que les générations se succédaient et perdaient de vue les richesses accordées pour leur bien spirituel, les influences désastreuses de l'apostasie menaçaient de renverser rapidement toutes les barrières dressées par la grâce divine. PR 99 3 Dieu dut alors envoyer à son peuple le plus terrible des châtiments. La prédiction d'Elie se réalisait dans toute son horreur. Pendant trois ans, le messager de malheur fut recherché dans toutes les villes, dans tous les pays. A l'enquête d'Achab, certains rois jurèrent sur leur honneur que l'étrange prophète n'avait pu être découvert dans leur royaume. Et cependant les recherches se poursuivaient, car Jézabel et les prophètes de Baal vouaient à Elie une haine mortelle, et ils étaient bien décidés à ne s'épargner aucune peine pour le faire tomber en leur pouvoir. Et la pluie faisait toujours défaut. PR 99 4 "Bien des jours s'écoulèrent", et la parole de l'Eternel fut adressée à Elie: "Va, lui fut-il dit, présente-toi devant Achab, et je ferai tomber de la pluie sur la face du sol." Obéissant à cet ordre, "Elie alla, pour se présenter devant Achab". Au moment où le prophète se mettait en route pour Samarie, le roi avait proposé à Abdias, chef de sa maison, de faire rechercher toutes les sources et tous les torrents pour y trouver de l'herbe, afin de sauver les animaux. Les effets de la sécheresse se faisaient cruellement sentir, même à la cour royale. Achab, sérieusement inquiet au sujet de l'avenir de sa maison, décida de se joindre en personne à son serviteur pour découvrir quelque endroit favorisé où se trouverait de l'herbe. "Ils se partagèrent le pays pour le parcourir; Achab alla seul par un chemin, et Abdias alla seul par un autre chemin." PR 100 1 "Comme Abdias était en route, voici, Elie le rencontra. Abdias, l'ayant reconnu, tomba sur son visage, et dit: Est-ce toi, mon seigneur Elie?" PR 100 2 Malgré l'apostasie qui l'entourait de toute part, Abdias était toujours resté fidèle au Seigneur. Son maître, le roi, avait été incapable de le détourner du Dieu vivant. Elie allait maintenant l'honorer d'une mission. "Va, lui dit-il, dis à ton maître: Voici Elie!" PR 100 3 Epouvanté, Abdias s'écria: "Quel péché ai-je commis, pour que tu livres ton serviteur entre les mains d'Achab, qui me fera mourir?" Aller rapporter les paroles d'Elie à Achab, c'était aller au-devant, en effet, d'une mort certaine. "L'Eternel est vivant! dit-il au prophète, il n'est ni nation ni royaume où mon maître n'ait envoyé pour te chercher; et quand on disait que tu n'y étais pas, il faisait jurer le royaume et la nation que l'on ne t'avait pas trouvé. Et maintenant tu dis: Va, dis à ton maître: Voici Elie! Puis, lorsque je t'aurai quitté, l'esprit de l'Eternel te transportera je ne sais où; et j'irai informer Achab, qui ne te trouvera pas, et qui me tuera." PR 100 4 Abdias supplia le prophète de ne pas insister. "Cependant, dit-il, ton serviteur craint l'Eternel dès sa jeunesse. N'a-t-on pas dit à mon seigneur ce que j'ai fait quand Jézabel tua les prophètes de l'Eternel? J'ai caché cent prophètes de l'Eternel, cinquante par cinquante dans une caverne, et je les ai nourris de pain et d'eau. Et maintenant tu dis: Va, dis à ton maître: Voici Elie! Il me tuera." PR 101 1 Elie jura solennellement qu'il ne parlait pas en vain. Il lui dit: "L'Eternel est vivant! Aujourd'hui je me présenterai devant Achab." Ainsi rassuré, "Abdias, étant allé à la rencontre d'Achab, l'informa de la chose". PR 101 2 Etonné et terrorisé, le roi écouta ce que lui faisait dire l'homme qu'il redoutait et haïssait, et qu'il avait fait rechercher sans relâche. Il savait bien que le prophète ne mettrait pas sa vie en danger pour le seul plaisir de le rencontrer. Se pourrait-il qu'Elie profère une autre malédiction contre Israël? Les craintes du roi redoublèrent. Il se souvenait de la main sèche de Jéroboam. Il ne pouvait se dispenser de rencontrer l'homme de Dieu, ni lever la main contre lui. Accompagné d'un corps de garde, il alla donc tout tremblant au-devant du prophète. PR 101 3 Les voici tous les deux en face l'un de l'autre. Bien que nourrissant envers Elie une haine farouche, en sa présence Achab semble anéanti, désarmé. Aux premières paroles qu'il balbutie: "Est-ce toi, qui jettes le trouble en Israël?" il montre inconsciemment les sentiments réels de son coeur. Achab n'ignore pas que c'est par la parole de l'Eternel que le ciel est devenu comme de l'airain, et cependant il cherche à lancer un blâme au prophète pour le lourd châtiment qui pèse sur le pays. PR 101 4 Il est propre à la nature du méchant de rendre les messagers de Dieu responsables des calamités qui résultent de la transgression des lois divines. Ceux qui se placent sous le pouvoir de Satan sont incapables de voir les choses comme Dieu les voit. Lorsque la vérité leur est présentée, ils s'indignent à la pensée que l'on puisse leur adresser un reproche. Aveuglés par le péché, ils refusent de se repentir; ils sont persuadés que les serviteurs de Dieu se sont tournés contre eux et sont passibles des pires châtiments. PR 101 5 Parfaitement conscient de son innocence, Elie se dresse devant Achab. Il n'essaie ni de s'excuser, ni de flatter le roi, pas plus que de se soustraire à la colère du monarque en lui annonçant la bonne nouvelle que la sécheresse va prendre fin. Il n'a à se défendre de quoi que ce soit. A la fois indigné et jaloux de l'honneur de Dieu, il rejette l'accusation sur Achab, et déclare courageusement au roi que ce sont ses péchés qui ont attiré sur Israël cette terrible calamité. "Je ne trouble point Israël, affirme-t-il; c'est toi, au contraire, et la maison de ton père, puisque vous avez abandonné les commandements de l'Eternel et que tu es allé après les Baals." PR 102 1 De nos jours, la voix réprobatrice d'en haut doit encore se faire entendre aux chrétiens, car de graves péchés les ont séparés de Dieu. L'incrédulité devient de plus en plus à la mode. "Nous ne voulons pas que cet homme règne sur nous",12 s'écrient des milliers de personnes, en parlant de Jésus. Les sermons agréables si souvent prêchés ne laissent aucune influence durable; la trompette omet de donner le signal d'alarme. Les hommes n'ont pas le coeur touché par les vérités claires et incisives de la Parole de Dieu. PR 102 2 Si certains chrétiens de profession exprimaient ouvertement leurs véritables sentiments, ils diraient: Est-il vraiment nécessaire de parler si franchement? Ils pourraient tout aussi bien demander: Etait-il nécessaire que Jean-Baptiste dise aux pharisiens: "Races de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir?"13 Pourquoi donc provoquer le courroux d'Hérodiade en déclarant à Hérode qu'il ne lui est pas permis de vivre avec la femme de son frère? Le précurseur du Christ risqua sa vie pour avoir parlé trop franchement. Pourquoi ne pas avoir atermoyé plutôt que de s'attirer la colère de ceux qui vivaient dans le péché? PR 102 3 Ainsi ont raisonné tous ceux qui auraient dû se dresser comme gardiens de la loi divine, à partir du moment où la prudence a remplacé la fidélité et où le péché a été toléré. Quand entendrons-nous à nouveau dans l'Eglise résonner les messages de reproches? PR 102 4 "Tu es cet homme-là!"14 Ces paroles sur lesquelles on ne pouvait se méprendre furent prononcées par Nathan lorsqu'il s'adressait à David. On les entend bien rarement aujourd'hui du haut de la chaire; rarement aussi les lit-on dans les journaux. Si elles étaient répétées plus fréquemment, nous verrions alors la puissance de Dieu se manifester parmi les hommes. Les serviteurs de l'Eternel ne se plaindraient plus de travailler en vain, s'ils se repentaient de leur tendance à approuver le mal et de leur désir de plaire aux hommes, attitude qui conduit à la suppression de la vérité. PR 103 1 Les messagers du Seigneur qui cherchent à plaire aux hommes, et s'écrient: "Paix, paix, alors qu'il n'y a point de paix", devraient humilier leurs coeurs devant Dieu. Qu'ils demandent pardon pour leur hypocrisie et leur lâcheté. Ce n'est pas l'amour du prochain qui leur fait édulcorer leur message, mais plutôt leur propre satisfaction et leur tranquillité personnelle. Le véritable amour cherche d'abord à honorer le Seigneur, puis à sauver les âmes. Ceux qui possèdent cet amour n'éluderont pas la vérité pour éviter les conséquences désagréables des paroles trop franches qu'ils ont prononcées. En face des âmes qui se perdent, les ministres de la Parole ne doivent pas penser à eux-mêmes, mais faire connaître aux pécheurs le message qui leur a été confié, se refusant à excuser ou à amoindrir le mal. PR 103 2 Si seulement tous les serviteurs de Dieu se rendaient compte du caractère sacré de leur tâche! Comme Elie, ils feraient alors preuve de courage. En tant que messagers du ciel, ils assument de terribles responsabilités. Il leur faut "reprendre, censurer, exhorter, avec toute douceur".15 A la place du Christ, qu'ils gèrent comme de bons dispensateurs les mystères d'en haut, encouragent ceux qui sont fidèles, avertissent les infidèles. Les convenances mondaines ne sauraient les influencer. Qu'ils ne se détournent jamais du chemin tracé par Jésus. Qu'ils avancent avec foi, et se souviennent qu'ils sont environnés d'une nuée de témoins. Qu'ils ne parlent pas de leur propre chef, mais délivrent le message que leur a confié celui dont la puissance est supérieure à celle de tous les potentats de la terre. Ce message doit toujours être: "Ainsi a dit l'Eternel!" PR 103 3 Dieu réclame des hommes comme Elie, Nathan, Jean-Baptiste -- des hommes qui proclament son message sans tenir compte des conséquences qui en résultent -- des hommes qui répandent courageusement la vérité, bien que cela entraîne le sacrifice de tout ce qu'ils possèdent. PR 103 4 Dieu ne peut employer des hommes qui, au moment du danger, alors que leur influence, leur force, leur courage sont indispensables, craignent de prendre position pour ce qui est juste. Il réclame des hommes qui luttent fidèlement contre le mal, "contre les principautés et les puissances, contre les princes des ténèbres de ce monde, contre les esprits malins qui sont dans les lieux célestes". C'est à ceux-là qu'il adressera un jour ces paroles: "C'est bien, bon et fidèle serviteur; ... entre dans la joie de ton maître."16 ------------------------Chapitre 11 -- Le mont Carmel PR 105 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 18:19-40. PR 105 1 Debout devant le roi Achab, Elie commanda qu'on fît rassembler autour de lui, sur le mont Carmel, tous les prophètes de Baal et d'Astarté. "Fais maintenant rassembler, ordonna-t-il au monarque, tout Israël auprès de moi, à la montagne du Carmel, et aussi les quatre cent cinquante prophètes de Baal et les quatre cents prophètes d'Astarté qui mangent à la table de Jézabel." PR 105 2 L'ordre était donné par quelqu'un qui semblait être en présence de Dieu; c'est pourquoi Achab obéit sur-le-champ, comme si le prophète était le monarque et le roi son sujet. Des messagers rapides furent envoyés dans toutes les parties du royaume pour inviter le peuple à se réunir auprès d'Elie et des prophètes de Baal et d'Astarté. Dans chaque ville, chaque village, on se prépara à cette rencontre dont le moment était fixé. En s'approchant du lieu du rendez-vous, d'aucuns sentaient d'étranges sentiments envahir leur coeur. Quelque chose d'extraordinaire était sur le point de se produire, sinon on ne les aurait pas convoqués sur le Carmel. Quel nouveau malheur allait s'abattre encore sur le pays? PR 106 1 Avant la sécheresse, le mont Carmel offrait un spectacle de toute beauté. Des cours d'eau, alimentés par des sources intarissables, dévalaient ses pentes fertiles, rehaussées de fleurs éclatantes et de bosquets verdoyants. Mais maintenant ce spectacle magnifique n'offre plus que langueur sous le poids accablant de la malédiction. Les autels élevés à Baal et à Astarté se dressent dans des bosquets effeuillés. Mais sur l'un des points culminants de la chaîne des crêtes, se trouve l'autel renversé de l'Eternel. PR 106 2 La chaîne du Carmel dominait une immense plaine. Ses hauteurs se découvraient d'une grande partie du royaume d'Israël. Au pied du Carmel, des points favorables permettaient d'apercevoir tout ce qui se passait au sommet. C'est là que le Seigneur avait été déshonoré d'une manière si frappante par le culte idolâtre célébré à l'abri des pentes boisées du mont. C'est ce lieu que choisit Elie comme étant le plus en évidence pour faire éclater la puissance de Dieu et venger l'honneur de son nom. PR 106 3 De bonne heure, le matin du jour convenu, les foules apostates d'Israël s'assemblèrent près du sommet du Carmel, dans une attente fébrile. Les prophètes de Jézabel avançaient en grande pompe. Le monarque apparut alors dans son faste royal, marchant en tête des prêtres, et tous les idolâtres le saluèrent de leurs cris. Mais un sentiment de crainte oppressait le coeur des prophètes en pensant à la parole d'Elie qui avait prédit la sécheresse pendant trois ans et demi. Ils sont certains qu'une crise redoutable va se produire. Les dieux qu'ils servent ont été incapables de prouver qu'Elie était un faux prophète. Ils sont restés étrangement indifférents à leurs cris frénétiques, à leurs prières, à leurs larmes, à leur humiliation, à leurs cérémonies révoltantes, à leurs sacrifices coûteux et continuels. PR 106 4 Face au roi, aux faux prophètes, et entouré par une foule d'Israélites, Elie apparaît alors. C'est le seul de sa nation qui ose se dresser pour venger l'honneur de son Dieu. Celui que tout le royaume a accablé du poids de la malédiction se trouve maintenant devant cette assemblée, sans défense apparente, en présence du monarque d'Israël, des prophètes de Baal, des hommes de guerre. Mais il n'est pas seul. Au-dessus et autour de lui se déploient les armées protectrices du ciel -- les anges qui excellent en force. PR 107 1 Sans honte, sans frayeur, le prophète se tient devant la foule, pleinement conscient de la grandeur de la mission qui lui a été confiée pour exécuter l'ordre divin. Son visage est illuminé d'une solennité imposante. Le peuple attend impatiemment qu'il parle. Les regards d'Elie se portent d'abord vers l'autel renversé de l'Eternel; puis d'une voix claire, dont les accents résonnent comme une trompette, il s'adresse à la multitude, et s'écrie: "Jusques à quand clocherez-vous des deux côtés? Si l'Eternel est Dieu, allez après lui; si c'est Baal, allez après lui!" PR 107 2 Le peuple ne répondit pas un mot. Pas une seule personne de cette vaste assemblée n'osa affirmer son attachement au Seigneur. L'ignorance et l'erreur s'étaient étendues sur Israël, tel un sombre nuage. Cette apostasie n'a pas fondu d'un seul coup sur le peuple, mais graduellement, alors qu'il s'obstinait à rester rebelle aux paroles d'avertissement et de reproche que le Seigneur lui adressait. Tout écart du droit sentier, tout refus à la repentance avait encore accru la culpabilité d'Israël et l'avait éloigné du ciel. Maintenant même, dans la crise que traverse la nation, le peuple s'obstine à refuser de prendre position pour Dieu. PR 107 3 Le Seigneur a de l'aversion pour l'indifférence et l'infidélité manifestées au cours des crises que traverse son oeuvre. Tout l'univers s'intéresse d'une manière inexprimable aux dernières scènes de la grande lutte entre le bien et le mal. Le peuple de Dieu approche des rivages du monde éternel; que peut-il y avoir de plus important pour lui que de rester fidèle au Très-Haut? A travers tous les âges, le Seigneur a eu ses héros spirituels, et il en possède encore aujourd'hui -- des héros qui, tels Joseph, Elie, Daniel, ne craignent pas de dire qu'ils font partie du peuple élu. Des bénédictions spéciales sont accordées aux hommes d'action, qui ne dévient jamais du sentier du devoir, et qui s'écrient avec une énergie toute divine: "A moi ceux qui sont pour l'Eternel!"1 Ces hommes ne se contentent pas de prononcer ces paroles; ils exigent aussi de ceux qui veulent s'identifier au peuple de Dieu qu'ils avancent résolument et montrent clairement leur attachement au Roi des rois et au Seigneur des seigneurs. De tels hommes subordonnent leur volonté et leurs plans à la loi divine. Par amour pour le Seigneur, ils ne font aucun cas de leur vie. Tout ce qu'ils désirent, c'est de saisir la lumière de la Parole de Dieu et de la faire resplendir dans le monde. Fidèles à Dieu, telle est leur devise. PR 108 1 Tandis que sur le Carmel Israël doute et hésite, la voix d'Elie rompt à nouveau le silence: "Je suis resté seul des prophètes de l'Eternel, et il y a quatre cent cinquante prophètes de Baal. Que l'on nous donne deux taureaux; qu'ils choisissent pour eux l'un des taureaux, qu'ils le coupent par morceaux, et qu'ils le placent sur le bois, sans y mettre le feu; et moi, je préparerai l'autre taureau, et je le placerai sur le bois, sans y mettre le feu. Puis invoquez le nom de votre dieu; et moi, j'invoquerai le nom de l'Eternel. Le dieu qui répondra par le feu, c'est celui-là qui sera Dieu." PR 108 2 La proposition d'Elie est si raisonnable que personne ne peut la refuser. Le peuple entier a même le courage de répondre: "C'est bien!" Les prophètes de Baal n'osent pas protester. S'adressant à eux, Elie leur dit: "Choisissez pour vous l'un des taureaux, préparez-le les premiers, car vous êtes les plus nombreux, et invoquez le nom de votre dieu; mais ne mettez pas le feu." PR 108 3 L'air cynique et arrogant, les faux prophètes dont le coeur souillé déborde d'effroi préparent leur autel, et placent leur victime sur le bois. Puis ils s'adonnent à leurs incantations. Leurs cris perçants retentissent à travers les forêts et les collines environnantes, tandis qu'ils invoquent le nom de leur dieu, et s'écrient: "Baal, réponds-nous!" Ils s'assemblent autour de leur autel, se mettent à sauter, à gesticuler, à hurler; ils s'arrachent les cheveux, se font des incisions, et implorent leur dieu de leur venir en aide. PR 108 4 La matinée s'écoule, l'heure de midi arrive, et aucun signe évident ne se produit montrant que Baal entend les cris de ses prophètes abusés. Nulle voix ne se fait entendre en réponse à leurs prières frénétiques. Le sacrifice n'est pas consumé. PR 109 1 Et tandis qu'ils se livrent à leurs dévotions extravagantes, les plus astucieux essaient d'imaginer un stratagème pour allumer le feu sur l'autel, afin de faire croire au peuple que ce feu vient directement de Baal. Mais Elie épie chacun de leurs gestes; et les prêtres, espérant contre toute espérance, continuent à se livrer à leurs pratiques insensées. PR 109 2 "A midi, Elie se moqua d'eux, et dit: Criez à haute voix, puisqu'il est dieu; il pense à quelque chose, ou il est occupé, ou il est en voyage; peut-être qu'il dort, et il se réveillera. Et ils crièrent à haute voix, et ils se firent, selon leur coutume, des incisions avec des épées et avec des lances, jusqu'à ce que le sang coulât sur eux. Lorsque midi fut passé, ils prophétisèrent jusqu'au moment de la présentation de l'offrande. Mais il n'y eut ni voix, ni réponse, ni signe d'attention." PR 109 3 Avec quelle joie Satan ne serait-il pas venu au secours de ceux qu'il trompait et qui se consacraient à son service! Avec quelle joie n'aurait-il pas fait jaillir l'éclair qui aurait consumé le sacrifice! Mais Dieu a prescrit des limites à l'ennemi de nos âmes; il a restreint son pouvoir, et tous ses desseins ne sauraient communiquer une seule étincelle sur l'autel de Baal. PR 109 4 La voix éraillée pour avoir trop crié, les habits souillés du sang des blessures qu'ils s'étaient infligées, les prophètes entrent alors dans un violent désespoir. Avec une frénésie accrue, ils entremêlent maintenant leurs prières aux terribles imprécations qu'ils adressent au dieu solaire. Et Elie continue à les épier attentivement, car il sait que si par quelque subterfuge les prêtres réussissaient à allumer le bois de l'autel, il serait immédiatement déchiqueté. PR 109 5 Le soir approche. Les prophètes de Baal sont exténués, défaillants, déconcertés. L'un suggère une chose, l'autre une chose différente, jusqu'à ce qu'enfin ils abandonnent la partie. Leurs cris perçants, leurs malédictions ne résonnent plus sur le Carmel. Désespérés, ils se retirent du combat. PR 109 6 Tout au long du jour, le peuple avait assisté aux démonstrations des prêtres bafoués. Il les avait vus sauter sauvagement autour de l'autel, comme s'ils avaient voulu saisir les rayons du soleil pour servir leur dessein. Il avait regardé, horrifié, les mutilations que ces prêtres s'étaient infligées, et il avait eu l'occasion de réfléchir sur les folies de l'idolâtrie. Nombreux étaient ceux qui, parmi l'assistance, étaient fatigués des exhibitions démoniaques dont ils avaient été témoins, et ils attendaient maintenant avec un intérêt croissant les agissements d'Elie. PR 110 1 A l'heure du sacrifice du soir, Elie dit au peuple: "Approchez-vous de moi!" Et, tandis qu'on s'approche de lui en tremblant, l'homme de Dieu rétablit l'autel où jadis les hommes venaient adorer le Seigneur. Pour le prophète, ce monceau de ruines a plus de prix que tous les autels somptueux du paganisme. PR 110 2 En relevant cet autel, Elie manifestait le respect qu'il éprouvait pour l'alliance contractée par Dieu avec Israël, lorsque celui-ci avait traversé le Jourdain pour entrer dans le pays de la promesse. "Il prit douze pierres, d'après le nombre des tribus des fils de Jacob ... et il bâtit avec ces pierres un autel au nom de l'Eternel." PR 110 3 Confondus et harassés par leurs vains efforts, les prêtres de Baal se demandent ce qu'Elie va faire. Ils vouent une haine farouche au prophète qui les a soumis à une épreuve dont les effets démontrent la faiblesse et l'impuissance de leurs dieux, et cependant ils redoutent son pouvoir. Le peuple, qui partage les mêmes sentiments, l'observe aussi tandis qu'il prépare son sacrifice. L'attitude calme de l'homme de Dieu contraste vivement avec la frénésie démoniaque et insensée des adorateurs de Baal. PR 110 4 Une fois l'autel reconstruit, le prophète creuse tout autour un fossé; puis il arrange le bois, prépare le taureau et le place sur l'autel. Il demande alors au peuple de verser de l'eau sur l'holocauste et sur le bois. "Remplissez d'eau quatre cruches, et versez-les sur l'holocauste et sur le bois. Il dit: Faites-le une seconde fois. Et ils le firent une seconde fois. Il dit: Faites-le une troisième fois. Et ils le firent une troisième fois. L'eau coula autour de l'autel, et l'on remplit aussi d'eau le fossé." PR 110 5 Elie rappelle alors aux Israélites que leur apostasie persistante a provoqué la colère de l'Eternel; il leur demande d'humilier leurs coeurs et de revenir au Dieu de leurs pères, afin d'ôter la malédiction qui pèse sur le pays. Puis, s'inclinant avec révérence devant le Dieu invisible, il lève les mains vers le ciel, et formule une simple prière. Les prophètes de Baal avaient hurlé, écumé de rage et sauté de l'aube à une heure avancée de l'après-midi. Elie, lui, ne fait entendre aucun son discordant tandis qu'il est en prière. Il intercède auprès de Dieu comme s'il savait qu'il assiste à cette scène et entend son appel. Les prophètes de Baal avaient prié d'une manière farouche, incohérente. Elie prie simplement, avec ferveur; il demande à Dieu de faire éclater sa supériorité sur Baal, afin qu'Israël puisse revenir à lui. PR 111 1 "Eternel, Dieu d'Abraham, d'Isaac et d'Israël! implore le prophète, que l'on sache aujourd'hui que tu es Dieu en Israël, que je suis ton serviteur, et que j'ai fait toutes ces choses par ta parole! Réponds-moi, Eternel, réponds-moi, afin que ce peuple reconnaisse que c'est toi, Eternel, qui es Dieu, et que c'est toi qui ramènes leur coeur!" PR 111 2 Un silence solennel plane alors sur tous. Les prophètes de Baal tremblent d'épouvante. Conscients de leur culpabilité, ils s'attendent à un châtiment rapide. PR 111 3 A peine la prière d'Elie est-elle achevée que des flammes de feu semblables à des éclairs fulgurants descendant du ciel sur l'autel consument l'holocauste, absorbent l'eau du fossé et dévorent jusqu'aux pierres de l'autel. L'éclat de la flamme illumine le mont Carmel et éblouit les yeux de la foule. Dans les vallées, en contre-bas, les curieux qui suivent avec un scepticisme impatient les mouvements des prophètes voient très nettement le feu descendre sur l'autel et en restent interdits. Cela leur rappelle la colonne de feu qui, dans la mer Rouge, séparait les enfants d'Israël des armées égyptiennes. PR 111 4 Sur le Carmel, le peuple se prosterne avec crainte devant le Dieu invisible. Il n'ose pas continuer à regarder le feu venu du ciel. Il redoute d'être lui-même consumé. Convaincus qu'ils doivent maintenant reconnaître le Dieu d'Elie comme le Dieu de leurs pères, les Israélites s'écrient tous ensemble: "C'est l'Eternel qui est Dieu! C'est l'Eternel qui est Dieu!" Avec une netteté saisissante, ce cri retentit sur la montagne et se répercute dans la plaine. Israël est enfin réveillé, éclairé, repentant. Il voit à quel point il a déshonoré le Seigneur. Le caractère du culte de Baal offrant un contraste frappant avec le service raisonnable de celui du vrai Dieu apparaît alors nettement. Le peuple reconnaît la justice et la miséricorde du Seigneur qui a retenu la rosée et la pluie jusqu'au moment où les pécheurs confesseraient son nom. Il est prêt maintenant à admettre que le Dieu d'Elie est au-dessus de toutes les idoles. PR 112 1 Les prophètes de Baal assistent avec consternation à la merveilleuse démonstration de la puissance de l'Eternel. Et cependant, dans leur défaite, et en présence de la gloire divine, ils refusent de se repentir de leur mauvaise conduite. Ils veulent continuer à servir Baal. Ils se montrent ainsi prêts pour le châtiment. Dieu ordonne alors à Elie de détruire ces faux docteurs, afin de préserver Israël repentant des séductions de ces adorateurs de Baal. La colère du peuple s'est déjà déchaînée contre les chefs de la transgression, et lorsqu'Elie ordonne: "Saisissez les prophètes de Baal; qu'aucun d'eux n'échappe!" tous sont prêts à lui obéir. Ils saisissent les prophètes et les font descendre au torrent de Kison. Là, avant la fin du jour qui devait marquer le début d'une réforme décisive, les prêtres de Baal furent égorgés. Pas un seul n'échappa. ------------------------Chapitre 12 -- De Jizreel à Horeb PR 113 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 18:41-46; 19:1-8. PR 113 1 Le massacre des prophètes de Baal avait ouvert la voie à une importante réforme spirituelle au sein des dix tribus du royaume d'Israël. Elie avait dénoncé leur apostasie, tout en les suppliant de s'humilier et de revenir au vrai Dieu. Les jugements du ciel avaient été exécutés, les Israélites avaient confessé leurs péchés et reconnu le Dieu de leurs pères comme le Dieu vivant. La malédiction céleste cessa donc de les atteindre, et ils furent comblés à nouveau de bénédictions matérielles. La terre serait enfin rafraîchie par une pluie abondante. PR 113 2 "Monte, mange et bois, dit Elie à Achab, car il se fait un bruit qui annonce la pluie." Quant à lui, il gravit le sommet du Carmel pour prier. PR 113 3 Ce n'est pas parce qu'il y avait des signes apparents d'ondée sur le point de tomber que le prophète ordonna à Achab avec tant d'assurance de se préparer à la pluie. Elie n'avait aperçu aucun nuage dans le ciel, et encore moins entendu le grondement du tonnerre. Il prononçait simplement les paroles que l'Esprit de Dieu le poussait à dire, en réponse à sa grande foi. Pendant toute la journée il avait accompli avec une fermeté inébranlable la volonté divine, et manifesté sa confiance implicite dans les prophéties des saintes Ecritures. Maintenant qu'il avait fait tout ce qui était en son pouvoir, il savait que Dieu lui accorderait avec abondance les bénédictions promises. Celui qui avait envoyé la sécheresse était le même qui avait promis une abondante pluie à tous ceux qui pratiqueraient le bien. Elie attendait donc que cette pluie tombât. Dans l'attitude de l'humilité, "le visage entre les genoux", il intercédait auprès de Dieu en faveur d'Israël repentant. PR 114 1 Le prophète envoya plusieurs fois de suite son serviteur vers un point qui dominait la Méditerranée, pour voir s'il discernait un signe à l'horizon prouvant que le Seigneur avait entendu sa prière. Mais chaque fois le serviteur revenait en disant: "Il n'y a rien." Toutefois le prophète ne perdit ni sa patience, ni sa foi; il continua à prier avec ferveur. Six fois de suite, le serviteur revint en disant qu'il n'y avait aucun signe de pluie dans un ciel d'airain. PR 114 2 Elie, inflexible, envoya encore son serviteur regarder à l'horizon. Cette fois, ce dernier revint avec ces paroles: "Voici un petit nuage qui s'élève de la mer, et qui est comme la paume de la main d'un homme." C'était suffisant. L'homme de Dieu n'attendit pas que le ciel s'assombrît. Dans le petit nuage qui montait de la mer, il entrevit, par la foi, une abondante chute de pluie. Il envoya alors immédiatement son serviteur dire à Achab: "Attelle et descends, afin que la pluie ne t'arrête pas." PR 114 3 C'est parce qu'Elie était un homme de foi que Dieu se servit de lui dans la grave crise que traversait Israël. Alors qu'il priait, sa foi parvenait jusqu'au ciel et saisissait ses promesses. Elie persista à croire jusqu'à ce qu'il fût exaucé. Il n'attendit pas d'avoir la confirmation totale que Dieu l'avait entendu, mais il saisit jusqu'aux plus petits témoignages de la faveur divine. PR 115 1 Ce que le prophète fit, tous les hommes peuvent le faire dans leur travail au service du Maître. N'est-il pas écrit: "Elie était un homme de la même nature que nous: il pria avec instance pour qu'il ne plût point, et il ne tomba point de pluie sur la terre pendant trois ans et six mois"?1 PR 115 2 De nos jours, une foi semblable à celle du prophète est nécessaire aux hommes -- une foi qui saisira les promesses divines et persistera à implorer le ciel jusqu'à ce qu'il ait entendu. Cette foi nous unit plus étroitement au Seigneur et nous procure les forces nécessaires dans la lutte contre les puissances des ténèbres. Par la foi les enfants de Dieu "vainquirent des royaumes, exercèrent la justice, obtinrent des promesses, fermèrent la gueule des lions, éteignirent la puissance du feu, échappèrent au tranchant de l'épée, guérirent de leurs maladies, furent vaillants à la guerre, mirent en fuite des armées étrangères."2 Par la foi nous pouvons atteindre les sommets que Dieu nous propose. "Tout est possible à celui qui croit."3 PR 115 3 La foi est un élément essentiel de la prière efficace. "Il faut que celui qui s'approche de Dieu croie que Dieu existe et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent." "Nous avons auprès de lui cette assurance, que si nous demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute. Et si nous savons qu'il nous écoute, quelque chose que nous demandions, nous savons que nous possédons la chose que nous lui avons demandée."4 Avec la foi persévérante de Jacob, la persistance inébranlable d'Elie, nous pouvons adresser des prières au Père, en nous réclamant de toutes ses promesses. L'honneur de son trône dépend de l'accomplissement de sa parole. PR 115 4 Les ombres de la nuit s'amoncelaient sur le Carmel lorsque le roi Achab se prépara à descendre. "En peu d'instants, le ciel s'obscurcit par les nuages, le vent s'établit, et il y eut une forte pluie. Achab monta sur son char, et partit pour Jizreel." Tandis qu'il s'acheminait vers la cité royale, il n'arrivait pas à discerner le chemin qu'il suivait tant les ténèbres étaient denses et la pluie abondante. Elie, qui l'avait humilié devant ses sujets, qui avait fait massacrer ses prêtres idolâtres, ne cessait cependant de le reconnaître comme roi d'Israël. En signe d'hommage, et fortifié par la puissance divine, il courut devant le char royal, guidant ainsi le roi jusqu'à l'entrée de la ville. PR 116 1 De cet acte généreux du messager de Dieu en faveur d'un mauvais roi, découle une leçon pour tous ceux qui se disent ouvriers du Seigneur, et qui ont une trop haute opinion d'euxmêmes. D'aucuns se croient au-dessus de certaines tâches qui leur paraissent humiliantes. Ils hésitent à rendre un service, de peur de faire le travail d'un domestique. Comme ils feraient bien de profiter de l'exemple d'Elie! Par la parole du prophète, les richesses du ciel avaient été retirées de la terre pendant trois ans et demi. Dieu l'avait honoré tout particulièrement lorsque, sur le Carmel, le feu était descendu du ciel pour consumer son holocauste. Il avait exécuté les jugements de Dieu en faisant massacrer les prophètes idolâtres; sa prière qui réclamait la pluie avait été exaucée. Et malgré ces triomphes éclatants qui avaient honoré son ministère, Elie se plut à remplir le rôle de serviteur. PR 116 2 Elie et Achab se séparèrent aux portes de Jizreel. Le prophète préféra demeurer hors des murs de la ville. Il s'enveloppa de son manteau et s'étendit sur le sol dénudé pour dormir. Le roi entra dans la ville et atteignit rapidement le toit protecteur de son palais. Là, il raconta à la reine les merveilleux événements qui s'étaient déroulés dans la journée et la magnifique révélation de la puissance divine qui avait convaincu Israël que l'Eternel est le vrai Dieu et Elie le messager désigné par le ciel. Mais, lorsque Jézabel, impénitente et endurcie, entendit le récit du massacre des prophètes idolâtres, elle entra dans une violente colère. Refusant de reconnaître dans les événements du Carmel la souveraine providence de Dieu, et toujours provocante, elle déclara délibérément qu'Elie serait mis à mort. PR 116 3 Cette nuit-là, un messager de la reine réveilla le prophète harassé de fatigue, et lui remit ce message de Jézabel: "Que les dieux me traitent dans toute leur rigueur, si demain, à cette heure, je ne fais de ta vie ce que tu as fait de la vie de chacun d'eux!" PR 116 4 On aurait pu croire qu'après avoir montré un si grand courage et obtenu une si éclatante victoire sur le roi, les prêtres et le peuple, le prophète ne pourrait plus jamais connaître le découragement, pas plus qu'il ne se laisserait intimider par qui que ce soit. Cependant, celui qui avait été l'objet d'une manière si manifeste de la tendre sollicitude de Dieu n'était pas à l'abri des faiblesses humaines. A cette heure sombre, sa foi et son courage l'abandonnèrent. Tout décontenancé, il se leva. La pluie continuait à se déverser du ciel, les ténèbres enveloppaient toutes choses. Le prophète oubliait que trois ans auparavant Dieu l'avait conduit en lieu sûr pour échapper à la haine de Jézabel et aux recherches d'Achab. Maintenant il fuyait pour sa vie. Il arriva à Beer-Schéba, "et il y laissa son serviteur. Pour lui, il alla dans le désert ... après une journée de marche". PR 117 1 Elie n'aurait jamais dû abandonner le lieu où le devoir l'appelait. Il aurait dû affronter la colère de Jézabel, en faisant appel à la protection de celui qui l'avait envoyé pour venger l'honneur de son nom. Il aurait dû dire au messager de la reine que le Dieu en qui il se confiait le protégerait. Quelques heures seulement s'étaient écoulées depuis qu'il avait assisté à la merveilleuse manifestation de la puissance divine. Cela aurait dû lui donner l'assurance qu'il ne serait pas abandonné. En restant où il était, et en faisant de Dieu son refuge et sa force, il aurait été préservé de tout mal. Le Seigneur lui aurait donné une autre victoire, tout aussi éclatante, en envoyant à Jézabel un châtiment terrible. L'impression produite alors sur le roi et sur le peuple aurait opéré une grande réforme. PR 117 2 Elie avait beaucoup espéré du miracle du Carmel. Il avait cru qu'après cette manifestation de la puissance divine, Jézabel n'aurait plus d'influence sur l'esprit d'Achab, et qu'une prompte réforme gagnerait tout Israël. Tout le long du jour, sur le Carmel, il avait peiné et jeûné. Et cependant, lorsqu'il conduisit le char d'Achab aux portes de Jizreel, son courage était indomptable en dépit de l'effort physique fourni pendant la journée. PR 117 3 Mais une réaction, telle qu'il s'en produit fréquemment après les périodes de foi ardente et de victoires spirituelles, menaçait Elie. Il redoutait que la réforme commencée sur le Carmel ne fût pas durable, et le découragement l'envahit. Il s'était élevé sur le sommet du Pisga; maintenant il était redescendu dans la vallée. Animé par l'inspiration divine, sa foi avait résisté à la plus terrible épreuve; mais à cette heure sombre, alors que retentissaient encore à ses oreilles les menaces de Jézabel et que Satan semblait favoriser le projet de la reine colérique, le prophète perdit sa confiance en Dieu. Il avait été élevé au-dessus de toute imagination, et la réaction qui s'ensuivit fut terrible. Il oublia son Dieu, et il marcha longtemps, jusqu'à ce qu'il se trouvât dans un lieu solitaire. Harassé de fatigue, il s'assit sous un genêt, et demanda la mort. "C'est assez, dit-il. Maintenant, Eternel, prends mon âme, car je ne suis pas meilleur que mes pères." Fugitif, solitaire, éloigné de toute agglomération, l'esprit accablé par un cruel désappointement, Elie ne désirait plus revoir un visage humain. Brisé de fatigue, il s'endormit profondément. PR 118 1 Dans la vie de tout homme, il est des périodes de profonde dépression, de découragement total, des jours où la tristesse nous envahit, et il nous semble impossible de croire que le Seigneur est encore le bienfaiteur de ses enfants, des jours où les tourments nous accablent, si bien que la mort nous semble préférable à la vie. C'est alors que beaucoup perdent leur confiance en Dieu, et sombrent dans le doute et l'incrédulité. Si, à de tels moments, nous pouvions discerner la signification des voies de la providence, nous verrions alors des anges s'efforcer de nous délivrer de nous-mêmes et essayer d'affermir nos pieds sur un fondement inébranlable, plus solide que les collines éternelles; une foi et une ardeur nouvelles animeraient alors tout notre être. PR 118 2 En ses jours d'épreuve et d'adversité, Job déclarait: PR 118 3 Périsse le jour où je suis né. ... Oh! s'il était possible de peser ma douleur, Et si toutes mes calamités étaient sur la balance. ... Puisse mon voeu s'accomplir, Et Dieu veuille réaliser mon espérance! Qu'il plaise à Dieu de m'écraser, Qu'il étende sa main et qu'il m'achève! Il me restera du moins une consolation, Une joie dans les maux dont il m'accable. ... C'est pourquoi je ne retiendrai point ma bouche, Je parlerai dans l'angoisse de mon coeur, Je me plaindrai dans l'amertume de mon âme. ... Ah! je voudrais être étranglé! Je voudrais la mort plutôt que ces os! Je les méprise! ... je ne vivrai pas toujours... Laisse-moi, car ma vie n'est qu'un souffle. PR 119 1 Mais, bien que Job ait été fatigué de la vie, il ne lui fut pas permis de mourir. Un avenir meilleur lui était réservé, et il reçut ce message d'espérance: PR 119 2 Alors tu lèveras ton front sans tache, Tu seras ferme et sans crainte; Tu oublieras tes souffrances, Tu t'en souviendras comme des eaux écoulées. Tes eaux auront plus d'éclat que le soleil à son midi, Tes ténèbres seront comme la lumière du matin, Tu seras plein de confiance, et ton attente ne sera pas vaine; Tu regarderas autour de toi, et tu reposeras en sûreté. Tu te coucheras sans que personne te trouble, Et plusieurs caresseront ton visage. Mais les yeux des méchants seront consumés; Pour eux point de refuge; La mort, voilà leur espérance. PR 119 3 Des profondeurs du découragement et de l'abattement, Job s'élevait vers les sommets avec une confiance totale dans la miséricorde et la puissance salvatrice de Dieu. Il s'écriait triomphalement: PR 119 4 Voici, il me tuera; je n'ai rien à espérer. ... Cela même peut servir à mon salut. ... Mais je sais que mon Rédempteur est vivant, Et qu'il se lèvera le dernier sur la terre. Quand ma peau sera détruite, il se lèvera; Quand je n'aurai plus de chair, je verrai Dieu. Je le verrai, et il me sera favorable; Mes yeux le verront, et non ceux d'un autre. PR 119 5 "L'Eternel répondit à Job du milieu de la tempête",8 et fit connaître à son serviteur la souveraineté de sa puissance. Lorsque Job eut la révélation de son Créateur, il eut horreur de lui-même, et se repentit dans la poussière et la cendre. Alors le Seigneur put le bénir abondamment, et faire de ses dernières années les meilleures de sa vie. PR 120 1 L'espoir et le courage sont essentiels dans un service agréable à Dieu. Ce sont les fruits de la foi. Le découragement est coupable et déraisonnable. Dieu peut et désire "montrer avec plus d'évidence"9 la force dont ont besoin ses serviteurs dans les difficultés. Les plans des ennemis de sa cause peuvent sembler solidement établis; mais le Seigneur est capable de renverser les mieux assurés. Il le fait en son temps, lorsqu'il voit que la foi de ses enfants a été suffisamment mise à l'épreuve. PR 120 2 Il existe un remède infaillible pour ceux qui ont le coeur abattu: la foi, la prière, le travail. La foi et l'activité donnent une assurance et une satisfaction sans cesse accrues. Etes-vous tentés de vous laisser aller à de sombres pressentiments ou à un profond découragement? Aux jours les plus ténébreux, alors que les apparences semblent être contre vous, ne craignez rien. Ayez foi en Dieu; il connaît vos besoins. Il est tout-puissant; son amour et sa compassion infinis ne se lassent jamais. Ne craignez pas qu'il manque à sa promesse; il est la vérité éternelle; il ne rompra jamais le pacte contracté avec ceux qui l'aiment. Il accordera à ses fidèles serviteurs ce dont ils ont besoin. L'apôtre Paul a dit: "Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse. ... C'est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les outrages, dans les calamités, dans les persécutions, dans les détresses pour Christ; car, quand je suis faible, c'est alors que je suis fort."10 PR 120 3 Le Seigneur avait-il abandonné Elie au moment de l'épreuve? Certes non. Il aimait tout autant son serviteur lorsque celui-ci se crut délaissé de Dieu et des hommes qu'au moment où il répondit à sa prière en lui envoyant le feu du ciel qui embrasa le sommet du Carmel. PR 120 4 Et voici, alors qu'Elie dormait, une main légère et une voix caressante le réveillèrent. Il tressaillit de peur, et il voulut s'enfuir, craignant que l'ennemi ne l'ait découvert. Cependant, le visage compatissant qui se penchait sur lui n'était pas celui d'un ennemi, mais d'un ami. Dieu avait envoyé un ange chargé de nourriture à l'intention de son serviteur. "Lève-toi, lui dit-il, mange." Elie "regarda, et il y avait à son chevet un gâteau cuit sur des pierres chauffées et une cruche d'eau". PR 121 1 Après avoir pris la collation qui lui avait été préparée, Elie s'endormit à nouveau. Mais l'ange revint une deuxième fois, toucha l'homme harassé de fatigue, et lui dit avec une tendresse compatissante: "Lève-toi, mange, car le chemin est trop long pour toi. Il se leva, mangea et but; et avec la force que lui donna cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, à Horeb. Et là, il entra dans la caverne." ------------------------Chapitre 13 -- Que fais-tu ici? PR 123 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 19:9-18. PR 123 1 Si le refuge d'Elie, sur le mont Horeb, était caché aux hommes, il n'était pas inconnu du Seigneur. Lassé, découragé, le prophète n'était donc pas seul pour lutter contre les puissances des ténèbres. Dieu vint s'entretenir avec lui par le moyen d'un ange majestueux, à l'entrée de la caverne où il s'était retiré. Ce messager du ciel s'enquit de ses besoins, et lui fit comprendre clairement quels étaient les desseins de la Providence à l'égard d'Israël. PR 123 2 L'oeuvre qu'Elie avait entreprise auprès des adorateurs de Baal ne pouvait s'achever tant que le prophète n'avait pas appris à mettre toute sa confiance en Dieu. Le triomphe éclatant remporté sur les hauteurs du Carmel avait ouvert la voie à des victoires plus glorieuses encore. Les perspectives merveilleuses qui s'ouvraient devant lui s'étaient estompées par la menace de Jézabel. Il fallait donc que l'homme de Dieu soit amené à comprendre la faiblesse de sa situation présente par rapport à la haute position qu'il devait occuper. PR 124 1 Dans l'état où se trouvait le prophète, le Seigneur lui posa cette question: "Que fais-tu ici?" Je t'ai envoyé près du torrent de Kérith, puis chez la veuve de Sarepta. Je t'ai ensuite chargé de retourner en Israël pour te dresser contre les prêtres idolâtres sur le Carmel. Je t'ai revêtu de force pour conduire le char du roi jusqu'aux portes de Jizréel. Mais qui t'a poussé à t'enfuir précipitamment dans le désert? Qu'as-tu à faire ici? PR 124 2 L'âme pleine d'amertume, Elie exhala sa triste plainte. "J'ai déployé, dit-il, mon zèle pour l'Eternel, le Dieu des armées; car les enfants d'Israël ont abandonné ton alliance, ils ont renversé tes autels, et ils ont tué par l'épée tes prophètes; je suis resté, moi seul, et ils cherchent à m'ôter la vie." PR 124 3 L'ange invita alors le prophète à sortir de la caverne, à se tenir sur la montagne devant Dieu et à prêter l'oreille à ses paroles. "Et voici, l'Eternel passa. Et devant l'Eternel, il y eut un vent fort et violent qui déchirait les montagnes et brisait les rochers: l'Eternel n'était pas dans le vent. Et après le vent, ce fut un tremblement de terre: l'Eternel n'était pas dans le tremblement de terre. Et après le tremblement de terre, un feu: l'Eternel n'était pas dans le feu. Et après le feu, un murmure doux et léger. Quand Elie l'entendit, il s'enveloppa le visage de son manteau, il sortit et se tint à l'entrée de la caverne." PR 124 4 Dieu se révéla à son serviteur, non pas dans de violentes manifestations de sa puissance, mais dans "un murmure doux et léger". Il désirait apprendre ainsi à Elie que ce n'est pas toujours le travail exécuté dans les plus brillantes conditions qui a le plus d'importance pour l'accomplissement de ses desseins. Alors que le prophète attendait que Dieu se révélât à lui, une violente tempête se déchaîna; les éclairs sillonnèrent la nue, et un feu dévorant passa soudain. Mais Dieu n'était pas dans ces éléments déchaînés. Ensuite, on entendit un murmure doux et léger. Elie se couvrit le visage en présence de l'Eternel; il se calma, son esprit s'apaisa et se soumit. Il comprenait maintenant qu'une confiance tranquille, une ferme assurance en Dieu lui assureraient un secours efficace au moment du besoin. PR 125 1 Ce n'est pas toujours une présentation savante des vérités divines qui convainc et convertit les âmes. On n'atteint le coeur des hommes ni par la logique, ni par l'éloquence, mais par les douces influences du Saint-Esprit qui se font sentir silencieusement, mais sûrement, dans la transformation et le développement du caractère. Seul le murmure doux et léger de l'Esprit de Dieu peut changer les coeurs. PR 125 2 "Que fais-tu ici, Elie?" demanda encore la voix, et le prophète répondit à nouveau: "J'ai déployé mon zèle pour l'Eternel, le Dieu des armées; car les enfants d'Israël ont abandonné ton alliance, ils ont renversé tes autels, et ils ont tué par l'épée tes prophètes; je suis resté, moi seul, et ils cherchent à m'ôter la vie." PR 125 3 Dieu répondit à Elie que les enfants d'Israël qui s'étaient livrés au mal ne resteraient pas impunis. Des hommes seraient spécialement choisis pour accomplir le dessein du ciel, qui allait châtier le royaume idolâtre. Une oeuvre ardue restait à faire; il fallait donner à tous l'occasion de revenir au vrai Dieu. Elie devait retourner en Israël et s'unir à d'autres pour opérer une réforme. PR 125 4 "Va, lui dit le Seigneur, reprends ton chemin par le désert jusqu'à Damas; et quand tu seras arrivé, tu oindras Hazaël pour roi de Syrie. Tu oindras aussi Jéhu, fils de Nimschi, pour roi d'Israël; et tu oindras Elisée, fils de Schaphath, d'Abel-Mehola, pour prophète à ta place. Et il arrivera que celui qui échappera à l'épée de Hazaël, Jéhu le fera mourir, et celui qui échappera à l'épée de Jéhu, Elisée le fera mourir." PR 125 5 Elie avait cru être resté seul en Israël à adorer le vrai Dieu. Mais celui qui lit dans le coeur de tous les hommes lui révéla que beaucoup d'autres Israélites, au cours des siècles d'apostasie, lui étaient restés fidèles. "Je laisserai en Israël, dit le Seigneur, sept mille hommes, tous ceux qui n'ont point fléchi les genoux devant Baal, et dont la bouche ne l'a point baisé." PR 125 6 Que de leçons recèle l'expérience d'Elie pendant ces jours de découragement et de défaite apparente! Puissent tous les serviteurs de Dieu de notre époque s'en inspirer! L'apostasie qui règne de nos jours ressemble étrangement à celle qui florissait au temps d'Elie. Des foules aujourd'hui suivent encore Baal en élevant l'humain au-dessus du divin, en glorifiant les chefs populaires, en adorant Mammon, le dieu de la richesse, en plaçant la science au-dessus des vérités des saintes Ecritures. Le doute et l'incrédulité exercent leur funeste influence sur l'esprit et le coeur, et l'on substitue aux vérités divines les théories humaines. Il est communément enseigné que nous avons atteint une période où la raison doit être placée au-dessus des enseignements des Ecritures. La loi divine, modèle de justice, est mise de côté. L'ennemi de toute vérité s'ingénie, avec son pouvoir trompeur, à amener les hommes à mettre les institutions terrestres à la place de Dieu, et à oublier ce qui devrait faire le bonheur et le salut de l'humanité. PR 126 1 Et cependant, pour si répandue qu'elle soit, cette apostasie n'est pas universelle. Tous les hommes ne vivent pas sans loi et ne sont pas des pécheurs endurcis. Tous ne se rangent pas du côté de l'ennemi. Dieu possède des milliers de fidèles qui n'ont point fléchi le genou devant Baal, et qui désirent mieux comprendre les vérités concernant le Christ et sa loi. Ils espèrent contre toute espérance que Jésus reviendra bientôt pour mettre un terme au règne du péché et de la mort. Il en est un grand nombre qui ont adoré Baal par ignorance, mais chez lesquels l'Esprit de Dieu lutte toujours. Ces hommes ont besoin du secours de ceux qui ont appris à connaître le Seigneur et la puissance de sa Parole. De nos jours, tout enfant de Dieu devrait s'employer activement à venir en aide à son prochain. PR 126 2 Les anges accompagneront tous ceux qui, connaissant les vérités bibliques, s'efforceront de rechercher les hommes et les femmes avides de lumière. Et partout où se rendent les anges on peut avancer sans crainte. Ce travail, accompli avec fidélité, amènera de nombreux pécheurs à se détourner de l'idolâtrie pour adorer le Dieu vivant. Ils cesseront alors de glorifier les institutions humaines pour se ranger résolument du côté de Dieu et de sa loi. PR 126 3 Comme ces résultats dépendent en grande partie de l'activité incessante des ouvriers du Seigneur fidèles et sincères, Satan fait l'impossible pour les pousser à la désobéissance, afin de faire échouer les desseins de Dieu. A certains d'entre eux, il fait perdre de vue la noble et sainte mission à laquelle ils ont été appelés, et il les rend sensibles aux plaisirs de cette vie. Il les pousse à s'installer dans des demeures confortables, ou à changer de résidence si les avantages matériels leur paraissent plus intéressants ailleurs. C'est ainsi qu'ils abandonnent des endroits où ils auraient pu exercer une heureuse influence. Satan pousse encore d'autres serviteurs de Dieu à quitter leur travail lorsque le découragement s'empare d'eux à la suite de l'opposition ou de la persécution. Et cependant, pour tous ces hommes, le Seigneur éprouve la plus touchante pitié. PR 127 1 A tout enfant de Dieu dont la voix a été réduite au silence par l'ennemi de nos âmes, Dieu pose cette question: "Que fais-tu ici?" Je t'ai ordonné d'aller dans le monde entier prêcher l'Evangile et préparer un peuple pour le jour du Seigneur, pourquoi es-tu ici? Et qui t'y a envoyé? PR 127 2 La joie qui soutenait le Christ, au cours de son sacrifice et de ses souffrances, résidait dans le salut des âmes. Ce devrait être aussi celle de tous ses vrais disciples pour stimuler leur ambition. Ceux qui se rendent compte, même à une échelle réduite, de ce que signifie pour eux et leur prochain la rédemption, comprendront dans une certaine mesure les immenses besoins de l'humanité. Leurs coeurs seront émus de compassion en voyant la déchéance morale et spirituelle de milliers de pécheurs plongés dans les ténèbres, et dont la souffrance physique n'est rien en comparaison de leur souffrance morale. PR 127 3 Aux familles comme aux individus, cette question est posée: "Que fais-tu ici?" Dans de nombreuses églises se trouvent des familles très éclairées sur les vérités évangéliques. Elles pourraient élargir leur sphère d'influence en se rendant dans des lieux privés de ministres de la Parole et qu'elles seraient capables de remplacer. Dieu appelle ces familles à se rendre là où règnent les ténèbres; il les engage à travailler avec sagesse et persévérance en faveur de ceux qui vivent dans la nuit spirituelle. Mais pour répondre à cet appel, il faut consentir à faire des sacrifices. Des âmes se meurent sans espoir et sans Dieu, alors que ceux qui hésitent à répondre à l'appel divin attendent pour se décider que s'aplanissent les obstacles. Séduits par les avantages qu'offre le monde, par la recherche scientifique, les hommes veulent bien se risquer dans des régions pestilentielles et subir des privations et des souffrances. Mais où sont ceux qui désirent en faire autant pour la joie de parler du Sauveur à leurs semblables? PR 128 1 S'il arrive, à la suite de circonstances pénibles, que des hommes de grande spiritualité, éprouvés à l'extrême, se laissent aller au découragement et au désespoir, et s'ils ne trouvent plus rien dans la vie qui les attire ou les attache, il ne faut pas s'en étonner; cela n'a rien d'étrange, ni de nouveau. Qu'ils se rappellent que le plus grand des prophètes s'enfuit pour sa vie devant la colère d'une femme exaspérée. Brisé de fatigue, exténué par les rigueurs de la route, en proie au plus cruel désespoir, le fugitif demanda de mourir. Mais c'est alors qu'il désespérait et que son oeuvre semblait menacée d'insuccès qu'il reçut la plus précieuse leçon de sa vie. Il apprit au moment de son extrême faiblesse qu'il est nécessaire et toujours possible de se confier en Dieu dans des circonstances paraissant insurmontables. PR 128 2 S'il arrive à ceux qui ont mis toutes leurs énergies au service d'une cause exigeant des sacrifices de tomber dans le doute et le découragement, qu'ils pensent à Elie et retrempent leur courage dans l'exemple donné par le prophète. La sollicitude incessante de Dieu, son amour, sa puissance se manifestent plus particulièrement envers ses serviteurs dont le zèle est mal compris ou inapprécié, dont les conseils et les reproches sont méprisés, et dont tout essai de réforme se heurte à la haine et à la résistance. PR 128 3 C'est alors que nous sommes le plus faibles que Satan nous fait subir les plus cruelles tentations. C'est ainsi qu'il avait espéré triompher du Fils de Dieu, car il avait réussi de cette manière à remporter bien des victoires sur les hommes. Chaque fois que leur volonté s'affaiblissait, que leur foi chancelait, ceux qui avaient vaillamment et pendant longtemps lutté pour la justice finissaient par céder à la tentation. PR 129 1 Fatigué par quarante ans de pérégrinations dans le désert, par ses luttes contre l'incrédulité, Moïse perdit pendant un certain temps le contact avec Dieu. Il faiblit juste au moment où il allait franchir les frontières de la terre promise. Il en fut de même avec Elie, qui avait été si confiant pendant les années de sécheresse et de famine. Il s'était présenté sans crainte devant Achab, levé en présence de tout Israël comme le seul et véritable témoin du Seigneur. Puis, dans un moment de lassitude, les menaces de Jézabel triomphèrent de sa foi. PR 129 2 Il en est de même aujourd'hui. Lorsque nous sommes assiégés par le doute, rendus perplexes par les circonstances; lorsque nous sommes éprouvés par la pauvreté ou l'affliction, alors Satan s'efforce d'ébranler notre confiance en Dieu. C'est à ce moment-là qu'il étale devant nous toutes nos fautes et nous incite à douter du Seigneur et de son amour. Il espère ainsi plonger notre âme dans le découragement, tout en nous faisant perdre contact avec Dieu. PR 129 3 Ceux que le Saint-Esprit a chargés d'accomplir une tâche particulière, et qui occupent la pointe du combat, subissent fréquemment une certaine réaction lorsque la calamité s'estompe. Le découragement peut ébranler la foi la plus solide, affaiblir la volonté la plus ferme. Mais le Seigneur comprend tout, et il ne cesse d'aimer et d'avoir pitié de ses enfants. Il lit dans leurs coeurs les intentions et les desseins qui les animent. Attendre avec patience et confiance lorsque tout paraît sombre, voilà ce que tous ceux qui ont la charge de l'oeuvre de Dieu devraient apprendre. Le ciel n'abandonne jamais les siens dans l'adversité. Aucune situation n'est apparemment plus désespérée, et cependant plus triomphante, que celle de l'homme conscient de son néant et pleinement confiant en Dieu. PR 129 4 Ce ne sont pas seulement ceux qui assument des tâches importantes qui devront encore profiter, lorsque viendra l'épreuve, de l'exemple d'Elie. Quelle que soit sa faiblesse, l'enfant de Dieu peut avoir confiance en celui qui faisait la force du prophète. Le Seigneur compte sur la fidélité de tous ceux auxquels il accorde le secours nécessaire. Par lui-même l'homme est impuissant; mais, avec Dieu, il est capable de vaincre le mal et d'aider ses semblables à le surmonter. Impossible à Satan de triompher sur celui qui prend le Seigneur pour défenseur. "En l'Eternel seul ... résident la justice et la force."1 PR 130 1 Ami chrétien, le diable connaît ta faiblesse. Appuie-toi donc sur Jésus. Si tu demeures dans l'amour de Dieu, tu pourras supporter l'épreuve. Seule la justice du Christ te donnera le pouvoir de résister à la marée montante du mal qui déferle sur le monde. Que ta vie déborde de foi. La foi allège tous les fardeaux, soulage toutes les fatigues. La Providence t'envoie des contrariétés qui te semblent mystérieuses aujourd'hui; tu en triompheras en te confiant continuellement en Dieu. Marche par la foi dans le sentier qu'il t'a tracé. Les épreuves surviendront, mais continue d'avancer. Elles serviront à fortifier ta foi et à te rendre apte au service du Maître. Le récit sacré n'a pas été écrit simplement pour que nous le lisions et en soyons émerveillés, mais pour que nous arrivions à avoir une foi semblable à celle que possédaient jadis les serviteurs de Dieu. Le Seigneur agit de nos jours d'une manière aussi frappante qu'alors. Partout il trouve des coeurs débordants de foi pour servir de canal à sa toute-puissance. PR 130 2 A nous, comme à Pierre autrefois, le Seigneur dit: "Satan vous a réclamés, pour vous cribler comme le froment. Mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point."2 Le Christ n'abandonnera jamais ceux pour lesquels il a donné sa vie. Nous pouvons l'oublier, être vaincus par la tentation; mais il ne se détournera jamais de celui qu'il est venu racheter au prix de son sang. PR 130 3 Si notre vision spirituelle pouvait être renforcée, nous verrions des âmes ployant sous le poids de la tentation et de la douleur, et sur le point de mourir de découragement. Nous verrions des anges voler rapidement au secours de ceux qui sont tentés, repoussant les armées du mal qui les assiègent, et les aidant à poser les pieds sur le rocher des siècles. Les batailles qui se livrent entre les deux armées sont tout aussi réelles que celles des armées d'ici-bas, et les destinées éternelles dépendent de l'issue du conflit spirituel. PR 131 1 Dans la célèbre vision du prophète Ezéchiel, une main apparaît sous les ailes des chérubins. Cette vision a pour but d'enseigner aux serviteurs de Dieu que c'est grâce à la puissance divine que l'on peut réussir. Ceux que le Seigneur emploie comme messagers ne doivent pas croire que la cause de Dieu dépend d'eux-mêmes. Des êtres limités ne sauraient assumer cette responsabilité. Celui qui ne sommeille ni ne dort est constamment à l'oeuvre pour accomplir ses desseins; c'est lui qui achèvera la tâche. Il fera échouer les plans des méchants, et jettera la confusion dans les conseils de tous ceux qui machinent le mal contre son peuple. Celui qui est Roi et Seigneur des armées est assis entre les chérubins; et dans les combats et le tumulte des nations, il tranquillise ses enfants. Lorsque les forteresses des rois de ce monde seront renversées, quand les flèches de la colère divine frapperont le coeur des ennemis de Dieu, alors son peuple sera en sûreté. ------------------------Chapitre 14 -- Avec l'esprit et la puissance d'Elie PR 133 1 Au cours des longs siècles qui se sont écoulés depuis Elie, le récit de son ministère a inspiré et encouragé tous ceux qui ont été appelés à lutter contre l'apostasie. Pour nous, qui "sommes parvenus à la fin des siècles",1 ce récit a une signification toute particulière. L'histoire se répète. Notre époque a ses Achabs et ses Jézabels; elle ressemble étrangement à celle du grand prophète. Les autels des idoles peuvent ne pas être visibles, les statues non apparentes; il n'en reste pas moins que des milliers de personnes adorent les dieux de ce monde: les richesses, la gloire, les plaisirs, les fables agréables qui permettent aux hommes de suivre les penchants de leurs coeurs irrégénérés. Des multitudes ont une conception erronée de Dieu et de ses attributs, et elles servent ainsi un faux dieu comme les adorateurs de Baal. Beaucoup de ceux qui se disent chrétiens ont subi des influences diamétralement opposées à Dieu et à sa vérité. Ils se détournent du divin pour exalter ce qui est humain. PR 134 1 L'esprit qui prédomine à notre époque est un esprit d'incrédulité et d'apostasie. Les hommes prétendent posséder des lumières parce qu'ils connaissent la vérité; mais, en réalité, ils font preuve de la suffisance la plus aveugle. Ils exaltent les théories humaines, et les substituent à Dieu et à sa loi. Satan incite les hommes à la désobéissance; il leur assure qu'ils trouveront ainsi la liberté et l'indépendance, ce qui les rendra semblables à des dieux. On constate de plus en plus un esprit d'opposition à la Parole infaillible de Dieu, et une sorte d'idolâtrie de la sagesse humaine que l'on place au-dessus de la révélation divine. PR 134 2 En se conformant aux coutumes et aux influences du monde, les hommes ont laissé envahir leur esprit par les ténèbres et la confusion, si bien qu'ils semblent avoir perdu toute possibilité de discerner la lumière des ténèbres, la vérité de l'erreur. Ils se sont éloignés du droit chemin au point de considérer l'opinion de quelques philosophes comme étant plus importante que les vérités de la Bible. Les promesses de la Parole de Dieu, ses menaces contre la désobéissance et l'idolâtrie paraissent impuissantes à toucher les coeurs. Une foi semblable à celle de Paul, Pierre et Jean leur paraît périmée, mystique et indigne de l'intelligence des penseurs modernes. PR 134 3 Aux origines, Dieu donna sa loi à l'humanité pour lui permettre d'acquérir le bonheur et la vie éternelle. Or, le seul espoir de Satan pour arriver à faire obstacle aux desseins de Dieu était d'amener hommes et femmes à désobéir à cette loi. Il s'est donc appliqué à dénaturer ce qu'elle enseignait, et à minimiser son importance. Il a essayé par un coup de maître de changer la loi elle-même, de façon à persuader les hommes à violer ses préceptes tout en prétendant l'observer. PR 134 4 Un écrivain a comparé la tentative faite pour changer la loi de Dieu à une malicieuse habitude d'autrefois, consistant à tourner dans une fausse direction la flèche d'un poteau indicateur placé au croisement de deux routes importantes. On peut imaginer la confusion et les complications qui en résultaient. PR 134 5 Dieu avait aussi placé un poteau indicateur sur la route des voyageurs de notre globe. Une flèche indiquait l'obéissance volontaire au Créateur, obéissance conduisant au chemin de la félicité et de la vie; l'autre indiquait la désobéissance menant au chemin de la misère et de la mort. La voie qui aboutissait au bonheur était aussi nettement délimitée que celle conduisant à la cité de refuge de la dispensation juive. Mais, à une heure fatale pour nous, l'ennemi de tout bien retourna les flèches du poteau indicateur, et des multitudes furent fourvoyées. PR 135 1 Par l'intermédiaire de Moïse, Dieu avait donné aux Israélites les instructions suivantes: "Vous ne manquerez pas d'observer mes sabbats, car ce sera entre moi et vous, et parmi vos descendants, un signe auquel on connaîtra que je suis l'Eternel qui vous sanctifie. Vous observerez le sabbat, car il sera pour vous une chose sainte. Celui qui le profanera sera puni de mort; celui qui fera quelque ouvrage ce jour-là ... sera puni de mort. Les enfants d'Israël observeront le sabbat, en le célébrant, eux et leurs descendants, comme une alliance perpétuelle. Ce sera entre moi et les enfants d'Israël un signe qui devra durer à perpétuité; car en six jours l'Eternel a fait les cieux et la terre, et le septième jour il a cessé son oeuvre et il s'est reposé."2 PR 135 2 Par ces paroles, le Seigneur indiquait nettement que l'obéissance est le chemin qui conduit à la cité céleste. Mais l'homme de péché a tourné les flèches du poteau indicateur; il a instauré un faux sabbat et fait croire aux hommes qu'en se reposant ce jour-là, ils observaient le commandement du Créateur. Dieu a déclaré que le septième jour est le jour de repos de l'Eternel. Quand "furent achevés les cieux et la terre", il glorifia ce jour en en faisant le mémorial de son oeuvre créatrice. "Il se reposa au septième jour de toute son oeuvre, qu'il avait faite. Dieu bénit le septième jour, et il le sanctifia."3 PR 135 3 A la sortie d'Egypte, le peuple élu fut clairement instruit à ce sujet. Alors qu'ils étaient en esclavage, les Israélites durent subir le joug de leurs oppresseurs, qui essayèrent de les forcer à travailler le jour du sabbat en augmentant la somme de travail qu'ils exigeaient d'eux chaque semaine. Les conditions dans lesquelles ils se trouvaient devinrent de plus en plus difficiles et de plus en plus contraignantes. Mais ils furent délivrés de l'esclavage, et établis dans un pays où ils pouvaient observer librement les préceptes du Seigneur. La loi fut proclamée sur le Sinaï, inscrite sur deux tables de pierre, par le doigt même de Dieu,4 et donnée à Moïse. Pendant les quarante ans passés au désert, les Israélites se souvinrent du jour de repos. La manne ne tombait pas le septième jour, le vendredi il en tombait deux fois plus, et elle se conservait miraculeusement deux jours, ce qui n'était pas le cas les autres jours. PR 136 1 Avant d'entrer dans le pays de la promesse, les Israélites furent exhortés par Moïse "à observer le jour du repos, pour le sanctifier."5 Dieu voulait que, par une observance fidèle du sabbat, Israël se souvienne de son Créateur et Rédempteur. S'il observait ce jour dans l'esprit voulu, il ne connaîtrait pas l'idolâtrie. Mais si les préceptes du Décalogue étaient mis de côté, le Créateur serait vite oublié, et les hommes adoreraient de faux dieux. "Je leur donnai aussi mes sabbats, dit le Seigneur, comme un signe entre moi et eux, pour qu'ils connussent que je suis l'Eternel qui les sanctifie." Et cependant, "ils rejetèrent mes ordonnances et ne suivirent point mes lois, et ... ils profanèrent mes sabbats, car leur coeur ne s'éloigna pas de leurs idoles", ajoutait le Seigneur. En les invitant à retourner à lui, Dieu insistait à nouveau sur l'importance de sanctifier le sabbat. "Je suis l'Eternel, votre Dieu, dit-il. Suivez mes préceptes, observez mes ordonnances, et mettez-les en pratique. Sanctifiez mes sabbats, et qu'ils soient entre moi et vous un signe, auquel on connaisse que je suis l'Eternel, votre Dieu."6 PR 136 2 En attirant l'attention de Juda sur les péchés qui lui valurent finalement la captivité babylonienne, le Seigneur déclarait: "Tu profanes mes sabbats. ... Je répandrai sur eux ma fureur, je les consumerai par le feu de ma colère, je ferai retomber leurs oeuvres sur leur tête."7 PR 136 3 Aux jours de Néhémie, pendant la restauration de Jérusalem, la profanation du sabbat attira sur les Israélites ces reproches sévères: "N'est-ce pas ainsi qu'ont agi vos pères, et n'est-ce pas à cause de cela que notre Dieu a fait venir tous ces malheurs sur nous et sur cette ville? Et vous, vous attirez de nouveau sa colère contre Israël, en profanant le sabbat."8 PR 137 1 Au cours de son ministère terrestre, le Christ insista sur les exigences du sabbat. Dans tous ses enseignements, il manifesta de la vénération pour cette institution qu'il avait lui-même créée. De son temps, le sabbat était si peu respecté que son observance reflétait le caractère égoïste et despotique de l'homme, plutôt que celui de Dieu. Jésus rejeta la fausse doctrine enseignée par ceux qui prétendaient connaître le Seigneur et l'avaient dénaturé. Bien qu'il fût impitoyablement poursuivi par la haine des rabbins, il continua résolument à observer le sabbat selon la loi de Dieu, sans même paraître se conformer à leurs exigences. PR 137 2 Dans un langage clair, le Christ déclara au sujet de la loi divine: "Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes; je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir. Car, je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne passeront point, il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre, jusqu'à ce que tout soit arrivé. Celui donc qui supprimera l'un de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire de même, sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux; mais celui qui les observera, et qui enseignera à les observer, celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux."9 PR 137 3 Pendant la dispensation chrétienne, le grand ennemi du bonheur de l'homme a fait du quatrième commandement un sujet spécial d'attaque. Satan déclare: "Je m'opposerai aux desseins de Dieu. J'aiderai mes sujets à ne pas tenir compte du mémorial du Seigneur, le septième jour de la semaine. Je montrerai ainsi au monde que le jour béni et sanctifié par l'Eternel a été changé. Le souvenir de ce jour ne survivra pas dans la pensée des hommes; je l'effacerai de leur mémoire. J'instaurerai à sa place un jour qui ne porte pas les empreintes de Dieu, un jour qui ne soit pas un signe entre l'Eternel et son peuple. J'inciterai ceux qui acceptent ce jour à lui conférer la sainteté attribuée au septième jour. PR 137 4 " Par l'intermédiaire de mon substitut, je me glorifierai moimême. On célébrera ce jour de la semaine, et le monde religieux acceptera cette contrefaçon du septième jour. Ce sera pour lui le vrai sabbat. Par la violation du sabbat institué par Dieu, j'arriverai à jeter le discrédit sur la loi divine. Ces paroles: "Un signe entre moi et vous et vos descendants", je les appliquerai au jour de repos que j'instituerai. Ainsi, l'univers m'appartiendra; je serai le chef de la terre, le prince de ce monde. J'aurai une telle emprise sur les esprits que le sabbat deviendra un sujet de mépris tout particulier. PR 138 1 " Un signe? Je ferai de l'observation du septième jour un signe de désobéissance envers les autorités de ce monde. Les lois humaines seront si draconiennes que l'on n'osera pas observer le sabbat, de peur de manquer de nourriture et de vêtements. Les croyants s'uniront au monde en transgressant la loi divine. Toute la terre sera sous ma domination." PR 138 2 En instituant ainsi un faux sabbat, l'ennemi pensa "changer les temps et la loi". Mais a-t-il bien réussi à changer la loi de Dieu? Les paroles du chapitre trente et un de l'Exode nous en donnent la réponse. Celui qui est le même hier, aujourd'hui et demain a déclaré au sujet du septième jour: "Vous ne manquerez pas d'observer mes sabbats, car ce sera entre moi et vous, et parmi vos descendants, un signe ... qui devra durer à perpétuité."10 La flèche du poteau indicateur a été retournée et elle indique une fausse direction; mais Dieu, lui, n'a pas changé; il est toujours le Dieu puissant d'Israël. "Voici, dit-il, les nations sont comme une goutte d'un seau, elles sont comme de la poussière sur une balance; voici, les îles sont comme une fine poussière qui s'envole. Le Liban ne suffit pas pour le feu. Et ses animaux ne suffisent pas pour l'holocauste. Toutes les nations sont devant lui comme un rien, elles ne sont pour lui que néant et vanité."11 Dieu est aussi juste et aussi jaloux maintenant à l'égard de sa loi qu'à l'époque d'Elie et d'Achab. PR 138 3 Comme cette loi est bafouée de nos jours! Le monde est en rébellion ouverte contre Dieu. Notre génération est en réalité faite de mécontents remplis d'ingratitude, de formalisme, de fausseté, d'orgueil et d'apostasie. Les hommes négligent la Bible et haïssent la vérité. Jésus voit sa loi rejetée, son amour méprisé, ses ambassadeurs traités avec indifférence. Il a parlé par ses bénédictions, mais on ne les a pas reconnues; il a parlé par ses avertissements, mais on n'en a pas tenu compte. Le temple de l'âme a été profané par le péché: l'égoïsme, l'envie, l'orgueil, la malice y sont entretenus. PR 139 1 Un grand nombre n'hésitent pas à se moquer de la Parole de Dieu. On ridiculise ceux qui y croient encore; on méprise de plus en plus la loi et l'ordre parce qu'on transgresse les commandements divins. La violence et le crime en sont les résultats visibles. Qu'il est triste de constater la pauvreté et la misère des multitudes qui se courbent devant les idoles, cherchant en vain le bonheur et la paix! Le mépris du commandement relatif au sabbat est presque universel. On voit avec quelle cynique impiété certains hommes promulguent des décrets pour sauvegarder la prétendue sainteté du premier jour de la semaine, et en même temps en émettent d'autres permettant le trafic de l'alcool! Plaçant leur sagesse au-dessus des Ecritures, ils essaient de contraindre les consciences, alors qu'ils favorisent un vice qui dégrade et avilit les êtres créés à l'image de Dieu. C'est Satan lui-même qui inspire de telles lois. Il sait bien que la colère céleste atteindra ceux qui mettent les décrets humains au-dessus des lois divines, et il fait l'impossible pour égarer les hommes sur la voie spacieuse qui mène à la mort. PR 139 2 On s'est si longtemps passionné pour les idées et les institutions humaines que presque tout l'univers se courbe devant les idoles. Celui qui a essayé de changer la loi de Dieu emploie tous les moyens pour tromper les hommes et les pousser à se soulever contre le Seigneur et le signe qui permet de reconnaître le juste. Mais le ciel ne souffrira pas toujours que sa loi soit foulée aux pieds. Le moment approche où "l'homme au regard hautain sera abaissé, et où l'orgueil sera humilié: L'Eternel seul sera élevé ce jour-là."12 PR 139 3 Le scepticisme peut traiter les exigences de la loi divine par la raillerie, la dérision ou la négation; l'esprit du monde peut contaminer la majeure partie des hommes et en dominer la minorité; la cause de Dieu peut demander de grands efforts et des sacrifices continuels; il n'en est pas moins certain que la vérité finira par triompher d'une manière éclatante. PR 140 1 Lorsque le Seigneur achèvera son oeuvre ici-bas, la loi divine sera de nouveau exaltée. La fausse religion peut devenir universelle, l'iniquité abonder, l'amour du plus grand nombre se refroidir, la croix du Calvaire être ignorée et les ténèbres recouvrir la surface de la terre comme un suaire; le courant populaire peut se déchaîner violemment contre la vérité; des complots répétés peuvent se tramer pour anéantir le peuple de Dieu; à l'heure du péril extrême, le Dieu d'Elie suscitera des instruments humains dont la voix ne pourra être réduite au silence. PR 140 2 Dans les grandes agglomérations, dans les lieux où les hommes ont blasphémé contre le Tout-Puissant, de sévères répréhensions se feront entendre. Des hommes envoyés par Dieu dénonceront courageusement l'union de l'Eglise et du monde. Ils supplieront hommes et femmes de se détourner de l'observance du jour de repos d'institution humaine pour observer le vrai sabbat. "Craignez Dieu, et donnez-lui gloire, proclameront-ils à toutes les nations, car l'heure de son jugement est venue; et adorez celui qui a fait le ciel, et la terre, et la mer, et les sources d'eaux. ... Si quelqu'un adore la bête et son image, et reçoit une marque sur son front ou sur sa main, il boira, lui aussi, du vin de la fureur de Dieu, versé sans mélange dans la coupe de sa colère."13 PR 140 3 Dieu ne violera pas son alliance; il ne changera pas les paroles qui sont sorties de sa bouche; elles sont éternelles, aussi immuables que son trône. Au jour du jugement, les commandements seront mis en plein jour, tels qu'ils ont été écrits par le doigt même de Dieu. Les hommes passeront devant le tribunal de la justice suprême pour recevoir leur rétribution. PR 140 4 De nos jours, comme au temps d'Elie, la ligne de démarcation entre ceux qui observent les commandements de Dieu et ceux qui adorent des idoles est nettement tracée. "Jusques à quand clocherez-vous des deux côtés? s'écriait Elie. Si l'Eternel est Dieu, allez après lui; si c'est Baal, allez après lui!"14 Et voici le message pour notre époque: "Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande! ... Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés, et que vous n'ayez point de part à ses fléaux. Car ses péchés se sont accumulés jusqu'au ciel, et Dieu s'est souvenu de ses iniquités."15 PR 141 1 L'heure où chacun de nous sera mis à l'épreuve va bientôt sonner. Le faux sabbat sera imposé; il y aura contestation entre les commandements de Dieu et les commandements des hommes. Ceux qui ont cédé peu à peu aux coutumes du monde, s'inclineront devant les autorités plutôt que de s'exposer aux moqueries, à l'insulte, aux menaces d'emprisonnement et de mort. A ce moment-là, l'or se séparera de la gangue, la vraie piété se distinguera nettement de la piété apparente et fausse. Les étoiles que nous avons admirées pour leur éblouissante clarté s'obscurciront. Ceux qui ont porté des vêtements sacerdotaux, mais qui n'ont pas revêtu la justice du Christ apparaîtront alors dans la honte de leur nudité. PR 141 2 Parmi les habitants de la terre, répandus dans toutes les nations, se trouvent des hommes qui n'ont pas fléchi les genoux devant Baal. Semblables aux étoiles qui n'apparaissent qu'à la nuit, ils brilleront lorsque les ténèbres couvriront la terre et l'obscurité les peuples. Dans l'Afrique païenne, dans les pays catholiques d'Europe et de l'Amérique du Sud, en Chine, aux Indes, dans les îles lointaines et dans les lieux les plus reculés du globe, le Seigneur possède un firmament d'âmes d'élite qui apparaîtront dans tout leur éclat au sein des ténèbres, révélant nettement au monde apostat le pouvoir transformateur de sa loi. Déjà aujourd'hui, nous les voyons apparaître dans toute nation, tout peuple, toute tribu et toute langue. A l'heure de la grande apostasie, quand Satan tentera un suprême effort pour que "tous, petits et grands, riches et pauvres, libres et esclaves"16 reçoivent, sous peine de mort, le sceau de l'obéissance à un faux jour de repos, ces fidèles, "sans tache, ni ride, ni rien de semblable", brilleront "comme des flambeaux dans le monde."17 Plus la nuit sera sombre, plus vif sera leur éclat. PR 141 3 Comme il semblait étrange qu'Elie dénombrât les fidèles d'Israël au moment où les jugements de Dieu allaient fondre sur la nation apostate! Il n'avait pu compter, en effet, qu'un seul homme du côté de l'Eternel. Mais lorsqu'il dit: "Je suis resté moi seul, et ils cherchent à m'ôter la vie", et que Dieu lui répondit: "Je laisserai en Israël sept mille hommes, tous ceux qui n'ont point fléchi les genoux devant Baal",18 alors le prophète éprouva un grand étonnement. PR 142 1 Que nul n'essaie donc, de nos jours, de compter les fidèles d'Israël; mais que chacun possède un coeur rempli d'amour, comme celui du Christ, pour sauver les âmes qui se perdent. ------------------------Chapitre 15 -- Josaphat PR 143 1 Jusqu'à son accession au trône de Juda, à l'âge de trentecinq ans, Josaphat avait eu sous les yeux l'exemple du bon roi Asa qui, dans presque toutes les crises, avait fait "ce qui est droit aux yeux de l'Eternel".1 Pendant vingt-cinq ans d'un règne prospère, Josaphat chercha "à marcher dans toute la voie d'Asa, son père, et ne s'en détourna point."2 Tout en s'efforçant de gouverner avec sagesse, il fit l'impossible pour amener ses sujets à résister fermement aux pratiques idolâtres. De nombreuses personnes dans son royaume "offraient encore des sacrifices et des parfums sur les hauts lieux."2 Le roi ne fit pas démolir tout de suite ces autels; mais, dès le début de son règne, il essaya de protéger Juda contre les péchés qui caractérisaient Israël. Ce royaume était alors gouverné par Achab dont Josaphat fut le contemporain un certain nombre d'années. PR 143 2 Josaphat fut fidèle au Seigneur; "il ne rechercha point les Baals; car il eut recours au Dieu de son père, et il suivit ses commandements, sans imiter ce que faisait Israël".3 L'Eternel eut égard à son intégrité, et fut avec lui. Il "affermit la royauté entre ses mains."3 PR 144 1 "Tout Juda apportait des présents" à Josaphat, "qui eut en abondance des richesses et de la gloire. Son coeur grandit dans les voies de l'Eternel."4 A mesure que s'écoulaient les années, et que des réformes s'opéraient, le roi faisait "disparaître de Juda les hauts lieux et les idoles."5 "Il ôta du pays le reste des prostitutions qui s'y trouvaient encore depuis le temps d'Asa, son père."6 C'est ainsi que peu à peu les habitants du royaume furent délivrés du danger qui les menaçait et qui aurait retardé sérieusement leur croissance spirituelle. PR 144 2 Tous les sujets du royaume avaient besoin d'être instruits sur la loi de Dieu. Leur sécurité en dépendait. En conformant leur vie à ses exigences, ils manifesteraient leur loyauté envers Dieu et leurs semblables. Josaphat, qui savait cela, s'efforça d'inculquer à son peuple une connaissance approfondie des saintes Ecritures. Les princes qui gouvernaient les différentes régions du royaume furent chargés d'organiser le fidèle ministère des prêtres pour enseigner le peuple. Ces prêtres exerçaient donc leurs fonctions sous la surveillance directe des princes; ils se rendaient dans "toutes les villes de Juda", et ils enseignaient "parmi le peuple".7 Et alors qu'un grand nombre s'efforçaient de comprendre les exigences de Dieu, un réveil se manifestait. PR 144 3 C'est aux richesses spirituelles dont il fit profiter ses sujets que le règne de Josaphat dut sa prospérité. L'obéissance à la loi divine est, en effet, d'une grande efficacité. Lorsqu'on se conforme à ses exigences, une transformation merveilleuse s'opère qui procure la paix aux hommes de bonne volonté. Si les enseignements de la Parole de Dieu dirigeaient la vie de tout homme et de toute femme, si leur esprit et leur coeur étaient contrôlés par sa puissance bienfaisante, les maux dont souffrent la vie nationale et la vie sociale disparaîtraient. De chaque foyer se dégagerait une influence qui fortifierait les individus dans leur vie spirituelle et morale, de sorte que les nations seraient dans les meilleures conditions possible. PR 145 1 Josaphat vécut en paix pendant de longues années, sans être inquiété par les nations voisines. "La terreur de l'Eternel s'empara de tous les royaumes des pays qui environnaient Juda."8 Les Philistins offrirent à Josaphat des présents et un tribut en argent; les Arabes lui amenèrent de grands troupeaux de moutons et de chèvres. "Josaphat s'élevait au plus haut degré de grandeur. Il bâtit en Juda des châteaux et des villes pour servir de magasins ... et il avait à Jérusalem de vaillants hommes pour soldats ... qui étaient au service du roi, outre ceux que le roi avait placés dans toutes les villes fortes de Juda."9 Comblé de "richesses et de gloire"10 Josaphat put exercer une puissante influence en faveur de la justice et de la vérité. PR 145 2 Quelques années après son accession au trône, Josaphat, qui avait alors atteint l'apogée de la prospérité, consentit que son fils Joram épousât Athalie, fille d'Achab et de Jézabel. Par cette union, les royaumes d'Israël et de Juda formèrent une alliance que le Seigneur désapprouva; elle fut la cause, en effet, dans les périodes de crises, des malheurs qui s'abattirent sur le roi et un grand nombre de ses sujets. PR 145 3 A une certaine occasion, Josaphat rendit visite au roi d'Israël, à Samarie. On lui fit de grands honneurs, et, avant de repartir, il était gagné à l'idée qu'il devait s'unir au roi d'Israël pour lutter contre les Syriens, avec lesquels celui-ci était en guerre. Achab espérait qu'en unissant ses forces à celles de Juda, il pourrait reconquérir Ramoth, ancienne ville de refuge qui, prétendait-il avec juste raison, appartenait aux Israélites. PR 145 4 Mais bien que Josaphat, dans un moment de faiblesse, se fût imprudemment engagé à s'allier au roi d'Israël, il jugea plus sûr de connaître la volonté du Seigneur à cet égard. "Consulte maintenant, je te prie, la parole de l'Eternel", suggéra-t-il à Achab. Celui-ci accéda à son désir, en rassemblant quatre cents faux prophètes de Samarie, auxquels il dit: "Ironsnous attaquer Ramoth en Galaad, ou dois-je y renoncer? Et ils répondirent: Monte, et Dieu la livrera entre les mains du roi."11 PR 145 5 Josaphat, que cette réponse ne satisfaisait pas, chercha à connaître la volonté réelle du Seigneur. "N'y a-t-il plus ici aucun prophète de l'Eternel, par qui nous puissions le consulter"12 demanda-t-il à Achab. "Il y a encore un homme par qui l'on pourrait consulter l'Eternel, répondit celui-ci; mais je le hais, car il ne me prophétise rien de bon, il ne prophétise que du mal: c'est Michée, fils de Jimla".13 Josaphat s'obstina à demander qu'on fît venir l'homme de Dieu, et lorsqu'il se présenta devant les monarques et qu'Achab l'eut fait "jurer de ne dire que la vérité au nom de l'Eternel", le prophète dit: "Je vois tout Israël dispersé sur les montagnes, comme des brebis qui n'ont point de berger; et l'Eternel dit: Ces gens n'ont point de maître, que chacun retourne en paix dans sa maison!"14 PR 146 1 Ces paroles auraient dû suffire aux monarques pour qu'ils comprissent que leur projet n'était pas agréé par Dieu; mais ni l'un ni l'autre ne voulut tenir compte de l'avertissement qui leur était donné. Achab avait manifesté son intention, et il était résolu à la poursuivre. Josaphat, lui, avait donné sa parole d'honneur: "Nous irons l'attaquer (la Syrie) avec toi".15 Après avoir fait une telle promesse, il lui répugnait de reprendre sa parole. "Le roi d'Israël et Josaphat, roi de Juda, montèrent" donc "à Ramoth en Galaad."16 PR 146 2 Au cours de la bataille qui s'ensuivit, Achab fut tué par une flèche, et il mourut le soir. "Au coucher du soleil, on cria par tout le camp: Chacun à sa ville et chacun dans son pays!"17 Ainsi s'accomplit la prophétie de Michée. PR 146 3 Josaphat sortit de ce combat désastreux pour retourner à Jérusalem. Comme il approchait de la ville, il rencontra Jéhu qui lui fit ce reproche: "Doit-on secourir le méchant, et aimes-tu ceux qui haïssent l'Eternel? A cause de cela, l'Eternel est irrité contre toi. Mais il s'est trouvé de bonnes choses en toi, car tu as fait disparaître du pays les idoles, et tu as appliqué ton coeur à chercher Dieu."18 PR 146 4 Josaphat consacra les dernières années de son règne à fortifier les défenses nationales et spirituelles de Juda. Il "fit une tournée parmi le peuple, depuis Beer-Schéba jusquà la montagne d'Ephraïm, et il les ramena à l'Eternel, le Dieu de leurs pères".19 PR 146 5 Parmi les plus importantes initiatives que prit Josaphat, il faut signaler l'établissement et le maintien de cours de justice. "Il établit des juges dans toutes les villes fortes du pays de Juda, dans chaque ville." Et il dit aux juges qu'il nommait: "Prenez garde à ce que vous ferez, car ce n'est pas pour les hommes que vous prononcerez des jugements; c'est pour l'Eternel, qui sera près de vous quand vous les prononcerez. Maintenant, que la crainte de l'Eternel soit sur vous; veillez sur vos actes, car il n'y a chez l'Eternel, notre Dieu, ni iniquité, ni égards pour l'apparence des personnes, ni acceptation de présents."20 L'administration judiciaire fut perfectionnée par la création d'une cour d'appel à Jérusalem, où Josaphat "établit des Lévites, des sacrificateurs et des chefs de maisons paternelles d'Israël ... pour les jugements de l'Eternel et pour les contestations."21 PR 147 1 Le roi exhorta les juges à demeurer fidèles au Seigneur. Il leur fit ces recommandations: "Vous agirez de la manière suivante dans la crainte de l'Eternel, avec fidélité et avec intégrité de coeur. Dans toute contestation qui vous sera soumise par vos frères, établis dans leurs villes, relativement à un meurtre, à une loi, à un commandement, à des préceptes et à des ordonnances, vous les éclairerez, afin qu'ils ne se rendent pas coupables envers l'Eternel, et que sa colère n'éclate pas sur vous et sur vos frères. C'est ainsi que vous agirez, et vous ne serez point coupables. PR 147 2 "Et voici, vous avez à votre tête Amaria, le souverain sacrificateur, pour toutes les affaires de l'Eternel, et Zebadia, fils d'Ismaël, chef de la maison de Juda, pour toutes les affaires du roi, et vous avez devant vous des Lévites comme magistrats. Fortifiez-vous et agissez, et que l'Eternel soit avec celui qui fera le bien!"22 PR 147 3 Dans le soin qu'il apportait à la sauvegarde des droits et des libertés de ses sujets, Josaphat insistait sur la sollicitude dont le Dieu de justice qui règne sur l'univers entoure chaque membre de la famille humaine. "Dieu se tient dans l'assemblée de Dieu; il juge au milieu des dieux." Ceux qui remplissent les fonctions de juges au-dessous de lui, doivent rendre "justice au faible et à l'orphelin"; ils feront "droit au malheureux et au pauvre" et les délivreront "de la main des méchants".23 PR 147 4 Vers la fin du règne de Josaphat, le royaume de Juda fut envahi par une armée qui fit, avec raison, trembler les habitants de ce pays. "Les fils de Moab et les fils d'Ammon, et avec eux des Maonites, marchèrent contre Josaphat pour lui faire la guerre." La nouvelle de cette invasion parvint au roi par l'intermédiaire d'un messager. "Une multitude nombreuse s'avance contre toi, lui dit-il, depuis l'autre côté de la mer, depuis la Syrie, et ils seront à Hatsatson-Thamar, qui est En-Guédi."24 PR 148 1 Josaphat était un homme courageux. Pendant de longues années, il avait renforcé ses troupes et fortifié ses villes. Il était donc bien préparé pour faire face à n'importe quel ennemi. Et pourtant, devant le danger, il ne plaçait pas sa confiance en luimême. Ses armées bien disciplinées, ses villes fortes ne pouvaient à elles seules lui assurer la victoire. C'est sur le Dieu d'Israël qu'il comptait. C'est ainsi qu'il vaincrait les païens qui se promettaient d'infliger une défaite au royaume de Juda aux yeux de toutes les nations. PR 148 2 "Dans sa frayeur, Josaphat se disposa à chercher l'Eternel, et il publia un jeûne pour tout Juda. Juda s'assembla pour invoquer l'Eternel, et l'on vint de toutes les villes de Juda pour chercher l'Eternel." PR 148 3 Debout au parvis du temple, devant son peuple, Josaphat se livra à la prière. Il se réclama des promesses de Dieu tout en confessant la faiblesse d'Israël. "Eternel, Dieu de nos pères, s'écria-t-il, n'es-tu pas Dieu dans les cieux, et n'est-ce pas toi qui domines sur tous les royaumes des nations? N'est-ce pas toi qui as en main la force et la puissance, et à qui nul ne peut résister? N'est-ce pas toi, ô notre Dieu, qui as chassé les habitants de ce pays devant ton peuple d'Israël, et qui l'as donné pour toujours à la postérité d'Abraham qui t'aimait? Ils l'ont habité, et ils t'y ont bâti un sanctuaire pour ton nom, en disant: S'il nous survient quelque calamité, l'épée, le jugement, la peste ou la famine, nous nous présenterons devant cette maison et devant toi, car ton nom est dans cette maison, nous crierons à toi du sein de notre détresse, et tu exauceras et tu sauveras! PR 148 4 " Maintenant voici, les fils d'Ammon et de Moab et ceux de la montagne de Séir, chez lesquels tu n'as pas permis à Israël d'entrer quand il venait du pays d'Egypte -- car il s'est détourné d'eux et ne les a pas détruits -- les voici qui nous récompensent en venant nous chasser de ton héritage, dont tu nous as mis en possession. O notre Dieu, n'exerceras-tu pas tes jugements sur eux? Car nous sommes sans force devant cette multitude nombreuse qui s'avance contre nous, et nous ne savons que faire, mais nos yeux sont sur toi."25 PR 149 1 Josaphat pouvait dire avec confiance au Seigneur: "Nos yeux sont sur toi." Pendant des années il avait appris à son peuple à se confier en celui qui était si souvent intervenu dans le passé pour sauver ses élus d'une destruction totale. Devant le péril, il ne se sentait donc pas seul. "Tout Juda se tenait debout devant l'Eternel, avec leurs petits enfants, leurs femmes et leurs fils."26 Ensemble ils jeûnèrent et prièrent. Ils supplièrent le Seigneur de mettre les ennemis en déroute, afin que son nom soit glorifié. PR 149 2 Avec le Psalmiste ils pouvaient dire: PR 149 3 O Dieu, ne reste pas dans le silence! Ne te tais pas, et ne te repose pas, ô Dieu! Car voici, tes ennemis s'agitent, Ceux qui te haïssent lèvent la tête. Ils forment contre ton peuple des projets pleins de ruse, Et ils délibèrent contre ceux que tu protèges. Venez, disent-ils, exterminons-les du milieu des nations, Et qu'on ne se souvienne plus du nom d'Israël! PR 149 4 Ils se concertent tous d'un même coeur, Ils font une alliance contre toi; Les tentes d'Edom et les Ismaélites, Moab et les Hagaréniens, Guebal, Ammon, Amalek ... Traite-les comme Madian, Comme Sisera, comme Jabin au torrent de Kison! ... Qu'ils soient confus et épouvantés pour toujours, Qu'ils soient honteux et qu'ils périssent! Qu'ils sachent que toi seul, dont le nom est l'Eternel, Tu es le Très-Haut sur toute la terre! PR 149 5 Et alors que le peuple se joignait au roi pour s'humilier devant le Seigneur, et lui demander son secours, l'Esprit d'en haut descendit sur Jachaziel, "Lévite, d'entre les fils d'Asaph", et il dit: "Soyez attentifs, tout Juda et habitants de Jérusalem, et toi, roi Josaphat! Ainsi vous parle l'Eternel: Ne craignez point et ne vous effrayez point devant cette multitude nombreuse, car ce ne sera pas vous qui combattrez, ce sera Dieu. Demain, descendez contre eux; ils vont monter par la colline de Tsits, et vous les trouverez à l'extrémité de la vallée, en face du désert de Jeruel. Vous n'aurez point à combattre en cette affaire: présentez-vous, tenez-vous là, et vous verrez la délivrance que l'Eternel vous accordera. Juda et Jérusalem, ne craignez point et ne vous effrayez point, demain, sortez à leur rencontre, et l'Eternel sera avec vous! PR 150 1 " Josaphat s'inclina le visage contre terre, et tout Juda et les habitants de Jérusalem tombèrent devant l'Eternel pour se prosterner en sa présence. Les Lévites d'entre les fils des Kéhathites et d'entre les fils des Koréites se levèrent pour célébrer d'une voix forte et haute l'Eternel, le Dieu d'Israël." PR 150 2 Le lendemain, de très bonne heure, ils se mirent en marche pour se rendre au désert de Tékoa. Et comme ils se disposaient à combattre, Josaphat leur dit: "Ecoutez-moi, Juda et habitants de Jérusalem! Confiez-vous en l'Eternel, votre Dieu, et vous serez affermis; confiez-vous en ses prophètes, et vous réussirez. Puis, d'accord avec le peuple, il nomma des chantres qui ... célébraient l'Eternel."28 Ces chantres précédaient l'armée, et il louaient le Seigneur pour la victoire promise. PR 150 3 Quelle étrange façon d'affronter une armée ennemie! Des chants de louange pour glorifier le Dieu d'Israël, c'était le cri de guerre de ces hommes de foi. Ils possédaient la "sainte magnificence". Si, de nos jours, on adressait davantage de louanges au Seigneur, la foi, le courage et l'espoir s'accroîtraient grandement. C'est ainsi que seraient fortifiés les vaillants défenseurs de la vérité. PR 150 4 "L'Eternel plaça une embuscade contre les fils d'Ammon et de Moab et ceux de la montagne de Séir, qui étaient venus contre Juda. Et ils furent battus. Les fils d'Ammon et de Moab se jetèrent sur les habitants de la montagne de Séir pour les dévouer par interdit et les exterminer; et quand ils en eurent fini avec les habitants de Séir, ils s'aidèrent les uns les autres à se détruire, PR 151 1 " Lorsque Juda fut arrivé sur la hauteur d'où l'on aperçoit le désert, ils regardèrent du côté de la multitude, et voici, c'étaient des cadavres étendus à terre, et personne n'avait échappé."29 PR 151 2 En temps de crise, le Seigneur était la force de Juda, comme il l'est aujourd'hui encore de son peuple. Ne nous confions donc ni dans les monarques ni dans les hommes que nous serions tentés de mettre à la place de Dieu. Souvenons-nous que les êtres humains que nous sommes sont faillibles et répréhensibles. Celui qui possède la toute-puissance est notre haute retraite. Rappelons-nous que, dans n'importe quelle circonstance, c'est lui qui combat. Ses possibilités sont illimitées, et plus les apparences nous semblent contraires, plus éclatante est la victoire. PR 151 3 Le Psalmiste chantait: PR 151 4 Sauve-nous, Dieu de notre salut, Rassemble-nous, et retire-nous du milieu des nations, Afin que nous célébrions ton saint nom Et que nous mettions notre gloire à te louer! PR 151 5 Chargés des dépouilles de l'ennemi, les soldats de Juda revinrent à Jérusalem "joyeux ... car l'Eternel les avait remplis de joie en les délivrant de leurs ennemis. Ils entrèrent à Jérusalem et dans la maison de l'Eternel, au son des luths, des harpes et des trompettes."31 Grandes furent leurs réjouissances. En obéissant à ce commandement: "Tenez-vous là, et vous verrez la délivrance que l'Eternel vous accordera ... ne craignez point et ne vous effrayez point",32 ils avaient mis toute leur confiance en Dieu, qui s'était manifesté à leur égard comme une forteresse libératrice. PR 151 6 Ils comprenaient bien alors les hymnes inspirés de David: PR 151 7 Dieu est pour nous un refuge et un appui, Un secours qui ne manque jamais dans la détresse. ... Il a brisé l'arc, et il a rompu la lance, Il a consumé par le feu les chars de guerre. Arrêtez, et sachez que je suis Dieu: Je domine sur les nations, je domine sur la terre. L'Eternel des armées est avec nous, Le Dieu de Jacob est pour nous une haute retraite. Comme ton nom, ô Dieu! Ta louange retentit jusqu'aux extrémités de la terre; Ta droite est pleine de justice. La montagne de Sion se réjouit, Les filles de Juda sont dans l'allégresse, A cause de tes jugements. ... PR 152 1 Voilà le Dieu qui est notre Dieu éternellement et à jamais; Il sera notre guide jusqu'à la mort. PR 152 2 Grâce à la foi du roi de Juda et de ses armées, "la terreur de l'Eternel s'empara de tous les royaumes des autres pays, lorsqu'ils apprirent que l'Eternel avait combattu contre les ennemis d'Israël. Et le royaume de Josaphat fut tranquille, et son Dieu lui donna du repos de tous côtés."35 ------------------------Chapitre 16 -- Ruine de la maison d'Achab PR 153 0 Ce chapitre est basé sur 1 Rois 21; 2 Rois 1. PR 153 1 L'influence néfaste exercée par Jézabel sur Achab, dès le début de leur mariage, continua à se faire sentir jusqu'à la fin de la vie du monarque. Il en résulta des actes de violence et d'infamie tels qu'on en trouve rarement dans le récit sacré. "Il n'y a eu personne qui se soit vendu comme Achab pour faire ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, et Jézabel, sa femme, l'y excitait." PR 153 2 Ambitieux de nature, et encouragé par Jézabel, Achab suivit ses mauvais penchants, et l'égoïsme le domina entièrement. Il ne pouvait admettre qu'on s'opposât à ses désirs; il pensait que tout ce qui lui faisait plaisir devait lui appartenir de droit. PR 153 3 Ce trait déplorable qui eut une influence si désastreuse sur le sort du royaume, sous le règne des successeurs d'Achab, se révéla dans un incident qui eut lieu alors qu'Elie était encore prophète en Israël. A côté du palais royal se trouvait une vigne appartenant à Naboth de Jizreel. Achab décida de s'en emparer. Il lui proposa de l'acheter, ou de lui donner en échange une autre vigne. "Cède-moi ta vigne, dit-il à Naboth, pour que j'en fasse un jardin potager, car elle est tout près de ma maison. Je te donnerai à la place une vigne meilleure; ou, si cela te convient, je te paierai la valeur en argent." PR 154 1 Mais Naboth considérait que sa vigne avait un prix inestimable, car elle avait appartenu à ses pères. Il refusa donc de s'en défaire. "Que l'Eternel, dit-il, me garde de te donner l'héritage de mes pères!" Selon le code lévitique, on ne pouvait se défaire d'une terre à perpétuité ni par vente, ni par échange. Les enfants d'Israël devaient conserver "l'héritage de la tribu de leurs pères".1 PR 154 2 Le refus de Naboth rendit malade l'égoïste monarque. "Achab rentra dans sa maison, triste et irrité, à cause de cette parole que lui avait dite Naboth de Jizreel. ... Il se coucha sur son lit, détourna le visage, et ne mangea rien." PR 154 3 Jézabel connut bientôt les détails de cet incident. Courroucée d'apprendre que quelqu'un avait pu refuser d'accéder à la demande du roi, elle assura Achab que sa tristesse n'était pas justifiée. "Est-ce bien toi maintenant, lui dit-elle, qui exerces la souveraineté sur Israël? Lève-toi, prends de la nourriture, et que ton coeur se réjouisse; moi, je te donnerai la vigne de Naboth de Jizreel." PR 154 4 Achab ne se soucia pas de la manière qu'emploierait sa femme pour obtenir l'objet de sa convoitise. Jézabel, elle, mit aussitôt ses noirs desseins à exécution. Elle écrivit des lettres au nom du roi, qu'elle scella de son sceau; puis, elle les envoya aux anciens et aux magistrats de la ville où demeurait Naboth. "Publiez un jeûne, leur disait-elle; placez Naboth à la tête du peuple, et mettez en face de lui deux méchants hommes qui déposeront ainsi contre lui: Tu as maudit Dieu et le roi! Puis menez-le dehors, lapidez-le, et qu'il meure." PR 154 5 Cet ordre fut exécuté. "Les gens de la ville de Naboth, les anciens et les magistrats ... agirent comme Jézabel le leur avait ... écrit dans les lettres qu'elle leur avait envoyées." Alors Jézabel se rendit auprès du roi, et lui ordonna de se lever pour prendre possession de la vigne en question. Achab suivit ce conseil aveuglément, sans s'inquiéter des conséquences qui s'ensuivraient. Il alla donc s'emparer de la propriété convoitée. PR 155 1 Mais il ne fut pas permis au roi, sans être repris, de jouir d'un bien acquis par la fraude et le crime. "La parole de l'Eternel fut adressée à Elie, le Thischbite, en ces mots: Lève-toi, descends au-devant d'Achab, roi d'Israël à Samarie; le voilà dans la vigne de Naboth, où il est descendu pour en prendre possession. Tu lui diras: Ainsi parle l'Eternel: N'es-tu pas un assassin et un voleur?" Et le Seigneur continua à révéler au prophète qu'il devait prononcer contre le roi un châtiment terrible. PR 155 2 Elie s'empressa de délivrer le message divin à Achab. Le monarque coupable et le messager sévère de l'Eternel se trouvèrent à nouveau face à face, cette fois dans la vigne extorquée. Effrayé, Achab s'écria: "M'as-tu trouvé, mon ennemi?" Le prophète répondit sans hésiter: "Je t'ai trouvé, parce que tu t'es vendu pour faire ce qui est mal aux yeux de l'Eternel. Voici, je vais faire venir le malheur sur toi; je te balaierai, j'exterminerai quiconque appartient à Achab." Aucune indulgence ne devait être accordée. La maison d'Achab serait totalement détruite. "Je rendrai ta maison semblable à la maison de Jéroboam, fils de Nebath, et à la maison de Baescha, fils d'Achija, dit l'Eternel par la bouche de son serviteur, parce que tu m'as irrité et que tu as fait pécher Israël." PR 155 3 Et le Seigneur ajouta au sujet de Jézabel: "Les chiens mangeront Jézabel près du rempart de Jizreel. Celui de la maison d'Achab qui mourra dans la ville sera mangé par les chiens, et celui qui mourra dans les champs sera mangé par les oiseaux du ciel." PR 155 4 Après avoir entendu ce message épouvantable, le roi "déchira ses vêtements, il mit un sac sur son corps, et il jeûna; il couchait avec ce sac, et il marchait lentement". PR 155 5 "La parole de l'Eternel fut adressée à Elie, le Thischbite, en ces mots: As-tu vu comment Achab s'est humilié devant moi? Parce qu'il s'est humilié devant moi, je ne ferai pas venir le malheur pendant sa vie; ce sera pendant la vie de son fils que je ferai venir le malheur sur sa maison." PR 156 1 Moins de trois ans plus tard, le roi Achab trouva la mort dans la guerre contre les Syriens. Achazia, son successeur, "fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, et il marcha dans la voie de son père et dans la voie de sa mère, et dans la voie de Jéroboam. ... Il servit Baal et se prosterna devant lui, et il irrita l'Eternel, le Dieu d'Israël, comme avait fait son père."2 Mais le châtiment ne tarda pas à atteindre le roi rebelle. Une guerre désastreuse contre Moab, puis un accident qui faillit lui coûter la vie témoignèrent de la colère de Dieu à son égard. PR 156 2 Achazia tomba "par le treillis de sa chambre haute", et il se blessa grièvement. Comme il éprouvait de sérieuses inquiétudes sur son sort, il envoya quelques-uns de ses serviteurs demander à Baal-Zebub, dieu d'Ekron, s'il guérirait. Le dieu d'Ekron était réputé pour sa connaissance de l'avenir, qu'il révélait par l'intermédiaire de ses prêtres. Des foules de gens venaient l'interroger au sujet des événements futurs. Mais ces prédictions provenaient du prince des ténèbres. PR 156 3 Les serviteurs d'Achazia rencontrèrent un homme de Dieu qui leur ordonna de retourner vers le roi, et de lui dire: "Est-ce parce qu'il n'y a point de Dieu en Israël que tu envoies consulter Baal-Zebub, dieu d'Ekron? C'est pourquoi tu ne descendras pas du lit sur lequel tu es monté, car tu mourras." Et après avoir délivré son message, le prophète disparut. PR 156 4 Les serviteurs tout décontenancés se hâtèrent de retourner vers le roi, et ils lui rapportèrent les paroles de l'homme de Dieu. Achazia leur demanda: "Quel air avait cet homme?" Ils répondirent: "C'était un homme vêtu de poil et ayant une ceinture de cuir autour des reins." Et le roi s'écria: "C'est Elie, le Thischbite." Il savait que si celui que ses messagers avaient rencontré était bien Elie, la sentence se réaliserait sûrement. Désireux de détourner de lui, si possible, le châtiment qui le menaçait, il décida de faire chercher le prophète. PR 156 5 Par deux fois Achazia envoya une compagnie de soldats pour intimider Elie; par deux fois aussi la colère de Dieu tomba sur eux et les châtia. PR 157 1 Une troisième compagnie s'humilia devant le Seigneur. En s'approchant du prophète, le capitaine "fléchit les genoux devant Elie, et il lui dit en suppliant: Homme de Dieu, que ma vie, je te prie, et que la vie de ces cinquante hommes, tes serviteurs, soit précieuse à tes yeux!" PR 157 2 "L'ange de l'Eternel dit à Elie: Descends avec lui, n'aie aucune crainte de lui. Elie se leva et descendit avec lui vers le roi. Il lui dit: Ainsi parle l'Eternel: Parce que tu as envoyé des messagers pour consulter Baal-Zebub, dieu d'Ekron, comme s'il n'y avait en Israël point de Dieu dont on puisse consulter la parole, tu ne descendras pas du lit sur lequel tu es monté, car tu mourras." PR 157 3 Pendant le règne de son père, Achazia avait été témoin des oeuvres merveilleuses du Très-Haut. Il avait assisté aux terribles manifestations de la puissance divine à l'égard du peuple apostat d'Israël, et il s'était rendu compte de la manière dont le Seigneur juge ceux qui refusent de se soumettre aux exigences de sa loi. Mais il agissait comme si ces vérités solennelles n'étaient que des contes frivoles. Au lieu d'humilier son coeur devant Dieu, il suivait Baal qu'il s'était finalement risqué à consulter pendant sa maladie, se livrant ainsi au plus audacieux des actes d'impiété. Révolté, n'éprouvant aucun désir de se repentir, Achazia mourut "selon la parole de l'Eternel prononcée par Elie". PR 157 4 Le récit du péché d'Achazia et de son châtiment comporte un avertissement auquel nul ne devrait rester indifférent. Aujourd'hui, les hommes peuvent ne pas rendre hommage aux dieux païens, et cependant des milliers d'entre eux adorent Satan comme le fit le roi d'Israël. L'esprit d'idolâtrie règne dans le monde, bien que sous l'influence de la science il ait pris des formes plus raffinées et plus séduisantes qu'à l'époque où Achazia consultait le dieu d'Ekron. Chaque jour nous fournit la triste preuve que la foi dans la parole prophétique diminue, alors que la superstition et la sorcellerie satanique captivent l'esprit des foules. PR 157 5 De nos jours, les mystères du culte païen sont remplacés par des associations et des réunions secrètes, par des séances de médiums spirites qui ont lieu dans l'obscurité. Les révélations de ces médiums sont reçues avec avidité par des milliers de personnes qui refusent d'accepter la lumière de la Parole de Dieu. Les adeptes du spiritisme peuvent parler avec dérision des magiciens de l'Antiquité, le grand séducteur triomphe lorsque ceux-ci se livrent à ses artifices sous une forme différente. PR 158 1 Il en est beaucoup qui frissonnent d'horreur à la pensée de consulter des médiums spirites, alors qu'ils sont fascinés par des formes plus agréables du spiritisme. Ils se laissent séduire par les enseignements de la science chrétienne, par le mysticisme de la théosophie, ou d'autres religions orientales. PR 158 2 Les disciples de la plupart des formes du spiritisme prétendent posséder le pouvoir de la guérison. Ils attribuent ce pouvoir à l'électricité, au magnétisme, aux remèdes dits "sympathiques", ou aux forces latentes du cerveau de l'homme. Ils sont nombreux ceux qui, à notre époque, vont consulter ces guérisseurs, au lieu de mettre leur confiance dans le Dieu vivant, ou dans l'habileté de médecins qualifiés. La mère qui veille auprès du lit de son enfant malade s'écrie: "Je ne puis plus rien faire! N'y a-t-il aucun médecin qui soit capable de le guérir?" On lui a parlé de cures merveilleuses opérées par certains guérisseurs, certains magnétiseurs, et elle confie son enfant bien-aimé aux soins de l'un d'entre eux, le plaçant ainsi entre les mains de Satan aussi sûrement que si cet ennemi était auprès d'elle. Dans de nombreux cas, il arrive que l'enfant continue à être sous le contrôle d'une puissance satanique, qu'il ne semble pas possible de vaincre. PR 158 3 Dieu avait des raisons pour être mécontent de l'impiété d'Achazia. Que n'avait-il pas fait pour gagner le peuple d'Israël, et l'engager à se confier en lui? Pendant des années, il lui avait donné des preuves de sa bonté et de son amour incomparables. Dès les origines, il avait montré qu'il trouvait son "bonheur parmi les fils de l'homme".3 Il avait été un secours pour tous ceux qui le recherchaient sincèrement. Et cependant, le roi d'Israël se détourna de l'Eternel pour chercher un appui auprès du plus grand ennemi de son peuple. Il déclara aux païens qu'il se confiait davantage dans leurs idoles que dans le Dieu du ciel. Aujourd'hui, les hommes déshonorent le Seigneur de la même manière, en se détournant de la source de la sagesse et de la puissance pour demander aide et conseil aux forces ténébreuses. Si la colère divine s'alluma par l'acte d'impiété d'Achazia, à combien plus forte raison ne s'allumera-t-elle pas contre nous, qui avons de plus grandes lumières que ce roi et qui suivons cependant une voie identique à la sienne. PR 159 1 Ceux qui s'adonnent à la sorcellerie diabolique, peuvent se vanter d'en avoir reçu un grand bien; mais est-ce la preuve que leur conduite est sage ou sûre? Qu'importe si la vie est prolongée; qu'importe si les biens temporels sont assurés. Quel profit en tirera-t-on finalement si l'on méprise la volonté divine? Tous ces avantages apparents s'avéreront comme autant de pertes irréparables. Ce n'est pas impunément que nous pouvons renverser l'unique barrière que le Seigneur a dressée pour mettre son peuple à l'abri des atteintes de Satan. PR 159 2 Achazia n'ayant pas de fils, ce fut Joram, son frère, qui lui succéda. Il régna pendant douze ans sur les dix tribus d'Israël. Sa mère, Jézabel, qui vivait encore, continua d'exercer sa mauvaise influence sur les affaires de la nation. De nombreuses personnes pratiquaient toujours les coutumes idolâtres. Joram lui-même "fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, non pas toutefois comme son père et comme sa mère. Il renversa les statues de Baal que son père avait faites; mais il se livra aux péchés de Jéroboam, fils de Nebath, qui avait fait pécher Israël, et il ne s'en détourna point."4 PR 159 3 C'est sous le règne de Joram que mourut Josaphat. Son fils qui s'appelait aussi Joram monta sur le trône de Juda. Par son mariage avec la fille d'Achab et de Jézabel, il était apparenté au roi d'Israël. Il pratiqua le culte de Baal "comme avait fait la maison d'Achab. ... Joram fit même des hauts lieux dans les montagnes de Juda; il poussa les habitants de Jérusalem à la prostitution, et il séduisit Juda."5 PR 159 4 Mais l'apostasie de Juda ne devait pas se prolonger sans recevoir son châtiment. Le prophète Elie n'avait pas encore été enlevé. Comment aurait-il pu garder le silence, alors que le royaume s'adonnait aux pratiques mêmes qui avaient amené la perte d'Israël? Il envoya donc un message contenant de terribles menaces contre le roi et contre son peuple. PR 160 1 "Ainsi parle l'Eternel, le Dieu de David, ton père, disait-il. Parce que tu n'as pas marché dans les voies de Josaphat, ton père, et dans les voies d'Asa, roi de Juda, mais que tu as marché dans la voie des rois d'Israël; parce que tu as entraîné à la prostitution Juda et les habitants de Jérusalem, comme l'a fait la maison d'Achab à l'égard d'Israël; et parce que tu as fait mourir tes frères, meilleurs que toi, la maison même de ton père; voici, l'Eternel frappera ton peuple d'une grande plaie, tes fils, tes femmes, et tout ce qui t'appartient; et toi, il te frappera d'une maladie violente, d'une maladie d'entrailles, qui augmentera de jour en jour jusqu'à ce que tes entrailles sortent par la force du mal." PR 160 2 Pour accomplir cette prophétie, "l'Eternel excita contre Joram l'esprit des Philistins et des Arabes qui sont dans le voisinage des Ethiopiens. Ils montèrent contre Juda, y firent une invasion, pillèrent toutes les richesses qui se trouvaient dans la maison du roi, et emmenèrent ses fils et ses femmes, de sorte qu'il ne lui resta d'autre fils que Joachaz, le plus jeune de ses fils. Après tout cela, l'Eternel le frappa d'une maladie d'entrailles qui était sans remède; elle augmenta de jour en jour, et sur la fin de la seconde année les entrailles de Joram sortirent par la force de son mal. Il mourut dans de violentes souffrances. ... Et Achazia, son fils, régna à sa place."6 PR 160 3 Joram, fils d'Achab, régnait encore sur Israël quand son neveu Achazia monta sur le trône de Juda. Achazia ne régna qu'une année, au cours de laquelle il subit la néfaste influence de sa mère Athalie, qui lui donnait "des conseils impies". "Et il marcha dans les voies de la maison d'Achab. ... Il fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel."7 Jézabel, sa grand-mère, vivait encore. Mal conseillé, le roi s'allia imprudemment avec Joram, roi d'Israël, son oncle. Achazia allait, d'ailleurs, bientôt connaître une fin tragique. Les survivants de la maison d'Achab furent "de vrais conseillers pour sa perte".8 Au cours d'une visite qu'Achazia rendait à son oncle à Jizreel, le Seigneur ordonna au prophète Elisée d'envoyer l'un des fils des prophètes à Ramoth en Galaad, pour oindre Jéhu, roi d'Israël. Les armées alliées de Juda et d'Israël combattaient à ce moment-là à Ramoth, en Galaad. Le roi Joram fut blessé au cours d'une bataille, et il retourna à Jizreel, abandonnant à Jéhu la charge des armées. PR 161 1 En oignant Jéhu, le messager d'Elisée avait déclaré: "Je t'oins roi d'Israël, du peuple de l'Eternel." Il avait ensuite solennellement confié à Jéhu une mission de la part de Dieu: "Tu frapperas la maison d'Achab, ton maître, et je vengerai sur Jézabel le sang de mes serviteurs les prophètes et le sang de tous les serviteurs de l'Eternel. Toute la maison d'Achab périra."9 PR 161 2 Après avoir été proclamé roi par l'armée, Jéhu se hâta de retourner à Jérusalem, où il commença à exécuter les ordres qui lui avaient été donnés concernant ceux qui s'étaient livrés au péché tout en égarant le peuple. Joram, roi d'Israël, Achazia, roi de Juda, et Jézabel, la reine-mère, et "tous ceux qui restaient dans la maison d'Achab à Jizreel, tous ses grands, ses familiers et ses ministres" furent massacrés, "sans en laisser échapper un seul". "Tous les prophètes de Baal, tous ses serviteurs et tous ses prêtres" qui demeuraient au centre du culte de Baal, près de Samarie, furent exterminés. Les statues et les idoles furent brisées et brûlées, le temple démoli: "Ainsi Jéhu extermina Baal du milieu d'Israël."10 PR 161 3 La nouvelle de cette extermination parvint aux oreilles d'Athalie, fille de Jézabel, qui régnait encore en souveraine dans le royaume de Juda. Lorsqu'elle apprit que son fils était mort, "elle se leva et fit périr toute la race royale". Tous les descendants de David, prétendants au trône, moururent dans ce massacre, à l'exception d'un bébé nommé Joas, que la femme du grand prêtre Jéhojada cacha dans la maison de Dieu. L'enfant resta ainsi caché pendant six ans, alors qu'Athalie "régnait dans le pays"11 Lorsqu'il eut sept ans, "les Lévites et tout Juda".12 s'entendirent avec Jehojada, le grand prêtre, pour couronner et oindre Joas, qu'ils proclamèrent roi. "Et frappant des mains, ils dirent: Vive le roi!"13 PR 162 1 "Athalie entendit le bruit du peuple accourant et célébrant le roi, et elle vint vers le peuple à la maison de l'Eterne."14 "Et voici, le roi se tenait sur l'estrade, selon l'usage; les chefs et les trompettes étaient près du roi: tout le peuple du pays était dans la joie, et l'on sonnait des trompettes. Athalie déchira ses vêtements, et cria: Conspiration! Conspiration!"15 Mais Jehojada ordonna aux officiers de l'armée de se saisir d'Athalie et de tous ceux qui la suivaient; puis de les faire sortir du temple pour les conduire au lieu d'exécution où ils furent massacrés. PR 162 2 Ainsi périt le dernier membre de la maison d'Achab. Les terribles maux engendrés par l'alliance d'Achab et de Jézabel sévirent jusqu'au moment où disparut la dernière descendante de cette maison. Athalie était arrivée en effet à entraîner dans l'idolâtrie de nombreuses personnes, même dans ce pays de Juda où le culte du vrai Dieu n'avait jamais été rejeté d'une façon formelle. PR 162 3 Immédiatement après l'exécution de la reine impénitente, "tout le peuple du pays entra dans la maison de Baal, et ils la démolirent; ils brisèrent entièrement ses autels et ses images, et ils tuèrent devant les autels Matthan, prêtre de Baal".16 PR 162 4 Une heureuse réforme s'ensuivit. Ceux qui avaient participé à l'accession de Joas au trône traitèrent une alliance solennelle, "par laquelle ils devaient être le peuple de l'Eternel". Et maintenant que la néfaste influence de la fille de Jézabel ne se faisait plus sentir en Juda, que les prêtres de Baal avaient été massacrés et leur temple détruit, "tout le peuple du pays se réjouissait, et la ville était tranquille".17 ------------------------Chapitre 17 -- L'appel d'Elisée PR 163 1 Dieu avait ordonné à Elie d'oindre un autre prophète à sa place. "Tu oindras, lui avait-il dit, Elisée, fils de Schaphath ... pour prophète à ta place."1 Obéissant à cette injonction, le prophète partit à la recherche d'Elisée. Et alors qu'il se dirigeait vers le nord, il admirait le spectacle qui s'offrait à ses yeux. Comme le paysage s'était transformé en peu de temps! Le sol desséché, les champs incultes avaient fait place à un site riant. La végétation s'étalait de toute part comme pour se rattraper de la sécheresse et de la famine qui avaient sévi au cours des trois ans et demi où il n'était tombé ni rosée, ni pluie. PR 163 2 Le père d'Elisée était un riche propriétaire terrien. Les gens de sa maison faisaient partie des fidèles qui n'avaient pas fléchi le genou devant Baal, au moment où l'apostasie régnait presque universellement dans le pays. Là, on honorait le Seigneur et on obéissait strictement aux préceptes divins, préceptes qui servaient de règle à la vie quotidienne. C'est dans cette atmosphère qu'Elisée vécut ses premières années. Dans le calme de la vie champêtre, il reçut les enseignements de Dieu et de la nature, tout en étant soumis à la discipline du travail. On l'habitua à observer la simplicité, l'obéissance aux parents et au Seigneur, ce qui lui permit d'assumer par la suite les plus grandes responsabilités. PR 164 1 L'appel prophétique parvint à Elisée alors qu'il labourait les champs avec les domestiques de son père. Le futur prophète possédait à la fois les capacités d'un chef et l'humilité d'un serviteur. Doué d'un esprit de douceur et de paix, il savait néanmoins être ferme et énergique. Il se caractérisait par son intégrité, sa fidélité, son amour et sa crainte de Dieu. Dans l'humble cadre de son labeur quotidien, il acquit un caractère noble et résolu, tandis qu'il croissait en grâce et en connaissance. Tout en collaborant avec son père aux travaux domestiques, il apprenait à collaborer avec Dieu. PR 164 2 La fidélité témoignée par Elisée dans les petites choses le préparait à de plus grandes. Chaque jour il acquérait dans son travail l'expérience nécessaire pour une oeuvre plus vaste et plus noble. Il apprenait à servir et, en servant, à instruire et à conduire les hommes. Sa vie comporte pour nous une leçon précieuse. Nul ne connaît les desseins de Dieu dans la discipline qu'il nous impose. Mais nous pouvons avoir l'assurance que la fidélité dans les petites choses est la preuve que nous arriverons à assumer de plus grandes responsabilités. PR 164 3 Le caractère se révèle dans tous les actes de la vie quotidienne, et seul celui qui se montre "un ouvrier qui n'a point à rougir",2 sera honoré par le Seigneur dans l'accomplissement d'une noble tâche. L'homme qui croit que l'exécution des devoirs de moindre importance ne tire pas à conséquence ne se montre pas digne d'occuper une situation plus honorable. Il peut s'estimer très compétent pour assumer de grandes tâches, mais Dieu en juge autrement; il voit au fond des choses et non superficiellement. Après l'avoir éprouvé, il lui adresse cette sentence: "Tu as été pesé dans la balance et tu as été trouvé trop léger." Son infidélité se retourne contre lui; il ne reçoit ni la grâce, ni la force, ni la fermeté que le Seigneur accorde à ceux qui se soumettent entièrement à sa volonté. PR 165 1 D'aucuns qui ne sont pas engagés dans l'oeuvre du Maître s'imaginent que leur vie est inutile, qu'ils ne font rien pour l'avancement du règne de Dieu. Avec quelle joie ils se chargeraient d'une tâche importante! Et parce qu'ils ne sont utiles que dans des travaux secondaires, ils se croient autorisés à ne rien faire. Ils font complètement fausse route en agissant de la sorte. Un homme est actif au service de Dieu lorsqu'il accomplit sa tâche de tous les jours: soit qu'il abatte un arbre, qu'il défriche son champ ou suive sa charrue. La mère de famille qui élève son enfant pour le Christ fait un travail pour le Seigneur tout aussi important que celui du pasteur. PR 165 2 Certains chrétiens voudraient posséder des dons spéciaux pour accomplir un travail remarquable. Ils en arrivent ainsi à perdre de vue les devoirs de la vie quotidienne, devoirs qui offriraient une saveur charmante s'ils étaient accomplis fidèlement. Que ces chrétiens-là fassent le travail placé sur leur chemin. Le succès d'une entreprise dépend beaucoup moins du talent que de l'énergie et de la volonté. Pour faire un travail profitable, il n'est pas nécessaire d'avoir des dons exceptionnels; il suffit d'accomplir consciencieusement la tâche de chaque jour. Il faut en outre posséder un esprit de contentement et s'intéresser sincèrement au bien du prochain. On peut trouver la perfection dans la destinée la plus humble. Les besognes les plus banales dont on s'acquitte avec amour sont belles aux yeux du Seigneur. PR 165 3 Alors qu'il cherchait son successeur, Elie, guidé par l'Esprit, traversa le champ où labourait Elisée, et il jeta sur les épaules du jeune homme son manteau de prophète. Pendant la famine, la famille de Schaphath avait été au courant de l'oeuvre et de la mission d'Elie. Or, maintenant, l'Esprit de Dieu pénétrait le coeur d'Elisée et lui montrait la signification du geste d'Elie. C'était pour lui le signe que le Seigneur l'appelait à succéder au prophète. Il quitta ses boeufs, "courut après Elie, et dit: Laisse-moi embrasser mon père et ma mère, et je te suivrai. Elie lui répondit: Va, et reviens; car pense à ce que je t'ai fait."3 PR 165 4 Elisée ne repoussait pas l'appel d'Elie; mais sa foi était mise à l'épreuve. Il devait réfléchir à ce que cela lui coûterait, et décider s'il accepterait ou refuserait cet appel. S'il désirait rester attaché à la maison paternelle et aux avantages qu'elle lui offrait, il était libre de le faire. Mais Elisée comprit ce que lui demandait Elie; il savait que c'était Dieu qui l'avait dicté, aussi n'hésita-t-il pas un seul instant à obéir. Aucun avantage au monde n'aurait pu l'empêcher de saisir l'occasion de devenir un messager du Seigneur ou de jouir du privilège de collaborer avec le prophète. Il revint "prendre une paire de boeufs, qu'il offrit en sacrifice; avec l'attelage des boeufs, il fit cuire leur chair, et la donna à manger au peuple. Puis, il se leva, suivit Elie, et fut à son service."3 Ainsi, sans hésitation, le jeune homme quitta le foyer où il était tendrement aimé pour suivre le prophète dans sa vie mouvementée. PR 166 1 Si Elisée avait demandé à Elie ce qu'il attendait de lui -- quel serait son travail -- le prophète lui aurait répondu: "Dieu le sait. Il te le fera connaître. Si tu te confies en lui, il répondra à toutes tes questions. Si tu as la preuve qu'il t'a appelé, tu peux me suivre. Mais sache que le Maître se tient derrière moi et que c'est sa voix que tu as entendue. Si, pour gagner la faveur du ciel, tu considères tout comme de la boue, alors viens!" PR 166 2 L'appel adressé à Elisée ressemblait à la réponse du Christ au jeune homme riche, lorsque celui-ci lui posa cette question: "Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle?" "Si tu veux être parfait, lui répondit le Christ, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi."4 PR 166 3 Elisée accepta donc l'appel qui le conviait à servir le Maître. Il le fit sans jeter un regard en arrière sur les plaisirs ou le bienêtre qu'il quittait. Le jeune homme riche, lui, après avoir entendu les paroles du Sauveur, "s'en alla tout triste, car il avait de grands biens".4 Il refusait de faire les sacrifices nécessaires; l'amour qu'il éprouvait pour ses richesses dépassait celui qu'il avait pour le Seigneur. En ne voulant pas tout quitter pour le Christ, il se révélait indigne de le servir. PR 166 4 Cet appel qui nous invite à tout placer sur l'autel du service s'adresse à chacun de nous. Il ne nous est pas demandé de servir comme Elisée, ni de vendre tous nos biens, mais d'offrir au Seigneur la première place dans nos vies, et par conséquent de ne laisser passer aucune journée sans faire quelque chose pour l'avancement de son règne. Nous ne sommes pas tous appelés au même travail. L'un devra peut-être partir en pays étranger, l'autre sera appelé à soutenir financièrement l'oeuvre évangélique. Mais le Seigneur accepte le don de chacun. Ce qui compte, c'est la consécration de nos vies et de tout ce qui s'y rattache. Ceux qui y parviennent entendront l'appel divin et lui obéiront. PR 167 1 A tous ceux qui deviennent participants de sa grâce, Dieu assigne une tâche en faveur des autres. Où que nous soyons, nous devons dire au Seigneur: "Me voici, envoie-moi!" Ministre de l'Evangile, médecin, commerçant, agriculteur, fonctionnaire, ouvrier, chacun a une responsabilité à assumer, chacun doit communiquer aux autres le message du salut. Quelle que soit la tâche qui nous est dévolue, elle est un moyen pour atteindre ce but. PR 167 2 Au début de son ministère, Elisée n'eut pas à faire une grande oeuvre. Il devait s'occuper de travaux ordinaires. Il est dit qu'il versait de l'eau sur les mains de son maître, Elie. Mais il était prêt à accomplir tout ce que le Seigneur lui demandait, et il apprenait jour après jour à servir dans l'humilité. Serviteur du prophète, il s'appliquait à être fidèle dans les petites choses tout en se préparant à la grande mission que le Seigneur lui confiait. PR 167 3 Après s'être joint à Elie, Elisée ne fut pas exempt de tentations. Les épreuves ne lui manquèrent pas; mais il ne cessait de se confier en Dieu. Il pensait tout naturellement à ce qu'il avait quitté en partant de la maison, mais cette tentation ne le retenait pas. Il avait mis la main à la charrue, il ne reviendrait pas en arrière. Il se montra donc fidèle à sa mission, malgré les épreuves et les difficultés. PR 167 4 Le ministère évangélique ne se limite pas à la prédication de la Parole de Dieu. Il comprend l'éducation des jeunes, comme celle qu'Elie donna à Elisée. Il faut arracher ces jeunes à leur tâche ordinaire pour leur confier des responsabilités dans l'oeuvre de Dieu. Ces responsabilités, d'abord légères, grandiront à mesure qu'ils acquerront des forces spirituelles et de l'expérience. PR 168 1 Il est, dans le ministère évangélique, des hommes de foi et de prière, qui peuvent dire: "Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la parole de vie ... ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons."5 Les jeunes serviteurs de Dieu inexpérimentés doivent être entraînés à collaborer avec ces hommes-là. Ils apprendront alors comment s'acquitter de leurs responsabilités. PR 168 2 Ceux qui se chargent de former ces jeunes au service du Maître ont une noble tâche. Le Seigneur lui-même collabore avec eux. Il faut que ceux qui ont le privilège d'être associés avec de fidèles ouvriers du Maître, en tirent le plus grand profit. Qu'ils n'oublient pas que Dieu les a honorés en les choisissant pour ses messagers et en les plaçant dans les conditions voulues pour être formés en vue de leur tâche. Qu'ils fassent preuve d'humilité, de fidélité, d'obéissance et d'esprit de sacrifice. S'ils se soumettent à la discipline du Seigneur, s'ils suivent ses directives, s'ils profitent des conseils qui leur sont donnés, ils deviendront des hommes aux principes fermes et nobles. Dieu pourra alors leur confier des charges importantes. PR 168 3 Si l'Evangile est prêché dans sa pureté, on verra des hommes quitter leurs champs ou les affaires commerciales qui les accaparent. Formés par des hommes de Dieu expérimentés, ils apprendront à travailler pour le Maître avec efficacité, et ils prêcheront la vérité avec puissance. Grâce à la merveilleuse intervention de la Providence, les montagnes de difficultés qui se dressent devant eux seront jetées dans la mer. Le message divin dont l'importance est grande pour l'humanité sera entendu et compris par les hommes. Ceux-ci connaîtront la vérité. L'oeuvre de Dieu progressera sans cesse jusqu'à ce que le monde entier ait entendu l'Evangile. Alors viendra la fin. PR 168 4 Après son appel, Elisée suivit pendant plusieurs années le prophète Elie. C'est ainsi que le jeune homme se préparait pour l'oeuvre qui l'attendait. Elie avait été l'instrument employé par le Seigneur pour supprimer de terribles fléaux. L'idolâtrie favorisée par Achab et Jézabel, cette reine païenne, avait gagné toute la nation. Elie réussit à lui porter un coup décisif. Les prophètes de Baal avaient été massacrés, les habitants d'Israël profondément remués. La plupart revenaient au vrai Dieu. Comme successeur d'Elie, Elisée devait, par son enseignement patient et méthodique, essayer de guider la nation israélite dans de sûrs sentiers. En collaborant avec Elie, le plus grand des prophètes depuis Moïse, il se préparait à la tâche qu'il serait bientôt seul à assumer. PR 169 1 Au cours de ces années de collaboration étroite, Elie fut parfois appelé à réprouver le péché. Quand Achab s'empara de la vigne de Naboth, ce fut la voix d'Elie qui prophétisa la ruine du roi et de sa maison. Et quand Achazia, après la mort de son père Achab, se détourna du Dieu vivant pour suivre Baal-Zebub, dieu d'Ekron, ce fut encore la voix d'Elie qui se fit entendre pour protester énergiquement. PR 169 2 Les écoles des prophètes créées par Samuel avaient disparu au cours des années d'apostasie qui sévirent en Israël. Elie rétablit ces écoles, qui permettaient aux jeunes gens de se former pour magnifier la loi et la faire honorer. Le récit sacré mentionne trois de ces écoles, une à Guilgal, une deuxième à Béthel et une troisième à Jéricho. Immédiatement avant son enlèvement au ciel, Elie visita avec Elisée un de ces centres d'éducation. Il répéta à ces jeunes serviteurs du Maître les leçons qu'il leur avait enseignées au cours de ses visites précédentes. Il les entretint tout particulièrement de l'immense privilège qu'ils possédaient en restant fidèles au Seigneur. Il leur parla de l'importance de la simplicité qui devait caractériser chaque détail de leur éducation. Ce n'était qu'ainsi qu'ils pourraient être façonnés sur le modèle divin et seraient prêts à travailler pour le Seigneur. PR 169 3 Elie se réjouissait de constater les résultats obtenus par ces écoles. La réforme entreprise n'était pas encore complète, mais il pouvait vérifier dans tout le royaume l'accomplissement de la parole du Seigneur: "Je laisserai en Israël sept mille hommes, tous ceux qui n'ont point fléchi les genoux devant Baal."6 PR 169 4 Alors qu'Elisée accompagnait le prophète dans ses visites d'école en école, sa foi et son courage furent mis à rude épreuve. A Guilgal, à Béthel, à Jéricho, il fut invité par le prophète à ne plus l'accompagner. "Reste ici, je te prie, lui dit Elie, car l'Eternel m'envoie jusqu'à Béthel." Mais, lorsqu'il apprenait à labourer, Elisée ne se laissait pas aller au découragement. Maintenant qu'il s'était engagé dans une autre voie, il poursuivrait résolument le but qu'il s'était tracé. Il ne se séparerait pas de son maître aussi longtemps qu'il pourrait se perfectionner auprès de lui en vue de son travail. Elie ignorait que son enlèvement avait été révélé aux élèves des écoles de prophètes, et en particulier à Elisée. Accablé de tristesse, le serviteur de l'homme de Dieu se tenait maintenant tout près de lui. Chaque fois qu'il l'invitait à le quitter, il répondait: "L'Eternel est vivant et ton âme est vivante! Je ne te quitterai point." PR 170 1 "Et ils poursuivirent tous deux leur chemin ... et ils s'arrêtèrent au bord du Jourdain. Alors Elie prit son manteau, le roula, et en frappa les eaux qui se partagèrent çà et là, et ils passèrent tous deux à sec. Lorsqu'ils eurent passé, Elie dit à Elisée: Demande ce que tu veux que je fasse pour toi, avant que je sois enlevé d'avec toi." PR 170 2 Elisée ne demanda ni les honneurs de ce monde, ni une place de choix parmi les grands. Ce qu'il désirait par-dessus tout, c'était une abondante mesure de l'Esprit que le Seigneur avait répandu si largement sur le prophète qui allait le quitter. Il savait que seul l'Esprit qui reposait sur Elie pourrait le préparer à s'acquitter de la tâche qui lui était confiée. Il demanda donc à Elie: "Qu'il y ait sur moi, je te prie, une double portion de ton esprit!" Elie répondit: "Tu demandes une chose difficile. Mais si tu me vois pendant que je serai enlevé d'avec toi, cela t'arrivera ainsi; sinon, cela n'arrivera pas. Comme ils continuaient à marcher en parlant, voici, un char de feu et des chevaux de feu les séparèrent l'un de l'autre, et Elie monta au ciel dans un tourbillon."7 PR 170 3 Elie est un type des saints qui vivront à la seconde venue du Christ, et seront "changés, en un instant, en un clin d'oeil, à la dernière trompette",8 sans connaître la mort. C'est comme représentant de ceux qui seront enlevés au dernier jour que, vers la fin du ministère du Sauveur, il se tint avec Moïse près de lui sur la montagne de la transfiguration. Dans ces deux hommes de Dieu glorifiés, les disciples virent en miniature le royaume des rachetés. Ils contemplèrent Jésus revêtu de la lumière céleste, et ils entendirent la "voix qui sortait de la nuée"9 le proclamant Fils de Dieu. Ils virent Moïse représentant ceux qui ressusciteront à la seconde venue du Christ. Ils virent Elie représentant ceux qui, à la fin de l'histoire de ce monde, revêtiront l'immortalité et seront enlevés au ciel sans passer par la mort. PR 171 1 Au désert, en proie à la solitude et au découragement, Elie en avait assez de la vie, et il désirait mourir. Mais le Seigneur, dans sa miséricorde, ne l'écouta pas. Il restait encore au prophète une grande oeuvre à accomplir. Cette oeuvre achevée, le prophète ne devait pas mourir dans l'abandon. Il ne devait même pas connaître la descente dans la tombe, mais l'ascension avec les anges dans la gloire céleste. PR 171 2 "Elisée regardait et criait: Mon père! mon père! Char d'Israël et sa cavalerie! Et il ne le vit plus. Saisissant alors ses vêtements, il les déchira en deux morceaux, et il releva le manteau qu'Elie avait laissé tomber. Puis il retourna, et s'arrêta au bord du Jourdain; il prit le manteau qu'Elie avait laissé tomber, et il en frappa les eaux, et dit: Où est l'Eternel, le Dieu d'Elie? Lui aussi, il frappa les eaux, qui se partagèrent çà et là, et Elisée passa. Les fils des prophètes qui étaient à Jéricho, vis-à-vis, l'ayant vu, dirent: L'esprit d'Elie repose sur Elisée! Et ils allèrent à sa rencontre, et se prosternèrent contre terre devant lui."10 PR 171 3 Lorsque le Seigneur juge que le temps est venu de relever de leurs fonctions les serviteurs à qui il a accordé la sagesse, il soutient et fortifie leurs successeurs, à condition toutefois qu'ils lui demandent son aide et marchent dans ses voies. Ils peuvent faire preuve de plus de sagesse encore que leurs prédécesseurs, car ils sont en mesure de profiter de leur expérience et de leurs erreurs. PR 171 4 Désormais Elisée remplacera Elie. Celui qui avait été fidèle dans les petites choses allait aussi faire preuve de fidélité dans les grandes. ------------------------Chapitre 18 -- Elisée assainit les eaux du Jourdain PR 173 1 À l'époque des patriarches, la plaine du Jourdain était "entièrement arrosée. ... C'était ... comme un jardin de l'Eternel." C'est là que Lot "dressa ses tentes jusqu'à Sodome".1 PR 173 2 Lorsque les villes de la plaine furent détruites, toute la région environnante fut transformée en un lieu désolé, qui confine depuis au désert de Judée. PR 173 3 Une partie de cette plaine riante subsiste cependant, avec ses sources et ses cours d'eau vivifiants, pour réjouir le coeur de l'homme. C'est dans cette plaine où abondaient les champs de céréales, les palmeraies, les vergers plantureux, que campèrent les armées d'Israël après avoir traversé le Jourdain. C'est là que, pour la première fois, les Israélites mangèrent les fruits de la terre promise. Devant eux se dressaient alors les murailles de Jéricho, forteresse païenne, centre du culte d'Astarté, qui revêtait les formes les plus abjectes et les plus dégradantes de l'idolâtrie cananéenne. Les murailles de cette ville furent bientôt renversées, et les habitants massacrés. C'est alors que fut faite en présence de tout Israël cette déclaration solennelle: "Maudit soit devant l'Eternel l'homme qui se lèvera pour rebâtir cette ville de Jéricho! Il en jettera les fondements au prix de son premier-né, et il en posera les portes au prix de son plus jeune fils."2 PR 174 1 Cinq siècles plus tard, ce lieu était toujours désolé, maudit par le Seigneur. Les cours d'eau même, qui prenaient leurs sources dans cette partie de la plaine, et dont les effets étaient si désirés, souffraient de cette malédiction. Mais à l'époque de l'apostasie d'Achab, lorsque fut ranimé le culte d'Astarté, sous l'influence de Jézabel, Jéricho, ancien centre de ce culte, fut rebâtie malgré le prix effroyable que dut y mettre le constructeur. Le récit sacré nous dit: "Hiel de Béthel bâtit Jéricho; il en jeta les fondements au prix d'Abiram, son premier-né, et il en posa les portes au prix de Segub, son plus jeune fils, selon la parole que l'Eternel avait dite par Josué."3 PR 174 2 Non loin de Jéricho, blottie dans les vergers ombragés, se trouvait une école de prophètes. C'est là que se rendit Elisée après l'enlèvement d'Elie. Pendant le séjour du prophète dans cette école, les gens de Jéricho vinrent lui dire: "Voici, le séjour de la ville est bon, comme le voit mon seigneur; mais les eaux sont mauvaises, et le pays est stérile." La source qui jadis donnait une eau pure et vivifiante, et qui suffisait amplement à alimenter la ville et ses environs, était maintenant impropre à la consommation. PR 174 3 Elisée répondit à la requête de ces gens: "Apportez-moi un plat neuf, et mettez-y du sel." Et lorsqu'on le lui eut apporté, "il alla vers la source des eaux, et il y jeta du sel, et dit: Ainsi parle l'Eternel: J'assainis ces eaux; il n'en proviendra plus ni mort, ni stérilité."4 PR 174 4 L'assainissement des eaux de Jéricho ne fut pas opéré par la sagesse d'un homme, mais par la miraculeuse intervention du Seigneur. Ceux qui avaient rebâti cette ville n'étaient pas dignes de la faveur divine; cependant, celui qui "fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes",5 jugea propice de révéler par ce miracle, témoignage de sa compassion, son désir de guérir Israël de ses maladies spirituelles. PR 175 1 Cette purification fut définitive. "Les eaux furent assainies, jusqu'à ce jour, selon la parole qu'Elisée avait prononcée."6 Elles n'ont cessé, en effet, de couler depuis des siècles, transformant ainsi cette partie de la plaine de Judée en une merveilleuse oasis. PR 175 2 Le récit de l'assainissement des eaux de Jéricho comporte de nombreux enseignements spirituels. Le plat neuf, le sel, la source, tout cela a un sens symbolique de haute valeur. PR 175 3 En jetant du sel dans la source impure, Elisée donnait aux hommes une leçon semblable à celle du Sauveur, lorsqu'il disait à ses disciples: "Vous êtes le sel de la terre."7 Le sel mélangé aux eaux polluées les purifia, et celles-ci dispensèrent désormais vie et bénédiction là où ne se trouvaient que mort et désolation. Lorsque le Seigneur compare ses enfants au sel, il veut dire qu'en en faisant les objets de sa grâce, ils contribueront au salut de leur prochain. PR 175 4 Le but de Dieu en choisissant un peuple entre tous n'était pas seulement d'adopter des fils et des filles, mais de se servir d'eux pour communiquer au monde la grâce qui apporte le salut. Lorsque le Seigneur choisit Abraham, ce n'était pas simplement pour en faire un ami particulier, mais pour que, par son moyen, les privilèges qu'il destinait aux nations leur fussent accordés. Ce que le monde réclame, ce sont des preuves d'un christianisme authentique. Le poison du péché exerce ses ravages au sein de la société. Les villes et les villages sont submergés par le vice et l'immoralité. La maladie, la souffrance, l'iniquité abondent partout. De toute part, on voit des hommes harcelés par la misère et la détresse, accablés par le sentiment de leur culpabilité et courant à leur perte, faute d'une influence salvatrice. Ils connaissent l'Evangile, et cependant ils périssent parce que l'exemple de ceux qui devraient leur communiquer "une odeur de vie donnant la vie" ne leur apporte que la mort. Leur âme s'abreuve d'amertume, car les sources qui devraient jaillir pour produire les eaux de la vie éternelle sont des fontaines empoisonnées. PR 176 1 Le sel doit être mélangé à la substance à laquelle on l'incorpore; il faut qu'il la pénètre, l'imbibe pour en garantir la conservation. De même, un contact personnel est indispensable, pour que les hommes puissent être atteints par la puissance salvatrice de l'Evangile. On n'est pas sauvé collectivement, mais individuellement. L'influence personnelle est une force; l'exercer à bon escient, c'est collaborer avec le Christ, c'est relever les âmes que le Christ relève, c'est inculquer de nobles principes, endiguer les progrès de l'immoralité. C'est répandre la grâce que le Christ seul confère, épurer et affiner la vie et le caractère du prochain, lui offrir un exemple irrépréhensible: une foi et un amour sincères. PR 176 2 Le Seigneur déclara au sujet des eaux impures de Jéricho: "J'assainis ces eaux; il n'en proviendra plus ni mort, ni stérilité." La source souillée représente l'âme séparée du ciel. Le péché éloigne non seulement de Dieu, mais il enlève de l'âme le désir et le pouvoir de le connaître. Il jette le désordre dans l'organisme, l'esprit est troublé, l'imagination pervertie, l'âme avilie. La religion pure et sans tache, la sainteté du coeur font alors totalement défaut; la puissance transformatrice d'en haut n'a pas opéré de changement dans le caractère; l'âme est affaiblie, dépourvue de force morale pour lutter contre le mal. Elle se pervertit et s'avilit. PR 176 3 Mais pour le coeur régénéré tout est changé. La transformation du caractère est pour le monde un témoignage de la présence du Christ en nous. L'Esprit de Dieu crée dans l'âme une vie nouvelle qui harmonise les pensées et les désirs avec la volonté du Christ. L'homme intérieur retrouve l'image de Dieu. Les faibles et les égarés montrent alors au monde que la puissance régénératrice de la grâce divine peut développer harmonieusement un caractère imparfait et le rendre exemplaire. PR 176 4 Le coeur qui reçoit la Parole de Dieu n'est pas comme un étang qui se dessèche, ni comme une citerne crevassée qui laisse échapper ses eaux précieuses. Il est comme un cours d'eau qui descend de la montagne, alimenté par des sources intarissables, et dont les flots rafraîchissants roulent en cascade de rocher en rocher, désaltérant ceux qui ont soif, ceux qui sont fatigués et chargés. Il est comme un fleuve qui coule sans cesse, s'élargit et s'approfondit à mesure qu'il avance, jusqu'à fertiliser la terre de ses eaux vivifiantes. Le ruisseau qui serpente en gazouillant laisse derrière lui la fraîcheur et la fertilité. Sur ses rives l'herbe est d'un vert plus éclatant, les arbres d'un feuillage plus luxuriant, et les fleurs abondent. Quand le soleil brûlant de l'été dessèche et parchemine le sol, une ligne de verdure marque le cours des eaux. PR 177 1 Ainsi en est-il avec l'enfant de Dieu. La religion du Christ agit comme un principe vivifiant et pénétrant; c'est une force spirituelle active, réelle. Lorsque le coeur s'ouvre à l'influence divine de la vérité et de l'amour, ce principe s'affirme, comme des ruisseaux dans le désert, fertilisant les lieux arides et désolés. PR 177 2 Ceux qui sont purifiés et sanctifiés par la connaissance de la Parole de Dieu travaillent avec zèle au salut des âmes. En se désaltérant à la source intarissable de la grâce, ils se rendent compte que leur propre coeur est rempli de l'Esprit du Maître et que, grâce à leur ministère désintéressé, un grand nombre d'hommes et de femmes ont été bénis physiquement, mentalement et spirituellement. Ceux qui étaient fatigués ont été soulagés, les malades guéris, les pécheurs délivrés. Et jusque dans les pays lointains des actions de grâces s'échappent des lèvres de ceux qui ont abandonné le péché pour se mettre au service de la justice. PR 177 3 "Donnez, et il vous sera donné."8 La Parole de Dieu est PR 177 4 Une fontaine des jardins, Une source d'eaux vives, Des ruisseaux du Liban. ------------------------Chapitre 19 -- Un prophète de paix PR 179 0 Ce chapitre est basé sur 2 Rois 4. PR 179 1 L'oeuvre accomplie par Elisée, en tant que prophète, fut à certains égards très différente de celle d'Elie. Celui-ci avait reçu la mission de délivrer des messages de condamnation et de châtiment. Ses accents étaient ceux de la réprobation courageuse, appelant le roi et le peuple d'Israël à se détourner de leur mauvaise voie. La mission d'Elisée fut une mission de paix. Il devait développer l'oeuvre amorcée par Elie: enseigner la voie du Seigneur. Le récit sacré nous le dépeint tantôt entrant en contact personnel avec les hommes, tantôt entouré par les fils des prophètes, tantôt prodiguant par ses miracles et son ministère guérison et réconfort. PR 179 2 Elisée était un homme bon et doux; mais il savait aussi être sévère. Il le montra à Béthel, le jour où de jeunes garnements impies se moquèrent de lui. Ces garçons avaient appris qu'Elisée gravissait la montée, ce qui les amusait. Ils vinrent crier derrière lui: "Monte, chauve! Monte chauve!" A l'ouïe de leurs sarcasmes, le prophète se retourna et, inspiré par le Tout-Puissant, il les maudit. Ils subirent alors un châtiment terrible: "Deux ours sortirent de la forêt, et déchirèrent quarante-deux de ces enfants."1 PR 180 1 Si le prophète n'avait pas relevé ces railleries, on aurait pu continuer à le ridiculiser et à l'injurier. Or sa mission, qui consistait à instruire le peuple et à le sauver à un moment de grave péril national, risquait d'échouer. Cet acte d'extrême sévérité suffit au prophète pour imposer le respect à tous jusqu'à la fin de sa vie. Pendant cinquante ans, il passa et repassa par la porte de Béthel, parcourant le pays çà et là. Il se rendit de ville en ville, traversa des groupes de garçons désoeuvrés, insolents, dépravés, sans jamais recevoir une seule raillerie. Nul ne traita plus à la légère sa qualité de prophète du Très-Haut. PR 180 2 La bonté même doit avoir des limites. Il faut maintenir l'autorité par une ferme sévérité, sinon elle risque d'être accueillie par la raillerie et les sarcasmes. La prétendue tendresse, la cajolerie, l'indulgence témoignées par les parents aux enfants sont les plus grands maux dont souffre la jeunesse. La fermeté, la rigueur, l'intransigeance dans les principes sont des qualités essentielles dans la famille. PR 180 3 L'irrévérence des jeunes -- qui dégénéra en raillerie envers Elisée -- devrait être sévèrement condamnée. Il faut apprendre aux enfants à manifester une vénération profonde à l'égard de Dieu. Que l'on ne prononce jamais son nom à la légère ou d'une manière distraite. Lorsqu'ils le prononcent, les anges se voilent la face. Avec quelle prudence ne devrions-nous pas, nous, pauvres pécheurs, avoir ce nom sacré sur les lèvres! PR 180 4 On devrait témoigner aussi de la révérence pour les représentants de Dieu: les pasteurs, les professeurs, les parents qui sont appelés à parler et à agir à la place du Maître. Dieu est honoré en fonction du respect témoigné à ses représentants. PR 180 5 La politesse est aussi une des grâces de l'Esprit-Saint. Elle devrait être cultivée par tous. Elle a le pouvoir d'adoucir les natures qui, sans elle, seraient rudes et grossières. Ceux qui se disent disciples du Sauveur, et qui sont durs, brusques, impolis n'ont rien compris du caractère du Christ. Leur sincérité et leur intégrité peuvent être indéniables, mais ces vertus ne sauraient suppléer au manque de bonté et de politesse. PR 181 1 La bonté, qui permettait à Elisée d'exercer une si profonde influence sur une foule de gens en Israël, se révéla dans ses rapports avec une famille de Sunem. Au cours de ses nombreux déplacements, le prophète passa un jour "à Sunem. Il y avait là une femme de distinction, qui le pressa d'accepter à manger. Et toutes les fois qu'il passait, il se rendait chez elle pour manger." Cette femme eut le sentiment qu'Elisée était "un saint homme de Dieu", et elle dit à son mari: "Faisons une petite chambre haute avec des murs, et mettons-y pour lui un lit, une table, un siège et un chandelier, afin qu'il s'y retire quand il viendra chez nous." Le prophète venait souvent dans cette chambre dont il appréciait le calme reposant. Dieu ne fut pas insensible aux marques de bonté de cette femme dont le foyer était sans enfant. Il récompensa son hospitalité en lui donnant un fils. PR 181 2 Des années s'écoulèrent. Ce fils avait grandi, et il se rendait dans les champs avec les moissonneurs. Or un jour, il fut frappé d'insolation, et "il dit à son père: Ma tête! ma tête!" Celui-ci demanda à l'un de ses serviteurs de porter l'enfant à sa mère. "Et l'enfant resta sur les genoux de sa mère jusqu'à midi, puis il mourut. Elle monta, le coucha sur le lit de l'homme de Dieu, ferma la porte sur lui, et sortit." PR 181 3 Dans sa détresse, la Sunamite décida d'aller trouver Elisée pour lui conter sa peine. Le prophète étant alors sur la montagne du Carmel, c'est là que se rendit immédiatement la femme, accompagnée de son serviteur. "L'homme de Dieu, l'ayant aperçue de loin, dit à Guéhazi, son serviteur: Voici cette Sunamite! Maintenant, cours donc à sa rencontre, et dis-lui: Te portes-tu bien? ton mari et ton enfant se portent-ils bien?" Le serviteur fit ce que lui demandait son maître. Mais la pauvre mère ne révéla pas la cause de son chagrin avant d'avoir vu Elisée. Lorsque le prophète apprit la mort de l'enfant, il dit à Guéhazi: "Ceins tes reins, prends mon bâton dans ta main, et pars. Si tu rencontres quelqu'un, ne le salue pas; et si quelqu'un te salue, ne lui réponds pas. Tu mettras mon bâton sur le visage de l'enfant." PR 182 1 Mais la mère ne pouvait être satisfaite tant que le prophète ne consentirait pas à venir avec elle. "L'Eternel est vivant, lui dit-elle, et ton âme est vivante! je ne te quitterai point." Alors il se leva et la suivit. Guéhazi, les ayant devancés, mit le bâton du prophète sur le visage de l'enfant, sans obtenir de résultat. Il revint donc à la rencontre d'Elisée et lui raconta ce qu'il avait fait. "L'enfant ne s'est pas réveillé", lui dit-il. PR 182 2 Lorsqu'ils arrivèrent à la maison de la Sunamite, Elisée se dirigea immédiatement vers la chambre où reposait l'enfant. Il "entra et ferma la porte sur eux deux, et il pria l'Eternel. Il monta, et se coucha sur l'enfant; il mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux, ses mains sur ses mains, et il s'étendit sur lui. Et la chair de l'enfant se réchauffa. Elisée s'éloigna, alla çà et là par la maison, puis remonta et s'étendit sur l'enfant. Et l'enfant éternua sept fois, et il ouvrit les yeux." PR 182 3 Le prophète appela alors Guéhazi pour qu'il aille chercher la mère. "Elle vint vers Elisée, qui dit: Prends ton fils! Elle alla se jeter à ses pieds, et se prosterna contre terre. Et elle prit son fils, et sortit." PR 182 4 Ainsi fut récompensée la foi de cette femme. Le grand dispensateur de la vie avait ressuscité son enfant. C'est ainsi que seront bénis tous ceux qui resteront fidèles au Seigneur. Lorsqu'il reviendra sur les nuées des cieux la mort aura perdu son aiguillon, et le tombeau sa victoire. Il ressuscitera alors tous les enfants que la mort avait ravis à ses serviteurs. PR 182 5 Le prophète Jérémie a écrit ces paroles consolantes: PR 182 6 Ainsi parle l'Eternel: On entend des cris à Rama, Des lamentations, des larmes amères; Rachel pleure ses enfants; Elle refuse d'être consolée sur ses enfants, Car ils ne sont plus. Ainsi parle l'Eternel: Retiens tes pleurs, Retiens les larmes de tes yeux; Car il y aura un salaire pour tes oeuvres. ... Ils reviendront du pays de l'ennemi. Il y a de l'espérance pour ton avenir. ... Tes enfants reviendront dans leur territoire. PR 183 1 Le Christ console tous ceux qui passent par le deuil avec ces paroles d'espérance: "Je les rachèterai de la puissance du séjour des morts, je les délivrerai de la mort. O mort, où est ta peste? Séjour des morts, où est ta destruction?"3 "J'étais mort; et voici, je suis vivant aux siècles des siècles. Je tiens les clefs de la mort et du séjour des morts."4 "Le Seigneur luimême, à un signal donné, à la voix d'un archange, et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et les morts en Christ ressusciteront premièrement. Ensuite, nous les vivants, qui serons restés, nous serons tous ensemble enlevés avec eux sur des nuées, à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur."5 PR 183 2 Elisée, comme le Christ dont il était un type, guérissait et enseignait. Animé d'une foi solide, infatigable, il accomplissait un labeur fructueux, tout en s'efforçant d'encourager et de développer les écoles de prophètes. L'enseignement qu'il donnait aux jeunes gens qui se groupaient autour de lui était enrichi par la puissance du Saint-Esprit, et quelquefois aussi par les preuves de son autorité en tant que serviteur de Dieu. PR 183 3 C'est au cours de l'une de ses visites à l'école de Guilgal que le prophète purifia le potage empoisonné. "Il y avait une famine dans le pays. Comme les fils des prophètes étaient assis devant lui, il dit à son serviteur: Mets le grand pot, et fais cuire un potage pour les fils des prophètes. L'un d'eux sortit dans les champs pour cueillir des herbes; il trouva de la vigne sauvage et il y cueillit des coloquintes sauvages, plein son vêtement. Quand il rentra, il les coupa en morceaux dans le pot où était le potage, car on ne les connaissait pas. On servit à manger à ces hommes; mais dès qu'ils eurent mangé du potage, ils s'écrièrent: La mort est dans le pot, homme de Dieu! Et ils ne purent manger. Elisée dit: Prenez de la farine. Il en jeta dans le pot, et dit: Sers à manger à ces gens, et qu'ils mangent. Et il n'y avait plus rien de mauvais dans le pot." PR 184 1 C'est aussi à Guilgal, alors que la famine sévissait encore dans le pays, qu'Elisée nourrit cent personnes avec quelques provisions que lui apporta un homme de Baal-Shalischa: "du pain des prémices, vingt pains d'orge, et des épis nouveaux". Ces gens étaient douloureusement éprouvés par la faim. Le prophète dit à son serviteur quand on lui remit ces provisions: "Donne à ces gens, et qu'ils mangent. Son serviteur répondit: Comment pourrais-je en donner à cent personnes? Mais Elisée dit: Donne à ces gens, et qu'ils mangent; car ainsi parle l'Eternel: On mangera, et on en aura de reste. Il mit alors les pains devant eux; et ils mangèrent et en eurent de reste, selon la parole de l'Eternel." PR 184 2 Quelle marque de commisération manifesta le Seigneur en opérant, par l'intermédiaire de son serviteur, ce miracle destiné à apaiser la faim de ces personnes. Que de fois depuis lors, bien que d'une manière moins spectaculaire, Dieu n'a-t-il pas renouvelé ce geste! Si notre discernement était plus vif, nous reconnaîtrions plus facilement avec quelle compassion il prend soin de ses enfants. PR 184 3 C'est la grâce de Dieu qui peut faire de peu une quantité suffisante. Sa main multiplie au centuple; ses ressources sont infinies. Il est capable de dresser une table dans le désert, de rendre de maigres provisions suffisantes pour une foule de gens, par une seule parole. C'est sa toute-puissance qui multiplia pour les fils des prophètes les pains et les épis. PR 184 4 Lorsque le Christ accomplit un miracle semblable pour donner à manger à une foule de gens, il rencontra la même incrédulité que celle manifestée par les personnes que nourrit Elisée. "Comment pourrais-je en donner à cent personnes?" s'écria le serviteur du prophète. Lorsque le Sauveur ordonna à ses disciples de distribuer les pains et les poissons à la multitude rassemblée, ils répondirent: "Nous n'avons que cinq pains et deux poissons, à moins que nous n'allions nous-mêmes acheter des vivres pour tout ce peuple."6 Et qu'est cet exemple parmi tant d'autres? PR 185 1 Il y a là un enseignement pour les chrétiens de tous les temps. Lorsque le Seigneur ordonne de faire un certain travail, il ne faut pas discuter sur le bien-fondé de cet ordre, ni sur les résultats probables qui en découleront. Les ressources dont nous disposons peuvent paraître dérisoires pour répondre aux besoins auxquels nous devons faire face; mais, entre les mains de Dieu, ces ressources s'avéreront plus que suffisantes. Le serviteur d'Elisée "mit les pains devant eux; et ils mangèrent, et en eurent de reste, selon la parole de l'Eternel". PR 185 2 De nos jours, ceux qui ont été rachetés par le don du Fils de Dieu, ont besoin de mieux comprendre les rapports qui existent entre eux et le ciel. Ils doivent avoir une foi plus grande pour faire avancer le règne de Dieu. Qu'ils ne passent pas leur temps à se lamenter sur l'insuffisance de leurs ressources matérielles. Leur volonté, leur confiance en Dieu multiplieront ces ressources. PR 185 3 Les dons que nous apportons au Seigneur, avec des actions de grâces pour obtenir sa bénédiction, il les multipliera, comme il multiplia les pains des fils des prophètes et de la foule affamée. ------------------------Chapitre 20 -- Naaman PR 187 0 Ce chapitre est basé sur 2 Rois 5. PR 187 1 "Naaman, chef de l'armée du roi de Syrie, jouissait de la faveur de son maître et d'une grande considération; car c'était par lui que l'Eternel avait délivré les Syriens. Mais cet homme fort et vaillant était lépreux." PR 187 2 Ben-Hadad, roi de Syrie, avait vaincu les armées d'Israël dans la bataille où mourut Achab. Depuis lors les Syriens ne cessaient de livrer une guerre de frontière contre les Israélites. C'est au cours d'une de leurs incursions qu'ils emmenèrent une fillette. Celle-ci devint, au pays de sa captivité, la servante de la femme de Naaman. Bien que traitée en esclave, cette fillette continuait à rester fidèle à son Dieu, contribuant ainsi inconsciemment à accomplir le dessein du Seigneur qui avait choisi Israël comme peuple. Tandis qu'elle vaquait aux soins de ce foyer païen, elle s'attacha à ses maîtres. Se souvenant des cures miraculeuses opérées par Elisée, elle dit à sa maîtresse: "Oh! si mon seigneur était auprès du prophète qui est à Samarie, le prophète le guérirait de sa lèpre!" Elle savait qu'Elisée possédait la puissance divine, et elle croyait que par elle Naaman pouvait être guéri. PR 188 1 La conduite de la jeune captive dans ce foyer idolâtre est la démonstration frappante de l'influence profonde qu'exerce l'éducation familiale sur un enfant. Il n'est pas de tâche plus noble confiée aux parents que celle de veiller sur la formation de leurs petits. Ils édifient ainsi la base même des habitudes et du caractère. Ce sont eux qui, par leur exemple et leur enseignement, décident en grande partie de leur avenir. PR 188 2 Heureux les parents dont la vie reflète si parfaitement le divin que les promesses et les commandements du Seigneur éveillent chez l'enfant la gratitude et la vénération! Heureux ceux qui représentent par leur tendresse, leur droiture, leur patience, l'amour, la justice et la patience du Christ! En apprenant à leurs enfants à les aimer, à se confier en eux et à leur obéir, ils leur apprennent à aimer le Père céleste, à se confier en lui et à lui obéir. Les parents qui ont légué une telle richesse à leurs petits les ont dotés d'un trésor plus précieux que tous les biens de ce monde et qui durera éternellement. PR 188 3 Nous ignorons la manière dont nos enfants seront appelés à servir. Passeront-ils leur vie au cercle familial, travailleront-ils en commun avec des gens ayant la même vocation qu'eux, partiront-ils proclamer l'Evangile aux peuples païens? Quoi qu'il en soit, tous doivent être des missionnaires pour Dieu, des ambassadeurs de miséricorde dans le monde. Il faut qu'ils reçoivent une éducation qui leur permettra de servir le Christ d'une manière désintéressée. PR 188 4 Les parents de cette jeune Israélite ignoraient quelle serait sa destinée, lorsqu'ils lui apprenaient à aimer le Seigneur. Mais ils accomplissaient fidèlement leur devoir; aussi, dans la maison du capitaine des armées syriennes, cette enfant rendit témoignage à son Dieu qu'on lui avait appris à honorer. PR 188 5 Naaman fut mis au courant des propos que la fillette avait tenus à sa maîtresse. Il demanda au roi la permission de s'absenter, et il s'en alla chercher la guérison, "prenant avec lui dix talents d'argent, six mille sicles d'or et dix vêtements de rechange". Il portait aussi une lettre du roi de Syrie pour le roi d'Israël, contenant ceci: "Je t'envoie Naaman, mon serviteur, afin que tu le guérisses de sa lèpre." Quand le roi d'Israël lut cette lettre, "il déchira ses vêtements, et dit: Suis-je un dieu, pour faire mourir et pour faire vivre, qu'il s'adresse à moi afin que je guérisse un homme de sa lèpre? Sachez donc et comprenez qu'il cherche une occasion de dispute avec moi." PR 189 1 La nouvelle de cette histoire parvint à Elisée, qui fit dire au roi: "Pourquoi as-tu déchiré tes vêtements? Laisse-le venir à moi, et il saura qu'il y a un prophète en Israël." PR 189 2 "Naaman vint avec ses chevaux et son char, et il s'arrêta à la porte de la maison d'Elisée. Elisée lui fit dire par un messager: Va, et lave-toi sept fois dans le Jourdain; ta chair redeviendra saine, et tu seras pur." PR 189 3 Naaman s'attendait à voir une manifestation extraordinaire de la puissance divine. "Je me disais, déclara-t-il, il sortira vers moi, il se présentera lui-même, il invoquera le nom de l'Eternel, son Dieu, il agitera sa main sur la place et guérira le lépreux." Lorsqu'il fut invité à se laver dans le Jourdain, son orgueil fut blessé, et il s'exclama, mortifié et désappointé: "Les fleuves de Damas, l'Abana et le Parpar, ne valent-ils pas mieux que toutes les eaux d'Israël?" "Et il s'en retournait et partait avec fureur." PR 189 4 L'orgueil de Naaman se révolta contre les instructions du prophète. Les fleuves mentionnés par le capitaine syrien étaient, en effet, rehaussés par des rives ombragées que de nombreux idolâtres recherchaient pour y adorer leurs dieux. Naaman n'aurait pas éprouvé beaucoup d'humiliation d'aller se plonger dans l'un de ces fleuves. Mais, pour être guéri, il fallait suivre les indications du prophète. Seule une obéissance volontaire pouvait apporter le résultat désiré. PR 189 5 Les serviteurs de Naaman le supplièrent de suivre les conseils d'Elisée. "Si le prophète, lui dirent-ils, t'eût demandé quelque chose de difficile, ne l'aurais-tu pas fait? Combien plus dois-tu faire ce qu'il t'a dit: Lave-toi, et tu seras pur." La foi de Naaman était mise à rude épreuve, alors que son orgueil le poussait à la révolte. Mais ce fut elle qui finit par triompher. Le fier Syrien, dominant son orgueil, se soumit à la volonté de Dieu. Il se plongea sept fois dans le Jourdain, "selon la parole de l'homme de Dieu". Sa foi fut récompensée, "car sa chair redevint comme la chair d'un jeune enfant, et il fut pur". PR 190 1 Plein de reconnaissance, Naaman "retourna vers l'homme de Dieu avec toute sa suite"; et il reconnut "qu'il n'y a point de Dieu sur toute la terre, si ce n'est en Israël". PR 190 2 Conformément à la coutume de cette époque, Naaman pria Elisée d'accepter un riche présent de sa part. Mais le prophète refusa. Ce n'était pas lui qui devait recevoir une récompense pour la bénédiction accordée à Naaman. "L'Eternel, dont je suis le serviteur, est vivant! dit-il. Je n'accepterai pas!" Le Syrien "le pressa d'accepter, mais il refusa". PR 190 3 "Alors Naaman dit: Puisque tu refuses, permets que l'on donne de la terre à ton serviteur, une charge de deux mulets; car ton serviteur ne veut plus offrir à d'autres dieux ni holocauste, ni sacrifice, il n'en offrira qu'à l'Eternel. Voici toutefois ce que je prie l'Eternel de pardonner à ton serviteur. Quand mon maître entre dans la maison de Rimmon pour s'y prosterner et qu'il s'appuie sur ma main, je me prosterne aussi dans la maison de Rimmon: veuille l'Eternel pardonner à ton serviteur." "Elisée lui dit: Va en paix." Alors Naaman, prenant congé du prophète, s'éloigna "à une certaine distance". PR 190 4 Le serviteur d'Elisée, Guéhazi, avait eu l'occasion, au cours des années écoulées, de cultiver l'esprit de renoncement qui caractérisait son maître. Il put jouir du privilège insigne d'être le porte-bannière de l'armée de l'Eternel. Les dons les plus précieux du ciel furent longtemps à sa portée. Et pourtant il s'en détourna, préférant s'assurer des richesses terrestres de mauvais aloi. Maintenant donc, poussé par son amour inavoué du lucre, il céda à une tentation qu'il ne put maîtriser. "Voici, se dit-il, mon maître a ménagé Naaman, ce Syrien, en n'acceptant pas de sa main ce qu'il avait apporté. ... Je vais courir après lui, et j'en obtiendrai quelque chose." Et "Guéhazi courut après Naaman", à l'insu de son maître. PR 191 1 "Naaman le voyant courir après lui, descendit de son char pour aller à sa rencontre, et dit: Tout va-t-il bien?" Alors Guéhazi lui mentit effrontément: "Mon maître m'envoie te dire: Voici, il vient d'arriver chez moi deux jeunes gens de la montagne d'Ephraïm, d'entre les fils des prophètes; donne pour eux, je te prie, un talent d'argent et deux vêtements de rechange." Naaman fut tout heureux d'accéder à cette requête; il insista même auprès de Guéhazi pour qu'il accepte deux talents au lieu d'un seul. Il lui "donna deux habits de rechange", et ordonna à ses serviteurs de porter tout cela au prophète. PR 191 2 Arrivé près de la maison de son maître, Guéhazi renvoya les serviteurs de Naaman, et cacha le trésor et les vêtements. Puis, il vint se présenter à Elisée. Pour parer à toute critique, il prononça un deuxième mensonge. "D'où viens-tu?" lui demanda le prophète. Il répondit: "Ton serviteur n'est allé ni d'un côté, ni d'un autre." Alors Elisée lui adressa ces paroles sévères: "Mon esprit n'était pas absent, lorsque cet homme a quitté son char pour venir à ta rencontre. Est-ce le temps de prendre de l'argent et de prendre des vêtements, puis des oliviers, des vignes, des brebis, des boeufs, des serviteurs et des servantes? La lèpre de Naaman s'attachera à toi et à ta postérité pour toujours." Le châtiment qui atteignit le coupable fut instantané. "Guéhazi sortit de la présence d'Elisée avec une lèpre comme la neige." PR 191 3 Quelles leçons solennelles se dégagent de la conduite de Guéhazi, cet homme à qui avaient été accordés de si nobles privilèges! Il fut pour Naaman comme une pierre d'achoppement sur son chemin, alors que le Syrien avait été illuminé par une merveilleuse clarté et qu'il était si bien disposé envers la religion du Dieu vivant. Aucune excuse ne pouvait justifier la tromperie de Guéhazi; aussi fut-il lépreux jusqu'à la fin de ses jours, maudit par le Seigneur et relégué loin de ses semblables. "Le faux témoin ne restera pas impuni, et celui qui dit des mensonges n'échappera pas."1 PR 191 4 Les hommes peuvent essayer de cacher leurs mauvaises actions aux yeux des hommes; mais ils ne sauraient tromper Dieu. "Nulle créature n'est cachée devant lui, mais tout est nu et découvert aux yeux de celui à qui nous devons rendre compte."2 Guéhazi croyait tromper Elisée, mais Dieu révéla au prophète les paroles que Guéhazi avait adressées à Naaman, ainsi que tous les détails de leur entrevue. PR 192 1 La vérité procède de Dieu; la tromperie sous ses multiples formes vient de Satan. Quiconque se détourne du droit sentier se place sous la puissance du malin. Ceux qui suivent le Christ ne prennent "point part aux oeuvres infructueuses des ténèbres".3 Dans leurs paroles comme dans leur conduite, ils se comportent avec simplicité, franchise et vérité; car ils se préparent à se joindre à ceux dans la bouche desquels il ne s'est trouvé aucun mensonge.4 PR 192 2 Des siècles après que Naaman eut regagné sa demeure en Syrie, purifié de corps et d'esprit, le Christ fit allusion à sa foi admirable, et il la donna en exemple à ceux qui prétendaient servir Dieu. "Il y avait aussi, dit-il, plusieurs lépreux en Israël du temps d'Elisée, le prophète; et cependant aucun d'eux ne fut purifié, si ce n'est Naaman le Syrien."5 Le Seigneur ne fit aucun cas des nombreux lépreux d'Israël à cause de leur incrédulité, qui les privait de toute bénédiction. En revanche, un païen de qualité, qui avait été fidèle à ses convictions concernant la justice, et éprouvé le besoin d'être secouru, paraissait aux yeux du Seigneur plus digne de sa bénédiction que les Israélites égarés qui méprisaient les privilèges dont ils étaient les objets. Dieu opère en faveur de ceux qui apprécient ses faveurs et se conforment à ses lumières. PR 192 3 Aujourd'hui, dans tous les pays, il existe encore des coeurs honnêtes que la lumière divine éclaire. S'ils s'acquittent fidèlement de ce qu'ils considèrent comme étant leur devoir, une lumière plus vive leur sera accordée, jusqu'à ce qu'enfin, comme autrefois Naaman, ils soient contraints de déclarer "qu'il n'y a point de Dieu sur toute la terre" en dehors du Dieu vivant, le Créateur de toutes choses. PR 192 4 A tout homme sincère, "qui marche dans l'obscurité et manque de lumière", voici l'invitation qui lui est adressée: "Qu'il se confie dans le nom de l'Eternel, et qu'il s'appuie sur son Dieu!" car "jamais on n'a appris ni entendu dire, et jamais l'oeil n'a vu qu'un autre dieu que toi fît de telles choses pour ceux qui se confient en lui. Tu vas au-devant de celui qui pratique avec joie la justice, de ceux qui marchent dans tes voies et se souviennent de toi."6 ------------------------Chapitre 21 -- Fin du ministère d'Elisée PR 195 1 Appelé au ministère prophétique, alors que le roi Achab régnait encore, Elisée assista à de nombreux changements dans le royaume d'Israël. Pendant le règne d'Hazaël, roi de Syrie, oint pour châtier la nation apostate, les châtiments s'étaient abattus les uns après les autres sur les Israélites. Les réformes sévères de Jéhu avaient provoqué le massacre de toute la maison d'Achab. Joachaz, le successeur de Jéhu, par suite des guerres continuelles avec les Syriens, avait perdu certaines villes situées à l'est du Jourdain. A un moment donné, on aurait pu croire que les Syriens allaient dominer sur tout le royaume d'Israël. Mais la réforme commencée par Elie et poursuivie par Elisée avait amené de nombreuses personnes à rechercher le vrai Dieu. Les autels de Baal avaient été abandonnés et, lentement mais sûrement, les desseins de la Providence se réalisaient dans la vie de ceux qui avaient décidé de revenir au Seigneur de tout leur coeur. PR 196 1 C'est par amour pour Israël que Dieu permit aux Syriens de le châtier. Il avait compassion de ceux qui ne savaient pas résister au péché, c'est pourquoi il suscita Jéhu pour exterminer Jézabel et toute la maison d'Achab. Une fois de plus, grâce à une mystérieuse providence, les prêtres de Baal et d'Astarté furent rejetés et leurs autels renversés. Dans son infinie sagesse, Dieu prévoyait qu'en supprimant la tentation, quelques pécheurs se détourneraient de l'idolâtrie pour fixer leurs regards vers le ciel. Il permit donc les calamités. Mais celles-ci furent adoucies par sa miséricorde; et quand ses desseins furent accomplis, il intervint en faveur de ceux qui avaient appris à le rechercher. PR 196 2 Tandis que les influences du bien et du mal luttaient pour s'assurer la suprématie, et que Satan faisait l'impossible pour achever son oeuvre de perdition entreprise sous le règne d'Achab et de Jézabel, Elisée continuait à rendre fidèlement son témoignage. Il se heurtait à l'opposition, mais nul ne pouvait réfuter ses paroles. Il était honoré, vénéré dans tout le royaume, et on venait de loin chercher conseil auprès de lui. Joram, roi d'Israël, le consulta, alors que Jézabel vivait encore. Un jour qu'il se trouvait à Damas, des messagers de Ben-Hadad, roi de Syrie, vinrent lui demander si la maladie dont souffrait le monarque aurait une issue fatale. A cette époque où le mensonge triomphait partout, et où régnait une rébellion ouverte contre le ciel, le prophète demeurait un témoin fidèle de la vérité. PR 196 3 Le Seigneur n'abandonna jamais son messager. Au cours d'une invasion syrienne, le roi ennemi cherchait à faire périr Elisée, parce que celui-ci dévoilait tous ses plans contre Israël. Le roi de Syrie tint un jour conseil avec ses serviteurs, et leur dit: "Mon camp sera dans un tel lieu." Mais le prophète en eut connaissance par une révélation divine. Il fit dire au roi d'Israël: "Garde-toi de passer dans ce lieu, car les Syriens y descendent. Et le roi d'Israël envoya des gens, pour s'y tenir en observation, vers le lieu que lui avait mentionné et signalé l'homme de Dieu. Cela arriva non pas une fois ni deux fois. Le roi de Syrie en eut le coeur agité; il appela ses serviteurs, et leur dit: Ne voulez-vous pas me déclarer lequel de nous est pour le roi d'Israël? L'un de ses serviteurs répondit: Personne, ô roi, mon seigneur; mais Elisée, le prophète, qui est en Israël, rapporte au roi d'Israël les paroles que tu prononces dans ta chambre à coucher." PR 197 1 Décidé à se débarrasser du prophète, le roi de Syrie dit à ses serviteurs: "Allez et voyez où il est, et je le ferai prendre." Elisée était à ce moment-là à Dothan. Lorsque le roi de Syrie l'apprit, il "envoya des chevaux, des chars et une forte troupe, qui arrivèrent de nuit et cernèrent la ville. Le serviteur de l'homme de Dieu se leva de bon matin et sortit; et voici, une troupe entourait la ville, avec des chevaux et des chars." Effrayé, le serviteur d'Elisée vint trouver le prophète, et lui dit: "Ah! mon seigneur, comment ferons-nous? Il répondit: Ne crains point, car ceux qui sont avec nous sont en plus grand nombre que ceux qui sont avec eux." Et pour que son serviteur puisse s'en rendre compte, "Elisée pria et dit: Eternel, ouvre ses yeux pour qu'il voie." Et Dieu ouvrit les yeux de cet homme qui "vit la montagne pleine de chevaux et de chars de feu autour d'Elisée". Entre le serviteur de Dieu et les armées ennemies se tenait une cohorte d'anges, formant un cercle protecteur. PR 197 2 Ces êtres célestes étaient descendus en force imposante, non pour exterminer, ni pour obtenir des hommages, mais pour camper auprès des bien-aimés du Seigneur, les aider dans leur faiblesse et leur impuissance. Lorsque le peuple de Dieu se trouve dans une impasse, d'où il semble ne pas pouvoir sortir, qu'il se souvienne que seul Dieu peut le délivrer. PR 197 3 Alors que les soldats syriens avançaient courageusement, ignorant la présence des armées invisibles du ciel, "Elisée pria, et dit: Daigne frapper d'aveuglement cette nation! Et l'Eternel les frappa d'aveuglement, selon la parole d'Elisée. Elisée leur dit: Ce n'est pas ici le chemin, et ce n'est pas ici la ville; suivez-moi, et je vous conduirai vers l'homme que vous cherchez. Et il les conduisit à Samarie. PR 197 4 "Lorsqu'ils furent entrés dans Samarie, Elisée dit: Eternel, ouvre les yeux de ces gens, pour qu'ils voient! Et l'Eternel ouvrit leurs yeux, et ils virent qu'ils étaient au milieu de Samarie. Le roi d'Israël, en les voyant, dit à Elisée: Frapperai-je, frapperai-je, mon père? Tu ne frapperas point, répondit Elisée; est-ce que tu frappes ceux que tu fais prisonniers avec ton épée et avec ton arc? Donne-leur du pain et de l'eau, afin qu'ils mangent et boivent; et qu'ils s'en aillent ensuite vers leur maître. Le roi d'Israël leur fit servir un grand repas, et ils mangèrent et burent; puis il les renvoya, et ils s'en allèrent vers leur maître. Et les troupes des Syriens ne revinrent plus sur le territoire d'Israël."1 PR 198 1 Pendant quelque temps, le royaume d'Israël fut donc délivré des armées syriennes. Mais, plus tard, sous la conduite de l'intrépide Hazaël,2 ces mêmes armées assiégèrent Samarie. Jamais Israël n'avait tant souffert qu'au cours de ce siège. Les péchés des pères retombaient sur les enfants et sur les petits enfants. Les horreurs de la famine se prolongeaient, poussant le roi à prendre des mesures désespérées; mais Elisée prédit la délivrance du royaume pour le jour suivant. PR 198 2 Le lendemain, à l'aube, "le Seigneur avait fait entendre dans le camp des Syriens un bruit de chars et un bruit de chevaux, le bruit d'une grande armée". Saisis d'effroi, "les Syriens se levèrent et prirent la fuite au crépuscule, abandonnant leurs tentes, leurs chevaux et leurs ânes, le camp tel qu'il était", avec ses réserves abondantes. "Et ils s'enfuirent pour sauver leur vie." PR 198 3 La nuit de cette fuite, quatre lépreux, que la faim avaient réduits au désespoir, décidèrent de se rendre dans le camp des Syriens et de se livrer à la merci des assiégeants. Ils espéraient ainsi susciter la pitié et obtenir quelque nourriture. Mais grand fut leur étonnement de découvrir, en pénétrant dans le camp des Syriens, "qu'il n'y avait personne". PR 198 4 N'ayant à encourir aucune menace, aucune punition, ces lépreux "mangèrent et burent, et en emportèrent de l'argent, de l'or et des vêtements, qu'ils allèrent cacher. Ils revinrent, pénétrèrent dans une autre tente, et en emportèrent des objets qu'ils allèrent cacher. Puis ils se dirent l'un à l'autre: Nous n'agissons pas bien! Cette journée est une journée de bonne nouvelle; si nous gardons le silence et si nous attendons jusqu'à la lumière du matin, le châtiment nous atteindra." Ils se hâtèrent donc de retourner à la ville pour y annoncer l'heureuse nouvelle. PR 199 1 Le butin était immense. Il y avait de telles réserves que ce jour-là on eut "une mesure de fleur de farine pour un sicle et deux mesures d'orge pour un sicle",3 selon la prophétie faite la veille par Elisée. Une fois de plus, le nom de l'Eternel fut exalté aux yeux des païens. PR 199 2 C'est ainsi que l'homme de Dieu continuait, d'année en année, à s'acquitter fidèlement de son ministère auprès du peuple, et en temps de crise auprès des rois dont il était le conseiller. PR 199 3 L'idolâtrie à laquelle s'adonnèrent les rois et le peuple d'Israël, pendant de longues années, avait eu une influence néfaste sur le pays. Les ténèbres spirituelles subsistaient encore partout. Cependant, il existait çà et là des âmes sincères qui n'avaient pas fléchi le genou devant Baal. PR 199 4 Alors qu'Elisée poursuivait sa réforme, de nombreuses personnes se détournaient du paganisme pour savourer les joies que l'on éprouve à servir le vrai Dieu. Le prophète était heureux de constater ces miracles de la grâce divine, et il désirait ardemment atteindre le coeur de tous ceux qui étaient sincères. Partout où il portait ses pas, il s'efforçait d'enseigner la vérité. PR 199 5 A vues humaines, la perspective d'une régénération spirituelle de la nation était tout aussi désespérée que celle devant laquelle se trouvent aujourd'hui les serviteurs de Dieu appelés à travailler dans les régions enténébrées. Mais l'Eglise du Christ est le moyen que Dieu emploie pour la proclamation de la vérité. Il l'a rendue capable d'accomplir une oeuvre spéciale. Si elle demeure fidèle au Seigneur, si elle obéit à ses commandements, alors la plénitude de la puissance céleste reposera sur elle. Si elle est fidèle à sa mission, aucun pouvoir ne saurait lui résister. Les forces de l'ennemi ne pourront la vaincre, pas plus que le fétu de paille ne triomphe de l'aquilon. PR 199 6 L'aube d'un jour éclatant et radieux resplendira sur l'Eglise, si elle revêt la robe de justice du Christ et se dégage de tous les liens qui pourraient l'attacher à la terre. PR 199 7 Dieu fait appel à tous ses fidèles, afin qu'ils aillent apporter des paroles de réconfort aux incroyants et aux désespérés. Tournez-vous vers le Seigneur, vous, pauvres pécheurs qui avez perdu l'espérance. Cherchez votre force en lui. Montrez une foi humble et inébranlable en sa puissance et en son désir de vous sauver. Lorsque nous nous emparons par la foi de la force d'en haut, les perspectives les plus sombres, les plus décourageantes se transforment merveilleusement. Le Seigneur opère pour la gloire de son nom. PR 200 1 Aussi longtemps que le prophète Elisée put se rendre de lieu en lieu dans le royaume, il continua à jouer un rôle actif dans l'édification des écoles des prophètes. Dieu l'accompagnait partout; il l'inspirait dans ses paroles, lui donnait le pouvoir de faire des miracles. Un jour, "les fils des prophètes dirent à Elisée: Voici, le lieu où nous sommes assis devant toi est trop étroit pour nous. Allons jusqu'au Jourdain; nous prendrons là chacun une poutre, et nous y ferons un lieu d'habitation."4 Elisée se rendit avec les fils des prophètes jusqu'au Jourdain; il leur prodigua les conseils nécessaires, et il accomplit même un miracle pour faciliter leur tâche. "Comme l'un d'eux abattait une poutre, le fer tomba dans l'eau. Il s'écria: Ah! mon seigneur, il était emprunté! L'homme de Dieu dit: Où est-il tombé? Et il lui montra la place. Alors Elisée coupa un morceau de bois, le jeta à la même place, et fit surnager le fer. Puis il dit: Enlève-le! Et il avança la main, et le prit."5 PR 200 2 L'influence du prophète fut si efficace, elle s'étendit si loin, qu'au moment de sa mort le jeune roi Joas, adonné à l'idolâtrie et peu respectueux envers le Seigneur, s'approcha de son lit, et reconnut en Elisée un père en Israël. Il déclara que la présence du prophète avait été plus précieuse en temps de guerre qu'une armée de chevaux et de chars. Le récit sacré nous dit: "Elisée était atteint de la maladie dont il mourut; et Joas, roi d'Israël, descendit vers lui, pleura sur son visage, et dit: Mon père, mon père! Char d'Israël et sa cavalerie!"6 PR 200 3 Le prophète avait été pour les âmes troublées, en quête d'un appui, un père sage et aimant. Aussi ne repoussa-t-il pas le jeune roi impie qui se présentait devant lui, roi si peu digne de la charge qu'il assumait, et qui aurait eu tant besoin de conseils. Le Seigneur, dans sa providence, lui offrait l'occasion de racheter ses défaillances et de placer son royaume dans des conditions avantageuses. Les Syriens occupaient alors la région située à l'est du Jourdain, il fallait les en chasser. La puissance de Dieu allait se manifester une fois encore en faveur de ses enfants rebelles. PR 201 1 Avant de mourir, le prophète donna cet ordre au roi: "Prends un arc et des flèches." Et Joas obéit. Alors Elisée dit: "Bande l'arc avec ta main." Joas banda l'arc, et le prophète mit ses mains sur les mains du roi, en disant: "Ouvre la fenêtre à l'orient", vers les villes au-delà du Jourdain, tombées au pouvoir des Syriens. Le roi obéit à Elisée, qui lui ordonna de tirer. Tandis que la flèche fendait l'air, le prophète prononça ces paroles inspirées: "C'est une flèche de délivrance de la part de l'Eternel, une flèche de délivrance contre les Syriens; tu battras les Syriens à Aphek jusqu'à leur extermination." PR 201 2 Elisée mit la foi du monarque à l'épreuve. Il lui ordonna de prendre les flèches, puis il dit: "Frappe contre terre!" Joas frappa trois fois, et s'arrêta. "Il fallait frapper cinq ou six fois", s'écria le prophète irrité, "alors tu aurais battu les Syriens jusqu'à leur extermination; maintenant, tu les battras trois fois".7 PR 201 3 La leçon qui se dégage de ce récit est valable pour tous ceux qui assument des charges importantes. Lorsque le Seigneur ouvre la voie pour accomplir une certaine tâche, il faut faire l'impossible pour arriver au résultat escompté. Le succès sera fonction de l'enthousiasme et de la persévérance manifestés. Dieu opérera des miracles en faveur de son peuple, à condition que celui-ci joue un rôle actif dans son oeuvre. Il fait appel à des hommes de foi, courageux et aimant les âmes, dévorés d'un zèle ardent pour sa cause. Nulle tâche trop ingrate, nulle perspective ne paraîtra vouée à l'échec aux yeux de tels hommes. Ils poursuivront leur tâche avec ardeur, jusqu'à ce que leur insuccès apparent se transforme en victoire éclatante. Rien au monde, ni les murs de la prison, ni le bûcher ne sauraient les faire dévier du but poursuivi en collaboration avec le Seigneur, dans l'édification de son royaume. PR 201 4 L'oeuvre d'Elisée s'acheva avec le conseil et les paroles d'encouragement qu'il donna à Joas. Celui qui avait reçu une mesure abondante de l'Esprit-Saint avait été fidèle jusqu'au bout. Jamais il ne chancela, jamais il ne perdit confiance dans la toute-puissance du Très-Haut. Lorsque le chemin devant lui paraissait sans issue, il continuait sa marche par la foi, et le Seigneur récompensait sa confiance en ouvrant ce chemin devant lui. PR 202 1 Il ne fut pas donné à Elisée de suivre son maître au ciel dans un char de feu. Dieu permit qu'une longue maladie le consumât lentement. Pendant ces heures interminables de souffrances et de faiblesses physiques, la foi du prophète s'attacha aux promesses divines. Il eut toujours devant les yeux les êtres célestes, ces messagers de paix et d'espérance. De même qu'il avait vu, sur les hauteurs de Dothan, la cohorte des anges qui l'environnaient, les chars de feu, les cavaliers, de même il eut conscience au cours de sa maladie de la présence des messagers protecteurs. C'est ce qui fit sa force. Toute sa vie, il avait manifesté une grande foi, et cette foi s'était affermie à mesure qu'il apprenait à mieux connaître les bontés providentielles du Seigneur. Sa confiance en Dieu était devenue inébranlable. Aussi, lorsque la mort l'appela, il était prêt à se reposer de ses travaux. PR 202 2 "Elle a du prix aux yeux de l'Eternel, la mort de ceux qui l'aiment."8 "Le juste trouve un refuge même en sa mort."9 En toute confiance, Elisée pouvait dire avec le Psalmiste: "Mon Dieu sauvera mon âme du séjour des morts, car il me prendra sous sa protection."10 Et il pouvait ajouter avec joie: "Je sais que mon Rédempteur est vivant, et qu'il se lèvera le dernier sur la terre."11 "Pour moi, dans mon innocence, je verrai ta face; dès le réveil, je me rassasierai de ton image."12 ------------------------Chapitre 22 -- Ninive, la grande ville PR 203 1 Aux jours de la division d'Israël, Ninive, capitale du royaume d'Assyrie, comptait parmi les plus grandes villes de l'antiquité. Bâtie sur les rives fertiles du Tigre, peu après la dispersion de la tour de Babel, elle avait prospéré au cours des siècles au point de devenir une "très grande ville, de trois jours de marche".1 PR 203 2 A l'époque de sa prospérité, Ninive était un foyer de crime et de corruption. Le récit sacré nous la dépeint comme une "ville sanguinaire, pleine de mensonge et de rapine".2 Dans un langage imagé, le prophète Nahum la compare à un lion cruel et dévorant. "Quel est celui que ta méchanceté n'a pas atteint?"3 dit-il. PR 203 3 Mais Ninive, bien que pervertie, n'était pas totalement livrée au mal. Celui qui "voit tous les fils des hommes",4 et qui "contemple ce qu'il y a de précieux5 savait que de nombreux Ninivites aspiraient à quelque chose de plus élevé et de meilleur, et il jugea que, si on leur offrait l'occasion de connaître le Dieu vivant, ils renonceraient à leurs mauvaises actions et l'adoreraient. Et c'est ainsi que, dans sa sagesse, le Seigneur se révéla aux Ninivites d'une manière manifeste, afin de les amener à la repentance. PR 204 1 Pour cette oeuvre, il se choisit comme instrument Jonas, fils d'Amitthaï. La parole de l'Eternel lui fut adressée en ces termes: "Lève-toi, va à Ninive, la grande ville, et crie contre elle! car sa méchanceté est montée jusqu'à moi."6 PR 204 2 En envisageant les difficultés et l'impossibilité apparente d'une telle mission, Jonas fut tenté de mettre en doute la sagesse de l'appel qui lui était adressé. A vues humaines, en effet, il semblait inutile de proclamer un message de ce genre dans cette ville orgueilleuse. Le prophète oubliait en ce moment que Dieu possède la toute-puissance et la toute-sagesse. En proie au doute et à l'hésitation, Jonas se laissa plonger dans le découragement par Satan. Saisi de frayeur, il "se leva pour s'enfuir à Tarsis". Il descendit à Japho, et trouva un navire qui appareillait pour Tarsis. "Il paya le prix du transport, et s'embarqua ... avec les passagers."7 PR 204 3 La mission confiée à Jonas comportait une lourde responsabilité; mais celui qui l'en avait chargé était capable de le soutenir et de l'aider à s'en acquitter fidèlement. S'il avait obéi sans hésitation, il aurait évité bien des épreuves et reçu d'abondantes bénédictions. Cependant, au moment où le désespoir s'empara de Jonas, le Seigneur ne l'abandonna pas. S'il subit une série de dures épreuves, celles-ci furent suivies de bénédictions extraordinaires. Sa confiance en Dieu et en sa puissance salvatrice devait en être raffermie. PR 204 4 Si le prophète n'avait pas discuté froidement l'appel qui lui avait été adressé, il aurait compris combien toute tentative était vaine pour se dérober à sa mission. Mais il ne lui fut pas permis de rester longtemps en repos dans sa fuite insensée. "L'Eternel fit souffler sur la mer un vent impétueux, et il s'éleva sur la mer une grande tempête. Le navire menaçait de faire naufrage. Les mariniers eurent peur, ils implorèrent chacun leur dieu, et ils jetèrent dans la mer les objets qui étaient sur le navire, afin de le rendre plus léger. Jonas descendit au fond du navire, se coucha, et s'endormit profondément."8 PR 205 1 Tandis que les marins suppliaient leur dieu païen de les secourir, le pilote en proie à un désespoir farouche se mit à la recherche de Jonas, et lui dit: "Pourquoi dors-tu? Lève-toi, invoque ton Dieu! peut-être voudra-t-il penser à nous, et nous ne périrons pas."9 PR 205 2 Mais qu'auraient pu faire les prières d'un homme qui s'était détourné du sentier du devoir? Convaincus que l'extrême violence de la tempête était due à la colère des dieux, les marins décidèrent, en désespoir de cause, de tirer au sort "pour savoir qui attirait ce malheur. Ils tirèrent au sort, et le sort tomba sur Jonas. Alors ils dirent: Dis-nous qui nous attire ce malheur? Quelles sont tes affaires, et d'où viens-tu? Quel est ton pays, et de quel peuple es-tu? Il leur répondit: Je suis Hébreu, et je crains l'Eternel, le Dieu des cieux, qui a fait la mer et la terre. PR 205 3 "Ces hommes eurent une grande frayeur, et ils lui dirent: Pourquoi as-tu fais cela? Car ces hommes savaient qu'il fuyait loin de la face de l'Eternel, parce qu'il le leur avait déclaré. Ils lui dirent: Que te ferons-nous, pour que la mer se calme envers nous? Car la mer était de plus en plus orageuse. Il leur répondit: Prenez-moi, et jetez-moi dans la mer, et la mer se calmera envers vous; car je sais que c'est moi qui attire sur vous cette grande tempête. Ces hommes ramaient pour gagner la terre, mais ils ne le purent, parce que la mer s'agitait toujours plus contre eux. PR 205 4 "Alors ils invoquèrent l'Eternel, et dirent: O Eternel, ne nous fais pas périr à cause de la vie de cet homme, et ne nous charge pas du sang innocent! Car toi, Eternel, tu fais ce que tu veux. Puis ils prirent Jonas, et le jetèrent dans la mer. Et la fureur de la mer s'apaisa. Ces hommes furent saisis d'une grande crainte de l'Eternel, et ils offrirent un sacrifice à l'Eternel, et firent des voeux. PR 205 5 "L'Eternel fit venir un grand poisson pour engloutir Jonas, et Jonas fut dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits. Jonas, dans le ventre du poisson, pria l'Eternel, son Dieu. Il dit: PR 206 1 Dans ma détresse, j'ai invoqué l'Eternel, Et il m'a exaucé; Du sein du séjour des morts j'ai crié, Et tu as entendu ma voix. Tu m'as jeté dans l'abîme, dans le coeur de la mer, Et les courants d'eau m'ont environné; Toutes tes vagues et tous tes flots ont passé sur moi. Je disais: Je suis chassé loin de ton regard! Mais je verrai encore ton saint temple. Les eaux m'ont couvert jusqu'à m'ôter la vie, L'abîme m'a enveloppé, Les roseaux ont entouré ma tête. Je suis descendu jusqu'aux racines des montagnes, Les barres de la terre m'enfermaient pour toujours; Mais tu m'as fait remonter vivant de la fosse, Eternel, mon Dieu! Quand mon âme était abattue au-dedans de moi, Je me suis souvenu de l'Eternel, Et ma prière est parvenue jusqu'à toi, Dans ton saint temple. ... Pour moi, je t'offrirai des sacrifices avec un cri d'actions de grâces, J'accomplirai les voeux que j'ai faits: Le salut vient de l'Eternel." PR 206 2 Jonas avait enfin compris que "le salut est auprès de l'Eternel".11 Et parce qu'il s'était repenti, qu'il avait reconnu la grâce salvatrice de Dieu, il avait la vie sauve. Echappant aux périls des profondeurs de la mer, il était rejeté sur la terre ferme. PR 206 3 Mais une fois de plus le serviteur de Dieu reçut l'ordre d'avertir Ninive. "La parole de l'Eternel fut adressée à Jonas une seconde fois, en ces mots: Lève-toi, va à Ninive, la grande ville, et proclames-y la publication que je t'ordonne!" Alors le prophète ne tergiversa plus, il ne mit pas en doute non plus l'ordre divin. Il obéit aveuglément. "Jonas se leva, et alla à Ninive, selon la parole de l'Eternel."12 PR 206 4 Dès qu'il pénétra dans la ville, le prophète se mit à "crier et à dire: Encore quarante jours, et Ninive est détruite!"13 Il parcourut ainsi toutes les rues, en faisant retentir son cri d'alarme. PR 207 1 Ce n'est pas en vain qu'il proclama ce message. Le cri qui résonna dans les rues de la ville païenne circula de bouche en bouche, jusqu'à ce que tous les Ninivites eussent entendu l'effrayante nouvelle. L'Esprit de Dieu fit pénétrer profondément les paroles de Jonas dans le coeur de chacun, et des foules frémirent à l'idée de leurs péchés, et se repentirent en s'humiliant dans la poussière. PR 207 2 "Les gens de Ninive crurent à Dieu, ils publièrent un jeûne, et se revêtirent de sacs, depuis les plus grands jusqu'aux plus petits. La chose parvint au roi de Ninive; il se leva de son trône, ôta son manteau, se couvrit d'un sac, et s'assit sur la cendre. Et il fit faire dans Ninive cette publication, par ordre du roi et de ses grands: Que les hommes et les bêtes, les boeufs et les brebis, ne goûtent de rien, ne paissent point, et ne boivent point d'eau! Que les hommes et les bêtes soient couverts de sacs, qu'ils crient à Dieu avec force, et qu'ils reviennent tous de leur mauvaise voie et des actes de violence dont leurs mains sont coupables! Qui sait si Dieu ne reviendra pas et ne se repentira pas, et s'il ne renoncera pas à son ardente colère, en sorte que nous ne périssions point?"14 PR 207 3 Le roi, les nobles, le peuple, les grands et les petits, "se repentirent à la prédication de Jonas",15 et tous ensemble implorèrent le Dieu des cieux, qui exerça envers eux sa miséricorde. Il "vit qu'ils agissaient ainsi et qu'ils revenaient de leur mauvaise voie. Alors Dieu se repentit du mal qu'il avait résolu de leur faire, et il ne le fit pas"Quel est celui que ta méchanceté n'a pas atteint16 Ils furent donc épargnés. Le Dieu d'Israël fut exalté et honoré dans tout le monde païen, et sa loi révérée. Malheureusement, peu de temps après cet événement, Ninive devint la proie des nations voisines, car elle avait oublié l'Eternel et s'était laissé aller à l'orgueil.17 PR 207 4 Lorsque Jonas apprit que Dieu avait décidé d'épargner la ville qui s'était repentie de ses péchés en prenant le sac et la cendre, au lieu d'être le premier à se réjouir de ce miracle de la grâce, il se laissa gagner par l'idée qu'on le considérerait comme un faux prophète. Jaloux de sa réputation, il perdit de vue la valeur infiniment grande des âmes de cette ville corrompue. La compassion manifestée par le Seigneur envers Ninive repentante "déplut fort à Jonas, et il fut irrité. ... N'est-ce pas ce que je disais, s'écria-t-il en s'adressant à l'Eternel, quand j'étais encore dans mon pays? C'est ce que je voulais prévenir en fuyant à Tarsis. Car je savais que tu es un Dieu compatissant et miséricordieux, lent à la colère et riche en bonté, et qui te repens du mal."18 PR 208 1 Une fois de plus le prophète se laissait aller à sa tendance au doute, et une fois de plus il sombrait dans le découragement. Il perdit de vue le bien de ses semblables et, préférant mourir plutôt que de voir Ninive épargnée, il s'écria, plein d'amertume: "Maintenant, Eternel, prends-moi donc la vie, car la mort m'est préférable à la vie." PR 208 2 Mais Dieu lui répondit: "Fais-tu bien de t'irriter? Et Jonas sortit de la ville, et s'assit à l'orient de la ville. Là, il se fit une cabane, et s'y tint à l'ombre, jusqu'à ce qu'il vît ce qui arriverait dans la ville. L'Eternel Dieu fit croître un ricin, qui s'éleva au-dessus de Jonas pour donner de l'ombre sur sa tête et pour lui ôter son irritation. Jonas éprouva une grande joie à cause de ce ricin."19 PR 208 3 Alors le Seigneur donna à Jonas une leçon frappante. Il "fit venir un ver qui piqua le ricin, et le ricin sécha. Au lever du soleil, Dieu fit souffler un vent chaud d'orient, et le soleil frappa sur la tête de Jonas, au point qu'il tomba en défaillance. Il demanda la mort, et dit: La mort m'est préférable à la vie." PR 208 4 Dieu s'adressa encore à son prophète en ces termes: "Fais-tu bien de t'irriter à cause du ricin?" Jonas répondit: "Je fais bien de m'irriter jusqu'à la mort. Et l'Eternel dit: Tu as pitié du ricin qui ne t'a coûté aucune peine et que tu n'as pas fait croître, qui est né dans une nuit et qui a péri dans une nuit. Et moi, je n'aurais pas pitié de Ninive, la grande ville, dans laquelle se trouvent plus de cent vingt mille hommes qui ne savent pas distinguer leur droite de leur gauche, et des animaux en grand nombre!"20 PR 208 5 Confus, humilié, incapable de comprendre les desseins de Dieu qui épargnait Ninive, Jonas avait cependant accompli sa mission, consistant à avertir cette grande ville. Et bien que l'événement prédit ne se soit pas réalisé, le message du prophète n'en émanait pas moins de Dieu, et il atteignait le but souhaité: la puissance de la grâce divine fut connue parmi les païens. Ceux qui, depuis longtemps, "avaient pour demeure les ténèbres et l'ombre de la mort, vivaient captifs dans la misère et dans les chaînes", et "dans leur détresse, ils crièrent à l'Eternel, et il les délivra de leurs angoisses; il les fit sortir des ténèbres et de l'ombre de la mort, et il rompit leurs liens". "Il envoya sa parole et les guérit, il les fit échapper de la fosse."21 PR 209 1 Au cours de son ministère terrestre, le Christ fit allusion au bien produit par la prédication de Jonas à Ninive. Il compara les habitants de cette agglomération païenne à ceux qui, de son temps, prétendaient être le peuple élu du Seigneur. "Les hommes de Ninive, disait-il, se lèveront, au jour du jugement, avec cette génération et la condamneront, parce qu'ils se repentirent à la prédication de Jonas; et voici, il y a ici plus que Jonas."22 PR 209 2 Lorsque le Christ vint ici-bas, les hommes étaient agités, absorbés par les affaires et les rivalités commerciales; ils ne pensaient qu'à leurs propres intérêts. Alors la voix du Sauveur, telle la trompette de Dieu, domina la confusion, et proclama: "Que sert-il à un homme de gagner tout le monde, s'il perd son âme?" Et "que donnerait un homme en échange de son âme?"23 PR 209 3 De même que la prédication de Jonas fut un signe pour les Ninivites, la prédication de Jésus en était un autre pour les hommes de sa génération. Mais comme ces avertissements furent reçus différemment! Cependant, en dépit de l'indifférence et du mépris qui lui furent manifestés, le Sauveur continua son oeuvre jusqu'au bout. PR 209 4 Il y a ici une leçon pour les messagers de Dieu de nos jours. Les habitants des grandes villes ont un besoin tout aussi impérieux de l'Evangile que les Ninivites d'antan. Il faut que les ambassadeurs du Christ attirent l'attention des hommes sur un monde plus beau, que l'on a totalement perdu de vue, sur la cité céleste "dont Dieu est l'architecte et le constructeur". Le croyant peut contempler, avec les yeux de la foi, cette demeure d'en haut, toute resplendissante de la gloire du Dieu vivant. Jésus-Christ, par ses serviteurs, invite tous les hommes à mettre leur ambition dans la recherche d'un héritage éternel. Il les exhorte à s'amasser un trésor dans les cieux. PR 210 1 L'augmentation constante et obstinée de la méchanceté attirera promptement et inévitablement sur les habitants des villes un châtiment presque universel. La corruption qui règne actuellement est indescriptible. Chaque jour apporte de nouvelles révélations concernant les dissensions, la malhonnêteté et la fraude. Chaque jour amène son cortège douloureux de violences et d'infractions à la loi, d'indifférence en face de la souffrance, d'attentats brutaux et diaboliques à la vie humaine. Chaque jour est témoin d'un accroissement de la folie, du meurtre et du suicide. PR 210 2 Satan s'est efforcé, à travers les âges, de maintenir les hommes dans l'ignorance des desseins d'amour du Créateur. Il s'est appliqué à leur faire perdre de vue les grands principes de la loi de Dieu, principes de justice, de miséricorde et d'amour. Les hommes se vantent des merveilleux progrès scientifiques de l'heure; mais Dieu voit la terre remplie d'iniquité et de violence. Les hommes prétendent que la loi divine a été abrogée, que la Bible n'est pas authentique. Il en est résulté une vague de maux, tels qu'on n'en avait jamais vu de semblables depuis les jours de Noé et de l'apostasie d'Israël. La noblesse d'âme, la bonté, la piété ont fait place à la convoitise des choses défendues. La sombre liste des crimes commis pour l'amour du lucre suffit à nous faire frissonner d'horreur. PR 210 3 Notre Dieu est un Dieu de miséricorde. Il traite les transgresseurs de sa loi avec patience et compassion. Toutefois, de nos jours, alors que les hommes et les femmes ont tant d'occasions de se familiariser avec la loi divine, telle qu'elle est révélée dans la sainte Ecriture, le grand Maître de l'univers ne peut considérer avec satisfaction les villes corrompues, où règnent la violence et le crime. Sa patience à l'égard de ceux qui s'obstinent à lui désobéir arrive rapidement à son terme. PR 211 1 Les hommes doivent-ils s'étonner si le Maître suprême change soudain d'attitude envers les habitants d'un monde perdu? Doivent-ils être surpris si le châtiment fait suite à la transgression et au crime toujours croissants? Doivent-ils s'étonner si Dieu amène la destruction et la mort sur ceux qui ont acquis leurs biens par l'extorsion et la tromperie? Bien que la lumière divine ait illuminé leur sentier d'un vif éclat, le plus grand nombre refuse de se soumettre aux exigences du Seigneur et de le reconnaître comme leur Maître. Ils préfèrent rester sous la sombre bannière de celui qui est à l'origine de la révolte contre le ciel. PR 211 2 La patience de Dieu est très grande, au point que lorsque nous considérons l'outrage continuel réservé à ses saints commandements, nous sommes émerveillés. Le Tout-Puissant n'a pas exercé son pouvoir comme il aurait pu le faire, mais soyons sûrs qu'il punira les méchants qui se moquent des justes revendications du Décalogue. PR 211 3 Le Seigneur accorde aux hommes un temps de grâce; mais lorsqu'ils dépassent une certaine limite, sa patience est à son terme, et ses châtiments ne se font pas attendre. Il supporte longtemps la méchanceté des hommes et des villes, mais il vient un temps où sa clémence ne s'exerce plus. Ceux qui persistent à refuser la lumière de la vérité seront un jour rejetés, livrés à leur propre merci et à celle des hommes qu'ils ont influencés. PR 211 4 Le temps est proche où le monde connaîtra une douleur que nul ne sera capable de soulager. L'Esprit de Dieu se retire de la terre. Les cataclysmes se succèdent à une cadence accélérée. Que de fois n'entendons-nous pas parler de tremblements de terre, de cyclones, de ravages causés par des incendies et des inondations, de lourdes pertes de vies humaines et de biens matériels! A vues humaines, ces calamités résultent des déchaînements capricieux des forces de la nature, désorganisées et déréglées, échappant au contrôle de l'homme. Mais ce sont des moyens employés par Dieu pour chercher à éveiller chez tous le sentiment du danger qu'ils courent. PR 212 1 Les messagers du Seigneur, dans les grandes villes, ne doivent pas se laisser aller au découragement par la méchanceté, l'injustice, la dépravation qu'ils rencontrent lorsqu'ils s'efforcent de parler aux hommes de la bonne nouvelle du salut. Dieu sera leur réconfort; il leur adressera le message qu'il donna à l'apôtre Paul quand il se trouvait dans la ville corrompue de Corinthe: "Ne crains point; mais parle, et ne te tais point, car je suis avec toi, et personne ne mettra la main sur toi pour te faire du mal: parle, car j'ai un peuple nombreux dans cette ville."24 PR 212 2 Ceux qui s'occupent du salut de leurs semblables doivent se souvenir que, si un grand nombre de personnes refusent d'écouter la Parole de Dieu, il en est d'autres qui ne se détourneront pas de la vérité, ni des appels d'un Sauveur patient et miséricordieux. Quels que puissent être le nombre des crimes et la corruption que recèle une ville, il s'y trouvera toujours des âmes prêtes à devenir disciples de Jésus, si elles sont instruites convenablement. Le message du salut peut amener des milliers de personnes à recevoir le Christ comme leur Sauveur personnel. PR 212 3 La parole que Dieu adresse aujourd'hui à tous est celle-ci: "Vous aussi, tenez-vous prêts, car le Fils de l'homme viendra à l'heure où vous n'y penserez pas."25 L'état de choses qui existe dans la société, et en particulier dans les grandes villes, proclame avec force que l'heure du jugement est venue, et que la fin de toutes choses est proche. Nous sommes à la veille de la crise finale, les jugements de Dieu se succèdent rapidement: les incendies, les inondations, les tremblements de terre, la guerre. Tout cela ne doit pas nous surprendre, car l'ange de la miséricorde ne saurait plus longtemps protéger les impénitents. PR 212 4 Le prophète Esaïe a écrit ces paroles: "Voici, l'Eternel sort de sa demeure, pour punir les crimes des habitants de la terre; et la terre mettra le sang à nu, elle ne couvrira plus les meurtres."26 La tempête déchaînée par la colère divine se prépare. Seuls y échapperont ceux qui acceptent la grâce du ciel, comme le firent les Ninivites à la prédication de Jonas, et ceux qui seront sanctifiés par l'obéissance aux lois divines. Seul le juste sera "caché avec le Christ en Dieu, jusqu'à ce que la désolation soit passée". Que les paroles de ce beau cantique soient le cri de notre âme: PR 213 1 Seul Refuge de mon âme, Je veux m'appuyer sur toi; La paix que mon coeur réclame Est à tes pieds, divin Roi! PR 213 2 A toi, Jésus, j'abandonne Mon coeur, mon âme et mes jours! Qu'en moi ton amour rayonne. Je veux te servir toujours. ------------------------Chapitre 23 -- La captivité assyrienne PR 215 1 Les dernières années du malheureux royaume d'Israël furent marquées par une violence et un massacre tels qu'on n'en avait jamais vu de semblables, même aux jours les plus sombres des luttes et des guerres de la maison d'Achab. Pendant plus de deux siècles, les rois des dix tribus avaient semé le vent, ils allaient récolter la tempête. Ils avaient été assassinés les uns après les autres pour permettre à des intrigants de régner à leur place. "Ils ont établi des rois sans mon ordre, déclarait le Seigneur en parlant de ces usurpateurs impies, et ils ont établi des chefs à mon insu."1 PR 215 2 Tous les principes de justice furent rejetés, et les hommes qui auraient dû paraître aux yeux des nations comme les dépositaires de la grâce divine furent "infidèles à l'Eternel"2 et à leurs semblables. Par de sévères réprimandes, Dieu s'efforça de faire naître chez la nation rebelle le sentiment du danger qui la menaçait: sa ruine imminente et totale. Par l'intermédiaire des prophètes Osée et Amos, il envoya aux dix tribus d'Israël des messages répétés, les invitant à se repentir, et les menaçant de la destruction si elles ne mettaient pas un terme à leurs transgressions continuelles. "Vous avez cultivé le mal, disait Osée, moissonné l'iniquité, mangé le fruit du mensonge", et s'adressant à la nation rebelle il lui déclarait: "Tu as eu confiance dans ta voie, dans le nombre de tes vaillants hommes. Il s'élèvera un tumulte parmi ton peuple, et toutes tes forteresses seront détruites. ... Vienne l'aurore, et c'en est fait du roi d'Israël."3 PR 216 1 Le prophète Osée parle ainsi au sujet d'Ephraïm".4: "Des étrangers consument sa force, et il ne s'en doute pas; la vieillesse s'empare de lui, et il ne s'en doute pas. ... Israël a rejeté le bien. ... Ephraïm est opprimé, brisé par le jugement." Incapables de prévoir les conséquences de leur mauvaise conduite, les Israélites allaient devenir un peuple "errant parmi les nations."5 PR 216 2 Certains conducteurs d'Israël eurent le sentiment très vif d'avoir perdu leur glorieux prestige à l'égard des autres nations, et ils souhaitèrent ardemment le retrouver. Mais au lieu d'abandonner les pratiques qui avaient provoqué la faiblesse du royaume, ils s'obstinèrent à commettre l'iniquité. Ils se flattaient de renforcer leur pouvoir en s'alliant, quand l'occasion s'en présentait, avec des païens. "Ephraïm voit son mal, et Juda ses plaies; Ephraïm se rend en Assyrie. ... Ephraïm est comme une colombe stupide, sans intelligence; ils implorent l'Egypte, ils vont en Assyrie." Ephraïm "fait alliance avec l'Assyrie".6 PR 216 3 Par l'intermédiaire de l'homme de Dieu qui était apparu devant l'autel de Béthel, par celui d'Elie, d'Elisée, d'Amos et d'Osée, Dieu ne cessa d'avertir les dix tribus d'Israël des malheurs qui allaient fondre sur elles, par suite de leur désobéissance. Mais en dépit des reproches et des supplications, les Israélites ne firent que s'enfoncer dans l'apostasie. "Israël se révolte comme une génisse indomptable, déclarait le Seigneur, mon peuple est enclin à s'éloigner de moi."7 PR 216 4 Les châtiments divins s'abattaient parfois lourdement sur les enfants d'Israël. "Je les frapperai par les prophètes, déclarait le Seigneur, je les tuerai par les paroles de ma bouche, et mes jugements éclateront comme la lumière. Car j'aime la piété et non les sacrifices, et la connaissance de Dieu plus que les holocaustes. Ils ont, comme le vulgaire, transgressé l'alliance; c'est alors qu'ils m'ont été infidèles."8 Enfin, un suprême message leur fut adressé: "Ecoutez la parole de l'Eternel, enfants d'Israël!" Puis, s'adressant à la nation rebelle, Osée s'écrie: "Puisque tu as oublié la loi de ton Dieu, j'oublierai aussi tes enfants. Plus ils se sont multipliés, plus ils ont péché contre moi: je changerai leur gloire en ignominie. ... Je les châtierai selon leurs voies, je leur rendrai selon leurs oeuvres."9 PR 217 1 L'iniquité d'Israël, au cours de la dernière moitié du siècle qui précéda la captivité assyrienne, rappelle celle des jours de Noé. C'est celle de toutes les périodes où les hommes rejettent le Seigneur pour se livrer totalement au mal. Lorsqu'on exalte la nature au-dessus de son auteur, qu'on adore la créature au lieu du Créateur, on aboutit toujours aux pires catastrophes. Ainsi, quand le peuple d'Israël adora Baal et Astarté, il rendit un culte suprême aux forces de la nature, et il perdit contact avec tout ce qui est noble et élevé. Il devint alors une proie facile pour la tentation. Privée de défense, l'âme s'égare, elle est incapable de lutter contre le péché, et les viles passions du coeur humain se donnent libre cours. PR 217 2 Les prophètes élevèrent la voix contre l'oppression excessive, l'injustice flagrante, le luxe effréné et insensé qui régnaient de leur temps. Ils blâmèrent les festins et l'ivresse, la licence impudique et la débauche; mais c'est en vain qu'ils adressaient leurs protestations au peuple idolâtre et dénonçaient ses péchés. "Ils haïssent celui qui les reprend à la porte, déclarait Amos, et ils ont en horreur celui qui parle sincèrement." Et, s'adressant à eux, il s'écrie: "Vous opprimez le juste, vous recevez des présents, et vous violez à la porte le droit des pauvres."10 PR 217 3 Telles furent certaines des conséquences de l'instauration du culte du veau d'or de Jéroboam. La première entorse faite aux formes du culte conduisait aux pratiques les plus grossières de l'idolâtrie, si bien que finalement presque tous les habitants d'Israël s'adonnèrent à l'adoration fascinante de la nature. Oubliant leur Maître, ils se plongèrent "dans la corruption".11 PR 218 1 Les prophètes ne cessèrent de s'élever contre ces péchés, et d'exhorter le peuple au bien. "Semez selon la justice, moissonnez selon la miséricorde, s'écria Osée, défrichez-vous un champ nouveau! Il est temps de chercher l'Eternel, jusqu'à ce qu'il vienne, et répande pour vous la justice. ... Reviens à ton Dieu, dit le prophète au peuple rebelle, garde la piété et la justice, et espère toujours en ton Dieu. ... Car tu es tombé par ton iniquité. Apportez avec vous des paroles, et revenez à l'Eternel. Dites-lui: Pardonne toutes les iniquités, et reçois-nous favorablement."12 PR 218 2 De multiples occasions furent offertes aux pécheurs pour se repentir. A l'heure la plus sombre de l'apostasie, Dieu envoya à Israël un message de pardon et d'espoir. "Ce qui cause ta ruine, Israël, déclarait-il, c'est que tu as été contre moi, contre celui qui pouvait te secourir. Où donc est ton roi? Qu'il te délivre dans toutes tes villes!"13 PR 218 3 "Venez, retournons à l'Eternel, suppliait le prophète, car il a déchiré, mais il nous guérira; il a frappé, mais il bandera nos plaies. Il nous rendra la vie dans deux jours; le troisième jour il nous relèvera, et nous vivrons devant lui. Connaissons, cherchons à connaître l'Eternel; sa venue est aussi certaine que celle de l'aurore. Il viendra pour nous comme la pluie, comme la pluie du printemps qui arrose la terre."14 PR 218 4 Le Seigneur offrait la restauration et la paix à ceux qui avaient perdu de vue ses desseins pour sauver les pécheurs des pièges de Satan. "Je réparerai leur infidélité, leur déclarait-il, j'aurai pour eux un amour sincère; car ma colère s'est détournée d'eux. Je serai comme la rosée pour Israël, il fleurira comme le lis, et il poussera des racines comme le Liban. Ses rameaux s'étendront; il aura la magnificence de l'olivier, et les parfums du Liban. Ils reviendront s'asseoir à son ombre, ils redonneront la vie au froment, et ils fleuriront comme la vigne; ils auront la renommée du vin du Liban. Ephraïm, qu'ai-je à faire encore avec les idoles? Je l'exaucerai, je le regarderai, je serai pour lui comme un cyprès verdoyant. C'est de moi que tu recevras ton fruit. Que celui qui est sage prenne garde à ces choses! Que celui qui est intelligent les comprenne! Car les voies de l'Eternel sont droites; les justes y marcheront, mais les rebelles y tomberont."15 PR 219 1 Dieu insistait sur les bénédictions réservées à ceux qui le rechercheraient. "Cherchez-moi, et vous vivrez! disait-il. Ne cherchez pas Béthel, n'allez pas à Guilgal, ne passez pas à Beer-Schéba. Car Guilgal sera captif, et Béthel anéanti. ... PR 219 2 "Recherchez le bien et non le mal, afin que vous viviez, et qu'ainsi l'Eternel, le Dieu des armées, soit avec vous, comme vous le dites. Haïssez le mal et aimez le bien, faites régner à la porte la justice; et peut-être l'Eternel, le Dieu des armées, aura pitié des restes de Joseph."16 PR 219 3 Mais la plupart de ceux qui entendirent ces exhortations refusèrent d'en bénéficier. Les paroles des messagers du Seigneur allaient tellement à l'encontre de ces impénitents que le prêtre idolâtre de Béthel fit dire au roi d'Israël: "Amos conspire contre toi au milieu de la maison d'Israël; le pays ne peut supporter toutes ses paroles."17 PR 219 4 Le Seigneur déclara par la bouche d'Osée: "Lorsque je voulais guérir Israël, l'iniquité d'Ephraïm et la méchanceté de Samarie se sont révélées. ... L'orgueil d'Israël témoigne contre lui; ils ne reviennent pas à l'Eternel, leur Dieu, et ils ne le cherchent pas, malgré tout cela."18 PR 219 5 De génération en génération, Dieu avait supporté la méchanceté de ses enfants. Même alors, devant leur rébellion pleine de défi, il désirait ardemment leur salut. "Que te ferai-je, Ephraïm? s'exclamait-il. Que te ferai-je Juda? Votre piété est comme la nuée du matin, comme la rosée qui bientôt se dissipe."19 PR 219 6 Les maux qui s'étaient abattus sur la nation étaient devenus inguérissables, c'est pourquoi ce terrible jugement fut prononcé: "Ephraïm est attaché aux idoles: laisse-le! ... Ils arrivent, les jours de châtiment, ils arrivent, les jours de la rétribution: Israël va l'éprouver!"20 PR 219 7 Les dix tribus devaient récolter le fruit de l'apostasie qui avait pris forme avec l'érection des autels de Béthel et de Dan. Dieu leur adressa ce message: "L'Eternel a rejeté ton veau, Samarie! Ma colère s'est enflammée contre eux. Jusques à quand refuseront-ils de se purifier? Il vient d'Israël, un ouvrier l'a fabriqué, et ce n'est pas un dieu; c'est pourquoi le veau de Samarie sera mis en pièces. ... Les habitants de Samarie seront consternés au sujet des veaux de Beth-Aven; le peuple mènera deuil sur l'idole, et ses prêtres trembleront pour elle, pour sa gloire, qui va disparaître du milieu d'eux. Elle sera transportée en Assyrie, pour servir de présent au roi Jareb (Sennacherib)."21 PR 220 1 "Voici, le Seigneur, l'Eternel, a les yeux sur le royaume coupable. Je le détruirai de dessus la face de la terre; toutefois, je ne détruirai pas entièrement la maison de Jacob, dit l'Eternel. Car voici, je donnerai mes ordres, et je secouerai la maison d'Israël parmi toutes les nations, comme on secoue avec le crible, sans qu'il tombe à terre un seul grain. Tous les pécheurs de mon peuple mourront par l'épée, ceux qui disent: Le malheur n'approchera pas, ne nous atteindra pas. ... PR 220 2 "Les palais d'ivoire périront, les maisons des grands disparaîtront, dit l'Eternel. ... Le Seigneur, l'Eternel des armées, touche la terre, et elle tremble, et tous ses habitants sont dans le deuil. ... Tes fils et tes filles tomberont par l'épée, ton champ sera partagé au cordeau; et toi, tu mourras sur une terre impure, et Israël sera emmené captif loin de son pays. ... Et puisque je te traiterai de la même manière, prépare-toi à la rencontre de ton Dieu, ô Israël!"22 PR 220 3 Les châtiments prédits subirent un temps d'arrêt, et pendant le long règne de Jéroboam II les armées d'Israël remportèrent d'éclatantes victoires. Toutefois ces succès éphémères n'apportèrent aucun changement dans le coeur des impénitents, et finalement Amos déclara: "Jéroboam mourra par l'épée, et Israël sera emmené captif loin de son pays."23 PR 220 4 Mais le roi et le peuple ne tinrent aucun compte de cette déclaration catégorique, tant ils étaient ancrés dans l'idolâtrie. Amatsia, l'un des chefs des prêtres de Béthel, saisi par les paroles que le prophète avait prononcées contre Israël et son roi, dit à Amos: "Homme à visions, va-t'en, fuis dans le pays de Juda; manges-y ton pain, et là tu prophétiseras. Mais ne continue pas à prophétiser à Béthel, car c'est un sanctuaire du roi, et c'est une maison royale."24 Ce à quoi le prophète répondit: "Voici ce que dit l'Eternel. ... Israël sera emmené captif loin de son pays."25 PR 221 1 Ces paroles s'accomplirent littéralement. Mais la destruction du royaume ne se produisit que graduellement. Dans son jugement, le Seigneur fit preuve de clémence, tout d'abord lorsque "Pul, roi d'Assyrie, vint dans le pays". Menahem, alors roi d'Israël, ne fut pas fait prisonnier; le vainqueur lui promit de le laisser sur le trône comme vassal du roi d'Assyrie. "Menahem donna à Pul mille talents d'argent, pour qu'il l'aidât à affermir la royauté entre ses mains. Menahem leva cet argent sur tous ceux d'Israël qui avaient de la richesse, afin de le donner au roi d'Assyrie: il les taxa chacun à cinquante sicles d'argent."26 Lorsque les Assyriens eurent soumis les dix tribus d'Israël, ils s'en retournèrent dans leur pays pendant un certain temps. PR 221 2 Loin de se repentir du mal qui avait provoqué la ruine de son royaume, Menahem "ne se détourna point des péchés de Jéroboam, fils de Nebath, qui avait fait pécher Israël". Ses successeurs, Pekachia et Pékach, firent aussi "ce qui est mal aux yeux de l'Eternel".27 "Du temps de Pékach", qui régna vingt ans sur Israël, Tiglath-Piléser, roi d'Assyrie, envahit le royaume, et emmena en captivité, dans son pays, de nombreux habitants des tribus de la Galilée et de l'est du Jourdain, "les Rubénites, les Gadites et la demi-tribu de Manassé", ainsi que les habitants "de Galaad, de la Galilée, et de tout le pays de Nephtali",28 qui furent dispersés parmi les païens, dans des régions très éloignées de la Palestine. PR 221 3 Le royaume du nord ne devait jamais se remettre de ce coup fatal. Le faible reste conserva cependant les formes de son gouvernement, bien qu'il ne possédât plus aucun pouvoir. Un roi seulement allait succéder à Pékach, le roi Osée. Mais le royaume d'Israël serait bientôt rayé de la carte du monde. Cependant, au cours de ces années de détresse, Dieu usa encore de miséricorde, et offrit à son peuple une nouvelle occasion de se détourner de l'idolâtrie. La troisième année du règne d'Osée, le bon roi Ezéchias monta sur le trône de Juda, et il s'empressa d'apporter d'importantes réformes aux services du temple de Jérusalem. Pendant la Pâque, on organisa une cérémonie où furent conviées, non seulement les tribus de Juda et de Benjamin sur lesquelles régnait Ezéchias, mais aussi les tribus du royaume du nord. Une publication fut faite "dans tout Israël, depuis Beer-Schéba jusqu'à Dan, pour que l'on vînt à Jérusalem célébrer la Pâque en l'honneur de l'Eternel, le Dieu d'Israël. Car elle n'était plus célébrée par la multitude comme il est écrit. PR 222 1 "Les coureurs allèrent avec les lettres du roi et de ses chefs dans tout Israël et Juda. Et d'après l'ordre du roi, ils dirent: Enfants d'Israël, revenez à l'Eternel, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, afin qu'il revienne à vous, reste échappé de la main des rois d'Assyrie. ... Ne raidissez donc pas votre cou, comme vos pères; donnez la main à l'Eternel, venez à son sanctuaire qu'il a sanctifié pour toujours, et servez l'Eternel, votre Dieu, pour que sa colère ardente se détourne de vous. Si vous revenez à l'Eternel, vos frères et vos fils trouveront miséricorde auprès de ceux qui les ont emmenés captifs, et ils reviendront dans ce pays; car l'Eternel, votre Dieu, est compatissant et miséricordieux, et il ne détournera pas sa face de vous, si vous revenez à lui."29 PR 222 2 "Les coureurs allèrent ainsi de ville en ville dans le pays d'Ephraïm et de Manassé, et jusqu'à Zabulon", publier le message dont Ezéchias les avait chargés. Israël aurait dû reconnaître alors, dans cette invitation, un appel à la repentance. Mais le reste des dix tribus qui vivait encore dans le territoire jadis prospère du royaume du nord traita les messagers du roi avec indifférence, même avec mépris. "On se riait et l'on se moquait d'eux." Quelques-uns cependant répondirent avec empressement à l'invitation royale. "Quelques hommes d'Aser, de Manassé et de Zabulon s'humilièrent et vinrent à Jérusalem ... pour célébrer la fête des pains sans levain."30 PR 222 3 Deux ans plus tard environ, les armées assyriennes, conduites par Salmanasar, investirent la ville de Samarie. Au cours de ce siège, une grande partie de la population périt, autant par la faim et la maladie que par les armes. La ville et la nation capitulèrent, le malheureux reste des dix tribus fut emmené en captivité en Assyrie et dispersé dans les provinces de ce royaume. PR 223 1 La ruine qui fondit sur les tribus du royaume du nord était l'effet du châtiment direct du ciel. Les Assyriens ne furent que les instruments employés par le Seigneur dans l'exécution de ses desseins. Par la bouche d'Esaïe, qui commença à prophétiser peu de temps avant la chute de Samarie, Dieu disait de l'armée assyrienne: Elle est la "verge de ma colère", "la verge dans ma main", "l'instrument de ma fureur".31 PR 223 2 Les enfants d'Israël avaient commis de graves péchés "contre l'Eternel, leur Dieu ... et ils firent des choses mauvaises. ... Ils n'écoutèrent point. ... Ils rejetèrent ses lois, l'alliance qu'il avait faite avec leurs pères, et les avertissements qu'il leur avait adressés." Tout cela arriva parce qu'"ils abandonnèrent tous les commandements de l'Eternel, leur Dieu; ils se firent deux veaux en fonte, ils fabriquèrent des idoles d'Astarté, ils se prosternèrent devant toute l'armée des cieux, et ils servirent Baal". Et parce qu'ils refusèrent résolument de se repentir, "l'Eternel les a humiliés, il les a livrés entre les mains des pillards, et il a fini par les chasser loin de sa face", selon les avertissements qu'il leur avait envoyés "par tous ses serviteurs, les prophètes". PR 223 3 Ainsi, "Israël a été emmené captif loin de son pays, en Assyrie ... parce que les Israélites n'avaient ni écouté ni mis en pratique tout ce qu'avait ordonné Moïse, serviteur de l'Eternel".32 PR 223 4 En infligeant ces terribles châtiments aux dix tribus d'Israël, Dieu avait un plan plein de sagesse et de miséricorde. Ce qu'il ne pouvait plus faire par les Israélites au pays de leurs pères, il allait chercher à l'accomplir en les dispersant parmi les païens. Ce plan consistait à sauver tous ceux qui voudraient profiter du pardon offert par le Sauveur de l'humanité. Dans les épreuves du peuple d'Israël, Dieu révélerait sa gloire aux nations de la terre. PR 224 1 Tous les captifs ne furent pas impénitents. Quelques-uns restèrent fidèles à l'Eternel, d'autres s'humilièrent devant lui. C'est par "ces fils du Dieu vivant"33 que le Seigneur allait amener des multitudes d'Assyriens à le connaître et à bénéficier de sa loi. ------------------------Chapitre 24 -- Détruit par manque de connaissance PR 225 1 La faveur divine à l'égard d'Israël a toujours été fonction de son obéissance. Au pied du Sinaï, ce peuple avait contracté une alliance avec le Seigneur, qui avait déclaré: "Vous m'appartiendrez entre tous les peuples." Les Israélites promirent solennellement de suivre la voie de l'obéissance. "Nous ferons tout ce que l'Eternel a dit",1 avaient-ils affirmé. Et quelques jours plus tard, alors que la loi était promulguée sur le Sinaï et que Moïse leur faisait part des instructions relatives aux statuts et aux ordonnances, ils déclarèrent à nouveau, d'une seule voix: "Nous ferons tout ce que l'Eternel a dit." Ces mêmes paroles, ils les répétèrent encore au moment où l'alliance fut ratifiée.2 Dieu choisissait Israël pour en faire son peuple, et Israël le choisissait comme son Roi. PR 225 2 Arrivé au terme de ses pérégrinations dans le désert, Israël entendit encore répéter les conditions de cette alliance. A Baal-Péor, situé à la frontière de la terre promise, et où un si grand nombre furent la proie facile de tentations insidieuses, ceux qui restèrent fidèles renouvelèrent leur promesse d'obéissance. Moïse les mit en garde contre les tentations qui allaient les assaillir; il les suppliait de ne rien avoir de commun avec les nations étrangères, et d'adorer Dieu seul. PR 226 1 "Maintenant, Israël, avait-il dit, écoute les lois et les ordonnances que je vous enseigne. Mettez-les en pratique, afin que vous viviez, et que vous entriez en possession du pays que vous donne l'Eternel, le Dieu de vos pères. Vous n'ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n'en retrancherez rien; mais vous observerez les commandements de l'Eternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris. ... Vous les observerez et vous les mettrez en pratique; car ce sera là votre sagesse et votre intelligence aux yeux des peuples, qui entendront parler de toutes ces lois et qui diront: Cette grande nation est un peuple absolument sage et intelligent!"3 PR 226 2 Il avait été spécialement recommandé aux Israélites de ne pas perdre de vue les commandements de Dieu. S'ils les observaient, la force et la bénédiction seraient leur partage. "Prends garde à toi et veille attentivement sur ton âme, tous les jours de ta vie", avait dit le Seigneur par la bouche de Moïse, "de peur que tu n'oublies les choses que tes yeux ont vues, et qu'elles ne sortent de ton coeur; enseigne-les à tes enfants et aux enfants de tes enfants".4 PR 226 3 Les scènes terrifiantes qui se déroulèrent au moment où la loi fut donnée sur le Sinaï ne devaient jamais être oubliées. Les avertissements prodigués aux Israélites au sujet des coutumes idolâtres qui régnaient dans les nations étrangères étaient clairs et formels: "Veillez attentivement sur vos âmes, de peur que vous ne vous corrompiez et que vous ne vous fassiez une image taillée, une représentation de quelque idole." Et encore: "Veille sur ton âme, de peur que, levant les yeux vers le ciel, et voyant le soleil, la lune et les étoiles, toute l'armée des cieux, tu ne sois entraîné à te prosterner en leur présence et à leur rendre un culte: ce sont des choses que l'Eternel, ton Dieu, a données en partage à tous les peuples, sous le ciel tout entier. ... Veillez sur vous, afin de ne point mettre en oubli l'alliance que l'Eternel, votre Dieu, a traitée avec vous, et de ne point vous faire d'image taillée, de représentation quelconque, que l'Eternel, ton Dieu, t'ait défendue."5 PR 227 1 Moïse signalait les maux qui résulteraient de l'abandon des statuts de l'Eternel. Prenant la terre et le ciel à témoin, il déclarait que si, après avoir habité longtemps le pays promis, le peuple ajoutait à son culte des rites idolâtres, se prosternait devant des images taillées, et refusait de revenir au vrai Dieu, alors sa colère s'enflammerait contre les Israélites, qui seraient emmenés en captivité et dispersés parmi les païens. "Vous disparaîtrez par une mort rapide du pays dont vous allez prendre possession au-delà du Jourdain, leur avait dit le prophète; vous n'y prolongerez pas vos jours, car vous serez entièrement détruits. L'Eternel vous dispersera parmi les peuples et vous ne resterez qu'un petit nombre au milieu des nations où l'Eternel vous emmènera. Et là, vous servirez des dieux, ouvrage de mains d'homme, du bois, et de la pierre, qui ne peuvent ni voir, ni entendre, ni manger, ni sentir."6 PR 227 2 Cette prophétie, qui se réalisa en partie au temps des Juges, s'accomplit d'une façon plus complète et plus littérale pendant la captivité d'Israël en Assyrie et de Juda à Babylone. PR 227 3 L'apostasie avait été graduelle. De génération en génération, Satan redoubla d'efforts pour faire oublier au peuple élu "les commandements, les lois et les ordonnances"7 qu'il s'était engagé à observer perpétuellement. Le diable savait que s'il arrivait à amener les Israélites à oublier le Seigneur pour aller "après d'autres dieux", ils périraient.8 PR 227 4 Toutefois, l'ennemi de l'Eglise de Dieu avait mésestimé la compassion de celui qui, bien que ne tenant "point le coupable pour innocent", est "miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité, qui conserve son amour jusqu'à mille générations, qui pardonne l'iniquité, la rébellion et le péché".9 Quoique Satan s'efforçât de contrecarrer les desseins du Seigneur à l'égard de son peuple, bien qu'il parût triompher aux heures les plus sombres de l'histoire d'Israël, Dieu continuait à faire preuve de miséricorde. Il montrait au peuple tout ce qui pouvait contribuer au bien de la nation. J'ai écrit "pour lui toutes les ordonnances de ma loi, déclarait-il par la bouche du prophète Osée, elles sont regardées comme quelque chose d'étranger. ... C'est moi qui guidai les pas d'Ephraïm, le soutenant par ses bras; et ils n'ont pas vu que je les guérissais."10 Dieu avait témoigné à l'égard d'Israël une tendresse infinie; il l'avait instruit par ses prophètes, "précepte sur précepte, règle sur règle". PR 228 1 Si les Israélites avaient tenu compte de ses messages, l'humiliation leur eût été épargnée. Mais, parce qu'ils persistèrent dans le mépris de sa loi, Dieu fut contraint de les laisser aller en captivité. "Mon peuple est détruit, lui fit-il dire par Osée, parce qu'il lui manque la connaissance. Puisque tu as rejeté la connaissance, je te rejetterai. ... Tu as oublié la loi de ton Dieu."11 PR 228 2 Dans tous les siècles, la transgression de la loi divine a été suivie des mêmes résultats. Aux jours de Noé, alors que tous les principes du bien étaient violés, que l'iniquité grandissait au point que Dieu ne pouvait plus la supporter, il fut décrété: "J'exterminerai de la face de la terre l'homme que j'ai créé."12 Au temps d'Abraham, les habitants de Sodome défièrent ouvertement Dieu et sa loi. Il s'ensuivit la même méchanceté, la même corruption, la même licence effrénée qui caractérisa le monde antédiluvien. Les Sodomites dépassèrent les bornes de la patience divine, et le feu de la vengeance céleste s'alluma contre eux. L'époque qui précéda la captivité des dix tribus d'Israël fut marquée par une désobéissance et une méchanceté semblables. La loi divine fut considérée comme une ordonnance sans valeur, ce qui amena sur Israël un déluge d'iniquité. PR 228 3 "L'Eternel a un procès avec les habitants du pays, s'écria Osée, parce qu'il n'y a point de vérité, point de miséricorde, point de connaissance de Dieu dans le pays. Il n'y a que parjures et mensonges, assassinats, vols et adultères; on use de violence, on commet meurtre sur meurtre."13 PR 228 4 Les prophéties d'Amos et d'Osée concernant le châtiment divin parlaient aussi de gloire future. Mais pour les dix tribus, si longtemps rebelles et impénitentes, il n'était fait aucune promesse de retour en Palestine. Elles devaient, jusqu'à la fin des temps, "errer parmi les nations". Toutefois, Osée prédit à Israël qu'il aurait le privilège de participer à la restauration finale, à la fin des temps, au moment où le Christ apparaîtra comme Roi des rois et Seigneur des seigneurs. Le prophète déclarait: "Les enfants d'Israël resteront longtemps sans roi, sans chef, sans sacrifice, sans statue, sans éphod, et sans théraphim." "Après cela, ajoutait-il, ils reviendront; ils chercheront l'Eternel, leur Dieu, et David, leur roi; et ils tressailliront à la vue de l'Eternel et de sa bonté, dans la suite des temps."14 PR 229 1 Dans un langage symbolique, Osée exposait aux dix tribus le dessein de Dieu destiné à redonner à toute âme repentante, qui voudrait se joindre à son Eglise, les bénédictions réservées à Israël dans la terre promise, aux jours où il avait manifesté sa fidélité envers son Dieu. En parlant de cette nation à laquelle il désirait si ardemment témoigner sa miséricorde, le Seigneur disait: "Je veux l'attirer et la conduire au désert, et je parlerai à son coeur. Là, je lui donnerai ses vignes et la vallée d'Acor, comme une porte d'espérance, et là, elle chantera comme au temps de sa jeunesse, et comme au jour où elle remonta du pays d'Egypte. En ce jour-là, dit l'Eternel, tu m'appelleras: Mon mari! et tu ne m'appelleras plus: Mon maître! J'ôterai de sa bouche les noms des Baals, afin qu'on ne les mentionne plus par leurs noms."15 PR 229 2 A la fin des temps, Dieu renouvellera son alliance avec ceux qui observent ses commandements. "En ce jour-là, dit-il, je traiterai pour eux une alliance avec les bêtes des champs, les oiseaux du ciel et les reptiles de la terre, je briserai dans le pays l'arc, l'épée et la guerre, et je les ferai reposer avec sécurité. Je serai ton fiancé pour toujours; je serai ton fiancé par la justice, la droiture, la grâce et la miséricorde; je serai ton fiancé par la fidélité, et tu reconnaîtras l'Eternel. PR 229 3 "En ce jour-là, j'exaucerai, dit l'Eternel, j'exaucerai les cieux, et ils exauceront la terre; la terre exaucera le blé, le moût et l'huile, et ils exauceront Jizreel. Je planterai pour moi Lo-Ruchama dans le pays, et je lui ferai miséricorde; je dirai à Lo-Ammi: Tu es mon peuple! et il répondra: Mon Dieu!"16 PR 230 1 "En ce jour-là, le reste d'Israël et les réchappés de la maison de Jacob ... s'appuieront avec confiance sur l'Eternel, le Saint d'Israël."17 De "toute nation, de tout peuple", quelques-uns répondront avec empressement au message: "Craignez Dieu, et donnez-lui gloire, car l'heure de son jugement est venue." Ils abandonneront toutes leurs idoles qui les attachaient à la terre pour adorer "celui qui a fait le ciel, et la terre, et la mer, et les sources d'eaux". Ils se dégageront de tout ce qui les entravait pour être devant ce monde comme des monuments de la miséricorde divine. Obéissant à la loi de Dieu, ils seront reconnus des anges et des hommes comme ceux qui sont restés fidèles "aux commandements de Dieu et à la foi de Jésus."18 PR 230 2 Voici, les jours viennent, dit l'Eternel, Où le laboureur suivra de près le moissonneur, Et celui qui foule le raisin celui qui répand la semence, Où le moût ruissellera des montagnes Et coulera de toutes les collines. Je ramènerai les captifs de mon peuple d'Israël; Ils rebâtiront les villes dévastées et les habiteront, Ils planteront des vignes et en boiront le vin, Ils établiront des jardins et en mangeront les fruits. Je les planterai dans leur pays, Et ils ne seront plus arrachés du pays que je leur ai donné, Dit l'Eternel, ton Dieu. ------------------------Chapitre 25 -- L'appel d'Esaïe PR 231 1 Le long règne d'Ozias".,1 au pays de Juda et de Benjamin, fut caractérisé par une prospérité que n'avait connue aucun monarque depuis la mort de Salomon, mort qui remontait à près de deux siècles. Il gouverna avec sagesse pendant longtemps. Grâce à la bénédiction d'en haut, ses armées reconquirent certains territoires perdus au cours des années précédentes. Des villes furent reconstruites et fortifiées; la position de la nation par rapport aux peuples voisins fut solidement renforcée. Le commerce refleurit, et les richesses des nations affluèrent à Jérusalem. La renommée d'Ozias "s'étendit au loin, car il fut merveilleusement soutenu jusqu'à ce qu'il devînt puissant."2 PR 231 2 Cette prospérité n'était cependant pas accompagnée d'une renaissance spirituelle correspondante. Les services du temple continuaient à se faire comme auparavant, et des multitudes s'assemblaient pour adorer le Dieu vivant; mais peu à peu l'orgueil et le formalisme succédèrent à l'humilité et à la sincérité. Il est dit d'Ozias que, "lorsqu'il fut puissant, son coeur s'éleva pour le perdre. Il pécha contre l'Eternel, son Dieu."3 Ozias pécha donc par orgueil, ce qui eut des conséquences désastreuses. Il viola un commandement formel qui ne permettait qu'aux descendants d'Aaron d'officier comme prêtres. Il pénétra dans le sanctuaire "pour brûler des parfums sur l'autel". Azaria, le grand prêtre, et les sacrificateurs le reprirent, et le supplièrent de ne pas se livrer à cet acte. "Tu commets un péché, lui dirent-ils, et cela ne tournera pas à ton honneur."4 PR 232 1 Ozias se mit dans une violente colère. Comment osait-on le réprimander ainsi, lui, le roi? Mais il ne put s'opposer aux protestations unanimes de ceux qui représentaient l'autorité religieuse et qui lui interdisaient de profaner le sanctuaire. Alors qu'il était là, plein de rage, un châtiment divin s'abattit sur lui. La lèpre "éclata sur son front". Le roi s'enfuit, terrifié; il ne devait jamais plus pénétrer dans le temple. Il resta lépreux jusqu'à sa mort, qui survint quelques années plus tard. Quel exemple frappant de l'insensé qui se détourne d'un commandement formel de l'Ecriture! Ni sa position élevée, ni son long service ne pouvaient excuser le péché d'orgueil qui ternit les dernières années de son règne, et attira sur lui le châtiment du ciel. PR 232 2 Dieu ne fait acception de personne. "Si quelqu'un, indigène ou étranger, agit la main levée, il outrage l'Eternel; celui-là sera retranché du milieu de son peuple."5 PR 232 3 Le châtiment qui s'abattit sur Ozias semble avoir eu sur son fils une heureuse influence. Jotham assuma de lourdes responsabilités pendant les dernières années du règne de son père, et à sa mort il lui succéda. Il est dit de Jotham qu'"il fit ce qui est droit aux yeux de l'Eternel; il agit entièrement comme avait agi Ozias, son père. Seulement, les hauts lieux ne disparurent point; le peuple offrait encore des sacrifices et des parfums sur les hauts lieux."6 PR 232 4 Le règne d'Ozias touchait à sa fin, et Jotham assumait déjà la plupart des charges de l'Etat, lorsque Esaïe, de lignée royale et tout jeune encore, fut appelé à la vocation prophétique. La période au cours de laquelle il devait exercer son ministère fut particulièrement critique pour le peuple de Dieu. Esaïe assista à l'invasion de Juda par les armées alliées du nord d'Israël et de la Syrie, ainsi qu'au siège des principales villes du royaume par les armées assyriennes. Il vit Samarie capituler et emmener captives parmi les nations les dix tribus d'Israël. PR 233 1 Il vit aussi Juda envahi maintes fois par les Assyriens, et Jérusalem assiégée, prête à capituler, n'eût été la miraculeuse intervention du Seigneur. Le royaume du sud ne cessait d'être menacé de graves dangers. La protection divine allait disparaître, et les forces assyriennes déferler sur tout le territoire de Juda. PR 233 2 Mais le danger extérieur, bien qu'insurmontable en apparence, n'était rien comparé au danger intérieur. C'est la perversité de Juda qui plongeait Esaïe dans la plus grande angoisse et le désespoir le plus profond. L'apostasie et la révolte des hommes qui auraient dû se dresser comme des porte-bannières au milieu des peuples, attiraient sur eux les châtiments divins. Les nombreux péchés qui précipitaient la ruine du royaume du nord avaient été signalés en termes très nets, peu de temps auparavant, par Osée et Amos. PR 233 3 La situation sociale du peuple était particulièrement défavorable. Poussés par l'appât du gain, les hommes ajoutaient maison à maison, champ à champ?".7 La justice était faussée, le pauvre extorqué. Dieu s'écriait au sujet de ces procédés iniques: "La dépouille du pauvre est dans vos maisons! De quel droit foulez-vous mon peuple, et écrasez-vous la face des pauvres."8 Les magistrats eux-mêmes, qui auraient dû protéger les êtres sans défense, restaient insensibles aux cris des pauvres, des malheureux, des veuves et des orphelins.9 PR 233 4 Avec l'oppression et la richesse étaient apparus l'orgueil, le désir de paraître,10 l'ivrognerie et la luxure.11 Au temps d'Esaïe, l'idolâtrie elle-même ne provoquait plus d'étonnement.12 L'iniquité régnait avec tant d'intensité parmi toutes les classes de la population que les rares fidèles étaient souvent tentés de se laisser aller au découragement et au désespoir. Il semblait que le dessein de Dieu à l'égard d'Israël était sur le point d'échouer, et que la nation rebelle subirait un sort semblable à celui de Sodome et de Gomorrhe. PR 234 1 On ne s'étonne donc pas qu'en présence d'une telle situation Esaïe se soit dérobé à l'appel qui lui était adressé, sous le règne de Josias, de donner un message d'avertissement et de reproche au royaume de Juda. Il n'ignorait pas qu'il se heurterait à une résistance opiniâtre. Aussi tandis qu'il se rendait compte de son incapacité en face de la situation, qu'il pensait à l'endurcissement et à l'incrédulité du peuple pour lequel il était appelé à travailler, il lui semblait que son oeuvre serait vouée à l'échec. Devait-il, dans son désespoir, renoncer à sa mission, et abandonner Juda à son idolâtrie? Les dieux de Ninive devaient-ils régner sur la terre et défier le Dieu du ciel? PR 234 2 Telles étaient les pensées qui assaillaient l'esprit d'Esaïe, alors qu'il se tenait sous le portique du temple. Mais soudain, il sembla que la porte s'ouvrait et que le voile intérieur se soulevait. Alors le prophète put contempler le Saint des Saints, le lieu même où ses pieds ne devaient pas se poser. Devant lui se déploya la vision du Seigneur assis sur un trône très élevé et dont les pans de la robe remplissaient le temple. De chaque côté du trône se tenaient des séraphins, la face voilée en signe d'adoration. Et alors qu'ils officiaient devant leur Maître, et unissaient leurs voix dans ce chant solennel: "Saint, saint, saint est l'Eternel des armées! toute la terre est pleine de sa gloire!"13 les colonnes, les piliers et les portes de cèdre furent ébranlés par le son de leurs voix, et la maison fut remplie de leurs louanges. PR 234 3 Tandis qu'il contemplait la gloire et la majesté du Seigneur qui se révélait ainsi à ses yeux, Esaïe fut comme anéanti par le sentiment de la pureté et de la sainteté de Dieu. Quel contraste entre l'incomparable perfection de son Créateur et la vie de péché de ceux qui, comme lui-même, faisaient partie depuis si longtemps du peuple élu: Israël et Juda! "Malheur à moi! s'écria-t-il, je suis perdu, car je suis un homme dont les lèvres sont impures, j'habite au milieu d'un peuple dont les lèvres sont impures, et mes yeux ont vu le Roi, l'Eternel des armées."14 PR 234 4 Debout, dans la lumière éblouissante de la présence divine du Saint des Saints, Esaïe comprenait que s'il était abandonné à son imperfection et à sa déficience il ne pourrait jamais s'acquitter de la mission à laquelle il était appelé. Mais un séraphin fut envoyé pour le secourir; il prit une pierre ardente sur l'autel et en toucha les lèvres du prophète, en lui disant: "Ceci a touché tes lèvres; ton iniquité est enlevée, et ton péché est expié." Alors on "entendit la voix du Seigneur, disant: Qui enverrai-je, et qui marchera pour nous?" Esaïe répondit: "Me voici, envoie-moi."15 PR 235 1 Le céleste visiteur donna alors cet ordre au prophète: PR 235 2 Va, et dis à ce peuple: Vous entendrez, et vous ne comprendrez point; Vous verrez, et vous ne saisirez point. Rends insensible le coeur de ce peuple, Endurcis ses oreilles, et bouche-lui les yeux, Pour qu'il ne voie point de ses yeux, n'entende point de ses oreilles, Ne comprenne point de son coeur, Ne se convertisse point et ne soit point guéri. PR 235 3 La mission d'Esaïe était claire; il devait élever la voix pour protester contre les péchés d'Israël. Mais il redoutait de commencer son oeuvre sans avoir reçu auparavant l'assurance de réussir. "Jusques à quand, Seigneur?"17 s'écria-t-il. N'y aura-t-il jamais parmi le peuple que tu t'es choisi quelqu'un qui comprenne, qui se repente et qui croie? PR 235 4 La charge d'âmes confiée à Esaïe ne devait pas être assumée en vain. Sa mission ne serait pas entièrement infructueuse. Toutefois, les péchés qui s'étaient multipliés au cours de tant de générations ne pouvaient disparaître en un seul jour. Pendant toute sa vie, le prophète devait instruire avec patience, avec courage, à la fois comme messager d'espérance et messager de malédiction. Lorsque le dessein de Dieu serait enfin accompli, alors il verrait le fruit de son travail, ainsi que celui de tous les messagers fidèles du Seigneur. Un reste seulement serait sauvé. Pour cela, il fallait que des messages d'avertissement et d'exhortation soient adressés à la nation rebelle. Dieu déclarait: PR 235 5 Jusqu'à ce que les villes soient dévastées Et privées d'habitants; Jusqu'à ce qu'il n'y ait personne dans les maisons, Et que le pays soit ravagé par la solitude; Jusqu'à ce que l'Eternel ait éloigné les hommes, Et que le pays devienne un immense désert. PR 236 1 De terribles châtiments devaient s'abattre sur les pécheurs: la guerre, l'exil, l'oppression, la perte de la puissance et du prestige d'Israël à l'égard des autres nations. Toutes ces calamités allaient se produire, afin que ceux qui voudraient reconnaître en elles la main d'un Dieu offensé soient amenés à la repentance. PR 236 2 Les dix tribus qui composaient le royaume du nord seraient bientôt dispersées parmi les nations, et leurs villes abandonnées. Les armées dévastatrices des ennemis déferleraient sans cesse sur le pays: Jérusalem elle-même tomberait finalement, et Juda serait emmené en captivité. Cependant, la terre promise ne resterait pas entièrement abandonnée à toujours. Le visiteur céleste donna en effet à Esaïe cette assurance: PR 236 3 S'il y reste encore un dixième des habitants. Ils seront à leur tour anéantis. Mais, comme le térébinthe et le chêne Conservent leur tronc quand ils sont abattus, Une sainte postérité renaîtra de ce peuple. PR 236 4 Cette certitude de l'accomplissement des desseins de Dieu ranima le courage d'Esaïe. Que lui importait maintenant que les forces terrestres se déchaînent contre Juda? Que lui importait que le messager du Seigneur se heurte à l'opposition et à la résistance? Le prophète avait vu le Roi, l'Eternel des armées; il avait entendu la voix des séraphins s'écrier: "Toute la terre est pleine de sa gloire!"20 Il était persuadé que les messages du Seigneur, adressés au royaume égaré de Juda, seraient accompagnés de la puissance convaincante du Saint-Esprit. Cela suffisait à galvaniser son énergie pour accomplir la tâche qui se présentait à lui. Au cours de sa longue et pénible carrière, Esaïe garda le souvenir de cette vision. Pendant plus de soixante ans, il se dressa devant les enfants de Juda comme le prophète de l'espérance, et son courage ne faisait que grandir alors qu'il annonçait le triomphe futur de l'Eglise de Dieu. ------------------------Chapitre 26 -- Voici votre Dieu PR 237 1 Au temps d'Esaïe, l'état spirituel de l'humanité était obscurci par son incompréhension à l'égard de Dieu. Pendant longtemps, Satan s'était efforcé de faire croire aux hommes que leur Créateur était l'auteur du péché, de la souffrance et de la mort. Ceux qu'il avait ainsi trompés s'imaginaient que Dieu était un Dieu cruel et exigeant, qu'il les observait pour les accuser et les condamner, et ne recevait pas les pécheurs qui venaient à lui. La loi d'amour qui régit le royaume des cieux avait été présentée par le grand séducteur comme une atteinte à leur bonheur, comme un joug pesant auquel ils devaient se soustraire avec joie. Satan prétendait qu'on ne pouvait pas obéir aux préceptes de cette loi, et que la pénalité attachée à sa transgression était infligée d'une manière arbitraire. PR 237 2 En perdant de vue le vrai caractère du Très-Haut, les Israélites étaient sans excuse. Dieu se révéla souvent à eux comme celui qui est "miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité."1 "Quand Israël était jeune, déclarait-il, je l'aimais, et j'appelai mon fils hors d'Egypte."2 PR 238 1 Le Seigneur avait témoigné une tendresse infinie à Israël lors de sa délivrance du joug égyptien pour le conduire vers la terre promise. "Dans toutes leurs détresses ils n'ont pas été sans secours, et l'ange qui est devant sa face les a sauvés; il les a lui-même rachetés, dans son amour et sa miséricorde, et constamment il les a soutenus et portés, aux anciens jours."3 PR 238 2 "Je marcherai moi-même avec toi",4 telle était la promesse faite à Israël quand il errait dans le désert. Cette certitude était accompagnée d'une révélation merveilleuse du caractère de Dieu, ce qui avait rendu Moïse capable de proclamer la bonté de Dieu à tout Israël et de bien l'instruire sur les attributs du Roi invisible. "L'Eternel passa devant lui, et s'écria: L'Eternel, l'Eternel, Dieu miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité, qui conserve son amour jusqu'à mille générations, qui pardonne l'iniquité, la rébellion et le péché, mais qui ne tient point le coupable pour innocent."5 PR 238 3 C'est grâce à sa connaissance de la longanimité du Seigneur, de son amour infini et de sa miséricorde que Moïse plaida si merveilleusement en faveur d'Israël, lorsque, sur les frontières de la terre promise, ce peuple refusa d'avancer, selon l'ordre de Dieu. Au moment où il manifestait sa révolte avec le plus d'intensité, le Seigneur avait déclaré: "Je le frapperai par la peste, et je le détruirai", et il avait promis de faire des descendants de Moïse "une nation plus grande que lui (Israël)".6 Mais le prophète insistait sur les merveilleuses bénédictions et les promesses divines qui étaient réservées au peuple élu. Et dans une prière suprême, il implorait le Dieu d'amour en faveur de l'homme perdu.7 PR 238 4 Dans sa grande bonté, le Seigneur répondit: "Je pardonne, comme tu l'as demandé." Et sous la forme d'une prophétie, il fit connaître à Moïse son intention concernant le triomphe final d'Israël. "Je suis vivant! déclarait-il, et la gloire de l'Eternel remplira toute la terre."8 Sa gloire, sa miséricordieuse bonté, son tendre amour -- que Moïse avait réclamés avec tant d'insistance -- devaient être révélés à l'humanité tout entière. Cette promesse du Seigneur fut confirmée par un serment. Aussi certainement que Dieu existe et règne, sa gloire serait proclamée "parmi les nations, ... ses merveilles parmi les peuples".9 PR 239 1 C'est au sujet de l'accomplissement de cette prophétie qu'Esaïe avait entendu les séraphins chanter devant le trône de Dieu: "Toute la terre est pleine de sa gloire."10 Confiant dans la certitude de ces paroles, le prophète déclara lui-même avec hardiesse au sujet de ceux qui se prosternaient devant les statues de pierre et de bois: "Ils verront la gloire de l'Eternel, la magnificence de notre Dieu!"11 PR 239 2 Aujourd'hui, cette prophétie trouve un accomplissement rapide. L'activité missionnaire de l'Eglise de Dieu produit une riche moisson d'âmes, et bientôt l'Evangile sera proclamé à toutes les nations. Hommes et femmes de toute nation, de toute tribu et de toute langue ont été acceptés dans "le bien-aimé", "à la louange de la gloire de sa grâce", "afin de montrer dans les siècles à venir l'infinie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ".12 "Béni soit l'Eternel Dieu, le Dieu d'Israël, qui seul fait des prodiges! Béni soit à jamais son nom glorieux! Que toute la terre soit remplie de sa gloire!"13 PR 239 3 Dans la vision qui lui fut donnée dans le temple, Esaïe eut une magnifique révélation du caractère du Dieu d'Israël. "Le Très-Haut, dont la demeure est éternelle et dont le nom est saint", lui apparut dans toute sa majesté; et cependant, le prophète put comprendre la nature compatissante du Seigneur. Celui qui habite "dans les lieux élevés et dans la sainteté" est "avec l'homme contrit et humilié, afin de ranimer les coeurs contrits."14 L'ange chargé de toucher les lèvres d'Esaïe lui avait apporté ce message: "Ton iniquité est enlevée, et ton péché est expié."15 PR 239 4 Lorsqu'il contempla son Dieu, comme plus tard Saul de Tarse à la porte de Damas, le prophète n'eut pas seulement un aperçu de sa propre indignité, mais il reçut dans son coeur humilié l'assurance du pardon total et gratuit de ses péchés. Il se releva transformé. Il avait vu son Sauveur; il avait entrevu la beauté du caractère divin. Il pouvait témoigner de la transformation opérée en lui par la contemplation de l'amour infini. Désormais, il n'avait plus qu'un désir: libérer Israël égaré du fardeau et de la pénalité du péché. "Quels châtiments nouveaux vous infliger? demandait-il. ... Venez et plaidons! dit l'Eternel. Si vos péchés sont comme le cramoisi, ils deviendront blancs comme la neige; s'ils sont rouges comme la pourpre, ils deviendront comme la laine." "Lavez-vous, purifiez-vous, ôtez de devant mes yeux la méchanceté de vos actions; cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien."16 PR 240 1 Le Dieu que les Israélites prétendaient servir, mais dont ils comprenaient mal le caractère, leur était présenté comme le grand Médecin des maladies de l'âme. Qu'importait si toute la tête était malade, et si tout le coeur était languissant? Qu'importait si, de la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête, rien n'était sain; si tout n'était que blessures, meurtrissures et plaies vives."?17 Celui dont le coeur était pervers pouvait trouver la guérison en se tournant vers le Seigneur. "J'ai vu ses voies, déclarait-il, et je le guérirai; je lui servirai de guide, et je le consolerai, lui et ceux qui pleurent avec lui. ... Paix, paix à celui qui est loin et à celui qui est près! dit l'Eternel. Je les guérirai."18 PR 240 2 Le prophète exaltait Dieu, le Créateur de toutes choses. Aux villes de Juda, il apportait ce message: "Voici votre Dieu!"19 "Ainsi parle Dieu, l'Eternel, qui a créé les cieux et qui les a déployés, qui a étendu la terre et ses productions." "Moi, l'Eternel, j'ai fait toutes choses." "Je forme la lumière, et je crée les ténèbres." "C'est moi qui ai fait la terre, et qui sur elle ai créé l'homme; c'est moi, ce sont mes mains qui ont déployé les cieux, et c'est moi qui ai disposé toute leur armée."20 PR 240 3 "A qui me comparerez-vous, pour que je lui ressemble? dit le Saint. Levez vos yeux en haut, et regardez! Qui a créé ces choses? Qui fait marcher en ordre leur armée? Il les appelle toutes par leur nom; par son grand pouvoir et par sa force puissante. Il n'en est pas une qui fasse défaut."21 PR 240 4 A ceux qui craignaient que Dieu ne les reçoive pas, s'ils revenaient à lui, le prophète déclarait: "Pourquoi dis-tu, Jacob, pourquoi dis-tu, Israël: Ma destinée est cachée devant l'Eternel, mon droit passe inaperçu devant mon Dieu? Ne le sais-tu pas? Ne l'as-tu pas appris? C'est le Dieu d'éternité, l'Eternel, qui a créé les extrémités de la terre; il ne se fatigue point, il ne se lasse point; on ne peut sonder son intelligence. Il donne de la force à celui qui est fatigué, et il augmente la vigueur de celui qui tombe en défaillance. Les adolescents se fatiguent et se lassent, et les jeunes hommes chancellent; mais ceux qui se confient en l'Eternel renouvellent leur force. Ils prennent le vol comme les aigles; ils courent, et ne se lassent point, ils marchent, et ne se fatiguent point."22 PR 241 1 Le coeur de celui qui est tout amour a pitié du faible qui se sent incapable de se dégager des pièges de Satan. Avec une tendresse infinie, il lui offre de le fortifier, afin qu'il vive pour lui. "Ne crains rien, lui dit-il, car je suis avec toi; ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu; je te fortifie, je viens à ton secours, je te soutiens de ma droite triomphante." "Car je suis l'Eternel, ton Dieu, qui fortifie ta droite, qui te dis: Ne crains rien, je viens à ton secours. Ne crains rien, vermisseau de Jacob, faible reste d'Israël; je viens à ton secours, dit l'Eternel, et le Saint d'Israël est ton sauveur."23 PR 241 2 Tous les habitants de Juda étaient coupables, mais Dieu ne les abandonnait pas. C'est par eux que son nom serait exalté parmi les païens. Un grand nombre d'hommes qui l'ignoraient totalement devaient encore contempler sa gloire. C'était pour faire connaître ses desseins qu'il continuait à envoyer ses serviteurs avec ce message: "Revenez chacun de votre mauvaise voie."24 "A cause de mon nom, ... déclarait-il par la bouche du prophète Esaïe, je me contiens envers toi pour ne pas t'exterminer. ... C'est pour l'amour de moi, pour l'amour de moi, que je veux agir; car comment mon nom serait-il profané? Je ne donnerai pas ma gloire à un autre."25 PR 241 3 L'appel à la repentance retentissait avec une netteté indéniable, et tous étaient invités à retourner au Seigneur. "Cherchez l'Eternel pendant qu'il se trouve, suppliait Esaïe; invoquez-le, tandis qu'il est près. Que le méchant abandonne sa voie, et l'homme d'iniquité ses pensées; qu'il retourne à l'Eternel, qui aura pitié de lui, à notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner."26 PR 242 1 Ami lecteur, as-tu choisi ta propre voie? Erres-tu encore loin de Dieu, et cherches-tu à te rassasier des fruits de tes transgressions, pour les retrouver en cendre sur tes lèvres? Maintenant que tes projets sont contrariés, que tes espérances sont anéanties, restes-tu seul et désolé? Alors cette voix qui a si longtemps résonné dans ton coeur, mais que tu ne voulais pas entendre, s'adresse à toi, toujours plus claire et plus distincte: "Levez-vous, marchez! car ce n'est point ici un lieu de repos; à cause de la souillure, il y aura des douleurs, des douleurs violentes."27 Retourne à la maison du Père. Il te redit encore: "Reviens à moi, car je t'ai racheté." "Prêtez l'oreille, et venez à moi, écoutez, et votre âme vivra: je traiterai avec vous une alliance éternelle, pour rendre durables mes faveurs envers David."28 Ne prête pas l'oreille aux suggestions de l'ennemi à ne pas t'approcher du Sauveur avant de t'être amélioré. Si tu attends de parvenir à cet état, tu ne viendras jamais à lui. Lorsque Satan te présente ta souillure, pense à cette promesse de Jésus: "Je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi."29 Dis à l'ennemi que le sang du Christ lave toutes les souillures. Que la prière de David devienne la tienne: "Purifie-moi avec l'hysope, et je serai pur; lave-moi, et je serai plus blanc que la neige."30 PR 242 2 Le prophète Esaïe exhorta Juda à contempler le Dieu vivant, et à accepter ses offres gratuites. Il ne parla pas en vain: d'aucuns y prêtèrent une profonde attention, et abandonnèrent leurs idoles pour adorer le vrai Dieu. Ils apprirent à discerner dans leur Créateur l'amour, la miséricorde, la compassion. Aux jours douloureux qui assombrirent l'histoire de Juda et ne laissèrent qu'un reste dans le pays, les paroles du prophète devaient continuer à favoriser une réforme décisive. "En ce jour, avait déclaré Esaïe, l'homme regardera vers son créateur, et ses yeux se tourneront vers le Saint d'Israël; il ne regardera plus vers les autels, ouvrage de ses mains, et il ne contemplera plus ce que ses doigts ont fabriqué, les idoles d'Astarté et les statues du soleil."31 PR 243 1 Nombreux furent les hommes qui s'approchèrent de celui qui est tout amour, et le "plus puissant entre dix mille". "Tes yeux verront le roi dans sa magnificence",32 telle était la promesse qui leur était faite. Leurs péchés seraient effacés, et ils ne se glorifieraient qu'en Dieu seul. Au jour heureux où ils triompheraient de l'idolâtrie, ils s'écrieraient: "L'Eternel est magnifique pour nous; il nous tient lieu de fleuves, de vastes rivières. ... L'Eternel est notre juge, l'Eternel est notre législateur, l'Eternel est notre roi: c'est lui qui nous sauve."33 PR 243 2 Les messages adressés par Esaïe à ceux qui se détourneraient de leurs mauvaises voies étaient pleins d'encouragement et de consolation. Ecoutez ses paroles: PR 243 3 Souviens-toi de ces choses, ô Jacob! O Israël! car tu es mon serviteur; Je t'ai formé, tu es mon serviteur; Israël, je ne t'oublierai pas. J'efface tes transgressions comme un nuage, Et tes péchés comme une nuée; Reviens à moi, Car je t'ai racheté. PR 243 4 Tu diras en ce jour-là: Je te loue, ô Eternel! Car tu as été irrité contre moi, Ta colère s'est apaisée, et tu m'as consolé. Voici, Dieu est ma délivrance, Je serai plein de confiance, et je ne craindrai rien; Car l'Eternel, l'Eternel est ma force et le sujet de mes louanges. ... PR 243 5 Célébrez l'Eternel, car il a fait des choses magnifiques: Qu'elles soient connues par toute la terre! Pousse des cris de joie et d'allégresse, habitant de Sion! Car il est grand au milieu de toi, le Saint d'Israël. ------------------------Chapitre 27 -- Achaz PR 245 1 L'accession d'Achaz au trône de Juda plaça Esaïe et ses collaborateurs dans des difficultés plus grandes encore que celles qui s'étaient présentées jusqu'alors dans le royaume. Un grand nombre de ceux qui avaient résisté aux influences séductrices des pratiques idolâtres se laissaient maintenant gagner par le culte des divinités païennes. Les princes d'Israël étaient infidèles à leur mission, de faux prophètes s'élevaient, porteurs de messages destinés à égarer les esprits; il y eut même des prêtres qui se faisaient payer leur enseignement. Et cependant, les chefs de l'apostasie maintenaient encore les formes du vrai culte, et prétendaient faire partie du peuple de Dieu. PR 245 2 Michée, qui prophétisa pendant cette période troublée, déclare au sujet de ces gens-là: "Ils osent s'appuyer sur l'Eternel, ils disent: L'Eternel n'est-il pas au milieu de nous? Le malheur ne nous atteindra pas." Ils se vantaient, en blasphémant, ces pécheurs, qui continuaient à bâtir "Sion avec le sang, et Jérusalem avec l'iniquité".1 PR 246 1 Le prophète Esaïe réprouvait sévèrement ces péchés: "Ecoutez la parole de l'Eternel, chefs de Sodome! s'écriait-il. ... Qu'ai-je à faire de la multitude de vos sacrifices? dit l'Eternel. ... Quand vous venez vous présenter devant moi, qui vous demande de souiller mes parvis?"2 PR 246 2 Le Sage a dit: "Le sacrifice des méchants est quelque chose d'abominable; combien plus grand quand ils l'offrent avec des pensées criminelles".3 Le Dieu du ciel a les yeux "trop purs pour voir le mal", et il ne peut "regarder l'iniquité!"4 Ce n'est pas parce qu'il ne veut pas pardonner le pécheur que Dieu se détourne de lui, mais parce que celui-ci refuse de profiter des trésors de la grâce. PR 246 3 "Non, la main de l'Eternel n'est pas trop courte pour sauver, ni son oreille trop dure pour entendre. Mais ce sont vos crimes qui mettent une séparation entre vous et votre Dieu; ce sont vos péchés qui vous cachent sa face et l'empêchent de vous écouter."5 PR 246 4 Salomon a écrit: "Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant."6 Il en était ainsi du pays de Juda. Par leurs transgressions continuelles, ses rois étaient devenus comme des enfants. Esaïe attira l'attention du peuple sur la faiblesse de sa situation par rapport aux autres nations. Il lui montra que cette faiblesse provenait de la méchanceté manifestée en haut lieu. "Le Seigneur, l'Eternel des armées, déclarait-il, va ôter de Jérusalem et de Juda tout appui et toute ressource, toute ressource de pain et toute ressource d'eau, le héros et l'homme de guerre, le juge et le prophète, le devin et l'ancien, le chef de cinquante et le magistrat, le conseiller, l'artisan distingué et l'habile enchanteur. Je leur donnerai des jeunes gens pour chefs, et des enfants domineront sur eux. ... Jérusalem chancelle, et Juda s'écroule, parce que leurs paroles et leurs oeuvres sont contre l'Eternel."7 PR 246 5 "Mon peuple, ceux qui te conduisent t'égarent, ajoutait le prophète, et ils corrompent la voie dans laquelle tu marches."8 Ceci s'appliquait directement au règne d'Achaz, car l'Ecriture nous dit qu'"il marcha dans les voies des rois d'Israël; et même il fit des images en fonte pour les Baals, il brûla des parfums dans la vallée des fils de Hinnom",9 et "il fit passer son fils par le feu, suivant les abominations des nations que l'Eternel avait chassées devant les enfants d'Israël."10 PR 247 1 Le peuple élu courait alors un grand danger. Quelques années plus tard, les dix tribus du royaume d'Israël étaient dispersées parmi les nations païennes. La situation du royaume de Juda était tout aussi tragique. Les forces du bien, diminuant rapidement, le mal ne cessait d'augmenter. Devant cet état de choses, le prophète Michée s'écriait: "L'homme de bien a disparu du pays, et il n'y a plus de juste parmi les hommes." "Le meilleur d'entre eux est comme une ronce, le plus droit pire qu'un buisson d'épines."11 Et Esaïe, de son côté, disait: "Si l'Eternel des armées ne nous eût conservé un faible reste, nous serions comme Sodome, nous ressemblerions à Gomorrhe."12 PR 247 2 Par sa tendre compassion envers ceux qui lui restent fidèles, aussi bien que par son amour infini pour ceux qui se perdent, Dieu exerce sa longue patience à l'égard des rebelles, afin qu'ils abandonnent le mal pour revenir à lui. "Précepte sur précepte, règle sur règle, un peu ici, un peu là",13 par l'intermédiaire de ceux qu'il a choisis, le Seigneur enseigne le chemin de la justice aux transgresseurs de sa loi. PR 247 3 C'est ce qu'il fit sous le règne d'Achaz. Des appels répétés furent adressés aux Israélites pour les inviter à retourner à l'Eternel. Avec quelle tendresse les prophètes ne s'adressaient-ils pas aux rebelles! Aussi leurs exhortations ardentes à la repentance portèrent-elles des fruits à la gloire de Dieu. PR 247 4 Le prophète Michée s'exprimait ainsi: "Ecoutez donc ce que dit l'Eternel: Lève-toi, plaide devant les montagnes, et que les collines entendent ta voix! ... Ecoutez, montagnes, le procès de l'Eternel, et vous, solides fondements de la terre! Car l'Eternel a un procès avec son peuple, il veut plaider avec Israël. PR 247 5 "Mon peuple, que t'ai-je fait? En quoi t'ai-je fatigué? Réponds-moi! Car je t'ai fait monter du pays d'Egypte, je t'ai délivré de la maison de servitude, et j'ai envoyé devant toi Moïse, Aaron et Marie. Mon peuple, rappelle-toi ce que projetait Balak, roi de Moab, et ce que lui répondit Balaam, fils de Beor, de Sittim à Guilgal, afin que tu reconnaisses les bienfaits de l'Eternel."14 PR 248 1 Le Dieu que nous servons fait preuve envers nous de longanimité. "Ses compassions ne sont pas à leur terme."15 Son Esprit nous invite à accepter le don de la vie. "Je suis vivant! dit le Seigneur, l'Eternel, ce que je désire, ce n'est pas que le méchant meure, c'est qu'il change de conduite et qu'il vive. Revenez, revenez de votre mauvaise voie; et pourquoi mourriez-vous, maison d'Israël?"16 PR 248 2 Un procédé cher à Satan consiste à pousser les hommes dans le mal et à les y abandonner sans secours, sans espoir, et n'osant pas même rechercher le pardon. Mais Dieu adresse cette invitation au pécheur: "Qu'on me prenne pour refuge, qu'on fasse la paix avec moi, qu'on fasse la paix avec moi."17 En Christ on trouve tous les encouragements nécessaires. PR 248 3 Aux jours de l'apostasie de Juda et d'Israël, d'aucuns se demandaient: "Avec quoi me présenterai-je devant l'Eternel, pour m'humilier devant le Dieu Très-Haut? Me présenterai-je avec des holocaustes? Avec des veaux d'un an? L'Eternel agréera-t-il des milliers de béliers, des myriades de torrents d'huile?" Voici la réponse, nette et positive, qui leur a été faite: "On t'a fait connaître, ô homme, ce qui est bien; et ce que l'Eternel demande de toi, c'est que tu pratiques la justice, que tu aimes la miséricorde, et que tu marches humblement avec ton Dieu."18 PR 248 4 En insistant sur la piété que l'on doit pratiquer, le prophète ne faisait que renouveler le conseil donné à Israël des centaines d'années auparavant. Lorsque les Israélites s'apprêtaient à entrer dans la terre promise, voici ce que Dieu leur dit par la bouche de Moïse: "Maintenant, Israël, que demande de toi l'Eternel, ton Dieu, si ce n'est que tu craignes l'Eternel, ton Dieu, afin de marcher dans toutes ses voies, d'aimer et de servir l'Eternel, ton Dieu, de tout ton coeur et de toute ton âme; si ce n'est que tu observes les commandements de l'Eternel et ses lois que je te prescris aujourd'hui, afin que tu sois heureux?"19 Ces conseils ont été répétés en tout temps par les serviteurs de Dieu à ceux qui étaient menacés de sombrer dans le formalisme, et qui oubliaient de faire preuve de miséricorde. PR 249 1 Lorsque le Christ, au cours de son ministère terrestre, fut abordé par un docteur de la loi, qui lui posa cette question: "Maître, quel est le plus grand commandement de la loi?" il lui répondit: "Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme et de toute ta pensée. C'est le premier et le plus grand commandement. Et voici le second, qui lui est semblable: Tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépendent toute la loi et les prophètes."20 PR 249 2 Ces déclarations des prophètes et du Maître lui-même devraient être considérées comme la voix de Dieu s'adressant à chaque âme. Saisissons toutes les occasions pour faire preuve de miséricorde, de tendre sollicitude, de charité chrétienne, à l'égard des faibles et des opprimés. S'il nous est impossible de faire davantage, prononçons des paroles de réconfort et d'espoir pour ceux qui ne connaissent pas le Seigneur et dont nous atteindrons plus facilement les coeurs par la sympathie et l'amour. PR 249 3 Comme elles sont riches les bénédictions promises à ceux qui saisissent toutes les occasions pour apporter la joie et le bonheur dans la vie du prochain! "Si tu donnes ta propre subsistance à celui qui a faim, a écrit le prophète Esaïe, si tu rassasies l'âme indigente, ta lumière se lèvera sur l'obscurité. Et tes ténèbres seront comme le midi. L'Eternel sera toujours ton guide, il rassasiera ton âme dans les lieux arides, et il redonnera de la vigueur à tes membres; tu seras comme un jardin arrosé, comme une source dont les eaux ne tarissent pas."21 PR 249 4 La conduite idolâtre d'Achaz en réponse aux appels enflammés des prophètes ne pouvait aboutir qu'à ce résultat: "La colère de l'Eternel a été sur Juda et sur Jérusalem, et il les a livrés au trouble, à la désolation et à la moquerie."22 Le royaume s'affaiblit rapidement, et son existence même fut bientôt menacée par l'invasion des armées ennemies. "Alors Retsin, roi de Syrie, et Pékach, fils de Semalia, roi d'Israël, montèrent contre Jérusalem pour l'attaquer. Ils assiégèrent Achaz."23 PR 250 1 Si Achaz et les principaux de son royaume étaient restés fidèles au Très-Haut, ils n'auraient pas eu à faire face à l'alliance qui s'était formée contre eux. Mais leur endurcissement dans le péché avait diminué leur courage. Epouvantés à l'idée de recevoir les justes jugements d'un Dieu offensé, "le coeur d'Achaz et le coeur de son peuple furent agités comme les arbres de la forêt sont agités par le vent."24 A ce moment-là, la parole de Dieu fut adressée à Esaïe, lui ordonnant d'aller à la rencontre du roi alarmé, et de lui dire: "Sois tranquille, ne crains rien, et que ton coeur ne s'alarme pas ... de ce qu'Ephraïm et le fils de Remalia disent: Montons contre Juda, assiégeons la ville et battons-la en brèche. ... Ainsi parle le Seigneur, l'Eternel: Cela n'arrivera pas, cela n'aura pas lieu." Le prophète déclara que le royaume d'Israël ainsi que la Syrie seraient bientôt détruits. "Si vous ne croyez pas, leur dit-il en terminant, vous ne subsisterez pas."25 PR 250 2 Tout se serait bien passé pour le royaume de Juda si Achaz avait accepté ce message comme venant du ciel. Mais il préféra s'appuyer "sur le bras de la chair", et il rechercha la protection des païens. Désespéré, il envoya des messagers à Tiglath-Piléser, pour lui dire: "Je suis ton serviteur et ton fils; monte, et délivre-moi de la main du roi de Syrie et de la main du roi d'Israël, qui s'élèvent contre moi."26 Et Achaz accompagna sa requête d'un riche présent provenant du trésor de la maison royale et du temple. L'aide implorée lui fut accordée, et il jouit d'une paix momentanée, mais à quel prix pour Juda! PR 250 3 Le présent offert par Achaz excita la cupidité de l'Assyrie, et cette nation perfide ne tarda pas à menacer Juda de l'invasion et du pillage. Achaz et ses malheureux sujets étaient alors hantés par la peur de tomber entre les mains des cruels Assyriens. "L'Eternel humilia Juda", à cause de son obstination dans le péché. Au lieu de se repentir, Achaz "continuait à pécher contre l'Eternel. ... Il sacrifia aux dieux de Damas." "Puisque les dieux des rois de Syrie leur viennent en aide, se dit-il, je leur sacrifierai pour qu'ils me secourent."27 Vers la fin de son règne, le roi apostat fit fermer les portes du temple. Il fit cesser les offrandes pour le péché, et l'encens ne monta plus vers le ciel, à l'heure du sacrifice du matin et du soir. On ne vit plus brûler le chandelier devant l'autel. PR 251 1 Les habitants de la cité impie désertèrent les parvis de la maison de Dieu. Ils verrouillèrent ses portes, et élevèrent avec impudence des autels à tous les coins de rues de Jérusalem, où ils adoraient les divinités païennes. Le paganisme semblait triompher, les puissances des ténèbres étaient sur le point de l'emporter. PR 251 2 Mais il restait dans Juda certains croyants qui refusaient obstinément d'embrasser l'idolâtrie. C'est vers ces fidèles qu'Esaïe, Michée et leurs collaborateurs se tournaient pleins d'espoir tandis qu'ils assistaient à la ruine de Juda au cours des dernières années d'Achaz. Leur sanctuaire avait fermé ses portes, mais ceux qui étaient restés fidèles se disaient avec assurance: "Dieu est avec nous. ... C'est l'Eternel des armées que vous devez sanctifier, c'est lui que vous devez craindre et redouter. Et il sera un sanctuaire."28 ------------------------Chapitre 28 -- Ezéchias PR 253 1 Le gouvernement insouciant d'Achaz offre un contraste frappant avec les réformes opérées par son fils, Ezéchias, au cours d'un règne prospère. Le jeune roi monta sur le trône, décidé à faire l'impossible pour épargner à Juda le sort du royaume du nord. Mais les prophètes n'offraient aucun encouragement aux demi-mesures. Ce n'est qu'en opérant les réformes les plus énergiques que les châtiments prédits pouvaient être évités. PR 253 2 Au cours de cette crise, Ezéchias se révéla l'homme du moment. Dès son accession au trône, il commença à faire des projets qu'il mit aussitôt à exécution. Son premier souci fut de rétablir les services du temple, si longtemps abandonnés. Il sollicita à cet effet la collaboration de certains prêtres et Lévites restés fidèles à leur mission sacrée. Assuré de leur appui sincère, il leur parla librement de son désir d'opérer des réformes immédiates et radicales. "Nos pères ont péché, dit-il, ils ont fait ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, notre Dieu, ils l'ont abandonné, ils ont détourné leurs regards du tabernacle de l'Eternel. ... J'ai donc l'intention de faire alliance avec l'Eternel, le Dieu d'Israël, pour que son ardente colère se détourne de nous."1 PR 254 1 En quelques mots frappés au coin du bon sens, le roi exposa la situation à laquelle ils devaient faire face: le temple fermé, la cessation de tous ses services, l'idolâtrie criante pratiquée dans les rues de la ville et dans tout le royaume, l'apostasie des foules qui seraient restées fidèles au Seigneur si les conducteurs de Juda avaient donné le bon exemple, la décadence du royaume, la perte de l'estime des nations voisines et du prestige que le royaume exerçait sur elles. Le royaume du nord s'effondrait rapidement, ses habitants périssaient en grand nombre par l'épée, une foule d'entre eux avait déjà été emmenés en captivité. Il ne tarderait pas à tomber entièrement aux mains des Assyriens. Sa destruction serait alors complète. Semblable sort serait fatalement réservé à Juda, si Dieu n'intervenait pas puissamment par l'intermédiaire de ses représentants. PR 254 2 Ezéchias demanda immédiatement aux prêtres de s'unir à lui pour opérer les réformes nécessaires. "Maintenant, leur dit-il, cessez d'être négligents; car vous avez été choisis par l'Eternel pour vous tenir à son service devant lui, pour être ses serviteurs, et pour lui offrir des parfums. ... Maintenant sanctifiez-vous, sanctifiez la maison de l'Eternel, le Dieu de vos pères."2 PR 254 3 Le moment d'agir rapidement était venu. Les prêtres se mirent aussitôt à l'oeuvre. Ils s'assurèrent la collaboration de leurs collègues qui n'étaient pas là lorsque le roi leur fit part de ses desseins, et tous s'engagèrent courageusement à faire l'impossible pour purifier et sanctifier le temple. Mais cette oeuvre était rendue difficile par la profanation et l'oubli dont la maison de Dieu avait été l'objet pendant de si longues années. Cependant, prêtres et Lévites poursuivirent leur tâche inlassablement, et l'achevèrent en très peu de temps. Les portes du temple étaient réparées et grandes ouvertes, les ustensiles sacrés rassemblés et remis en place. Tout était prêt pour le rétablissement des services du sanctuaire. PR 254 4 Lorsque le premier service fut célébré, les chefs de la ville se joignirent à Ezéchias, aux prêtres et aux Lévites pour implorer le pardon des péchés de la nation. Le sacrifice "en expiation pour les péchés de tout Israël" fut placé sur l'autel. "Et quand on eut achevé d'offrir l'holocauste, le roi et tous ceux qui étaient avec lui fléchirent le genou et se prosternèrent." Les parvis du temple résonnèrent à nouveau aux accents des actions de grâces et de louange. On chanta d'un coeur joyeux les cantiques de David et d'Asaph. Les fidèles adorateurs se sentaient enfin délivrés de l'esclavage du péché et de l'idolâtrie. "Ezéchias et tout le peuple se réjouirent de ce que Dieu avait bien disposé le peuple, car la chose se fit subitement."3 PR 255 1 Dieu avait en réalité préparé le coeur des chefs du royaume de Juda pour les amener à entreprendre un mouvement de réforme spirituelle, destiné à endiguer la marée de l'apostasie. Par ses prophètes, le Seigneur avait adressé message sur message à son peuple pour l'inviter à revenir à lui. Ces messages avaient été méprisés et rejetés par les dix tribus d'Israël, désormais aux mains de l'ennemi. Mais un reste important demeurait en Juda, et c'est à ce reste que les prophètes s'adressaient encore. Ecoutez cet appel d'Esaïe: "Revenez à celui dont on s'est profondément détourné."4 Ecoutez Michée déclarer avec assurance: "Pour moi, je regarderai vers l'Eternel, je mettrai mon espérance dans le Dieu de mon salut; mon Dieu m'exaucera. Ne te réjouis pas à mon sujet, mon ennemie! Car si je suis tombée, je me relèverai; si je suis assise dans les ténèbres, l'Eternel sera ma lumière. Je supporterai la colère de l'Eternel, puisque j'ai péché contre lui, jusqu'à ce qu'il défende ma cause et me fasse droit; il me conduira à la lumière, et je contemplerai sa justice."5 PR 255 2 Ces messages, et d'autres semblables, révélaient le désir de Dieu de pardonner et d'accepter tous ceux qui se tournaient vers lui d'un coeur sincère. Aux jours sombres, alors que les portes du temple étaient closes, ces messages réconfortaient les coeurs abattus. Et maintenant que les chefs de Juda entreprenaient une réforme spirituelle, une foule de gens, lassés de l'esclavage du péché, se réjouissaient de cette réforme. PR 255 3 Ceux qui entraient dans les parvis du temple pour y chercher le pardon de leurs péchés et renouveler leur allégeance à Jéhovah, étaient merveilleusement encouragés par certains passages prophétiques des Ecritures. Les avertissements solennels de Moïse au sujet de l'idolâtrie, adressés à tout le peuple d'Israël, avaient été accompagnés de prophéties réconfortantes. Celles-ci révélaient le désir que Dieu éprouvait à entendre et à pardonner tous ceux qui, aux jours de l'apostasie, le rechercheraient de tout leur coeur. "Tu retourneras à l'Eternel, ton Dieu, et tu écouteras sa voix, avait dit Moïse; car l'Eternel, ton Dieu, est un Dieu de miséricorde, qui ne t'abandonnera point et ne te détruira point: il n'oubliera pas l'alliance de tes pères, qu'il leur a jurée."6 PR 256 1 Dans la prière prophétique prononcée par Salomon lors de la dédicace du temple -- de ce temple dont les services étaient rétablis par les soins d'Ezéchias et de ses collaborateurs -- le roi avait déclaré: "Quand ton peuple d'Israël sera battu par l'ennemi, pour avoir péché contre toi; s'ils reviennent à toi et rendent gloire à ton nom, s'ils t'adressent des prières et des supplications dans cette maison, -- exauce-les des cieux, pardonne le péché de ton peuple."7 PR 256 2 Le sceau de l'approbation divine avait été placé sur cette prière, car, lorsque Salomon eut fini de prier, le feu descendit du ciel et consuma l'holocauste et les sacrifices, et la gloire de Dieu remplit le temple.".8 Le Seigneur apparut à Salomon pendant la nuit et lui donna l'assurance qu'il exauçait sa prière et se montrerait miséricordieux envers tous ceux qui viendraient l'adorer dans sa maison. Voici ses paroles: "Si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s'humilie, prie et cherche ma face, et s'il se détourne de ses mauvaises voies, -- je l'exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays."9 PR 256 3 Ces promesses se réalisèrent pleinement quand Ezéchias opéra sa réforme. L'heureuse initiative de la purification du temple fut suivie par un mouvement plus considérable tant en Israël qu'en Juda. Dans le zèle qu'il apportait à faire des services du temple une source de bénédiction pour le peuple, Ezéchias décida de rétablir l'ancienne coutume de rassembler les Israélites pour la célébration de la Pâque. Depuis bien des années, celle-ci n'était plus considérée comme une fête nationale. La division du royaume, à la fin du règne de Salomon, avait rendu sa célébration impossible. Mais les terribles châtiments qui s'abattaient sur les dix tribus éveillaient dans le coeur de certains le désir d'une amélioration spirituelle, les messages saisissants des prophètes produisant leur effet. PR 257 1 Des messagers royaux furent donc dépêchés dans tout le pays pour inviter le peuple à célébrer la Pâque à Jérusalem. Mais généralement on se détournait d'eux avec mépris. Les impénitents n'en firent aucun cas, mais ceux qui recherchaient avidement le Seigneur pour mieux connaître sa volonté "s'humilièrent et vinrent à Jérusalem".10 PR 257 2 En Juda, les habitants répondirent unanimement à cette invitation, car "la main de Dieu" agissait sur eux "pour leur donner un même coeur et leur faire exécuter l'ordre du roi et des chefs",11 selon la volonté de Dieu révélée par ses prophètes. PR 257 3 Cette occasion allait procurer le plus grand bienfait aux foules assemblées à Jérusalem. On fit disparaître des rues profanées de la ville les autels païens érigés sous le règne d'Achaz. La Pâque fut célébrée au jour convenu, et toute la semaine le peuple offrit des sacrifices d'actions de grâces, tout en s'efforçant de connaître ce que le Seigneur attendait de lui. PR 257 4 Chaque jour les Lévites "montraient une grande intelligence pour le service de l'Eternel", et ceux qui avaient appliqué leur coeur à rechercher le Seigneur trouvaient le pardon. Une grande joie s'empara de la foule en adoration; "les Lévites et les sacrificateurs louaient l'Eternel avec les instruments qui retentissaient en son honneur".12 Tous s'unirent pour louer Dieu qui s'était montré si compatissant et si miséricordieux. PR 257 5 Les sept jours consacrés habituellement à la célébration de la Pâque s'écoulèrent trop rapidement. Aussi décida-t-on de passer sept autres jours à connaître plus complètement les voies du Seigneur. Les prêtres continuèrent à instruire le peuple selon le livre de la loi. Chaque jour la foule s'assemblait au temple pour offrir à Dieu des louanges et des actions de grâces. Lorsque la grande réunion prit fin, on put constater la conversion miraculeuse qui s'était opérée dans Juda apostat. La marée de l'idolâtrie qui menaçait de tout submerger était ainsi refoulée; les avertissements solennels des prophètes n'avaient pas été vains. "Il y eut à Jérusalem de grandes réjouissances; et depuis le temps de Salomon, fils de David, roi d'Israël, rien de semblable n'avait eu lieu dans Jérusalem."13 PR 258 1 Mais le moment vint où les adorateurs durent retourner chez eux. Alors "les sacrificateurs et les Lévites se levèrent et bénirent le peuple; et leur voix fut entendue, et leur prière parvint jusqu'aux cieux, jusqu'à la sainte demeure de l'Eternel".14 Le Seigneur avait pardonné à ceux qui, le coeur brisé, avaient confessé leurs péchés, et s'étaient résolument tournés vers lui. PR 258 2 Toutefois une oeuvre importante restait à accomplir, à laquelle ceux qui retournaient chez eux devaient prendre une part active. L'accomplissement de cette oeuvre témoignait en faveur de la réforme sincère opérée chez les habitants de Juda. L'Ecriture nous dit: "Tous ceux d'Israël qui étaient présents partirent pour les villes de Juda, et ils brisèrent les statues, abattirent les idoles, et renversèrent entièrement les hauts lieux et les autels dans tout Juda et Benjamin et dans Ephraïm et Manassé. Puis tous les enfants d'Israël retournèrent dans leurs villes, chacun dans sa propriété."15 PR 258 3 Ezéchias et ses serviteurs instituèrent différentes réformes destinées à sauvegarder les intérêts spirituels et temporels du royaume. "Dans tout Juda", le roi "fit ce qui est bien, ce qui est droit, ce qui est vrai, devant l'Eternel, son Dieu. Il agit de tout son coeur, et il réussit dans tout ce qu'il entreprit". "Il mit sa confiance en l'Eternel, le Dieu d'Israël. ... Il fut attaché à l'Eternel, il ne se détourna point de lui, et il observa les commandements que l'Eternel avait prescrits à Moïse. Et l'Eternel fut avec Ezéchias, qui réussit dans toutes ses entreprises."16 PR 258 4 Le règne d'Ezéchias fut caractérisé par une suite de bénédictions remarquables, qui montrèrent aux nations voisines comment Dieu agissait envers son peuple. Lorsque les Assyriens, au début du règne d'Ezéchias, s'étaient emparés de Samarie, et avaient dispersé les dix tribus parmi les nations, d'aucuns avaient été amenés à mettre en doute la puissance du Dieu des Hébreux. Grisés par leurs succès, les Ninivites avaient depuis longtemps oublié le message de Jonas, et ils se dressaient pleins d'arrogance contre les desseins du Seigneur. Quelques années après la chute de Samarie, les armées victorieuses d'Assyrie réapparurent en Palestine. Leurs efforts se concentrèrent alors sur les villes fortes de Juda. Tout d'abord, elles parurent triompher; mais elles se retirèrent bientôt, pressées par les difficultés qui surgirent dans certaines parties du royaume d'Assyrie. Cependant, quelques années plus tard, vers la fin du règne d'Ezéchias, il fut clairement démontré aux nations païennes que leurs divinités ne remporteraient pas la victoire. ------------------------Chapitre 29 -- Les ambassadeurs de Babylone PR 261 1 Au milieu de son règne prospère, Ezéchias fut soudain frappé par une maladie mortelle. "Malade à la mort", il ne pouvait plus rien attendre des hommes. Et tout reste d'espoir sembla s'évanouir lorsque le prophète Esaïe vint auprès de lui, et lui dit: "Ainsi parle l'Eternel: Donne tes ordres à ta maison, car tu vas mourir, et tu ne vivras plus."1 PR 261 2 La situation était donc très grave. Cependant le roi pouvait encore implorer celui qui n'avait cessé d'être pour lui "un refuge et un appui, un secours qui ne manque jamais dans la détresse."2 "Il tourna son visage contre le mur, et fit cette prière à l'Eternel: O Eternel! souviens-toi que j'ai marché devant ta face avec fidélité et intégrité de coeur, et que j'ai fait ce qui est bien à tes yeux! Et Ezéchias répandit d'abondantes larmes."3 Aucun roi n'avait, en effet, depuis le règne de David, consolidé comme Ezéchias le royaume de Dieu au sein de l'apostasie, et alors que tout semblait perdu. Il avait servi son Dieu fidèlement et redonné à son peuple confiance en celui qui était son suprême souverain. A l'instar de David, il pouvait maintenant s'écrier: PR 262 1 Que ma prière parvienne en ta présence! Prête l'oreille à mes supplications! Car mon âme est rassasiée de maux, Et ma vie s'approche du séjour des morts. PR 262 2 Tu es mon espérance, Seigneur Eternel! En toi je me confie dès ma jeunesse. Dès le ventre de ma mère je m'appuie sur toi; C'est toi qui m'as fait sortir du sein maternel. ... Quand mes forces s'en vont, ne m'abandonne pas! ... Ne m'abandonne pas, ô Dieu! ... O Dieu, ne t'éloigne pas de moi! Mon Dieu, viens en hâte à mon secours! PR 262 3 Celui dont les "compassions ne sont pas à leur terme",6 entendit la prière de son serviteur. "Esaïe, qui était sorti, n'était pas encore dans la cour du milieu, lorsque la parole de l'Eternel lui fut adressée en ces mots: Retourne, et dis à Ezéchias, chef de mon peuple: Ainsi parle l'Eternel, le Dieu de David, ton père: J'ai entendu ta prière, j'ai vu tes larmes. Voici, je te guérirai; le troisième jour, tu monteras à la maison de l'Eternel. J'ajouterai à tes jours quinze années. Je te délivrerai, toi et cette ville, de la main du roi d'Assyrie; je protégerai cette ville, à cause de moi, et à cause de David, mon serviteur."7 PR 262 4 Le prophète revint vers Ezéchias le coeur plein de joie et lui fit part de ces paroles de certitude et d'espoir. Il ordonna que l'on applique une masse de figues sur la partie malade, et il assura le roi de la miséricorde et de la protection divines. Comme Moïse à Madian, Gédéon en présence du messager céleste, Elisée avant l'enlèvement de son maître, le roi Ezéchias demanda un signe pour s'assurer que le message d'Esaïe venait bien du ciel. "A quel signe connaîtrai-je, demanda-t-il, que l'Eternel me guérira, et que je monterai le troisième jour à la maison de l'Eternel?" Voici, répondit le prophète, "le signe auquel tu connaîtras que l'Eternel accomplira la parole qu'il a prononcée: L'ombre avancera-t-elle de dix degrés, ou reculera-t-elle de dix degrés? Ezéchias répondit: C'est peu de chose que l'ombre avance de dix degrés; mais plutôt qu'elle recule de dix degrés." PR 263 1 Seule l'intervention divine pouvait faire reculer l'ombre de dix degrés sur le cadran solaire. Ce signe prouverait alors à Ezéchias que le Seigneur avait entendu sa prière. "Esaïe invoqua l'Eternel, qui fit reculer l'ombre de dix degrés sur les degrés d'Achaz, où elle était descendue."8 PR 263 2 Lorsque le roi Ezéchias eut recouvré la santé, il composa un cantique d'actions de grâces en l'honneur de son Dieu, et il s'engagea à consacrer le reste de ses jours à le servir. Sa gratitude envers le Seigneur devrait être une leçon pour tous ceux qui veulent vivre pour la gloire du Maître. Voici ce cantique: PR 263 3 Je disais: Quand mes jours sont en repos, je dois m'en aller Aux portes du séjour des morts. Je suis privé du reste de mes années! Je disais: Je ne verrai plus l'Eternel, L'Eternel, sur la terre des vivants; Je ne verrai plus aucun homme Parmi les habitants du monde! Ma demeure est enlevée et transportée loin de moi, Comme une tente de berger; Je sens le fil de ma vie coupé comme par un tisserand Qui me retrancherait de sa trame. Du jour à la nuit tu m'auras achevé! Je me suis contenu jusqu'au matin; Comme un lion, il brisait tous mes os, Du jour à la nuit tu m'auras achevé! Je poussais des cris comme une hirondelle en voltigeant, Je gémissais comme la colombe; Mes yeux s'élevaient languissants vers le ciel: O Eternel! je suis dans l'angoisse, secours-moi! Que dirai-je? Il m'a répondu, et il m'a exaucé. Je marcherai humblement jusqu'au terme de mes années, Après avoir été ainsi affligé. Seigneur, c'est par tes bontés qu'on jouit de la vie, C'est par elles que je respire encore; Tu me rétablis, tu me rends à la vie. Voici, mes souffrances mêmes sont devenues mon salut; Tu as pris plaisir à retirer mon âme de la fosse du néant, Car tu as jeté derrière toi tous mes péchés. Ce n'est pas le séjour des morts qui te loue, Ce n'est pas la mort qui te célèbre; Ceux qui sont descendus dans la fosse n'espèrent plus en ta fidélité. Le vivant, le vivant, c'est celui-là qui te loue, Comme moi aujourd'hui; Le père fait connaître à ses enfants ta fidélité. L'Eternel m'a sauvé! Nous ferons résonner les cordes de nos instruments, Tous les jours de notre vie, Dans la maison de l'Eternel. PR 264 1 Dans les vallées fertiles du Tigre et de l'Euphrate vivait une ancienne race qui, bien que soumise à l'Assyrie, était destinée à dominer le monde entier. Là se trouvaient des savants qui s'adonnaient à l'étude de l'astronomie, et lorsqu'ils constatèrent que l'ombre, sur le cadran solaire, avait reculé de dix degrés, ils furent stupéfaits. Quand leur roi, Berodac-Baladan, apprit que ce miracle avait eu lieu pour servir de signe au roi de Juda, et que le Dieu du ciel l'avait guéri, il envoya des messagers à Ezéchias pour le féliciter de sa guérison et pour connaître davantage, si possible, le Dieu qui était capable de si grandes merveilles. Ces messagers du monarque qui régnait dans un pays lointain offraient à Ezéchias l'occasion inespérée de magnifier le Dieu vivant. Comme il eût été facile, en effet, de parler à ces gens du Créateur de tous les êtres vivants, grâce auquel sa vie avait été prolongée, alors que tout espoir était perdu! Quelles transformations remarquables auraient été opérées si ces hommes, venus des plaines de Chaldée et à la recherche de la vérité, avaient été amenés à reconnaître la souveraineté suprême du Dieu vivant! PR 264 2 Mais l'orgueil et la vanité s'emparèrent du coeur d'Ezéchias. Pour s'exalter lui-même, il déploya aux regards pleins de convoitise des ambassadeurs babyloniens les trésors dont le Seigneur avait enrichi son peuple. Le roi "montra aux envoyés le lieu où étaient ses choses de prix, l'argent et l'or, les aromates et l'huile précieuse, tout son arsenal, et tout ce qui se trouvait dans ses trésors: il n'y eut rien qu'Ezéchias ne leur fît voir dans sa maison et dans tous ses domaines".10 Ce n'était pas pour magnifier Dieu qu'il agissait ainsi, mais pour se faire valoir aux yeux des princes étrangers. Il ne s'attarda pas à considérer que ces hommes représentaient une nation puissante, qu'ils n'avaient pas la crainte de Dieu, et qu'il était imprudent d'en faire des confidents au sujet des richesses temporelles de la nation. PR 265 1 La visite des ambassadeurs de Babylone était destinée à éprouver la gratitude et la foi d'Ezéchias. L'Ecriture dit: "Lorsque les chefs de Babylone envoyèrent des messagers auprès de lui pour s'informer du prodige qui avait eu lieu dans le pays, Dieu l'abandonna pour l'éprouver, afin de connaître tout ce qui était dans son coeur."11 PR 265 2 Si Ezéchias avait profité de l'occasion qui lui était offerte pour rendre témoignage à la puissance, à la bonté et à la compassion du Dieu d'Israël, le rapport des ambassadeurs aurait été comme une lumière perçant les ténèbres. Mais Ezéchias se plaça lui-même au-dessus de l'Eternel des armées. Il ne "répondit point au bienfait qu'il avait reçu, car son coeur s'éleva". Les conséquences en furent désastreuses. Il fut révélé à Esaïe que les ambassadeurs, en rentrant chez eux, avaient parlé de toutes les richesses d'Israël, et que le roi de Babylone et ses conseillers conçurent le projet de s'en emparer pour enrichir leur pays. Ezéchias avait commis une erreur impardonnable. "La colère de l'Eternel fut sur lui et sur Juda et Jérusalem."12 PR 265 3 "Esaïe, le prophète, vint ensuite auprès du roi Ezéchias, et lui dit: Qu'ont dit ces gens-là, et d'où sont-ils venus vers toi? Ezéchias répondit: Ils sont venus vers moi d'un pays éloigné, de Babylone. Esaïe dit encore: Qu'ont-ils vu dans ta maison? Ezéchias répondit: Ils ont vu tout ce qui est dans ma maison: il n'y a rien dans mes trésors que je ne leur aie fait voir. PR 265 4 "Alors Esaïe dit à Ezéchias: Ecoute la parole de l'Eternel des armées! Voici, les temps viendront où l'on emportera à Babylone tout ce qui est dans ta maison et ce que tes pères ont amassé jusqu'à ce jour; il n'en restera rien, dit l'Eternel. Et l'on prendra de tes fils, qui seront sortis de toi, que tu auras engendrés, pour en faire des eunuques dans le palais du roi de Babylone. Ezéchias répondit à Esaïe: La parole de l'Eternel, que tu as prononcée, est bonne."13 PR 265 5 Bourrelé de remords, "Ezéchias, du sein de son orgueil, s'humilia avec les habitants de Jérusalem, et la colère de l'Eternel ne vint pas sur eux pendant la vie d'Ezéchias".14 Mais la mauvaise semence avait été jetée; elle devait lever en son temps et produire une moisson de désolation et de malédiction. Pendant les dernières années de son règne, le roi de Juda jouit d'une grande prospérité, car il résolut de racheter son passé et d'honorer le Dieu qu'il servait. Cependant, sa foi fut mise à rude épreuve, et il dut apprendre qu'il ne pourrait espérer triompher de la puissance des ténèbres qu'en mettant toute sa confiance en Dieu. PR 266 1 La faute d'Ezéchias, qui faillit à sa mission lors de la visite des envoyés du roi de Babylone, est riche d'enseignement pour tous. Nous devrions parler davantage des bénédictions précieuses qui découlent de notre expérience religieuse: de la bonté et de l'amour incomparable de notre Sauveur. Lorsque le coeur et l'esprit débordent de l'amour divin, il n'est pas difficile de faire part à d'autres de ce qui constitue la vie spirituelle. Les pensées élevées, les nobles aspirations, la nette conception de la vérité, les intentions désintéressées, les élans de foi et de sainteté trouveront leur expression dans des termes qui révèlent les trésors du coeur. PR 266 2 Ceux qui nous côtoient chaque jour ont besoin de notre aide et de nos conseils. Ils peuvent se trouver dans une condition telle qu'un mot prononcé à bon escient sera comme un clou enfoncé au bon endroit. Demain, ces personnes seront peut-être dans des lieux où il nous sera impossible de les atteindre. Quelle aura été notre influence sur ces compagnons de route? PR 266 3 Chaque jour comporte pour nous un certain nombre de responsabilités. Chaque jour nos paroles et nos actes font impression sur ceux qui nous entourent. Comme nous devrions prendre garde à ce que nous disons et à ce que nous faisons! Un geste inconséquent, un pas imprudent, et les vagues déchaînées d'une insurmontable tentation peuvent entraîner une âme dans le mauvais sentier. Nous ne pouvons plus ôter de l'esprit les pensées que nous y avons implantées. Si ces dernières ont été mauvaises, nous avons déclenché, par un concours de circonstances, la marée du mal qu'il n'est pas en notre pouvoir d'endiguer. PR 267 1 Mais si, d'autre part, notre exemple contribue à développer chez autrui de bonnes tendances, nous aurons offert la possibilité de faire le bien. A son tour, notre prochain exercera une influence salutaire autour de lui. C'est ainsi que des centaines et des milliers de nos semblables subiront inconsciemment notre influence. Le vrai disciple du Christ affermit les bonnes intentions de ceux qu'il côtoie. En présence d'un monde incrédule et pervers, il révèle la puissance de la grâce de Dieu et la perfection de son caractère. ------------------------Chapitre 30 -- Délivrance de l'Assyrie PR 269 1 Lorsque les armées d'Assyrie envahirent le royaume de Juda, ce pays courut un grand danger. Jérusalem semblait ne pouvoir être épargnée d'une destruction totale. Alors Ezéchias rassembla ses forces pour résister avec un courage indomptable aux oppresseurs païens, et prouver sa confiance dans le pouvoir du Dieu qui délivre. "Fortifiez-vous et ayez du courage! Ne craignez point et ne soyez point effrayés devant le roi d'Assyrie et devant toute la multitude qui est avec lui, dit-il aux hommes de Juda; car avec nous il y a plus qu'avec lui. Avec lui est un bras de chair, et avec nous l'Eternel, notre Dieu, qui nous aidera et qui combattra pour nous."1 PR 269 2 Ce n'était pas sans raison que le roi Ezéchias pouvait parler avec une telle assurance de l'issue de la guerre. L'Assyrien orgueilleux, dont Dieu se servait momentanément comme verge de sa colère2 pour châtier les nations, ne devait pas toujours triompher. "Ne crains pas l'Assyrien", avait déclaré le Seigneur par la bouche du prophète Esaïe quelques années auparavant. "Encore un peu de temps, avait-il ajouté, ... et l'Eternel des armées agitera le fouet contre lui, comme il frappa Madian au rocher d'Oreb; et, de même qu'il leva son bâton sur la mer, il le lèvera encore, comme en Egypte. En ce jour, son fardeau sera ôté de dessus ton épaule, et son joug de dessus ton cou; et la graisse fera éclater le joug."3 PR 270 1 Dans un autre message prophétique, donné "l'année de la mort du roi Achaz", le prophète avait déclaré: "L'Eternel des armées l'a juré, en disant: Oui, ce que j'ai décidé arrivera, ce que j'ai résolu s'accomplira. Je briserai l'Assyrien dans mon pays, je le foulerai aux pieds sur mes montagnes; et son joug leur sera ôté, et son fardeau sera ôté de leurs épaules. Voilà la résolution prise contre toute la terre, voilà la main étendue sur toutes les nations. L'Eternel des armées a pris cette résolution: qui s'y opposera? Sa main est étendue: qui la détournera?"4 PR 270 2 La puissance de l'oppresseur devait donc être brisée. Cependant, Ezéchias, au début de son règne, avait continué à payer le tribut que le roi Achaz s'était engagé à verser à cette nation. Mais "il tint conseil avec ses chefs et ses hommes vaillants", et il mit tout en oeuvre pour défendre son royaume. Il était assuré d'une abondante réserve d'eau dans Jérusalem, alors qu'il savait que celle-ci ferait défaut hors de la ville. Il "prit courage; il reconstruisit la muraille qui était en ruine et l'éleva jusqu'aux tours, bâtit un autre mur en dehors, fortifia Millo dans la cité de David, et prépara une quantité d'armes et de boucliers. Il donna des chefs militaires au peuple."5 Rien ne fut négligé en vue de la préparation d'un siège. PR 270 3 Lorsque le roi Ezéchias monta sur le trône de Juda, les Assyriens avaient déjà déporté un grand nombre d'Israélites du royaume du nord. Peu de temps après son avènement, alors qu'il renforçait les défenses de Jérusalem, les Assyriens assiégèrent Samarie et s'en emparèrent; puis ils dispersèrent les dix tribus dans les nombreuses provinces d'Assyrie. Les frontières de Juda n'étaient qu'à quelques kilomètres de distance et Jérusalem à moins de soixante-dix kilomètres. Or, les richesses qui se trouvaient dans le temple pouvaient inciter l'ennemi à revenir. PR 271 1 Mais le roi de Juda avait décidé de faire l'impossible pour lui résister. Après avoir accompli tout ce que l'ingéniosité et l'énergie humaines pouvaient réaliser, il rassembla ses armées et les exhorta au courage. "Il est grand au milieu de toi, le Saint d'Israël",6 avait proclamé le prophète Esaïe à Juda. Et le roi affirmait maintenant, avec une foi inébranlable: "Avec nous [est] l'Eternel, notre Dieu, qui nous aidera et qui combattra pour nous." Rien ne peut mieux inspirer la foi que de l'exercer. Le roi de Juda était prêt à affronter l'orage. Persuadé que la prophétie relative aux Assyriens se réaliserait, il s'appuyait sur Dieu. "Le peuple eut confiance dans les paroles d'Ezéchias."7 Qu'importait si les armées d'Assyrie, victorieuses dans leurs combats contre Samarie et les plus grandes nations, dirigeaient maintenant leurs forces contre Juda! Qu'importait si l'Assyrie disait avec orgueil: "De même que ma main a atteint les royaumes des idoles, où il y avait plus d'images qu'à Jérusalem et à Samarie, ce que j'ai fait à Samarie et à ses idoles, ne le ferai-je pas à Jérusalem et à ses images."8 Mais Juda n'avait rien à craindre, car il avait placé sa confiance en Dieu. PR 271 2 Le danger si longtemps prévu finit par survenir. Les armées d'Assyrie, marchant de triomphe en triomphe, pénétrèrent dans le royaume de Juda. Certains de la victoire, les chefs assyriens divisèrent leurs forces en deux armées; l'une devait rencontrer les Egyptiens, l'autre faire le siège de Jérusalem. L'unique espoir de Juda résidait alors en Dieu. Toute assistance possible de la part de l'Egypte avait été supprimée, et nulle autre nation n'était disposée à tendre à Ezéchias une main secourable. PR 271 3 Les chefs de l'armée assyrienne, convaincus de la puissance de leurs armées bien disciplinées, demandèrent alors à entrer en pourparlers avec les principaux de Juda, dont ils exigèrent avec insolence la reddition de Jérusalem. Cette demande était accompagnée d'insultes et de blasphèmes contre le Dieu des Hébreux. L'affaiblissement et l'apostasie d'Israël et de Juda avaient amené les nations à ne plus craindre le nom de Jéhovah; il était devenu au contraire un sujet d'outrage continuel.9 PR 271 4 "Dites à Ezéchias, dit alors Rabschaké, l'un des officiers supérieurs de Sanchérib, aux principaux chefs de Juda: Ainsi parle le grand roi, le roi d'Assyrie: Quelle est cette confiance sur laquelle tu t'appuies? Tu as dit: Il faut pour la guerre de la prudence et de la force. Mais ce ne sont que des paroles en l'air. En qui donc as-tu placé ta confiance pour t'être révolté contre moi?"10 PR 272 1 Les officiers conféraient hors des portes de la ville, mais les sentinelles placées sur les murs les entendaient parler. Or, comme les envoyés du roi d'Assyrie faisaient à haute voix leurs propositions, les chefs de Juda leur demandèrent de parler en araméen et non en langue judaïque, afin que le peuple ne puisse avoir connaissance des détails des pourparlers. Mais Rabschaké, méprisant cette proposition, éleva la voix, et continua à parler en langue judaïque. "Ecoutez, dit-il, les paroles du grand roi, du roi d'Assyrie! Ainsi parle le roi: Qu'Ezéchias ne vous abuse point, car il ne pourra vous délivrer. Qu'Ezéchias ne vous amène point à vous confier en l'Eternel, en disant: L'Eternel nous délivrera, cette ville ne sera pas livrée entre les mains du roi d'Assyrie. N'écoutez point Ezéchias; car ainsi parle le roi d'Assyrie: Faites la paix avec moi, rendez-vous à moi, et chacun de vous mangera de sa vigne et de son figuier, et chacun boira de l'eau de sa citerne, jusqu'à ce que je vienne, et que je vous emmène dans un pays comme le vôtre, dans un pays de blé et de vin, un pays de pain et de vignes. Qu'Ezéchias ne vous séduise point, en disant: L'Eternel nous délivrera. Les dieux des nations ont-ils délivré chacun son pays de la main du roi d'Assyrie? Où sont les dieux de Hamath et d'Arpad? Où sont les dieux de Sepharvaïm? Ont-ils délivré Samarie de ma main? Parmi tous les dieux de ces pays, quels sont ceux qui ont délivré leur pays de ma main, pour que l'Eternel délivre Jérusalem de ma main?"11 PR 272 2 A ces insultes, les représentants de Juda "ne répondirent pas un mot". Les pourparlers ayant pris fin, ils revinrent vers Ezéchias, "les vêtements déchirés, et lui rapportèrent les paroles de Rabschaké".12 Après avoir entendu cela, "il déchira ses vêtements, se couvrit d'un sac, et alla dans la maison de l'Eternel."13 PR 273 1 Un messager fut chargé d'aller informer le prophète Esaïe des résultats de l'entretien. "Ce jour est un jour d'angoisse, de châtiment et d'opprobre", dit le roi. "Peut-être l'Eternel, ton Dieu, a-t-il entendu toutes les paroles de Rabschaké, que le roi d'Assyrie, son maître, a envoyé pour insulter au Dieu vivant, et peut-être l'Eternel, ton Dieu, exercera-t-il ses châtiments à cause des paroles qu'il a entendues. Fais donc monter une prière pour le reste qui subsiste encore."14 PR 273 2 "Le roi Ezéchias et le prophète Esaïe, fils d'Amots, se mirent à prier à ce sujet, et ils crièrent au ciel."15 Dieu exauça les prières de ses serviteurs. Et voici le message qui fut donné à Esaïe pour Ezéchias: "Ainsi parle l'Eternel: Ne t'effraie point des paroles que tu as entendues et par lesquelles m'ont outragé les serviteurs du roi d'Assyrie. Je vais mettre en lui un esprit tel que, sur une nouvelle qu'il recevra, il retournera dans son pays; et je le ferai tomber par l'épée dans son pays."16 PR 273 3 Lorsque les représentants de l'Assyrie eurent quitté les chefs de Juda, ils firent aussitôt part des résultats des pourparlers à leur roi qui se trouvait avec ses forces aux frontières de l'Egypte. Ce dernier adressa alors "une lettre insultante pour l'Eternel, le Dieu d'Israël, en s'exprimant ainsi contre lui: De même que les dieux des nations des autres pays n'ont pu délivrer leur peuple de ma main, de même le Dieu d'Ezéchias ne délivrera pas son peuple de ma main."17 PR 273 4 Cette menace insolente fut accompagnée de ce message du roi d'Assyrie au roi de Juda: "Que ton Dieu, auquel tu te confies, ne t'abuse point, en disant: Jérusalem ne sera pas livrée entre les mains du roi d'Assyrie. Voici, tu as appris ce qu'ont fait les rois d'Assyrie à tous les pays, et comment ils les ont détruits; et toi, tu serais délivré! Les dieux des nations que mes pères ont détruites les ont-ils délivrées, Gozan, Charan, Retseph, et les fils d'Eden qui sont à Telassar? Où sont le roi de Hamath, le roi d'Arpad, et le roi de la ville de Sepharvaïm, d'Héna et d'Ivva?"18 PR 273 5 Lorsque le roi de Juda reçut cette lettre d'insulte, il la prit dans le temple, "et la déploya devant l'Eternel".19 Il pria avec une foi ardente pour demander au ciel que les royaumes de la terre reconnaissent que le Dieu des Hébreux était toujours vivant, et qu'il n'avait cessé de régner. Il y allait de l'honneur du Très-Haut; lui seul pouvait accorder la délivrance. "Eternel, Dieu d'Israël, assis sur les chérubins! s'écria Ezéchias. C'est toi qui es le seul Dieu de tous les royaumes de la terre, c'est toi qui as fait les cieux et la terre. Eternel! incline ton oreille, et écoute. Eternel! ouvre tes yeux, et regarde. Entends les paroles de Sanchérib, qui a envoyé Rabschaké pour insulter au Dieu vivant. Il est vrai, ô Eternel, que les rois d'Assyrie ont détruit les nations et ravagé leurs pays, et qu'ils ont jeté leurs dieux dans le feu; mais ce n'étaient point des dieux, c'étaient des ouvrages de mains d'homme, du bois et de la pierre; et ils les ont anéantis. Maintenant, Eternel, notre Dieu! délivre-nous de la main de Sanchérib, et que tous les royaumes de la terre sachent que toi seul es Dieu, ô Eternel!"20 PR 274 1 Prête l'oreille, berger d'Israël, Toi qui conduis Joseph comme un troupeau! Parais dans ta splendeur, Toi qui es assis sur les chérubins! Devant Ephraïm, Benjamin et Manassé, réveille ta force, Et viens à notre secours! O Dieu, relève-nous! Fais briller ta face, et nous serons sauvés! PR 274 2 Eternel, Dieu des armées! Jusques à quand t'irriteras-tu contre la prière de ton peuple? Tu les nourris d'un pain de larmes, Tu les abreuves de larmes à pleine mesure. Tu fais de nous un objet de discorde pour nos voisins, Et nos ennemis se raillent de nous. Dieu des armées, relève-nous! Fais briller ta face, et nous serons sauvés! PR 274 3 Tu avais arraché de l'Egypte une vigne; Tu as chassé des nations, et tu l'as plantée. Tu as fait place devant elle: Elle a jeté des racines et rempli la terre; Les montagnes étaient couvertes de son ombre, Et ses rameaux étaient comme des cèdres de Dieu; Elle étendait ses branches jusqu'à la mer, Et ses rejetons jusqu'au fleuve. Pourquoi as-tu rompu ses clôtures, En sorte que tous les passants la dépouillent? Le sanglier de la forêt la ronge, Et les bêtes des champs en font leur pâture. Dieu des armées, reviens donc! Regarde du haut des cieux, et vois! considère cette vigne! Protège ce que ta droite a planté, Et le fils que tu t'es choisi! ... PR 275 1 Fais-nous revivre, et nous invoquerons ton nom. Eternel, Dieu des armées, relève-nous! Fais briller ta face, et nous serons sauvés! PR 275 2 La prière d'Ezéchias en faveur de Juda et de la gloire de son suprême Souverain était selon la pensée de Dieu. Lors de la dédicace du temple, Salomon avait supplié le Seigneur pour "qu'il fasse en tout temps droit à son serviteur et à son peuple d'Israël, afin que tous les peuples de la terre reconnaissent que l'Eternel est Dieu, qu'il n'y en a point d'autre".22 Jéhovah devait secourir son peuple d'une manière toute particulière, si, en temps de guerre ou d'oppression ennemie, les principaux d'Israël se rendaient dans sa maison et lui adressaient des supplications pour obtenir la délivrance.23 PR 275 3 Ezéchias ne fut pas abandonné à lui-même. Le prophète Esaïe lui envoya dire: "Ainsi parle l'Eternel, le Dieu d'Israël. J'ai entendu ta prière au sujet de Sanchérib, roi d'Assyrie. Voici, la parole que l'Eternel a adressée contre lui: PR 275 4 Elle te méprise, elle se moque de toi, La vierge, fille de Sion; Elle hoche la tête après toi, La fille de Jérusalem. Qui as-tu insulté et outragé? Contre qui as-tu élevé la voix? Tu as porté tes yeux en haut Sur le Saint d'Israël! Par tes messagers tu as insulté le Seigneur, Et tu as dit: Avec la multitude de mes chars, J'ai gravi le sommet des montagnes, Les extrémités du Liban; Je couperai les plus élevés de ses cèdres, Les plus beaux de ses cyprès, Et j'atteindrai sa dernière cime, Sa forêt semblable à un verger; J'ai creusé, et j'ai bu des eaux étrangères, Et je tarirai avec la plante de mes pieds Tous les fleuves de l'Egypte. PR 276 1 N'as-tu pas appris que j'ai préparé ces choses de loin, Et que je les ai résolues dès les temps anciens? Maintenant j'ai permis qu'elles s'accomplissent, Et que tu réduisisses des villes fortes en monceaux de ruines. Leurs habitants sont impuissants, Epouvantés et confus; Ils sont comme l'herbe des champs et la tendre verdure, Comme le gazon des toits Et le blé qui sèche avant la formation de sa tige. Mais je sais quand tu t'assieds, quand tu sors et quand tu entres, Et quand tu es furieux contre moi. Parce que tu es furieux contre moi, Et que ton arrogance est montée à mes oreilles, Je mettrai ma boucle à tes narines et mon mors entre tes lèvres, Et je te ferai retourner par le chemin par lequel tu es venu. PR 276 2 Le pays de Juda avait été dévasté par les troupes d'occupation; mais le Seigneur avait promis de subvenir miraculeusement aux besoins du peuple. Ezéchias reçut alors ce message: "Que ceci soit un signe pour toi: On a mangé une année le produit du grain tombé, et une seconde année ce qui croît de soi-même; mais la troisième année, vous sèmerez, vous moissonnerez, vous planterez des vignes, et vous en mangerez le fruit. Ce qui aura été sauvé de la maison de Juda, ce qui sera resté poussera encore des racines par-dessous, et portera du fruit par-dessus. Car de Jérusalem il sortira un reste, et de la montagne de Sion des réchappés. Voilà ce que fera le zèle de l'Eternel des armées. C'est pourquoi ainsi parle l'Eternel sur le roi d'Assyrie: PR 276 3 Il n'entrera point dans cette ville, Il n'y lancera point de traits, Il ne lui présentera point de boucliers, Et il n'élèvera point de retranchements contre elle. Il s'en retournera par le chemin par lequel il est venu, Et il n'entrera point dans cette ville, dit l'Eternel. Je protégerai cette ville pour la sauver, A cause de moi, et à cause de David, mon serviteur". PR 277 1 Ce fut cette nuit même que se produisit la délivrance. "L'ange de l'Eternel sortit, et frappa dans le camp des Assyriens cent quatre-vingt-cinq mille hommes."26 "Tous les vaillants hommes, les princes et les chefs."27 furent exterminés. La nouvelle de ce terrible désastre qui survint aux troupes envoyées pour s'emparer de Jérusalem parvint bientôt à Sanchérib, qui continuait à défendre l'accès de la Judée à l'Egypte. Saisi de frayeur, le roi d'Assyrie s'enfuit en toute hâte, et "confus, retourna dans son pays."27 Mais il ne devait pas régner longtemps. Selon la prophétie relative à sa mort violente, il fut assassiné par les gens de sa propre maison. "Et Esar-Haddon, son fils, régna à sa place."28 PR 277 2 Le Dieu des Hébreux l'avait emporté sur l'Assyrien orgueilleux. L'honneur de Jéhovah était vengé aux yeux des nations voisines. Le coeur des habitants de Jérusalem débordait de joie; leurs prières ferventes pour la délivrance du royaume avaient été accompagnées de la confession de leurs péchés et de leurs larmes. Dans leur grande détresse, ils s'étaient entièrement confiés à la puissance salvatrice de Dieu, qui ne les avait pas abandonnés. Alors, des parvis du temple, on entendit des chants de louange et d'actions de grâces: PR 277 3 Dieu est connu en Juda, Son nom est grand en Israël. Sa tente est à Salem, Et sa demeure à Sion. C'est là qu'il a brisé les flèches, Le bouclier, l'épée, et les armes de guerre. PR 277 4 Tu es plus majestueux, plus puissant Que les montagnes des ravisseurs. Ils ont été dépouillés, ces héros pleins de courage, Ils se sont endormis de leur dernier sommeil; Ils n'ont pas su se défendre, tous ces vaillants hommes. A ta menace, Dieu de Jacob! Ils se sont endormis, cavaliers et chevaux. PR 277 5 Tu es redoutable, ô toi! Qui peut te résister, quand ta colère éclate? Du haut des cieux tu as proclamé la sentence; La terre effrayée s'est tenue tranquille, Lorsque Dieu s'est levé pour faire justice, Pour sauver tous les malheureux de la terre. PR 278 1 L'homme te célèbre même dans sa fureur, Quand tu te revêts de tout ton courroux. Faites des voeux à l'Eternel, votre Dieu, et accomplissez-les! Que tous ceux qui l'environnent apportent des dons au Dieu terrible! Il abat l'orgueil des princes, Il est redoutable aux rois de la terre. PR 278 2 L'ascension et la chute de l'empire assyrien sont riches d'enseignements pour les nations de nos jours. Les Ecritures ont comparé la gloire de l'Assyrie, à son apogée, à un arbre majestueux du jardin de Dieu, dominant tous ceux qui l'environnent: PR 278 3 Voici, l'Assyrie était un cèdre du Liban; Ses branches étaient belles, Son feuillage était touffu, sa tige élevée, Et sa cime s'élançait au milieu d'épais rameaux. ... Toutes les bêtes des champs faisaient leurs petits sous ses rameaux, Et de nombreuses nations habitaient toutes à son ombre. Il était beau par sa grandeur, par l'étendue de ses branches, Car ses racines plongeaient dans des eaux abondantes. Les cèdres du jardin de Dieu ne le surpassaient point, Les cyprès n'égalaient point ses branches, Et les platanes n'étaient point comme ses rameaux; Aucun arbre du jardin de Dieu ne lui était comparable en beauté. ... Et tous les arbres d'Eden, dans le jardin de Dieu, lui portaient envie. PR 278 4 Mais les chefs de l'Assyrie, au lieu de mettre leurs privilèges extraordinaires au service de l'humanité, devinrent la verge de nombreux pays. Sans pitié, sans égard pour Dieu ou leurs semblables, ils poursuivirent leur but défini: faire connaître à toutes les nations la suprématie des dieux de Ninive, qu'ils exaltaient au-dessus du Très-Haut. Dieu leur avait envoyé Jonas avec un message d'avertissement, et pendant quelque temps, ils s'étaient humiliés devant l'Eternel des armées et avaient imploré son pardon. Mais ils retournèrent bientôt au culte des idoles et à la conquête du monde. PR 279 1 Le prophète Nahum, s'adressant aux Ninivites, s'écriait: PR 279 2 Malheur à la ville sanguinaire, Pleine de mensonge, pleine de violence, Et qui ne cesse de se livrer à la rapine! ... On entend le bruit du fouet, Le bruit des roues, Le galop des chevaux, Le roulement des chars. Les cavaliers s'élancent, l'épée étincelle, la lance brille... Une multitude de blessés! ... Voici, j'en veux à toi, dit l'Eternel des armées. PR 279 3 Avec une précision infaillible, le Tout-Puissant tient compte des actions des hommes. Aussi longtemps que sa miséricorde s'exerce par des appels à la repentance, ce compte reste ouvert; mais lorsque la coupe déborde, alors éclate la colère divine. La mesure est pleine, la patience de Dieu est à son terme, sa miséricorde n'intervient plus en faveur de ces peuples. PR 279 4 L'Eternel est lent à la colère, il est grand par sa force; Il ne laisse pas impuni. L'Eternel marche dans la tempête, dans le tourbillon; Il menace la mer et la dessèche, Il fait tarir tous les fleuves; Le Basan et le Carmel languissent, La fleur du Liban se flétrit. Les nuées sont la poussière de ses pieds. Les montagnes s'ébranlent devant lui, Et les collines se fondent; La terre se soulève devant sa face, Le monde et tous ses habitants. Qui résistera devant sa fureur? Qui tiendra contre son ardente colère? Sa fureur se répand comme le feu, Et les rochers se brisent devant lui. PR 279 5 C'est ainsi que Ninive, "cette ville joyeuse, qui s'assied avec assurance, et qui dit en son coeur: Moi, et rien que moi!" devient un lieu de désolation, qu'elle est pillée, dévastée, ravagée. Elle est "devenue ce repaire de lions, ce pâturage des lionceaux, où se retiraient le lion, la lionne, le petit du lion, sans qu'il y eût personne pour les troubler".33 PR 280 1 Lorsqu'il annonçait que l'orgueil de Ninive serait abaissé, le prophète Sophonie disait de cette ville: "Des troupeaux se coucheront au milieu d'elle, des animaux de toute espèce; le pélican et le hérisson habiteront parmi les chapiteaux de ses colonnes; des cris retentiront aux fenêtres; la dévastation sera sur le seuil, car les lambris de cèdre seront arrachés."34 PR 280 2 Combien fut grande la gloire de l'Assyrie, et combien grande aussi sa chute! Le prophète Ezéchiel, rappelant l'image du cèdre majestueux du Liban, annonçait clairement la chute de l'Assyrie, due à son orgueil et à sa cruauté. "C'est pourquoi, disait-il, ainsi parle le Seigneur, l'Eternel: Parce qu'il avait une tige élevée, parce qu'il lançait sa cime au milieu d'épais rameaux, et que son coeur était fier de sa hauteur, je l'ai livré entre les mains du héros des nations, qui le traitera selon sa méchanceté; je l'ai chassé. Des étrangers, les plus violents des peuples, l'ont abattu et rejeté; ses branches sont tombées dans les montagnes et dans toutes les vallées. Ses rameaux se sont brisés dans tous les ravins du pays; et tous les peuples de la terre se sont retirés de son ombre, et l'ont abandonné. Sur ses débris sont venus se poser tous les oiseaux du ciel, et toutes les bêtes des champs ont fait leur gîte parmi ses rameaux, afin que tous les arbres près des eaux n'élèvent plus leur tige. ... Ainsi parle le Seigneur, l'Eternel: Le jour où il est descendu dans le séjour des morts, j'ai répandu le deuil. ... Tous les arbres des champs ont été desséchés. Par le bruit de sa chute j'ai fait trembler les nations."35 PR 280 3 L'orgueil et la chute de l'Assyrie doivent servir de leçon aux nations de la fin des temps. A celles qui s'élèvent avec arrogance contre Dieu, la sainte Ecriture dit: "A qui ressembles-tu ainsi en gloire et en grandeur parmi les arbres d'Eden? Tu seras précipité avec les arbres d'Eden dans les profondeurs de la terre."36 PR 280 4 L'Eternel est bon, Il est un refuge au jour de la détresse; Il connaît ceux qui se confient en lui. Mais avec des flots qui déborderont Il détruira la ville. PR 281 1 Voilà le sort de tous ceux qui voudront s'élever au-dessus du Très-Haut. PR 281 2 "L'orgueil de l'Assyrie sera abattu, et le sceptre de l'Egypte disparaîtra."38 Cette déclaration du prophète Zacharie ne concerne pas seulement les royaumes qui s'étaient autrefois dressés contre Dieu, mais aussi toutes les nations qui, aujourd'hui, sont infidèles à la mission divine. Au jour des rétributions finales, lorsque le juste Juge "va cribler les nations",39 et qu'il sera permis à tous ceux qui ont suivi la vérité d'entrer dans la sainte cité, alors les voûtes des cieux retentiront des accents triomphants des rachetés. "Vous chanterez comme la nuit où l'on célèbre la fête, déclare le prophète Esaïe. Vous aurez le coeur joyeux comme celui qui marche au son de la flûte, pour aller à la montagne de l'Eternel, vers le rocher d'Israël. Et l'Eternel fera retentir sa voix majestueuse. ... A la voix de l'Eternel, l'Assyrien tremblera; l'Eternel le frappera de sa verge. A chaque coup de la verge qui lui est destinée, et que l'Eternel fera tomber sur lui, on entendra les tambourins et les harpes."40 ------------------------Chapitre 31 -- Espoir pour les païens PR 283 1 Tout au cours de son ministère, le prophète Esaïe rendit un témoignage formel sur les desseins de Dieu à l'égard des païens. D'autres hommes de Dieu avaient déjà fait connaître le plan divin, mais leur langage n'avait pas été compris. Il était réservé à Esaïe d'informer clairement Juda sur le fait que parmi l'Israël de Dieu se trouvaient de nombreux enfants qui n'étaient pas issus d'Abraham selon la chair. Il y avait là un enseignement qui n'était pas conforme à la doctrine de cette époque. Cependant, le prophète proclama courageusement le message que Dieu lui avait confié. Il apporta ainsi l'espoir à tous ceux qui recherchaient avec ardeur les bénédictions spirituelles promises aux descendants d'Abraham. PR 283 2 Dans son épître aux croyants de Rome, l'apôtre Paul attire l'attention de ses correspondants sur cette caractéristique de l'enseignement d'Esaïe. "Esaïe, dit-il, pousse la hardiesse jusqu'à dire: J'ai été trouvé par ceux qui ne me cherchaient pas, je me suis manifesté à ceux qui ne me demandaient pas."1 PR 284 1 Les Israélites semblaient ne pas pouvoir ou ne pas vouloir comprendre le dessein du Seigneur envers les païens. C'était pourtant ce dessein qui avait fait d'eux un peuple à part, une nation indépendante. Abraham, leur ancêtre, avec qui une alliance fut conclue, avait été appelé à sortir de sa parenté et de son pays pour porter la lumière aux païens. Bien qu'il ait reçu la promesse d'avoir une postérité nombreuse comme le sable de la mer, ce n'était pas pour un but égoïste qu'il devait devenir le fondateur d'une grande nation au pays de Canaan. L'alliance que le Seigneur avait contractée avec lui embrassait toutes les nations de la terre. "Je te bénirai, avait déclaré l'Eternel, je rendrai ton nom grand, et tu seras une source de bénédiction. Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi."2 PR 284 2 Lorsqu'il renouvela son alliance, peu de temps avant la naissance d'Isaac, Dieu fit connaître à nouveau clairement son dessein en faveur de l'humanité. "En lui, affirme-t-il au sujet de l'enfant de la promesse, seront bénies toutes les nations de la terre."3 Et plus tard, l'ange qui rendit visite à Abraham déclara une fois de plus: "Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité."4 PR 284 3 Toutes les clauses de cette alliance étaient familières aux enfants d'Abraham et aux enfants de ses enfants. Si les Israélites furent délivrés du joug égyptien, c'était pour qu'ils puissent faire du bien aux autres nations, et pour que le nom de Dieu soit connu "par toute la terre".5 S'ils obéissaient aux exigences divines, ils surpasseraient en sagesse et en intelligence tous les autres peuples. Mais cette supériorité ne serait acquise et maintenue que si, par leur intermédiaire, le dessein de Dieu en faveur de "toutes les nations" pouvait être accompli. PR 284 4 Les merveilleuses bénédictions accordées aux Israélites, lorsqu'ils furent délivrés du joug égyptien et occupèrent la terre promise, amenèrent de nombreux païens à reconnaître dans le Dieu d'Israël le souverain suprême. "Les Egyptiens connaîtront, avait-il été promis à Moïse, que je suis l'Eternel, lorsque j'étendrai ma main sur l'Egypte, et que je ferai sortir du milieu d'eux les enfants d'Israël."6 L'orgueilleux pharaon même fut obligé de reconnaître la puissance de Jéhovah. "Allez, déclara-t-il à Moïse et Aaron, servez l'Eternel, ... allez, et bénissez-moi."7 PR 285 1 En avançant au pays de Canaan, les armées d'Israël constatèrent que les hauts faits du Dieu des Hébreux les avaient précédées, et que certains païens reconnaissaient que lui seul était le vrai Dieu. Voici le témoignage que rendit une païenne de la ville pervertie de Jéricho: "Car c'est l'Eternel, votre Dieu, qui est Dieu en haut dans les cieux et en bas sur la terre."8 La connaissance qui lui était parvenue au sujet de Jéhovah l'assurait de son salut. Par la foi "Rahab, la prostituée, ne périt pas avec les rebelles."9 Et sa conversion ne fut pas un acte isolé, dû à la grâce de Dieu en faveur des idolâtres qui reconnurent la divine autorité du Sauveur. Un peuple idolâtre, situé à l'intérieur du pays -- les Gabaonites -- abandonna son idolâtrie et se joignit à Israël, se mettant ainsi au bénéfice de l'alliance. PR 285 2 Dieu ne fait aucune distinction de classe, de race ou de nationalité. Il est le Créateur de tous les hommes. Tous font partie d'une même famille par la création et par la rédemption. PR 285 3 Le Christ est venu abolir tout mur de séparation, ouvrir à chacun les parvis du temple, afin que les âmes trouvent un libre accès auprès de Dieu. Son amour est si grand, si profond, si complet qu'il pénètre en tout lieu. Il arrache à l'influence de Satan tous ceux qui ont été trompés par ses mensonges, et il les attire près du trône de Dieu -- de ce trône auréolé par l'arc-en-ciel de la promesse. En Christ "il n'y a plus ni Juif, ni Grec, ni esclave, ni libre". PR 285 4 Pendant les années qui suivirent l'occupation de la terre promise, le dessein merveilleux du Seigneur pour le salut des païens fut presque entièrement perdu de vue. Il devint donc nécessaire de le rappeler. "Toutes les extrémités de la terre, dit le psalmiste, penseront à l'Eternel et se tourneront vers lui; toutes les familles des nations se prosterneront devant ta face." "Des grands viennent de l'Egypte; l'Ethiopie accourt, les mains tendues vers Dieu." "Les nations craindront le nom de l'Eternel, et tous les rois de la terre, ta gloire." "Que cela soit écrit pour la génération future, et que le peuple qui sera créé célèbre l'Eternel! Car il regarde du lieu élevé de sa sainteté; du haut des cieux l'Eternel regarde sur la terre, pour écouter les gémissements des captifs, pour délivrer ceux qui vont périr, afin qu'ils publient dans Sion le nom de l'Eternel, et ses louanges dans Jérusalem, quand tous les peuples s'assembleront, et tous les royaumes, pour servir l'Eternel."10 PR 286 1 Si le peuple d'Israël avait été fidèle, tous les royaumes de la terre auraient eu part à ses bénédictions. Mais ceux à qui avait été confiée la connaissance du salut furent insensibles aux besoins des peuples environnants. Tandis que les desseins d'en haut étaient ainsi perdus de vue, les païens finirent par être considérés comme hors d'atteinte de la miséricorde divine. La lumière céleste disparut pour faire place aux ténèbres. Alors les nations furent plongées dans l'ignorance, l'amour de Dieu fut à peine connu, l'erreur et la superstition fleurirent partout. PR 286 2 Telle était la situation lorsque le prophète Esaïe reçut son appel d'en haut. Il n'en était pourtant pas découragé, car il avait entendu chanter le choeur triomphal des séraphins qui entouraient le trône de Dieu: "Toute la terre est pleine de sa gloire."11 Sa foi était fortifiée par ses visions des glorieuses conquêtes de l'Eglise de Dieu: "La terre sera remplie de la connaissance de l'Eternel, comme le fond de la mer par les eaux qui le couvrent."12 "Le voile qui voile tous les peuples, la couverture qui couvre toutes les nations"13 devaient finalement disparaître, et l'Esprit de Dieu se répandre sur toute chair. Ceux qui avaient faim et soif de justice feraient partie de l'Israël spirituel. "Ils pousseront comme au milieu de l'herbe, comme les saules près des courants d'eau, dit le prophète. Celui-ci dira: Je suis à l'Eternel; celui-là se réclamera du nom de Jacob; cet autre écrira de sa main: à l'Eternel! Et prononcera avec amour le nom d'Israël."14 PR 286 3 Dieu révéla au prophète ses merveilleux desseins en dispersant la nation impénitente de Juda parmi les royaumes de la terre. "C'est pourquoi mon peuple connaîtra mon nom, dit l'Eternel; c'est pourquoi il saura, en ce jour, que c'est moi qui parle: me voici!"15 Ce peuple devait non seulement apprendre l'obéissance et la fidélité, mais aussi faire connaître aux pays où il était captif le Dieu vivant. De nombreux étrangers allaient être amenés à aimer leur Créateur et leur Rédempteur, et à observer le saint jour du sabbat, mémorial de la puissance créatrice de Dieu. Et, lorsque les Israélites auraient fait connaître "le bras de sa sainteté, aux yeux de toutes les nations" pour délivrer son peuple, "toutes les extrémités de la terre verraient le salut de notre Dieu".16 Un grand nombre de païens désireraient s'unir à Israël et retourner avec lui en Judée. Aucun d'eux ne dirait: "L'Eternel me séparera de son peuple!"17 car la parole du Seigneur adressée par son prophète à ceux qui se convertiraient et observeraient la loi divine annonçait qu'ils seraient désormais considérés comme faisant partie de l'Israël spirituel: l'Eglise du Christ: PR 287 1 "Les étrangers qui s'attacheront à l'Eternel pour le servir, pour aimer le nom de l'Eternel, pour être ses serviteurs, tous ceux qui garderont le sabbat, pour ne point le profaner, et qui persévéreront dans mon alliance, je les amènerai sur ma montagne sainte, et je les réjouirai dans ma maison de prière; leurs holocaustes et leurs sacrifices seront agréés sur mon autel; car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples. Le Seigneur, l'Eternel parle, lui qui rassemble les exilés d'Israël."18 PR 287 2 Il fut permis au prophète de jeter un coup d'oeil à travers les siècles, jusqu'à l'avènement du Messie promis. Il ne vit d'abord que "détresse, obscurité et de sombres angoisses".19 Un grand nombre d'âmes, qui étaient à la recherche de la vérité, égarées par de faux docteurs, erraient dans les labyrinthes de la philosophie et du spiritisme; d'autres pratiquaient une certaine forme de piété, sans témoigner une vraie sainteté dans leur vie quotidienne. La situation paraissait désespérée. Mais bientôt la scène changea d'aspect, et une vision éblouissante s'offrit aux yeux du prophète. Il vit le Soleil de justice se lever, et "la guérison était sous ses ailes". Alors, éperdu d'admiration, il s'écria: "Si les temps passés ont couvert d'opprobre le pays de Zabulon et le pays de Nephthali, les temps à venir couvriront de gloire la contrée voisine de la mer, au-delà du Jourdain, le territoire des Gentils. Le peuple qui marchait dans les ténèbres voit une grande lumière; sur ceux qui habitaient le pays de l'ombre de la mort une lumière resplendit."20 PR 288 1 Celui qui est la lumière du monde apporta le salut à toute nation, à toute langue, à toute tribu et à tout peuple. Le prophète entendit le Seigneur déclarer au sujet de l'oeuvre du Christ: "C'est peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus de Jacob et pour ramener les restes d'Israël: Je t'établis pour être la lumière des nations, pour porter mon salut jusqu'aux extrémités de la terre." "Au temps de la grâce je t'exaucerai, et au jour du salut je te secourrai; je te garderai, et je t'établirai pour traiter alliance avec le peuple, pour relever le pays, et pour distribuer les héritages désolés; pour dire aux captifs: Sortez! et à ceux qui sont dans les ténèbres: Paraissez!" "Les voici, ils viennent de loin, les uns du septentrion et de l'occident, les autres du pays de Sinim."21 PR 288 2 Portant les regards plus loin encore, à travers les âges, le prophète contempla l'accomplissement littéral de ces glorieuses promesses. Il vit les messagers de la bonne nouvelle du salut se rendre jusqu'aux extrémités de la terre, vers tout peuple et toute tribu. Il entendit le Seigneur déclarer au sujet de l'Eglise: "Voici, je dirigerai vers elle la paix comme un fleuve, et la gloire des nations comme un torrent débordé."22 Il entendit aussi quelle était sa mission: "Elargis l'espace de ta tente; qu'on déploie les couvertures de ta demeure: Ne retiens pas! Allonge tes cordages, et affermis tes pieux! Car tu te répandras à droite et à gauche; ta postérité envahira des nations, et peuplera des villes désertes."23 PR 288 3 Dieu déclara à Esaïe qu'il enverrait ses témoins "vers les nations, à Tarsis, à Pul et à Lud, ... à Tubal et à Javan, aux îles lointaines".24 PR 288 4 Qu'ils sont beaux sur les montagnes, Les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles, Qui publie la paix! De celui qui apporte de bonnes nouvelles, Qui publie le salut! De celui qui dit à Sion: Ton Dieu règne! PR 289 1 Le prophète entendit la voix de Dieu appeler son Eglise au travail qui lui était assigné, afin que soit préparée la venue du royaume éternel: PR 289 2 Lève-toi, sois éclairée, car ta lumière arrive, Et la gloire de l'Eternel se lève sur toi. Voici, les ténèbres couvrent la terre, Et l'obscurité les peuples; Mais sur toi l'Eternel se lève, Sur toi sa gloire apparaît. Des nations marchent à ta lumière, Et des rois à la clarté de tes rayons. Porte tes yeux alentour, et regarde: Tous ils s'assemblent, ils viennent vers toi; Tes fils arrivent de loin, Et tes filles sont portées sur les bras. ... Les fils de l'étranger rebâtiront tes murs, Et leurs rois seront tes serviteurs; Car je t'ai frappée dans ma colère, Mais dans ma miséricorde j'ai pitié de toi. Tes portes seront toujours ouvertes, Elles ne seront fermées ni jour ni nuit, Afin de laisser entrer chez toi les trésors des nations, Et leurs rois avec leur suite. ... PR 289 3 Tournez-vous vers moi, et vous serez sauvés, Vous tous qui êtes aux extrémités de la terre! Car je suis Dieu, et il n'y en a point d'autre. PR 289 4 Ces prophéties annoncent un grand réveil à une époque où règnent d'épaisses ténèbres. Elles trouvent leur accomplissement dans les stations missionnaires établies de nos jours dans les régions les plus reculées du globe. Les missionnaires qui travaillent en pays païens sont comparés par le prophète à des bannières flottant très haut et destinées à guider ceux qui cherchent la vérité. PR 289 5 "En ce jour-là, dit Esaïe, le rejeton d'Isaï sera là comme une bannière pour les peuples; les nations se tourneront vers lui, et la gloire vers sa demeure. Dans ce même temps, le Seigneur étendra une seconde fois sa main, pour racheter le reste de son peuple. ... Il élèvera une bannière pour les nations, il rassemblera les exilés d'Israël, et il recueillera les dispersés de Juda, des quatre extrémités de la terre."27 PR 290 1 Le jour de la délivrance est à la porte. "L'Eternel étend ses regards sur toute la terre, pour soutenir ceux dont le coeur est tout entier à lui."28 Parmi toutes les nations, les peuples et les langues, le Seigneur voit des âmes qui prient pour connaître la vérité. Ces âmes se sont longtemps nourries de cendres.29 Egarées par l'ennemi de toute justice, elles tâtonnent comme des aveugles. Pourtant elles sont sincères et aspirent après une vie meilleure. Bien que plongées dans l'abîme du paganisme, et dépourvues de toute connaissance de la loi de Dieu et de son Fils Jésus-Christ, elles ont montré de multiples manières les résultats de l'oeuvre divine sur l'esprit et le caractère. PR 290 2 Il est même arrivé que ceux qui ne connaissaient le Seigneur que par les manifestations de sa grâce ont fait preuve de bonté envers ses serviteurs, et les ont protégés au risque de leur propre vie. Le Saint-Esprit communique la grâce du Christ au coeur de ceux qui cherchent la vérité, vivifiant les sentiments contraires à leur nature et à leur éducation première. La "lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme",30 resplendit dans les coeurs. Si nous l'acceptons, elle guidera nos pas vers le royaume de Dieu. Le prophète Michée a dit: "Si je suis ... dans les ténèbres, l'Eternel sera ma lumière. ... Il me conduira à la lumière, et je contemplerai sa justice."31 PR 290 3 Le plan de la rédemption est assez vaste pour embrasser le monde entier. Dieu veut insuffler à l'humanité le souffle de la vie. Il ne permettra pas qu'une âme sincère soit déçue dans son désir d'obtenir quelque chose de meilleur que ce que le monde peut offrir. Il envoie sans cesse ses anges au secours de ceux qui, au milieu des difficultés les plus décourageantes, demandent avec foi qu'une puissance supérieure s'empare d'eux, et leur apporte la délivrance et la paix. Dieu se révèle à eux de diverses manières, et il les place dans des circonstances où ils affirmeront leur foi en celui qui s'est donné en rançon pour tous, "afin qu'ils mettent en Dieu leur confiance, qu'ils n'oublient pas les oeuvres de Dieu, et qu'ils observent ses commandements."32 "Le butin du puissant lui sera-t-il enlevé? Et la capture faite sur le juste échappera-t-elle? Oui, dit l'Eternel, la capture du puissant lui sera enlevée, et le butin du tyran lui échappera."33 "Ils reculeront, ils seront confus, ceux qui se confient aux idoles taillées, ceux qui disent aux idoles de fonte: Vous êtes nos dieux!"34 PR 291 1 "Heureux celui qui a pour secours le Dieu de Jacob, qui met son espoir en l'Eternel, son Dieu".35 "Retournez à la forteresse, captifs pleins d'espérance."36 Pour toutes les âmes sincères, dans les pays païens, pour ceux qui sont justes aux yeux du Seigneur, "la lumière se lève dans les ténèbres!"37 Dieu a dit: "Je ferai marcher les aveugles sur un chemin qu'ils ne connaissent pas, je les conduirai par des sentiers qu'ils ignorent; je changerai devant eux les ténèbres en lumière, et les endroits tortueux en plaine: Voilà ce que je ferai, et je ne les abandonnerai point!"38 ------------------------Chapitre 32 -- Manassé et Josias PR 293 1 Le royaume de Juda, qui connut la prospérité à l'époque d'Ezéchias, fut à nouveau affaibli par l'apostasie de Manassé. Le paganisme reprit vie et un grand nombre d'Israélites retournèrent à l'idolâtrie. "Manassé fut cause que Juda et les habitants de Jérusalem s'égarèrent et firent le mal plus que les nations que l'Eternel avait détruites."1 Les ténèbres de la superstition succédèrent à la glorieuse lumière qui avait illuminé les générations précédentes. De grands péchés surgissaient de tous côtés et triomphaient: la tyrannie, l'oppression, la haine du bien. La justice était faussée, la violence dominait. PR 293 2 Et cependant cette époque déplorable ne manquait pas de témoins pour Dieu et la vérité. Les épreuves douloureuses que le royaume de Juda avait subies sous le règne d'Ezéchias, et dont il avait triomphé, développèrent dans le coeur d'un grand nombre une fermeté de caractère qui leur servait de rempart contre l'iniquité dominante. Leur témoignage en faveur de la vérité provoqua la colère de Manassé et de ses serviteurs qui cherchaient à réduire au silence tous ceux qui désapprouvaient leur conduite. "Manassé répandit aussi beaucoup de sang innocent, jusqu'à en remplir Jérusalem d'un bout à l'autre."2 PR 294 1 Esaïe fut l'un des premiers à tomber, lui qui s'était dressé pendant plus d'un demi-siècle devant Juda comme messager de Jéhovah. "D'autres, nous dit l'épître aux Hébreux, subirent les moqueries et le fouet, les chaînes et la prison; ils furent lapidés, sciés, torturés, ils moururent tués par l'épée; ils allèrent çà et là vêtus de peaux de brebis et de peaux de chèvres, dénués de tout, persécutés, maltraités, -- eux dont le monde n'était pas digne, -- errants dans les déserts et les montagnes, dans les cavernes et les antres de la terre."3 PR 294 2 Parmi ceux qui subirent la persécution de Manassé, certains étaient chargés par le Seigneur de prononcer des paroles de reproches et de condamnation. Le roi de Juda, déclaraient les prophètes, avait "commis des abominations et fait pis que tout ce qu'avaient fait avant lui les Amoréens". Ses péchés allaient précipiter le royaume dans une crise sérieuse. Bientôt les habitants seraient emmenés en captivité à Babylone et deviendraient "le butin et la proie de tous leurs ennemis".4 Mais Dieu n'abandonnerait pas entièrement ceux qui, sur une terre étrangère, le reconnaîtraient comme leur Maître. Ils subiraient de grandes tribulations, mais le Seigneur les délivrerait au temps voulu et de la manière qu'il choisirait. Ceux qui placeraient en lui toute leur confiance trouveraient un refuge assuré. PR 294 3 Les prophètes ne cessaient d'adresser des messages d'avertissement et d'exhortation, à Manassé d'abord, puis au peuple. Mais ces messages étaient traités par le mépris; on n'en tenait aucun compte. Afin que l'on sache ce qui arriverait au peuple s'il ne se repentait pas, Dieu permit que le roi fût capturé par une bande de soldats assyriens qui "le mirent dans les fers, le lièrent avec des chaînes d'airain, et le menèrent à Babylone", leur capitale temporaire. Cette épreuve ramena le roi à la raison. "Il implora l'Eternel, son Dieu, et il s'humilia profondément devant le Dieu de ses pères. Il lui adressa ses prières; et l'Eternel, se laissant fléchir, exauça ses supplications, et le ramena à Jérusalem dans son royaume. Et Manassé reconnut que l'Eternel est Dieu."5 Mais ce repentir, bien que remarquable, se manifesta trop tard pour arracher le royaume à l'influence corruptrice de l'idolâtrie pratiquée depuis de si longues années. Un grand nombre était tombé pour ne plus jamais se relever. PR 295 1 Parmi ceux qui avaient été fortement marqués par l'apostasie de Manassé, il faut compter son propre fils, qui monta sur le trône à l'âge de vingt-deux ans. L'Ecriture nous dit que le roi Amon "marcha dans toute la voie où avait marché son père, il servit les idoles qu'avait servies son père, et il se prosterna devant elles".6 "Il ne s'humilia pas devant l'Eternel, comme s'était humilié Manassé, son père, car lui, Amon, se rendit de plus en plus coupable." Il ne fut pas permis à ce roi apostat de régner longtemps. Deux ans seulement après son accession au pouvoir, alors qu'il s'adonnait à son impiété provocante, il fut tué par ses propres serviteurs, dans son palais, et "le peuple du pays établit roi Josias, son fils, à sa place."7 PR 295 2 Avec l'arrivée de Josias au trône, qui régna trente et un ans, ceux dont la foi était restée pure commencèrent à espérer que l'apostasie de Juda aurait une fin; car le nouveau roi, bien qu'âgé de huit ans seulement, craignait Dieu. Dès le début de son règne, il fit "ce qui est droit aux yeux de l'Eternel, et il marcha dans toute la voie de David, son père; il ne s'en détourna ni à droite ni à gauche".8 Bien que fils d'un roi apostat, bien qu'assailli par la tentation de suivre l'exemple de son père, et encouragé par quelques conseillers seulement dans la voie du bien, Josias demeurait cependant fidèle au vrai Dieu. Evitant les erreurs des générations précédentes, il décida de faire le bien plutôt que de s'avilir dans le péché comme l'avaient fait son père et son grand-père. Il ne se "détourna ni à droite ni à gauche". Appelé à occuper un poste de confiance, il résolut de se conformer aux instructions données comme règle de conduite aux rois d'Israël. Le Seigneur put, grâce à son obéissance, en faire un vase d'honneur. PR 295 3 Lorsque Josias commença son règne, et bien des années auparavant, les fidèles de Juda se demandaient si les promesses divines faites à Israël seraient jamais réalisées. A vues humaines, le dessein de Dieu en faveur du peuple élu semblait presque relever du domaine de la chimère. L'apostasie des siècles écoulés s'était accentuée au cours des années précédentes, dix tribus d'Israël avaient été dispersées parmi les païens. Seuls Juda et Benjamin subsistaient encore, et ces tribus semblaient être à la veille d'une catastrophe morale et nationale. Les prophètes avaient commencé à prédire la ruine totale de la ville opulente, où se trouvait le temple construit par Salomon et où se concentraient tous les espoirs terrestres relatifs à la grandeur nationale d'Israël. Dieu allait-il se détourner de ceux qui avaient placé en lui leur confiance? Devant les persécutions continuelles des justes et la prospérité apparente des méchants, ceux qui étaient restés fidèles au vrai Dieu pouvaient-ils espérer des jours meilleurs? PR 296 1 Ces questions angoissantes étaient posées par le prophète Habakuk. Considérant la situation des fidèles de son époque, il exhalait sa souffrance, et demandait à Dieu: "O Eternel... J'ai crié, et tu n'écoutes pas! J'ai crié vers toi à la violence, et tu ne secours pas! Pourquoi me fais-tu voir l'iniquité, et contemples-tu l'injustice? Pourquoi l'oppression et la violence sont-elles devant moi? Il y a des querelles, et la discorde s'élève. Aussi la loi n'a point de vie, la justice n'a point de force; car le méchant triomphe du juste, et l'on rend des jugements iniques."9 PR 296 2 Dieu répondit au cri de ses fidèles enfants. Par l'interprète qu'il avait choisi, il leur révéla sa détermination de châtier la nation qui s'était détournée de lui pour servir des dieux païens. Certains même de ceux qui se demandaient ce que leur réservait l'avenir, verraient comment le Seigneur dirige miraculeusement les affaires de ce monde pour que les Babyloniens arrivent à la domination. Ce peuple "terrible et formidable",10 allait tomber subitement sur Juda, comme une verge divine. Les princes du royaume et les notables seraient alors emmenés en captivité à Babylone. Les villes et les villages de Judée, les champs cultivés seraient abandonnés; rien ne serait épargné. PR 296 3 Convaincu que, même dans ce terrible châtiment, le dessein de Dieu en faveur de son peuple s'accomplirait d'une manière ou d'une autre, Habakuk se soumit à la volonté d'en haut. "N'es-tu pas de toute éternité, Eternel, mon Dieu, mon Saint?" s'écria-t-il. Et, sa foi dépassant les sombres perspectives de l'avenir immédiat et s'emparant des précieuses promesses qui révèlent l'amour de Dieu pour les siens, le prophète ajouta: "Nous ne mourrons pas!"11 Avec cette déclaration pleine de foi, il remit son cas et celui de tous les croyants d'Israël entre les mains du Seigneur compatissant. Ce n'était pas là la seule expérience que fit Habakuk dans l'exercice de sa foi. Alors qu'il méditait un jour sur ce qu'il arriverait, il déclara: "J'étais à mon poste, et je me tenais sur la tour; je veillais, pour voir ce que l'Eternel me dirait." Dieu lui répondit avec bonté: "Ecris la prophétie: grave-la sur des tables, afin qu'on la lise couramment. Car c'est une prophétie dont le temps est déjà fixé, elle marche vers son terme, et elle ne mentira pas; si elle tarde, attends-la, car elle s'accomplira, elle s'accomplira certainement. Voici, son âme s'est enflée, elle n'est pas droite en lui; mais le juste vivra par sa foi."12 PR 297 1 La foi qui fortifiait Habakuk, ainsi que tous les saints et les justes de cette époque de profonde détresse, est la même que celle qui soutient le peuple de Dieu aujourd'hui. Aux heures les plus sombres, dans les circonstances les plus décourageantes, le chrétien peut fixer les regards sur celui qui est la source de toute lumière et de toute puissance. Par la foi en Dieu, son espoir et son courage seront renouvelés de jour en jour. "Le juste vivra par sa foi." Au service du Seigneur, aucun désespoir n'est permis, aucune hésitation, aucune crainte. Dieu fera au-delà de ce que peuvent attendre ceux qui mettent leur confiance en lui. Il leur accordera la sagesse qu'exigent leurs diverses épreuves. PR 297 2 L'apôtre Paul rend un éloquent témoignage au sujet des riches bénédictions que reçoivent tous ceux qui passent par la tentation. Voici la divine assurance qui lui fut donnée: "Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse." Dans son épreuve, le serviteur de Dieu répondit avec gratitude et confiance: "Je me glorifierai donc bien plus volontiers de mes faiblesses, afin que la puissance du Christ repose sur moi. C'est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les outrages, dans les calamités, dans les persécutions, dans les détresses, pour Christ; car, quand je suis faible, c'est alors que je suis fort."13 PR 298 1 Il faut cultiver et entretenir la foi pour laquelle les apôtres et les prophètes ont rendu témoignage, cette foi qui s'empare des promesses divines et attend la délivrance au jour fixé et selon le moyen convenu. La parole certaine de la prophétie trouvera son accomplissement à la venue en gloire de notre Sauveur, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs. L'attente peut paraître interminable, l'âme peut être accablée par des épreuves décourageantes, les hommes en qui nous avons mis notre confiance peuvent tomber en chemin; mais, avec le prophète (Habakuk) qui s'efforça de ranimer l'espoir de Juda à l'heure la plus sombre de l'apostasie, il faut s'écrier: "L'Eternel est dans son saint temple. Que toute la terre fasse silence devant lui!"14 PR 298 2 Ayons constamment à la pensée ce message réconfortant: "C'est une prophétie dont le temps est déjà fixé, elle marche vers son terme, et elle ne mentira pas; si elle tarde, attends-la, car elle s'accomplira, elle s'accomplira certainement. ... Le juste vivra par sa foi."15 PR 298 3 Accomplis ton oeuvre dans le cours des années, ô Eternel! Dans le cours des années manifeste-la! Mais dans ta colère souviens-toi de tes compassions! PR 298 4 Dieu vient de Théman, Le Saint vient de la montagne de Paran... Sa majesté couvre les cieux, Et sa gloire remplit la terre. C'est comme l'éclat de la lumière; Des rayons partent de sa main; Là réside sa force. Devant lui marche la peste, Et la peste est sur ses traces. Il s'arrête, et de l'oeil il mesure la terre; Il regarde, et il fait trembler les nations; Les montagnes éternelles se brisent, Les collines antiques s'abaissent; Les sentiers d'autrefois s'ouvrent devant lui. ... PR 298 5 Tu sors pour délivrer ton peuple, Pour délivrer ton oint. ... Car le figuier ne fleurira pas, La vigne ne produira rien, Le fruit de l'olivier manquera, Les champs ne donneront pas de nourriture; Les brebis disparaîtront du pâturage, Et il n'y aura plus de boeufs dans les étables. Toutefois, je veux me réjouir en l'Eternel, Je veux me réjouir dans le Dieu de mon salut. L'Eternel, le Seigneur, est ma force. PR 299 1 Habakuk ne fut pas le seul à donner un message d'espérance et de prochain triomphe, en même temps que de châtiment immédiat. Pendant le règne de Josias, la parole de l'Eternel parvint à Sophonie. Elle spécifiait nettement quelles seraient les conséquences de l'apostasie persistante, et attirait l'attention de la véritable Eglise de Dieu sur le glorieux avenir qui l'attendait. Les prophéties de Sophonie relatives au châtiment qui allait s'abattre sur Juda s'appliquent avec tout autant de puissance aux châtiments qui vont fondre sur le monde pécheur au moment de la seconde venue du Christ: PR 299 2 Le grand jour de l'Eternel est proche, Il est proche, il arrive en toute hâte; Le jour de l'Eternel fait entendre sa voix, Et le héros pousse des cris amers. Ce jour est un jour de fureur, Un jour de détresse et d'angoisse, Un jour de ravage et de destruction, Un jour de ténèbres et d'obscurité, Un jour de nuées et de brouillards, Un jour où retentiront la trompette et les cris de guerre Contre les villes fortes et les tours élevées. PR 299 3 "Je mettrai les hommes dans la détresse, et ils marcheront comme des aveugles, parce qu'ils ont péché contre l'Eternel; je répandrai leur sang comme de la poussière, et leur chair comme de l'ordure. Ni leur argent ni leur or ne pourront les délivrer, au jour de la fureur de l'Eternel; par le feu de sa jalousie tout le pays sera consumé; car il détruira soudain tous les habitants du pays."18 PR 299 4 Rentrez en vous-mêmes, examinez-vous, Nation sans pudeur, Avant que le décret s'exécute Et que ce jour passe comme la balle, Avant que la colère ardente de l'Eternel fonde sur vous! ... Cherchez l'Eternel, vous tous, humbles du pays! ... Recherchez la justice, recherchez l'humilité! Peut-être serez-vous épargnés au jour de la colère de l'Eternel. PR 300 1 Voici, en ce temps-là, j'agirai contre tous tes oppresseurs; Je délivrerai les boiteux et je recueillerai ceux qui ont été chassés, Je ferai d'eux un sujet de louange et de gloire Dans tous les pays où ils sont en opprobre. En ce temps-là, je vous ramènerai; En ce temps-là, je vous rassemblerai; Car je ferai de vous un sujet de gloire et de louange Parmi tous les peuples de la terre, Quand je ramènerai vos captifs sous vos yeux, Dit l'Eternel. PR 300 2 Pousse des cris de joie, fille de Sion! Pousse des cris d'allégresse, Israël! Réjouis-toi et triomphe de tout ton coeur, fille de Jérusalem! L'Eternel a détourné tes châtiments, Il a éloigné ton ennemi; Le roi d'Israël, l'Eternel, est au milieu de toi; Tu n'as plus de malheur à éprouver. En ce jour-là, on dira à Jérusalem: Ne crains rien! Sion, que tes mains ne s'affaiblissent pas! L'Eternel, ton Dieu, est au milieu de toi, comme un héros qui sauve; Il fera de toi sa plus grande joie; Il gardera le silence dans son amour; Il aura pour toi des transports d'allégresse. ------------------------Chapitre 33 -- Le livre de la loi PR 301 1 L'influence silencieuse mais profonde qu'exercèrent les messages des prophètes au sujet de la captivité babylonienne prépara la voie à une réforme qui eut lieu au cours de la dix-huitième année du règne de Josias. Cette réforme, qui retarda momentanément les châtiments prédits, fut opérée d'une manière tout à fait inattendue par la découverte et l'étude d'une partie des saintes Ecritures qui, d'une façon étrange, avait été pendant longtemps déplacée et perdue. PR 301 2 Presque un siècle auparavant, pendant la première Pâque célébrée par Ezéchias, il avait été décidé de faire pour le peuple une lecture quotidienne et publique du livre de la loi. Cette lecture était faite par les prêtres chargés de l'enseignement. Il s'agissait de l'observance des statuts consignés par Moïse dans le livre de l'alliance et formant une partie du Deutéronome, qui avait rendu le règne d'Ezéchias si prospère. Mais Manassé avait osé rejeter ces statuts, et pendant son règne l'exemplaire du livre de la loi appartenant au temple s'égara par suite d'une négligence. C'est ainsi que pendant de nombreuses années le peuple fut privé de son enseignement. PR 302 1 Ce manuscrit depuis si longtemps égaré fut découvert dans le temple par le grand prêtre Hilkija, au cours de réparations que le roi fit subir à l'édifice à la fois pour l'agrandir et pour en conserver la structure sacrée. Le grand prêtre donna le précieux volume à Schaphan, scribe érudit, qui le lut, puis l'emporta chez le roi à qui il fit le récit de la découverte. PR 302 2 Josias fut profondément frappé lorsqu'il entendit lire pour la première fois les exhortations et les avertissements contenus dans ce vieux manuscrit. Il n'avait jamais compris jusque-là, aussi clairement, la netteté avec laquelle le Seigneur avait placé devant Israël "la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction".1 Il n'avait pas compris combien fréquemment les Israélites avaient été poussés à choisir le chemin de la vie, afin d'être un sujet de louange pour la terre et une bénédiction pour toutes les nations. "Fortifiez-vous et ayez du courage! Ne craignez point et ne soyez point effrayés", avait dit Moïse à Israël, "car l'Eternel, ton Dieu, marchera lui-même avec toi, il ne te délaissera point, il ne t'abandonnera point."2 PR 302 3 Le livre abondait en certitudes données par le Seigneur au sujet de son désir de sauver à tout prix ceux qui mettraient entièrement en lui leur confiance. Comme il avait délivré les Israélites du joug égyptien, il opérerait avec puissance pour les établir dans la terre promise et les placer à la tête des nations. Les promesses offertes en récompense à ceux qui obéiraient à la loi étaient accompagnées de prédictions de châtiments pour ceux qui désobéiraient. En entendant ces paroles inspirées, le roi se rendit compte qu'il s'agissait là de l'état réel de son royaume. Quant aux déclarations prophétiques relatives à l'infidélité envers Dieu, elles remplirent Josias d'effroi, car le langage était net. La calamité suivrait promptement, et il n'y avait aucun moyen d'y échapper. On ne pouvait s'y méprendre, la signification des mots était claire. A la fin du livre, dans le sommaire relatif aux rapports de Dieu avec Israël, et dans le récit des événements futurs, ces paroles étaient doublement nettes. Moïse avait déclaré à toute l'assemblée d'Israël: PR 303 1 Cieux! prêtez l'oreille, et je parlerai; Terre! écoute les paroles de ma bouche. Que mes instructions se répandent comme la pluie, Que ma parole tombe comme la rosée, Comme des ondées sur la verdure, Comme des gouttes d'eau sur l'herbe! Car je proclamerai le nom de l'Eternel. Rendez gloire à notre Dieu! Il est le rocher; ses oeuvres sont parfaites, Car toutes ses voies sont justes; C'est un Dieu fidèle et sans iniquité, Il est juste et droit. PR 303 2 Rappelle à ton souvenir les anciens jours, Passe en revue les années, génération par génération, Interroge ton père, et il te l'apprendra, Tes vieillards, et ils te le diront. Quand le Très-Haut donna un héritage aux nations, Quand il sépara les enfants des hommes, Il fixa les limites des peuples D'après le nombre des enfants d'Israël, Car la portion de l'Eternel, c'est son peuple, Jacob est la part de son héritage. Il l'a trouvé dans une contrée déserte, Dans une solitude aux effroyables hurlements; Il l'a entouré, il en a pris soin, Il l'a gardé comme la prunelle de son oeil. PR 303 3 Israël est devenu gras, et il a regimbé; Tu es devenu gras, épais et replet! -- Et il a abandonné Dieu, son créateur, Il a méprisé le rocher de son salut, Ils ont excité sa jalousie par des dieux étrangers. Ils l'ont irrité par des abominations; Ils ont sacrifié à des idoles qui ne sont pas Dieu, A des dieux qu'ils ne connaissent point, Nouveaux, venus depuis peu, Et que vos pères n'avaient pas craints. Tu as abandonné le rocher qui t'a fait naître, Et tu as oublié le Dieu qui t'a engendré. L'Eternel l'a vu, et il a été irrité, Indigné contre ses fils et ses filles. Il a dit: Je leur cacherai ma face, Je verrai quelle sera leur fin; Car c'est une race perverse, Ce sont des enfants infidèles. Ils ont excité ma jalousie par ce qui n'est point Dieu, Ils m'ont irrité par leurs vaines idoles; Et moi, j'exciterai leur jalousie par ce qui n'est point un peuple, Je les irriterai par une nation insensée. PR 304 1 J'accumulerai sur eux les maux, J'épuiserai mes traits contre eux. Ils seront desséchés par la faim, consumés par la fièvre Et par des maladies violentes. PR 304 2 C'est une nation qui a perdu le bon sens, Et il n'y a point en eux d'intelligence. S'ils étaient sages, voici ce qu'ils comprendraient, Et ils penseraient à ce qui leur arrivera. Comment un seul en poursuivrait-il mille, Et deux en mettraient-ils dix mille en fuite, Si leur Rocher ne les avait vendus, Si l'Eternel ne les avait livrés? Car leur rocher n'est pas comme notre Rocher, Nos ennemis en sont juges. PR 304 3 Cela n'est-il pas caché près de moi, Scellé dans mes trésors? A moi la vengeance et la rétribution, Quand leur pied chancellera! Car le jour de leur malheur est proche, Et ce qui les attend ne tardera pas. PR 304 4 Ces paroles et d'autres semblables révélèrent à Josias l'amour de Dieu à l'égard de son peuple et son aversion du péché. Alors que le roi prenait connaissance de ces prophéties, annonçant un prompt châtiment à ceux qui persévéraient dans l'apostasie, il frémissait en songeant à l'avenir. La perversité de Juda avait été grande; qu'adviendrait-il de son apostasie persistante? PR 304 5 Dans son jeune âge, le roi n'était pas resté indifférent à l'égard de l'idolâtrie qui prévalait. "La huitième année de son règne, comme il était encore jeune", il s'était consacré entièrement au service de Dieu. Quatre ans plus tard, alors qu'il atteignait la vingtaine, il tenta de supprimer les tentations de ses sujets en purifiant "Juda et Jérusalem des hauts lieux, des idoles, des images taillées et des images de fonte". "On renversa devant lui les autels des Baals, et il abattit les statues consacrées au soleil qui étaient dessus; il brisa les idoles, les images taillées et les images en fonte, et les réduisit en poussière, et il répandit la poussière sur les sépulcres de ceux qui leur avaient sacrifié; et il brûla les ossements des prêtres sur leurs autels. C'est ainsi qu'il purifia Juda et Jérusalem."6 PR 305 1 Non satisfait de la purification totale du royaume de Juda, le jeune monarque étendit son oeuvre aux parties de la Palestine jadis occupées par les dix tribus d'Israël, au faible reste qui leur avait survécu. "Dans les villes de Manassé, d'Ephraïm, de Siméon, et même de Nephthali, partout au milieu de leurs ruines, il renversa les autels, il mit en pièces les idoles et les images taillées et les réduisit en poussière, et il abattit toutes les statues consacrées au soleil dans tout le pays d'Israël."7 Il ne retourna à Jérusalem que lorsqu'il eut parcouru dans tous les sens cette région en ruine, et qu'il eut accompli son oeuvre de purification. PR 305 2 C'est ainsi que dès son âge viril Josias s'était appliqué à user de son autorité royale pour exalter les principes de la sainte loi de Dieu. Et alors que Schaphan, le scribe, lui faisait la lecture du livre de la loi, il comprenait que ce volume recélait un trésor de connaissances. C'était un allié puissant qui l'aiderait à opérer la réforme qu'il désirait ardemment poursuivre dans son pays. Il prit donc la décision de marcher à la lumière de ses conseils, et de faire tout ce qu'il pourrait pour familiariser son peuple avec les enseignements de ce livre, afin de l'amener, si possible, à cultiver la vénération et l'amour pour la loi du ciel. PR 305 3 Mais comment opérer cette réforme si nécessaire? Israël avait presque atteint les limites de la patience divine; bientôt Dieu interviendrait pour punir ceux qui déshonoraient son nom. Déjà sa colère s'était allumée contre son peuple. Accablé de tristesse et d'épouvante, Josias déchira ses vêtements, se prosterna devant le Seigneur pour implorer le pardon des péchés de la nation impénitente. PR 305 4 A ce moment-là vivait à Jérusalem, près du temple, la prophétesse Hulda. Josias, obsédé par de sombres présages, décida d'aller la trouver. Il voulait consulter l'Eternel par sa messagère, afin de savoir s'il lui était possible de trouver le moyen de sauver Juda qui courait à sa perte. PR 306 1 La gravité de la situation, le respect qu'il éprouvait pour la prophétesse firent qu'il lui envoya les principaux hommes du royaume. "Allez, consultez l'Eternel pour moi, leur dit-il, pour le peuple, et pour tout Juda, au sujet des paroles de ce livre qu'on a trouvé; car grande est la colère de l'Eternel, qui s'est enflammée contre nous, parce que nos pères n'ont point obéi aux paroles de ce livre et n'ont point mis en pratique tout ce qui nous y est prescrit."8 PR 306 2 Dieu fit répondre à Josias par la prophétesse Hulda que la ruine de Jérusalem ne pouvait être évitée. Même si le peuple s'humiliait devant le Seigneur, il n'échapperait pas au châtiment. Il s'était endurci si longtemps dans le mal que, s'il évitait le châtiment, il retournerait bientôt à ses errements. "Dites à l'homme qui vous a envoyés vers moi, déclara la prophétesse, qu'ainsi parle l'Eternel: Voici, je vais faire venir des malheurs sur ce lieu et sur ses habitants, selon toutes les paroles du livre qu'a lu le roi de Juda. Parce qu'ils m'ont abandonné et qu'ils ont offert des parfums à d'autres dieux, afin de m'irriter par tous les ouvrages de leurs mains, ma colère s'est enflammée contre ce lieu, et elle ne s'éteindra point."9 PR 306 3 Toutefois, le roi s'étant humilié, le Seigneur voulut bien tenir compte de son vif désir de pardon et de miséricorde. Voici le message qui lui fut envoyé: "Parce que ton coeur a été touché, parce que tu t'es humilié devant l'Eternel en entendant ce que j'ai prononcé contre ce lieu et contre ses habitants, qui seront un objet d'épouvante et de malédiction, et parce que tu as déchiré tes vêtements et que tu as pleuré devant moi, moi aussi, j'ai entendu, dit l'Eternel. C'est pourquoi, voici, je te recueillerai auprès de tes pères, tu seras recueilli en paix dans ton sépulcre, et tes yeux ne verront pas tous les malheurs que je ferai venir sur ce lieu."10 PR 306 4 Le roi devait laisser à Dieu le déroulement des événements; il ne pouvait modifier ses décrets éternels. Mais en annonçant les châtiments célestes, le Seigneur ne supprimait pas l'occasion pour Juda de se repentir et d'opérer une réforme. Josias vit là le désir de Dieu de tempérer ses châtiments par sa miséricorde. Il décida donc de faire l'impossible pour apporter les réformes nécessaires. Il convoqua aussitôt une grande assemblée, où étaient invités les anciens et les principaux de Jérusalem et de Juda, ainsi que tout le peuple. Les prêtres et les Lévites se joignirent à eux, et tous rencontrèrent le roi dans le parvis du temple. PR 307 1 A cette vaste assemblée, Josias lut lui-même "toutes les paroles du livre de l'alliance, qu'on avait trouvé dans la maison de l'Eternel".11 Le royal lecteur était profondément ému, et il délivra son message avec les accents d'un coeur brisé. Ses auditeurs en furent vivement impressionnés. L'intensité de l'émotion qui se lisait sur la physionomie du roi, la solennité du message lui-même, l'annonce des châtiments prochains, tout cela produisit un grand effet sur les auditeurs, et beaucoup d'entre eux décidèrent de se joindre au monarque pour implorer le pardon divin. PR 307 2 Josias proposa alors aux principaux de se joindre au peuple afin de s'engager solennellement devant Dieu à opérer les changements nécessaires. "Le roi se tenait sur l'estrade, et il traita alliance devant l'Eternel, s'engageant à suivre l'Eternel, et à observer ses ordonnances, ses préceptes et ses lois, de tout son coeur et de toute son âme, afin de mettre en pratique les paroles de cette alliance, écrites dans ce livre." L'auditoire répondit plus chaleureusement que le roi n'avait osé l'espérer: "Tout le peuple entra dans l'alliance."12 PR 307 3 Par la réforme qui s'ensuivit, le roi s'appliqua à détruire tout vestige d'idolâtrie. Les habitants du pays avaient suivi si longtemps les coutumes des nations voisines en se prosternant devant des statues de bois et de pierre qu'il semblait presque impossible à un homme de supprimer toute trace de paganisme. Mais Josias était résolu à persévérer dans sa tentative de purifier le royaume. Il brava avec sévérité l'idolâtrie en immolant "tous les prêtres des hauts lieux. ... De plus, Josias fit disparaître ceux qui évoquaient les esprits et ceux qui prédisaient l'avenir, et les théraphim, et les idoles, et toutes les abominations qui se voyaient dans le pays de Juda et à Jérusalem, afin de mettre en pratique les paroles de la loi, écrites dans le livre que le sacrificateur Hilkija avait trouvé dans la maison de l'Eternel."13 PR 308 1 Au moment du partage du royaume, des siècles auparavant, Jéroboam, fils de Nébath, défia le Seigneur que servait Israël. Il s'efforça de détourner le peuple des services du temple pour lui faire adopter de nouvelles formes de culte, et il dressa un autel païen à Béthel. Mais au cours de la dédicace de cet autel, où pendant tant d'années une foule d'adorateurs devaient être séduits par des pratiques idolâtres, un homme de Dieu apparut soudain, venant de Juda, pour se dresser contre cet acte sacrilège. Il "cria contre l'autel", en déclarant: "Autel! Autel! ainsi parle l'Eternel: Voici, il naîtra un fils à la maison de David; son nom sera Josias; il immolera sur toi les prêtres des hauts lieux qui brûlent sur toi des parfums, et l'on brûlera sur toi des ossements d'hommes!"14 Cette prédiction était accompagnée d'un signe prouvant qu'elle émanait de Dieu. PR 308 2 Trois siècles s'étaient écoulés depuis lors. Au cours de la réforme de Josias, le roi se trouvait lui-même à Béthel où se dressait l'ancien autel. La prophétie qui avait été prononcée tant d'années auparavant, devant Jéroboam, s'accomplit alors littéralement. "Il renversa aussi l'autel qui était à Béthel, et le haut lieu qu'avait fait Jéroboam, fils de Nébath, qui avait fait pécher Israël; il brûla le haut lieu et le réduisit en poussière, et il brûla l'idole. Josias, s'étant tourné et ayant vu les sépulcres qui étaient là dans la montagne, envoya prendre les ossements des sépulcres, et il les brûla sur l'autel et le souilla, selon la parole de l'Eternel prononcée par l'homme de Dieu qui avait annoncé ces choses. Il dit: Quel est ce monument que je vois? Les gens de la ville lui répondirent: C'est le sépulcre de l'homme de Dieu, qui est venu de Juda, et qui a crié contre l'autel de Béthel ces choses que tu as accomplies. Et il dit: Laissez-le; que personne ne remue ses os! On conserva ainsi ses os avec les os du prophète qui était venu de Samarie."15 PR 308 3 Sur les pentes méridionales du mont des Oliviers, en face du temple merveilleux de Jérusalem, sur le mont Morija, se dressaient des autels et des statues que Salomon avait élevés pour plaire à ses femmes idolâtres.16 Pendant plus de trois siècles, ces grandes statues difformes dominèrent "la montagne de la perdition", témoignage silencieux de l'apostasie du plus sage roi d'Israël. Elles furent aussi enlevées et détruites par Josias. PR 309 1 Le roi chercha en outre à affermir la foi des habitants de Juda au Dieu de leurs pères, en célébrant une grande fête de Pâque, selon les instructions du livre de la loi. Ceux qui étaient chargés des services sacrés firent les préparatifs nécessaires, et le grand jour de la fête on offrit de nombreux sacrifices. "Aucune Pâque pareille à celle-ci n'avait été célébrée depuis le temps où les juges jugeaient Israël et pendant tous les jours des rois d'Israël et des rois de Juda."17 Mais le zèle de Josias, si agréable qu'il fût au Seigneur, ne pouvait expier les péchés des générations précédentes, pas plus d'ailleurs que la piété des émules du roi ne pouvait changer le coeur de ceux qui refusaient de se détourner de l'idolâtrie pour adorer le vrai Dieu. PR 309 2 Pendant plus d'une décennie, après la célébration de cette Pâque, Josias continua à régner. A l'âge de trente-neuf ans, il trouva la mort en luttant contre les Egyptiens. "Il fut enterré dans le sépulcre de ses pères. Tout Juda et Jérusalem pleurèrent Josias. Jérémie fit une complainte sur Josias; tous les chanteurs et toutes les chanteuses ont parlé de Josias dans leurs complaintes jusqu'à ce jour, et en ont établi la coutume en Israël. Ces chants sont écrits dans les Complaintes."18 "Avant Josias, il n'y eut point de roi qui, comme lui, revînt à l'Eternel de tout son coeur, de toute son âme et de toute sa force, selon toute la loi de Moïse; et après lui, il n'en a point paru de semblable. Toutefois, l'Eternel ne se désista point de l'ardeur de sa grande colère ... à cause de tout ce qu'avait fait Manassé pour l'irriter."19 PR 309 3 Le moment où Jérusalem allait être entièrement détruite approchait rapidement. Les habitants du pays seraient emmenés en captivité à Babylone. Là, ils apprendraient les leçons qu'ils avaient refusé d'apprendre dans des circonstances plus favorables. ------------------------Chapitre 34 -- Jérémie PR 311 1 Parmi ceux qui avaient mis leur espoir dans un réveil permanent, après la réforme de Josias, figure Jérémie. Celui-ci fut appelé par Dieu à la vocation prophétique pendant la douzième année du règne de Josias, alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Membre du sacerdoce lévitique, il fut élevé en vue du service sacré. Aux jours heureux de cette préparation au ministère, il était loin de supposer qu'il avait été choisi dès sa naissance pour être "prophète des nations". Lorsque l'appel de Dieu lui parvint, il fut accablé par le sentiment de son indignité. "Ah! Seigneur Eternel! s'écria-t-il, voici, je ne sais point parler, car je suis un enfant."1 PR 311 2 Dieu vit dans le jeune Jérémie un caractère qui resterait fidèle à sa foi et se dresserait pour le droit contre l'opposition la plus violente. Dès son enfance, il s'était montré ferme; il allait maintenant affronter les difficultés comme un bon soldat de la croix. "Ne dis pas: Je suis un enfant, répondit le Seigneur à son messager. Car tu iras vers tous ceux auprès de qui je t'enverrai, et tu diras tout ce que je t'ordonnerai. Ne les crains point; car je suis avec toi pour te délivrer. ... Ceins tes reins, lève-toi, et dis-leur tout ce que je t'ordonnerai. Ne tremble pas en leur présence, de peur que je ne te fasse trembler devant eux. Voici, je t'établis en ce jour sur tout le pays comme une ville forte, une colonne de fer et un mur d'airain, contre les rois de Juda, contre ses chefs, contre ses sacrificateurs, et contre le peuple du pays. Ils te feront la guerre, mais ils ne te vaincront pas; car je suis avec toi pour te délivrer, dit l'Eternel."2 PR 312 1 Pendant quarante ans, Jérémie devait se dresser contre la nation comme témoin de la vérité et de la justice. En un temps d'apostasie sans précédent, il allait donner l'exemple par sa vie et son caractère de l'adoration du seul vrai Dieu. Il serait le porte-parole du Très-Haut au cours du terrible siège de Jérusalem. Il fallait qu'il prédise la ruine de la maison de Juda, ainsi que la destruction du temple magnifique construit par Salomon. Et lorsqu'il serait en prison pour ses déclarations courageuses, il devrait encore dénoncer le péché en haut lieu. Méprisé, haï, rejeté par les hommes, il assisterait finalement à l'accomplissement de ses propres prophéties relatives à la destruction imminente de Jérusalem et il participerait aux malheurs qui l'accompagneraient. PR 312 2 Cependant, au milieu de la ruine totale de la nation, il fut souvent permis à Jérémie de contempler par-delà les scènes de détresse les glorieuses perspectives de l'avenir, au moment où le peuple élu racheté du pays de l'ennemi retournerait à Sion. Il vit par anticipation le jour où Dieu renouvellerait son alliance avec ses enfants. Alors "leur âme sera comme un jardin arrosé, et ils ne seront plus dans la souffrance".3 PR 312 3 Au sujet de son appel prophétique, Jérémie écrivit: "L'Eternel étendit sa main, et toucha ma bouche; et l'Eternel me dit: Voici, je mets mes paroles dans ta bouche. Regarde, je t'établis aujourd'hui sur les nations et sur les royaumes, pour que tu arraches et que tu abattes, pour que tu ruines et que tu détruises, pour que tu bâtisses et que tu plantes."4 PR 312 4 Remercions le Seigneur pour ces mots: "bâtir et planter". Grâce à eux, le prophète eut la certitude que le plan de Dieu était de restaurer et de guérir. Les messages de Jérémie au cours des années qui suivirent furent très durs. Les châtiments qu'ils annonçaient ne tarderaient point; il fallait les annoncer courageusement. Des plaines de Schinear, "la calamité se répandrait sur tous les habitants du pays". "Je prononcerai mes jugements contre eux, déclarait le Seigneur, à cause de toute leur méchanceté, parce qu'ils m'ont abandonné."5 Cependant, le prophète devait accompagner ces messages de l'assurance du pardon en faveur de tous ceux qui se détourneraient du mal. PR 313 1 Comme un sage architecte, Jérémie encouragea dès le début de son oeuvre les habitants de Juda à poser les fondements de leur vie spirituelle sur les bases solides de la repentance. Trop longtemps ils avaient bâti avec des matériaux comparés par l'apôtre Paul à du bois et à du chaume, et par Jérémie à des scories. "On les appelle de l'argent méprisable, disait-il à la nation pécheresse, car l'Eternel les a rejetés."6 Ils étaient encouragés maintenant à bâtir avec sagesse et pour l'éternité, en rejetant les scories de l'apostasie et de l'incrédulité, et en se servant, pour édifier leurs fondements, d'or pur, d'argent fin, de pierres précieuses: la foi, l'obéissance et les bonnes oeuvres, seules acceptables aux yeux d'un Dieu saint. PR 313 2 La parole du Seigneur, adressée à son peuple par Jérémie, était: "Reviens, infidèle Israël! ... Je ne jetterai pas sur vous un regard sévère; car je suis miséricordieux, dit l'Eternel, je ne garde pas ma colère à toujours. Reconnais seulement ton iniquité, reconnais que tu as été infidèle à l'Eternel, ton Dieu. ... Revenez, enfants rebelles, dit l'Eternel, car je suis votre maître. ... Tu m'appelleras: Mon père! Et tu ne te détourneras pas de moi. ... Revenez, enfants rebelles, et je pardonnerai vos infidélités".7 PR 313 3 En plus de ces merveilleuses déclarations, le Seigneur donnait à son peuple rebelle les paroles mêmes qu'il devait prononcer pour revenir à lui: "Nous voici, nous allons à toi, car tu es l'Eternel, notre Dieu. Oui, le bruit qui vient des collines et des montagnes n'est que mensonge; oui, c'est en l'Eternel, notre Dieu, qu'est le salut d'Israël. ... Nous avons notre honte pour couche, et notre ignominie pour couverture; car nous avons péché contre l'Eternel, notre Dieu, nous et nos pères, dès notre jeunesse jusqu'à ce jour, et nous n'avons pas écouté la voix de l'Eternel, notre Dieu."8 PR 314 1 La réforme de Josias avait purifié le pays des autels païens, mais les coeurs de la multitude n'avaient pas été changés. La semence de la vérité qui s'était développée et promettait une riche moisson avait été étouffée par les épines. Une apostasie semblable serait fatale à Juda. Dieu chercha à faire comprendre à la nation le danger qu'elle courait. Ce n'était que grâce à sa fidélité au Seigneur qu'elle pouvait espérer la faveur divine et la prospérité. PR 314 2 Jérémie ne cessa d'attirer l'attention des Israélites sur les conseils donnés dans le Deutéronome. Plus qu'aucun autre des prophètes il insista sur les enseignements de la loi mosaïque, et il montra comment ceux-ci pouvaient être une source de bénédiction spirituelle pour la nation et pour chacun de ses habitants. "Demandez quels sont les anciens sentiers, quelle est la bonne voie; marchez-y, affirmait-il, et vous trouverez le repos de vos âmes!"9 PR 314 3 A une certaine occasion, sur l'ordre de Dieu, le prophète vint se placer à l'une des portes principales de Jérusalem. Là, il insista sur l'importance d'observer le saint jour du sabbat. Les habitants de cette ville couraient le danger de perdre de vue la sainteté du jour du repos, et ils furent solennellement avertis de ne pas se laisser gagner par leurs occupations matérielles ce jour-là. Ne pouvaient être bénis que ceux qui obéiraient. "Si vous m'écoutez, dit l'Eternel, ... si vous sanctifiez le jour du sabbat, et ne faites aucun ouvrage ce jour-là, alors entreront par les portes de cette ville les rois et les princes assis sur le trône de David, montés sur des chars et sur des chevaux, eux et leurs princes, les hommes de Juda et les habitants de Jérusalem, et cette ville sera habitée à toujours."10 PR 314 4 Cette magnifique promesse -- récompense de l'obéissance -- était accompagnée d'une prophétie annonçant les terribles châtiments qui s'abattraient sur la ville si ses habitants se montraient infidèles au Seigneur et à sa loi. S'ils ne tenaient pas compte des avertissements relatifs à leur obéissance au Dieu de leurs pères et à la sanctification du jour du repos, la ville et ses palais seraient totalement détruits par le feu. PR 315 1 C'est ainsi que le prophète prenait fermement position pour les principes si clairement soulignés dans le livre de la loi. Mais les conditions qui régnaient dans le royaume de Juda étaient telles que seules des mesures énergiques pouvaient apporter une amélioration. C'est pourquoi Jérémie déploya le plus grand zèle à l'égard des pécheurs. "Défrichez-vous un champ nouveau, s'écriait-t-il, et ne semez pas parmi les épines. ... Purifie ton coeur du mal, Jérusalem, afin que tu sois sauvée!"11 PR 315 2 Mais la grande majorité du peuple n'écouta pas cet appel à la repentance et à la conversion. Depuis la mort du bon roi Josias, ceux qui avaient gouverné la nation n'étaient pas restés fidèles au Seigneur, et ils avaient égaré beaucoup d'âmes. A Joachaz, déposé par ordre du roi d'Egypte, avait succédé Jojakim, l'un des fils aînés de Josias. Alors Jérémie conserva peu d'espoir de sauver son pays bien-aimé de la destruction et le peuple de la captivité. Il ne put cependant rester silencieux tandis qu'une ruine totale menaçait le royaume. Il fallait encourager ceux qui étaient demeurés fidèles au Seigneur, afin qu'ils persévèrent dans le bien, et détourner si possible les pécheurs de l'iniquité. PR 315 3 La crise exigeait une grande démonstration publique. Dieu ordonna donc à Jérémie de se tenir debout dans le parvis du temple et de s'adresser à tous ceux qui y entraient et en sortaient. Le prophète ne devait pas retrancher une seule parole des messages qui lui étaient dictés, afin que les pécheurs de Sion puissent bien les entendre et se détourner de leurs mauvaises voies. PR 315 4 Le prophète obéit. Il se tint debout à la porte de la maison de Dieu, et là il éleva la voix pour avertir et exhorter son peuple. Inspiré par le Tout-Puissant, il déclara: "Ecoutez la parole de l'Eternel, vous tous, hommes de Juda, qui entrez par ces portes, pour vous prosterner devant l'Eternel! Ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Réformez vos voies et vos oeuvres, et je vous laisserai demeurer dans ce lieu. Ne vous livrez pas à des espérances trompeuses, en disant: C'est ici le temple de l'Eternel, le temple de l'Eternel, le temple de l'Eternel! Si vous réformez vos voies et vos oeuvres, si vous pratiquez la justice envers les uns et les autres, si vous n'opprimez pas l'étranger, l'orphelin et la veuve, si vous ne répandez pas en ce lieu le sang innocent, et si vous n'allez pas après d'autres dieux, pour votre malheur, alors je vous laisserai demeurer dans ce lieu, dans le pays que j'ai donné à vos pères, d'éternité en éternité."12 PR 316 1 L'aversion éprouvée par Dieu à châtier est ici manifeste. Il diffère ses jugements, afin de plaider avec le pécheur. Celui "qui exerce la bonté, le droit et la justice sur la terre",13 soupire après ses enfants égarés. Il cherche à leur enseigner par tous les moyens le chemin de la vie éternelle. Il délivra les Israélites de l'esclavage afin qu'ils le servent, lui, le seul vrai Dieu. Bien que ceux-ci aient longtemps erré dans l'idolâtrie et méprisé ses avertissements, le Seigneur exprimait maintenant son désir de différer le châtiment et de leur accorder une nouvelle occasion de se repentir. Mais il mettait en évidence ce fait: le châtiment ne serait retardé qu'à la condition qu'un changement radical se produise. La confiance placée dans le temple et ses services serait vaine. Les rites et les cérémonies ne pourraient servir d'expiation pour le péché. Se dire le peuple élu n'avait aucune importance; seule une réforme du coeur et de la conduite pouvait sauver de l'inévitable conséquence d'une transgression continuelle. PR 316 2 C'est ainsi que, "dans les villes de Juda et dans les rues de Jérusalem", ce message de Jérémie se répandait: "Ecoutez les paroles de cette alliance -- les préceptes du Seigneur, tels qu'ils sont mentionnés dans les saintes Ecritures -- et mettez-les en pratique".14 C'est ainsi que s'exprimait le prophète alors qu'il se tenait debout dans le parvis du temple, au début du règne de Jojakim. L'histoire du peuple d'Israël était brièvement passée en revue. Dieu avait contracté avec lui cette alliance: "Ecoutez ma voix, et je serai votre Dieu, et vous serez mon peuple; marchez dans toutes les voies que je vous prescris, afin que vous soyez heureux." Cette alliance avait été rompue avec impudence et à maintes reprises. Le peuple élu avait "suivi les conseils, les penchants de son mauvais coeur, il avait été en arrière et non en avant!"15 PR 316 3 "Pourquoi donc, demandait le Seigneur, ce peuple de Jérusalem s'abandonne-t-il à de perpétuels égarements?"16 Le prophète répondait que c'était parce qu'il n'avait pas obéi à la voix de l'Eternel, son Dieu, et avait refusé de revenir à de meilleurs sentiments?"17 "La vérité a disparu, constatait le prophète, elle s'est retirée de leur bouche." "Même la cigogne connaît dans les cieux sa saison; la tourterelle, l'hirondelle et la grue observent le temps de leur arrivée; mais mon peuple ne connaît pas la loi de l'Eternel." "Ne les châtierais-je pas pour ces choses-là, dit l'Eternel, ne me vengerais-je pas d'une pareille nation.18 PR 317 1 Le moment était venu pour les Israélites de sonder leurs coeurs. Pendant le règne de Josias, ils avaient quelque raison d'espérer; mais il n'était plus là pour intercéder en leur faveur; il avait péri au cours d'un combat. Les péchés de la nation avaient dépassé la limite, aucune intercession n'était plus possible. "Quand Moïse et Samuel, déclarait le Seigneur, se présenteraient devant moi, je ne serais pas favorable à ce peuple. Chasse-le loin de ma face, qu'il s'en aille! Et s'ils te disent: Où irons-nous? tu leur répondras: Ainsi parle l'Eternel: A la mort ceux qui sont pour la mort, à l'épée ceux qui sont pour l'épée, à la famine ceux qui sont pour la famine, à la captivité ceux qui sont pour la captivité!"19 PR 317 2 Si les Israélites refusaient encore l'invitation miséricordieuse de Dieu, ils attireraient sur la nation impénitente les châtiments qui s'étaient abattus sur le royaume du nord il y avait plus d'un siècle. Le message qui leur était adressé maintenant était celui-ci: "Si vous ne m'écoutez pas quand je vous ordonne de suivre ma loi que j'ai mise devant vous, d'écouter les paroles de mes serviteurs, les prophètes, que je vous envoie, que je vous ai envoyés dès le matin, et que vous n'avez pas écoutés, alors je traiterai cette maison comme Silo, et je ferai de cette ville un objet de malédiction pour toutes les nations de la terre."20 PR 317 3 Ceux qui, debout dans le parvis du temple, écoutaient les paroles de Jérémie, comprirent très bien cette allusion à Silo et aux temps d'Eli, alors que les Philistins avaient battu Israël et s'étaient emparés de l'arche de l'alliance. Eli avait péché en traitant à la légère les iniquités de ses fils, comme les péchés du pays tout entier. Cette faiblesse avait provoqué une terrible calamité en Israël. Les fils d'Eli étaient tombés dans la bataille, Eli lui-même était mort, l'arche de l'alliance avait été capturée, et trente mille hommes massacrés. Tout cela parce qu'on avait permis au péché de se développer, sans le reprendre ni le censurer. Les Israélites s'étaient figuré que malgré leur mauvaise conduite la présence de l'arche leur assurerait la victoire. Il en était de même au temps de Jérémie. Les habitants de Juda croyaient qu'une stricte observance des services du temple les préserveraient du juste châtiment que méritait leur conduite répréhensible. PR 318 1 Quelle leçon pour les hommes qui occupent aujourd'hui des postes de confiance dans l'Eglise! Quel avertissement solennel leur est donné à l'égard des péchés qui déshonorent la cause de Dieu! Que ceux qui se disent les dépositaires de la loi divine et se flattent d'en observer les commandements ne se croient pas à l'abri de la justice céleste. Que nul ne refuse de se laisser reprendre pour son péché et n'accuse les serviteurs de Dieu de manifester trop de zèle en "purifiant le camp". Celui qui a horreur du péché exhorte les hommes qui prétendent observer sa loi à se séparer de toute iniquité. La négligence dans le repentir et l'obéissance volontaire aura des conséquences aussi graves que pour Israël. Il est une limite au-delà de laquelle les châtiments divins ne peuvent être différés. La désolation de Jérusalem aux jours de Jérémie est un avertissement solennel pour l'Eglise de nos jours. Les conseils et les exhortations qui lui sont donnés par l'intermédiaire de messagers choisis de Dieu ne peuvent être rejetés impunément. PR 318 2 Les paroles de Jérémie adressées aux prêtres et au peuple suscitèrent des contestations parmi un grand nombre d'entre eux. Ils s'écrièrent avec violence: "Pourquoi prophétises-tu au nom de l'Eternel, en disant: Cette maison sera comme Silo, et cette ville sera dévastée, privée d'habitants? Tout le peuple s'attroupa autour de Jérémie dans la maison de l'Eternel."21 Les prêtres, les faux prophètes et le peuple se tournèrent avec rage contre celui qui leur annonçait des choses désagréables et décevantes. Le message de Dieu était ainsi méprisé et son serviteur menacé de mort. PR 319 1 L'écho des paroles de Jérémie parvint aux oreilles des princes de Juda. Quittant en hâte le palais du roi, ils se rendirent au temple pour de plus amples renseignements. "Alors les sacrificateurs et les prophètes parlèrent ainsi aux chefs et à tout le peuple: Cet homme mérite la mort; car il a prophétisé contre cette ville, comme vous l'avez entendu de vos oreilles."22 Mais Jérémie, se tenant courageusement devant les princes et le peuple, déclara: "L'Eternel m'a envoyé pour prophétiser contre cette maison et contre cette ville toutes les choses que vous avez entendues. Maintenant réformez vos voies et vos oeuvres, écoutez la voix de l'Eternel, votre Dieu, et l'Eternel se repentira du mal qu'il a prononcé contre vous. Pour moi, me voici entre vos mains; traitez-moi comme il vous semblera bon et juste. Seulement sachez que, si vous me faites mourir, vous vous chargez du sang innocent, vous, cette ville et ses habitants; car l'Eternel m'a véritablement envoyé vers vous pour prononcer à vos oreilles toutes ces paroles."23 PR 319 2 Si le prophète s'était laissé intimider par les menaces des principaux d'Israël, son message n'aurait produit aucun effet et il aurait risqué sa vie. Mais le courage dont il fit preuve dans son avertissement solennel imposa le respect au peuple, et lui acquit la faveur des princes d'Israël. Ceux-ci s'adressèrent alors aux prêtres et aux faux prophètes, et ils leur montrèrent combien déraisonnables seraient les mesures extrêmes qu'ils exigeaient. Leurs paroles provoquèrent une réaction salutaire dans l'esprit de l'assemblée. Dieu avait suscité des hommes pour défendre son serviteur. PR 319 3 Les anciens vinrent aussi protester contre la décision des prêtres au sujet de la mort de Jérémie. Ils citèrent le cas de Michée qui avait ainsi prophétisé contre Jérusalem: "Sion sera labourée comme un champ, Jérusalem deviendra un monceau de pierres, et la montagne de la maison une haute forêt." Et ils demandèrent: "Ezéchias, roi de Juda, et tout Juda l'ont-ils fait mourir? Ezéchias ne craignit-il pas l'Eternel? n'implora-t-il pas l'Eternel? Alors l'Eternel se repentit du mal qu'il avait prononcé contre eux. Et nous, nous chargerions notre âme d'un si grand crime!"24 PR 320 1 Grâce à l'intervention de ces hommes influents, la vie du prophète fut épargnée, bien que la plupart des prêtres et des faux prophètes, ne pouvant supporter les vérités qui les condamnaient, se fussent réjouis de le voir mettre à mort. PR 320 2 Dès le début de sa mission prophétique jusqu'à la fin de son ministère, Jérémie se tint devant Juda comme "une forteresse" que la colère de l'homme ne pouvait renverser. "Ils te feront la guerre, avait prédit le Seigneur à son serviteur, mais ils ne te vaincront pas, car je serai avec toi pour te sauver et te délivrer. Je te délivrerai de la main des méchants, je te sauverai de la main des violents."25 PR 320 3 D'un naturel timide et effacé, Jérémie soupirait après la paix et le calme d'une vie retirée où il n'aurait pas été témoin du péché continuel de la nation qu'il aimait. Son coeur était torturé d'angoisse en présence des ravages du péché. "Oh! si ma tête était remplie d'eau, si mes yeux étaient une source de larmes, s'écriait-il, je pleurerais jour et nuit les morts de la fille de mon peuple! Oh! si j'avais au désert une cabane de voyageurs, j'abandonnerais mon peuple, je m'en éloignerais!"26 PR 320 4 Comme ils étaient cruels les sarcasmes que le prophète était appelé à supporter! Son âme délicate était transpercée par les flèches de la raillerie de ceux qui dédaignaient ses messages et se moquaient du souci qu'il prenait de leur conversion. "Je suis pour tout mon peuple, disait-il, un objet de raillerie, chaque jour l'objet de leurs chansons." "Tout le monde se moque de moi. ... Tous ceux qui étaient en paix avec moi observent si je chancelle: peut-être se laissera-t-il surprendre, et nous serons maîtres de lui, nous tirerons vengeance de lui!"27 PR 320 5 Mais le fidèle prophète recevait quotidiennement des forces pour supporter son épreuve. "L'Eternel est avec moi comme un héros puissant, disait-il avec foi. C'est pourquoi mes persécuteurs chancellent et n'auront pas le dessus; ils seront remplis de confusion pour n'avoir pas réussi: ce sera une honte éternelle qui ne s'oubliera pas. ... Chantez à l'Eternel, louez l'Eternel! car il délivre l'âme du malheureux de la main des méchants."28 PR 321 1 Les expériences que fit Jérémie au cours de sa jeunesse ainsi que dans les dernières années de son ministère, lui enseignèrent que "la voie de l'homme n'est pas en son pouvoir; ce n'est pas à l'homme, quand il marche, à diriger ses pas". Il apprit à prier: "Châtie-moi, ô Eternel! mais avec équité, et non dans ta colère, de peur que tu ne m'anéantisses."29 Lorsqu'il fut appelé à boire à la coupe des tribulations et du désespoir, lorsqu'il fut tenté de dire dans sa misère: "Ma force est perdue, je n'ai plus d'espérance en l'Eternel!" il se rappela les bénédictions divines, et il s'écria triomphalement: "Les bontés de l'Eternel ne sont pas épuisées, ses compassions ne sont pas à leur terme. Elles se renouvellent chaque matin. Oh! que ta fidélité est grande! L'Eternel est mon partage, dit mon âme; c'est pourquoi je veux espérer en lui. L'Eternel a de la bonté pour qui espère en lui, pour l'âme qui le cherche. Il est bon d'attendre en silence le secours de l'Eternel."30 ------------------------Chapitre 35 -- L'approche du jugement PR 323 1 Les premières années du règne de Jojakim furent caractérisées par de nombreuses prophéties annonçant l'approche du châtiment. Les paroles de Dieu prononcées par les prophètes étaient sur le point de s'accomplir. Au nord, la puissance assyrienne, si longtemps souveraine, allait cesser de s'exercer sur les nations. Au sud, l'Egypte, en qui le roi de Juda plaçait vainement sa confiance, subirait bientôt un échec décisif. Une nouvelle puissance, l'empire babylonien, surgissait brusquement à l'est, éclipsant rapidement toutes les autres. PR 323 2 En peu d'années, le roi de Babylone allait servir d'instrument à la colère divine pour châtier Juda impénitent. Les armées de Nebucadnetsar déferleraient sans cesse sur Jérusalem, qui serait tour à tour assiégée et prise par l'ennemi. D'abord en petit nombre, puis par milliers et dizaines de milliers, les Israélites seraient emmenés en captivité au pays de Schinear pour y être en exil. Jojakim, Sédécias seraient tour à tour les vassaux du roi de Babylone, et tour à tour ils se révolteraient contre lui. Des châtiments de plus en plus terribles s'abattraient sur la nation rebelle, jusqu'à ce qu'enfin elle soit réduite en un monceau de ruines. Jérusalem serait dévastée et livrée au feu; le temple bâti par Salomon, détruit. Le royaume de Juda s'écroulerait et ne retrouverait plus jamais parmi les royaumes de la terre sa situation primitive. PR 324 1 Ces temps de troubles, si menaçants pour la nation israélite, étaient annoncés par de nombreux messages divins délivrés au peuple par Jérémie. Dieu donnait ainsi grandement le temps aux enfants d'Israël de rompre leur alliance avec l'Egypte et d'éviter des contestations avec le roi de Babylone. PR 324 2 Alors que le danger se faisait plus imminent, le Seigneur instruisait le peuple par des paraboles frappantes, espérant ainsi éveiller chez lui le sentiment de ses obligations envers Dieu tout en l'encourageant à entretenir avec le gouvernement de Babylone des rapports cordiaux. PR 324 3 Pour illustrer l'importance d'une obéissance implicite aux exigences divines, Jérémie réunit des Récabites dans une chambre du temple, et il leur offrit du vin. Il fut reçu comme il s'y attendait, c'est-à-dire par un refus catégorique et des remontrances. "Nous ne buvons pas de vin, lui affirmèrent-ils avec assurance, car Jonadab, fils de Récab, notre père, nous a donné cet ordre: Vous ne boirez jamais de vin, ni vous, ni vos fils. ... Alors la parole de l'Eternel fut adressée à Jérémie, en ces mots: Ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Va, et dis aux hommes de Juda et aux habitants de Jérusalem: Ne recevrez-vous pas instruction pour obéir à mes paroles? dit l'Eternel. On a observé les paroles de Jonadab, fils de Récab, qui a ordonné à ses fils de ne pas boire du vin, et ils n'en ont point bu jusqu'à ce jour, parce qu'ils ont obéi à l'ordre de leur père."1 PR 324 4 Dieu cherchait ainsi à montrer le contraste frappant entre l'obéissance des Récabites et la révolte de son peuple. Les Récabites avaient obéi à l'ordre de leur père; ils avaient refusé de transgresser cet ordre. Mais les habitants de Juda n'écoutaient pas les paroles du Seigneur, et ils subiraient par conséquent les plus terribles châtiments. PR 324 5 "Je vous ai parlé dès le matin, et vous ne m'avez pas écouté, leur dit Jérémie de la part de Dieu. Je vous ai envoyé tous mes serviteurs, les prophètes, je les ai envoyés dès le matin, pour vous dire: Revenez chacun de votre mauvaise voie, amendez vos actions, n'allez pas après d'autres dieux pour les servir, et vous resterez dans le pays que j'ai donné à vous et à vos pères. Mais vous n'avez pas prêté l'oreille, vous ne m'avez pas écouté. Oui, les fils de Jonadab, fils de Récab, observent l'ordre que leur a donné leur père, et ce peuple ne m'écoute pas! C'est pourquoi, ainsi parle l'Eternel, le Dieu des armées, le Dieu d'Israël: Voici, je vais faire venir sur Juda et sur tous les habitants de Jérusalem tous les malheurs que j'ai annoncés sur eux, parce que je leur ai parlé et qu'ils n'ont pas écouté, parce que je les ai appelés et qu'ils n'ont pas répondu."2 PR 325 1 Lorsque les hommes sont touchés par l'influence du Saint-Esprit, ils tiennent compte des conseils que leur donne le Seigneur. Mais s'ils rejettent les avertissements et si leur coeur s'endurcit, Dieu permet qu'ils subissent des influences néfastes. En se détournant de la vérité, ils acceptent le mensonge qui devient pour eux un piège. PR 325 2 Dieu avait supplié Juda de ne pas provoquer sa colère, mais il refusa de l'écouter. Finalement, la sentence fut prononcée à son égard. Il serait emmené en captivité à Babylone; les Chaldéens allaient être l'instrument dont le Seigneur se servirait pour châtier son peuple rebelle. Les souffrances de Juda seraient proportionnées aux lumières qu'il avait reçues et aux avertissements rejetés. Dieu avait retardé pendant longtemps ses châtiments, mais il manifesterait maintenant son courroux pour arrêter son peuple rebelle sur la mauvaise voie. Une bénédiction perpétuelle avait été promise aux Récabites. Le prophète avait déclaré: "Parce que vous avez obéi aux ordres de Jonadab, votre père, parce que vous avez observé tous ses commandements et fait tout ce qu'il vous a prescrit; à cause de cela, ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Jonadab, fils de Récab, ne manquera jamais de descendants qui se tiennent en ma présence."3 Le Seigneur enseignait ainsi à son peuple que la fidélité et l'obéissance rejailliraient sur Juda en bénédictions, comme les Récabites avaient été bénis pour avoir obéi aux ordres de leur père. PR 326 1 Cette leçon est aussi pour nous aujourd'hui. Si les exigences d'un bon et sage père, usant des moyens les meilleurs et les plus efficaces pour préserver sa postérité des maux de l'intempérance, étaient dignes d'une stricte obéissance, l'autorité de Dieu devrait certainement être reconnue avec une révérence plus grande encore, puisque le Seigneur est plus saint qu'un homme. Notre Créateur et notre Maître, au pouvoir infini, au jugement terrible, s'efforce par tous les moyens d'amener les hommes à reconnaître leurs péchés et à s'en repentir. Par la bouche de ses serviteurs, il prédit les dangers qu'engendre la désobéissance, il fait résonner le cri d'alarme et dénonce impitoyablement le péché. Ce n'est que grâce à sa miséricorde et aux soins vigilants de ses serviteurs que la prospérité est assurée à son peuple. Il ne peut soutenir et garder ceux qui rejettent ses conseils et méprisent ses avertissements. Pendant un certain temps, il diffère les châtiments que nous méritons, mais il ne saurait le faire indéfiniment. PR 326 2 Les enfants de Juda étaient de ceux dont Dieu avait dit: "Vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte."4 Au cours de son ministère, Jérémie ne perdit jamais de vue l'importance vitale de la sainteté dans les diverses activités de la vie quotidienne, et notamment dans le service divin. Il prévoyait nettement la chute du royaume de Juda et la dispersion de ses habitants parmi les nations. Mais avec l'oeil de la foi, il apercevait au-delà des tribulations le moment de la restauration. Cette promesse divine résonnait à ses oreilles: "Je rassemblerai le reste de mes brebis de tous les pays où je les ai chassées; je les ramènerai dans leur pâturage. ... Voici, les jours viennent, dit l'Eternel, où je susciterai à David un germe juste; il régnera en roi et prospérera, il pratiquera la justice et l'équité dans le pays. En son temps, Juda sera sauvé, Israël aura la sécurité dans sa demeure; et voici le nom dont on l'appellera: L'ETERNEL NOTRE JUSTICE."5 PR 326 3 Ainsi, l'annonce d'un prochain châtiment se mêlait-elle aux promesses d'une glorieuse délivrance. Ceux qui choisiraient de faire la paix avec Dieu et se conduiraient saintement au sein de l'apostasie, auraient la force d'affronter l'épreuve et seraient rendus capables de témoigner pour Dieu avec puissance. La délivrance qu'ils connaîtraient un jour serait plus glorieuse encore que celle accordée aux enfants d'Israël au moment de l'Exode. Les jours viendront, déclarait le Seigneur par son prophète, "où l'on ne dira plus: L'Eternel est vivant, lui qui a fait monter du pays d'Egypte les enfants d'Israël! Mais on dira: L'Eternel est vivant, lui qui a fait monter et qui a ramené la postérité de la maison d'Israël du pays du septentrion et de tous les pays où je les avais chassés! Et ils habiteront dans leur pays."6 PR 327 1 Telles étaient les magnifiques prophéties de Jérémie à la fin de l'histoire du royaume de Juda, alors que les Babyloniens allaient dominer l'univers entier et que leurs armées faisaient le siège de Sion. Comme la musique la plus mélodieuse, ces promesses de délivrance retentissaient aux oreilles de ceux qui étaient restés fidèles au culte du vrai Dieu. Chez les humbles comme chez les grands, partout où l'on révérait encore l'alliance avec le Seigneur, les paroles du prophète étaient sans cesse répétées. Les enfants eux-mêmes en étaient profondément remués, et ces promesses s'imprimaient d'une façon durable dans leurs jeunes cerveaux. PR 327 2 C'est l'observation consciencieuse des commandements de l'Ecriture qui, aux jours de Jérémie, permit à Daniel et à ses compagnons d'exalter le vrai Dieu devant les royaumes du monde. L'éducation que ces jeunes hébreux avaient reçue dans leur famille les affermit dans la foi, et les aida à servir fidèlement le Dieu vivant, le Créateur des cieux et de la terre. Lorsque, au début du règne de Jojakim, Nebucadnetsar assiégea et prit Jérusalem pour la première fois, il emmena en captivité Daniel et ses compagnons, ainsi que d'autres jeunes gens particulièrement doués pour servir à la cour de Babylone. Mais la foi de ces jeunes prisonniers fut mise à rude épreuve. C'est alors que ceux qui avaient appris à se confier dans les promesses divines trouvèrent les forces nécessaires pour affronter les difficultés qu'ils rencontrèrent en pays étranger. Les saintes Ecritures furent pour eux un guide et un soutien. PR 327 3 Tandis qu'il interprétait la portée des jugements qui commençaient à s'abattre sur Juda, Jérémie défendait noblement la justice de Dieu et ses desseins miséricordieux, même dans ses châtiments les plus cruels. Désireux d'atteindre toutes les classes, le prophète étendait sa sphère d'influence au-delà de Jérusalem, par de fréquentes visites aux différentes parties du royaume. Dans ses déclarations, Jérémie se reportait sans cesse aux enseignements du livre de la loi qui avait été si magnifiquement honoré et exalté sous le règne de Josias. Il insistait sur l'importance de la fidélité envers le Seigneur compatissant et miséricordieux qui, du haut du Sinaï, avait donné les préceptes du Décalogue. Les paroles d'avertissement et d'exhortation de Jérémie atteignirent les extrémités du royaume, et tous les habitants eurent ainsi l'occasion de connaître la volonté de Dieu à l'égard de la nation. PR 328 1 Le prophète insistait particulièrement sur le fait que le Père céleste envoie ses châtiments, afin que "les peuples sachent qu'ils sont des hommes."7 "Si vous me résistez et ne voulez point m'écouter, déclarait le Seigneur, ... je vous disperserai parmi les nations, et je tirerai l'épée après vous. Votre pays sera dévasté, et vos villes seront désertes."8 PR 328 2 Au moment même où des messages annonçant un châtiment imminent étaient adressés aux princes et au peuple, le roi de Juda, Jojakim, qui aurait dû être un chef spirituel avisé, le promoteur de la confession des péchés, de la réforme et des bonnes oeuvres, passait son temps dans les plaisirs égoïstes. "Je me bâtirai une maison vaste, et des chambres spacieuses", disait-il. Et il proposait d'y faire "percer des fenêtres", de les faire lambrisser "de cèdre" et de les peindre "en couleur rouge".9 Cette maison serait construite avec de l'argent provenant de la fraude et de l'oppression. PR 328 3 La colère du prophète s'enflamma, et l'Esprit le poussa à prononcer un jugement contre le monarque infidèle. "Malheur, dit-il, à celui qui bâtit sa maison par l'injustice, et ses chambres par l'iniquité, qui fait travailler son prochain sans le payer, sans lui donner son salaire. ... Est-ce que tu règnes, parce que tu as de la passion pour le cèdre? Ton père ne mangeait-il pas, ne buvait-il pas? Mais il pratiquait la justice et l'équité, et il fut heureux. ... N'est-ce pas là me connaître? dit l'Eternel. Mais tu n'as des yeux et un coeur que pour te livrer à la cupidité, pour répandre le sang innocent, et pour exercer l'oppression et la violence. C'est pourquoi ainsi parle l'Eternel sur Jojakim, fils de Josias, roi de Juda: On ne le pleurera pas, en disant: Hélas, mon frère! hélas, ma soeur! On ne le pleurera pas, en disant: Hélas, seigneur! hélas, sa majesté! Il aura la sépulture d'un âne, il sera traîné et jeté hors des portes de Jérusalem."10 PR 329 1 Ce terrible châtiment allait s'abattre sur Jojakim dans peu de temps. Mais le Seigneur miséricordieux en informait d'abord la nation impénitente. La quatrième année du règne de Jojakim, Jérémie parla "devant tout le peuple de Juda et devant tous les habitants de Jérusalem". Il déclara que pendant plus de vingt ans, "depuis la treizième année de Josias",11 jusqu'à ce jour, il n'avait cessé de dire que Dieu désirait sauver son peuple, mais que ses messages avaient été méprisés. Or voici la parole que le Seigneur leur adressait maintenant: "Ainsi parle l'Eternel des armées: Parce que vous n'avez point écouté mes paroles, j'enverrai chercher tous les peuples du septentrion, dit l'Eternel, et j'enverrai auprès de Nebucadnetsar, roi de Babylone, mon serviteur; je le ferai venir contre ce pays et contre ses habitants, et contre toutes ces nations à l'entour, afin de les dévouer par interdit, et d'en faire un objet de désolation et de moquerie, des ruines éternelles. Je ferai cesser parmi eux les cris de réjouissance et les cris d'allégresse, les chants du fiancé et les chants de la fiancée, le bruit de la meule et la lumière de la lampe. Tout ce pays deviendra une ruine, un désert, et ces nations seront asservies au roi de Babylone pendant soixante et dix ans."12 PR 329 2 Bien que les motifs du jugement aient été clairement énoncés, sa terrible signification ne pouvait être comprise que difficilement par les multitudes. Pour produire une impression plus profonde, Dieu essaya d'illustrer le sens des mots prononcés. Il ordonna à Jérémie de comparer le sort du royaume à une coupe remplie du vin de sa colère, et à laquelle auraient bu toutes les nations. Les premiers qui avaient bu à cette coupe étaient "Jérusalem, les villes de Juda, les rois et les chefs". D'autres devaient faire de même: "Pharaon, roi d'Egypte, ses serviteurs, ses chefs et tout son peuple", ainsi que beaucoup d'autres nations, jusqu'à ce que les desseins de Dieu fussent accomplis.13 PR 330 1 Pour mieux illustrer la nature des jugements qui approchaient rapidement, le prophète reçut l'ordre de prendre avec lui "des anciens du peuple et des anciens des sacrificateurs" et de se rendre "dans la vallée de Ben-Hinnom". Là, après avoir retracé l'apostasie de Juda, il devait briser "le vase de terre" du potier, et déclarer de la part du Seigneur dont il était le serviteur: "C'est ainsi que je briserai ce peuple et cette ville, comme on brise un vase de potier, sans qu'il puisse être rétabli." PR 330 2 Le prophète fit ce qui lui était commandé. Puis, lorsqu'il revint à Jérusalem, il se tint dans le parvis de la maison de Dieu, et il dit à tout le peuple: "Ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Voici, je vais faire venir sur cette ville et sur toutes les villes qui dépendent d'elle tous les malheurs que je lui ai prédits, parce qu'ils ont raidi leur cou, pour ne point écouter mes paroles."14 PR 330 3 Au lieu de provoquer la confession des péchés et la repentance, ces paroles suscitèrent la colère des chefs, et en conséquence Jérémie fut incarcéré. Privé de sa liberté, le prophète n'en continua pas moins à transmettre les messages du ciel à ceux qui se trouvaient près de lui. Sa voix ne pouvait être étouffée par la persécution. La parole de vérité, disait-il, est "dans mon coeur comme un feu dévorant qui est renfermé dans mes os. Je m'efforce de la contenir, et je ne le puis."15 PR 330 4 C'est vers cette époque que Dieu ordonna à Jérémie de transcrire les messages qu'il désirait faire connaître à ceux dont il souhaitait ardemment le salut. "Prends un livre, lui dit-il, et tu écriras toutes les paroles que je t'ai dites sur Israël et sur Juda, et sur toutes les nations, depuis le jour où je t'ai parlé, au temps de Josias, jusqu'à ce jour. Quand la maison de Juda entendra tout le mal que je pense lui faire, peut-être reviendront-ils chacun de leur mauvaise voie; alors je pardonnerai leur iniquité et leur péché."16 PR 330 5 Obéissant à cet ordre, Jérémie appela à son aide un ami fidèle, Baruc, le scribe, et il lui dicta "toutes les paroles que l'Eternel lui avait dites".17 Ces paroles furent soigneusement écrites sur un rouleau de parchemin et constituèrent un reproche solennel contre le péché, un avertissement au sujet des résultats inévitables dus à une apostasie ininterrompue, et une exhortation à renoncer au mal. PR 331 1 Lorsque le livre fut complet, Jérémie, toujours prisonnier, envoya Baruc lire le rouleau à la multitude assemblée au temple, le jour du jeûne national, "la cinquième année de Jojakim, fils de Josias, roi de Juda, le neuvième mois". "Peut-être, dit le prophète, l'Eternel écoutera-t-il leurs supplications, et reviendront-ils chacun de leur mauvaise voie; car grande est la colère, la fureur dont l'Eternel a menacé ce peuple."18 PR 331 2 Baruc obéit à l'ordre du prophète, et il lut le rouleau au peuple. Il le lut ensuite aux princes. Ceux-ci l'écoutèrent avec le plus grand intérêt, et ils promirent d'en parler au roi. Ils conseillèrent toutefois au scribe de se cacher, car ils craignaient que le monarque ne rejette ce message et ne cherche à faire périr ceux qui l'avaient rédigé et délivré. PR 331 3 Lorsque Jojakim fut mis au courant par les princes de ce que Baruc avait lu, il ordonna immédiatement qu'on apportât le rouleau en question et qu'on lui en fasse la lecture. Jehudi, l'un des serviteurs du roi, alla chercher le rouleau et commença à lire les reproches et les avertissements qu'il contenait. Ceci se passait en hiver. Le roi et ses conseillers, les princes de Juda, tous étaient réunis autour de la flamme d'un brasier. A l'ouïe des premières phrases, le roi, loin de trembler à l'approche du danger qui le menaçait, lui et son peuple, s'empara du rouleau, et avec une rage frénétique "coupa le livre avec le canif du secrétaire, et le jeta dans le feu du brasier, où il fut entièrement consumé."19 Ni lui ni ses serviteurs ne furent effrayés, "et ne déchirèrent leurs vêtements". Cependant, quelques princes "avaient fait des instances auprès du roi pour qu'il ne brûlât pas le livre; mais il ne les écouta pas". Le livre détruit, la colère du roi s'enflamma contre Jérémie et Baruc, et le monarque ordonna qu'on les fît saisir. "Mais l'Eternel les cacha."20 PR 331 4 En attirant l'attention des adorateurs du temple, des princes et du roi sur les avertissements contenus dans le livre inspiré, Dieu, dans sa bonté, cherchait à leur faire du bien. "Quand la maison de Juda, dit-il, entendra tout le mal que je pense lui faire, peut-être reviendront-ils chacun de leur mauvaise voie; alors je pardonnerai leur iniquité et leur péché."21 PR 332 1 Dieu a pitié des hommes qui luttent dans les ténèbres de la perversité. Il cherche à éclairer leur intelligence obscurcie en leur adressant des reproches et des menaces, afin de leur faire sentir leur ignorance et les amener à déplorer leurs erreurs. Il s'efforce d'aider les présomptueux à se méfier de leurs vaines connaissances, et à rechercher la bénédiction spirituelle par une communion intime avec le ciel. Le dessein de Dieu ne consiste pas à envoyer des messagers aux pécheurs pour les flatter et leur être agréables, pas plus qu'à leur délivrer des messages de paix qui les laisseront sommeiller dans une sécurité charnelle; mais, au contraire, à placer un poids qui pèsera sur leur conscience et, comme une flèche acérée, transpercera leur âme et les convaincra de péché. Les anges leur présentent les terribles jugements de Dieu pour leur faire sentir leur pauvreté spirituelle et les amener à se poser la question: "Que faut-il que je fasse pour être sauvé?"22 Mais celui qui humilie jusque dans la poussière, qui couvre de honte l'orgueil et l'ambition, qui condamne le péché, est aussi celui qui relève l'âme repentante. S'il permet le châtiment, c'est avec la plus profonde affection qu'il interroge: "Que veux-tu que je fasse pour toi?" PR 332 2 Quand un homme a péché contre le Dieu miséricordieux et saint, il ne peut suivre une ligne de conduite plus noble que celle qui consiste à se repentir sincèrement de ses erreurs et à les confesser avec larmes. C'est ce que Dieu réclame de lui; il n'accepte rien d'autre qu'un coeur brisé et un esprit contrit. Mais Jojakim et ses princes, dans leur arrogance et leur orgueil, refusèrent l'invitation divine. Ils ne voulurent tenir compte ni de l'avertissement, ni de l'offre à la repentance qui leur étaient adressés. L'occasion qu'ils avaient eue au moment où le livre fut brûlé était leur dernière chance. Dieu avait déclaré que s'ils refusaient à cet instant d'écouter sa voix, il leur infligerait une terrible punition. Or ils avaient refusé de l'entendre et Dieu prononça son jugement final contre Juda. Il manifesterait une colère particulière à l'égard de l'homme qui s'était élevé avec orgueil au-dessus du Tout-Puissant. PR 333 1 "C'est pourquoi, ainsi parle l'Eternel sur Jojakim, roi de Juda: Aucun des siens ne sera assis sur le trône de David, et son cadavre sera exposé à la chaleur pendant le jour et au froid pendant la nuit. Je le châtierai, lui, sa postérité, et ses serviteurs, à cause de leur iniquité, et je ferai venir sur eux, sur les habitants de Jérusalem et sur les hommes de Juda tous les malheurs dont je les ai menacés."23 PR 333 2 La destruction du rouleau ne mit pas un terme aux avertissements divins. Il était plus facile de se débarrasser des paroles écrites que des reproches et des avertissements qu'elles contenaient, ainsi que de la menace du châtiment tout proche dont avait parlé le Seigneur au sujet de la nation rebelle. Mais ce rouleau même fut reproduit. Dieu dit à son serviteur: "Prends de nouveau un autre livre, et tu y écriras toutes les paroles qui étaient dans le premier livre qu'a brûlé Jojakim, roi de Juda." Le document contenant les prophéties relatives à Juda avait été anéanti, mais, "comme un feu dévorant", elles étaient toujours vivantes au coeur de Jérémie. Il fut permis au prophète de reproduire ce que la colère de l'homme avait si délibérément détruit. PR 333 3 Jérémie prit un autre rouleau qu'il donna à Baruc. Celui-ci y "écrivit, sous la dictée de Jérémie, toutes les paroles du livre qu'avait brûlé au feu Jojakim, roi de Juda. Beaucoup d'autres paroles semblables y furent encore ajoutées."24 La colère de l'homme avait essayé de ruiner l'influence du prophète; mais grâce à cette suppression du rouleau par Jojakim les exigences divines allaient être mieux connues. PR 333 4 Cet esprit de révolte à l'égard des reproches, qui suscita la persécution et l'emprisonnement de Jérémie, règne encore de nos jours. Qu'ils sont nombreux les hommes qui refusent de tenir compte des avertissements répétés! Ils préfèrent écouter les faux docteurs dont les paroles flatteuses bercent leur vanité et glissent sur leur mauvaise conduite. Pendant le temps de détresse, ces personnes ne trouveront aucun refuge, aucun secours divin. Les serviteurs de Dieu supporteront avec courage et patience les épreuves et les tribulations qui s'abattront sur eux par suite des reproches, de l'oubli et des faux rapports. Ils continueront à s'acquitter fidèlement de la tâche que Dieu leur a confiée, et ils se souviendront que les prophètes du passé, le Sauveur lui-même et les apôtres ont subi, eux aussi, les injures et les persécutions pour l'amour de la sainte Parole. PR 334 1 Dieu désirait que Jojakim tienne compte des conseils de Jérémie, qu'il parvienne ainsi à gagner la faveur de Nebucadnetsar et à échapper en même temps à de grandes tribulations. Le jeune roi avait traité une alliance avec le monarque babylonien. S'il était resté fidèle à sa parole, il aurait imposé le respect aux païens et contribué ainsi à amener de nombreuses âmes à la conversion. Mais le roi de Juda méprisa les privilèges extraordinaires qui lui étaient accordés, et il suivit volontairement sa propre voie. Il viola la parole d'honneur qu'il avait donnée au roi de Babylone, et il se révolta, ce qui le plaça, lui et son royaume, en fâcheuse posture. "Alors l'Eternel envoya contre Jojakim des troupes de Chaldéens, des troupes de Syriens, des troupes de Moabites et des troupes d'Ammonites",25 et il fut impuissant à préserver son pays des ravages de ces envahisseurs. PR 334 2 Le règne désastreux de ce monarque prit fin peu de temps après. Couvert d'ignominie, rejeté du ciel, détesté par son peuple et méprisé par tous les gouverneurs de Babylone dont il avait trahi la confiance, ainsi finit Jojakim. Telles furent les conséquences de l'erreur fatale qu'il commit en rejetant les desseins de Dieu révélés par son messager. PR 334 3 Jojakin".,26 fils de Jojakim, ne régnait que depuis trois mois et dix jours lorsqu'il se rendit aux armées chaldéennes que la révolte du roi de Juda avait amenées, une fois de plus, aux portes de Jérusalem. Cette fois, Nebucadnetsar "emmena captifs de Jérusalem à Babylone la mère du roi, les femmes du roi et ses eunuques, et les grands du pays", au nombre de plusieurs milliers, avec "les charpentiers et les serruriers au nombre de mille". Avec eux, le roi de Babylone prit "tous les trésors de la maison de l'Eternel et les trésors de la maison du roi."27 PR 334 4 Le royaume de Juda subsista, cependant, en tant que gouvernement indépendant. Nebucadnetsar plaça à sa tête Matthania, l'un des derniers fils de Josias, dont il changea le nom en celui de Sédécias. ------------------------Chapitre 36 -- Le dernier roi de Juda PR 335 1 Au début de son règne, Sédécias jouissait de toute la confiance du roi de Babylone, et avait comme conseiller éprouvé le prophète Jérémie. Si ce monarque s'était comporté honorablement avec les Babyloniens, s'il avait écouté les messages du prophète, il aurait pu imposer le respect chez un grand nombre d'hommes puissants, et eu l'occasion de leur faire connaître le vrai Dieu. Ceux qui étaient déjà captifs à Babylone auraient ainsi joui d'une certaine liberté. Le nom de Dieu aurait été honoré partout, et les Israélites qui restaient en Palestine auraient évité les terribles calamités qui allaient finalement s'abattre sur eux. PR 335 2 Jérémie avait recommandé à Sédécias et à tout Juda, y compris les captifs de Babylone, de se soumettre docilement au régime temporaire de leurs conquérants. Il importait particulièrement pour ceux qui vivaient en captivité de rechercher la paix du pays où ils étaient en exil. Mais cette recommandation était contraire au coeur humain, et Satan, profitant des circonstances, suscita des faux prophètes parmi le peuple, à Jérusalem et à Babylone. Ces faux prophètes annoncèrent que le joug de la servitude serait bientôt brisé et l'ancien prestige de Juda rétabli. PR 336 1 Si ces prophéties agréables avaient été écoutées, elles auraient produit de fâcheuses réactions chez le roi et les captifs et ils auraient été ainsi frustrés des desseins miséricordieux du Seigneur. De crainte qu'une insurrection n'éclate et que de grandes souffrances n'en découlent, Dieu ordonna à Jérémie de faire face immédiatement à la crise en avertissant le roi de Juda des conséquences inévitables qui s'ensuivraient. Des lettres furent envoyées aux captifs pour les mettre en garde contre ceux qui leur assuraient que leur délivrance était proche. "Ne vous laissez pas tromper par vos prophètes qui sont au milieu de vous, et par vos devins, disait Jérémie; n'écoutez pas vos songeurs dont vous provoquez les songes!"1 Et il leur expliquait les desseins de Dieu relatifs à la restauration d'Israël, qui aurait lieu à la fin des soixante-dix ans de la captivité. PR 336 2 Avec quelle tendre sollicitude le Seigneur faisait part aux captifs de ses intentions à l'égard d'Israël! Il savait que si les faux prophètes persuadaient le peuple de sa rapide délivrance, la position de ce dernier à Babylone deviendrait très critique. Toute manifestation, toute insurrection de sa part éveillerait la vigilance et la rigueur des autorités chaldéennes qui restreindraient davantage encore la liberté des captifs, ce qui provoquerait de nouvelles souffrances. Le Seigneur désirait que les Israélites se soumettent docilement à leur triste sort, et rendent leur servitude aussi agréable que possible. "Bâtissez des maisons, et habitez-les, leur conseillait-il; plantez des jardins, et mangez-en les fruits. ... Recherchez le bien de la ville où je vous ai menés en captivité, et priez l'Eternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien."2 PR 336 3 Parmi les faux docteurs de Babylone se trouvaient deux hommes qui se disaient saints, mais dont la vie était loin d'être irréprochable. Jérémie réprouva leur conduite et les mit en garde contre le danger qu'ils couraient. Irrités par ces remontrances, ils cherchèrent à s'opposer à l'oeuvre du prophète en poussant le peuple à discréditer ses paroles et à agir contrairement à ce que Dieu avait conseillé au sujet de leur soumission au roi de Babylone. Le Seigneur fit connaître par Jérémie que ces faux prophètes seraient livrés entre les mains de Nebucadnetsar et qu'ils seraient massacrés sous ses yeux, ce qui arriva peu de temps après. PR 337 1 A la fin des temps, on verra aussi des hommes s'élever pour créer la confusion et la révolte parmi ceux qui se disent représentants du vrai Dieu. Ces prophètes de mensonge enseigneront aux autres à considérer le péché à la légère, et lorsque les résultats funestes de leurs mauvaises actions se feront sentir, ils s'efforceront d'en rendre responsable celui qui les en a fidèlement avertis, tout comme les Juifs accusaient Jérémie du mauvais destin qui leur était réservé. Mais aussi sûrement que les paroles du Seigneur, prononcées par son prophète, se trouvèrent jadis justifiées, aussi sûrement la certitude de ses messages s'affirmera de nos jours. PR 337 2 Jérémie avait toujours adopté une attitude raisonnable en conseillant la soumission aux Babyloniens, non seulement à Juda, mais aussi à plusieurs nations voisines. Dans les premières années du règne de Sédécias, des ambassadeurs des rois d'Edom, de Moab, de Tyr et d'autres royaumes vinrent trouver le roi de Juda pour lui demander s'il jugeait le moment propice de participer ensemble à une révolte contre le roi de Babylone. Mais alors que ces ambassadeurs attendaient la réponse de Sédécias, la parole de Dieu vint à Jérémie: "Fais-toi des liens et des jougs, et mets-les sur ton cou. Envoie-les au roi d'Edom, au roi de Moab, au roi des enfants d'Ammon, au roi de Tyr et au roi de Sidon, par les envoyés qui sont venus à Jérusalem auprès de Sédécias, roi de Juda."3 PR 337 3 Jérémie avait reçu l'ordre de faire connaître aux ambassadeurs que Dieu les avait tous livrés entre les mains de Nebucadnetsar, roi de Babylone, et qu'ils lui seraient soumis, "à lui, à son fils, et au fils de son fils, jusqu'à ce que le temps de son pays arrive".4 PR 337 4 De plus, les ambassadeurs devaient dire à leurs monarques, que, s'ils refusaient de servir le roi de Babylone, ils seraient châtiés, "par l'épée, par la famine et par la peste", jusqu'à ce qu'ils soient exterminés. Ils devaient surtout se détourner de l'enseignement des faux prophètes qui leur donnaient le conseil contraire. "N'écoutez pas vos prophètes, déclarait le Seigneur, vos devins, vos songeurs, vos astrologues, vos magiciens, qui vous disent: Vous ne serez point asservis au roi de Babylone! Car c'est le mensonge qu'ils vous prophétisent, afin que vous soyez éloignés de votre pays, afin que je vous chasse et que vous périssiez. Mais la nation qui pliera son cou sous le joug du roi de Babylone, et qui lui sera soumise, je la laisserai dans son pays, dit l'Eternel, pour qu'elle le cultive et qu'elle y demeure."5 Le plus léger châtiment qu'un Dieu miséricordieux pouvait infliger à un peuple rebelle consistait à se soumettre au roi de Babylone. Mais si ce peuple se révoltait contre cette servitude, il subirait toute la rigueur du châtiment divin. PR 338 1 L'étonnement des nations, réunies en assemblée, fut à son comble lorsque Jérémie, chargé du joug de la servitude, leur fit connaître la volonté divine. Le prophète lutta farouchement contre une opposition organisée et en faveur d'une politique de soumission. Parmi ceux qui osèrent contredire le conseil de Dieu, il faut citer Hanania, l'un des faux prophètes contre lesquels le peuple avait été mis en garde. Croyant s'assurer la faveur du roi et de la cour, il protesta en disant que Dieu lui avait donné des paroles d'encouragement pour les Israélites. "Ainsi parle l'Eternel des armées, déclara-t-il, le Dieu d'Israël: Je brise le joug du roi de Babylone! Encore deux années, et je fais revenir dans ce lieu tous les ustensiles de la maison de l'Eternel, que Nebucadnetsar, roi de Babylone, a enlevés de ce lieu, et qu'il a emportés à Babylone. Et je ferai revenir dans ce lieu, dit l'Eternel, Jeconia, fils de Jojakim, roi de Juda, et tous les captifs de Juda, qui sont allés à Babylone; car je briserai le joug du roi de Babylone."6 PR 338 2 Jérémie supplia alors les prêtres et le peuple de se soumettre au roi de Babylone pendant le temps fixé par Dieu. Il pria les hommes de Juda de se reporter aux paroles d'Osée, d'Habakuk, de Sophonie, ainsi qu'à celles des autres prophètes dont les messages de reproches et d'avertissements étaient conformes aux siens. Il leur rappela les événements qui s'étaient déroulés en accord avec les prophéties relatives au châtiment des péchés non confessés. Les jugements divins, dans le passé, s'étaient abattus sur les pécheurs conformément à ce qui avait été prédit par ses messagers. PR 339 1 "Si un prophète prophétise la paix, concluait Jérémie, c'est par l'accomplissement de ce qu'il prophétise qu'il sera reconnu comme véritablement envoyé par l'Eternel."7 Si Israël préférait se risquer dans une aventure, les événements se chargeraient bientôt de montrer quel était le vrai prophète. Les paroles de Jérémie qui conseillaient la soumission poussèrent Hanania à mettre en doute la véracité de ces déclarations. S'emparant du joug symbolique, placé sur le cou de Jérémie, il le brisa, en disant: "Ainsi parle l'Eternel: C'est ainsi que, dans deux années, je briserai de dessus le cou de toutes les nations le joug de Nebucadnetsar, roi de Babylone. Et Jérémie, le prophète, s'en alla."8 Il ne pouvait, en effet, faire autrement que de se retirer. Mais il reçut de Dieu un nouveau message: "Va, et dis à Hanania: Ainsi parle l'Eternel: Tu as brisé un joug de bois, et tu auras à sa place un joug de fer. Car ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Je mets un joug de fer sur le cou de toutes ces nations, pour qu'elles soient asservies à Nebucadnetsar, roi de Babylone, et elles lui seront asservies. ... Et Jérémie, le prophète, dit à Hanania, le prophète: Ecoute, Hanania! L'Eternel ne t'a point envoyé, tu inspires à ce peuple une fausse confiance. C'est pourquoi ainsi parle l'Eternel: Voici, je te chasse de la terre; tu mourras cette année; car tes paroles sont une révolte contre l'Eternel. Et Hanania, le prophète, mourut cette année-là, dans le septième mois."9 PR 339 2 Le faux prophète avait renforcé chez le peuple son sentiment d'incrédulité à l'égard de Jérémie et de son message. Il s'était déclaré avec arrogance l'envoyé de Dieu; il fut en conséquence puni de mort. Au cinquième mois de cette année, Jérémie avait prophétisé la mort d'Hanania; le septième mois sa prédiction s'accomplissait. PR 339 3 L'agitation causée par les déclarations des faux prophètes fit soupçonner Sédécias de trahison; ce ne fut que par une habile manoeuvre de sa part qu'il put continuer à régner en vassal. Cette occasion lui fut offerte peu de temps après le retour de Jérusalem des ambassadeurs auprès des nations voisines, alors que le roi de Juda accompagnait Seraja, "premier chambellan".10 Au cours de cette visite à la cour de Chaldée, Sédécias renouvela son serment de fidélité à Nebucadnetsar. PR 340 1 Le monarque babylonien avait été instruit par Daniel et d'autres captifs hébreux du pouvoir et de l'autorité souveraine du vrai Dieu. Aussi, lorsque Sédécias lui promit à nouveau de lui rester fidèle, il lui demanda de le jurer au nom du Dieu d'Israël. Si Sédécias avait respecté ce serment, sa fidélité aurait exercé une profonde influence sur l'esprit des hommes qui observaient la conduite de ceux qui prétendaient honorer le Dieu des Hébreux. PR 340 2 Mais le roi de Juda perdit de vue l'insigne privilège qui lui était accordé de glorifier le nom du vrai Dieu. L'Ecriture nous rapporte que Sédécias "fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel, son Dieu; et il ne s'humilia point devant Jérémie, le prophète, qui lui parlait de la part de l'Eternel. Il se révolta même contre le roi Nebucadnetsar, qui l'avait fait jurer par le nom de Dieu, et il raidit son cou et endurcit son coeur, au point de ne pas retourner à l'Eternel, le Dieu d'Israël."11 PR 340 3 Tandis que Jérémie continuait à rendre son témoignage dans le royaume de Juda, le prophète Ezéchiel surgissait parmi les captifs de Babylone pour avertir et réconforter les malheureux exilés. Il confirmait en même temps la parole de Dieu prononcée par Jérémie. Au cours des dernières années du règne de Sédécias, Ezéchiel insista sur la folie dont faisaient preuve ceux qui ajoutaient foi aux fausses prédictions entretenant dans le coeur des captifs l'espoir d'un retour prochain à Jérusalem. Ezéchiel fut aussi chargé de prédire, par une multitude de symboles et de messages solennels, le siège de Jérusalem et la destruction totale de cette ville. PR 340 4 La sixième année du règne de Sédécias, Dieu révéla dans une vision à Ezéchiel les abominations qui se commettaient à Jérusalem aux portes du temple et jusque dans le parvis. Des salles remplies de statues et d'images d'idoles peintes sur les murs, "toutes sortes de figures de reptiles et de bêtes abominables, et toutes les idoles de la maison d'Israël"12 défilèrent rapidement devant les yeux étonnés du prophète. PR 341 1 Ceux qui auraient dû être les conducteurs spirituels du peuple, "les anciens de la maison d'Israël", au nombre de soixante-dix, offraient de l'encens à ces idoles. "L'Eternel ne nous voit pas", disaient les hommes de Juda, alors qu'ils se livraient à leurs pratiques païennes. "L'Eternel a abandonné le pays",13 affirmaient-ils, le blasphème sur les lèvres. PR 341 2 Mais le prophète devait voir encore de "plus grandes abominations". "A l'entrée de la porte de la maison de l'Eternel", il lui fut montré "des femmes assises, qui pleuraient Thammuz", et "à l'entrée du temple de l'Eternel, entre le portique et l'autel, il y avait environ vingt-cinq hommes, tournant le dos au temple de l'Eternel et le visage vers l'orient; et ils se prosternaient à l'orient devant le soleil".14 PR 341 3 Alors le personnage glorieux qui accompagnait Ezéchiel dans cette vision bouleversante lui demanda: "Vois-tu, fils de l'homme? Est-ce trop peu pour la maison de Juda de commettre les abominations qu'ils commettent ici? Faut-il encore qu'ils remplissent le pays de violence, et qu'ils ne cessent de m'irriter? Voici, ils approchent le rameau de leur nez. Moi aussi, j'agirai avec fureur; mon oeil sera sans pitié, et je n'aurai point de miséricorde; quand ils crieront à voix haute à mes oreilles, je ne les écouterai pas."15 PR 341 4 Dieu avait déclaré par la bouche de Jérémie, au sujet des méchants qui osaient parler au peuple en son nom: "Prophètes et sacrificateurs sont corrompus; même dans ma maison j'ai trouvé leur méchanceté."16 PR 341 5 Dans la terrible accusation contre Juda, qui se lit dans le récit final du chroniqueur du règne de Sédécias, cette violation de la sainteté du temple est répétée: "Tous les chefs des sacrificateurs et le peuple, disait l'écrivain sacré, multiplièrent aussi les transgressions, selon toutes les abominations des nations; et ils profanèrent la maison de l'Eternel, qu'il avait sanctifiée à Jérusalem."17 PR 341 6 Le jour du jugement approchait rapidement pour Juda. Le peuple ne pouvait plus nourrir l'espoir d'échapper à son triste sort. "Et vous, vous resteriez impunis?"18 demandait le Seigneur. Mais ces paroles étaient accueillies avec dérision. Ils disaient: "Les jours se prolongent, et toutes les visions restent sans effet." Cependant, par la bouche d'Ezéchiel ce rejet de la parole infaillible de la prophétie était sévèrement censuré: "Dis-leur: Ainsi parle le Seigneur, l'Eternel: Je ferai cesser ces discours moqueurs; on ne les tiendra plus en Israël. Dis-leur, au contraire: Les jours approchent, et toutes les visions s'accompliront. Car il n'y aura plus de visions vaines, ni d'oracles trompeurs, au milieu de la maison d'Israël. Car moi, l'Eternel, je parlerai; ce que je dirai s'accomplira, et ne sera plus différé; oui, de vos jours, famille de rebelles, je prononcerai une parole et je l'accomplirai, dit le Seigneur, l'Eternel. PR 342 1 "La parole de l'Eternel, affirme encore Ezéchiel, me fut adressée en ces mots: Fils de l'homme, voici, la maison d'Israël dit: Les visions qu'il a ne sont pas près de s'accomplir; il prophétise pour des temps éloignés. C'est pourquoi dis-leur: Ainsi parle le Seigneur, l'Eternel: Il n'y aura plus de délai dans l'accomplissement de mes paroles; la parole que je prononcerai s'accomplira, dit le Seigneur, l'Eternel."19 PR 342 2 Sédécias fut le premier à entraîner le pays à sa ruine. En se détournant des conseils que le Seigneur lui avait donnés par ses prophètes, en oubliant ce qu'il devait à Nebucadnetsar, en violant le serment solennel qu'il avait fait au nom du Seigneur, le roi de Juda s'était révolté contre les prophètes, contre son bienfaiteur et contre Dieu. Grisé par sa propre sagesse, il se tourna vers l'ancien ennemi d'Israël pour lui demander son appui; il envoya "ses messagers en Egypte, pour qu'elle lui donnât des chevaux et un grand nombre d'hommes". "Réussira-t-il? demandait le Seigneur au sujet de celui qui trahissait ainsi ses obligations sacrées; échappera-t-il celui qui fait de telles choses? Il a rompu l'alliance, et il échapperait! Je suis vivant! dit le Seigneur, l'Eternel, c'est dans le pays du roi qui l'a fait régner, envers qui il a violé son serment et dont il a rompu l'alliance, c'est près de lui, au milieu de Babylone, qu'il mourra. Pharaon n'ira pas avec une grande armée et un peuple nombreux le secourir pendant la guerre. ... Il a méprisé le serment, il a rompu l'alliance; il avait donné sa main, et il a fait tout cela; il n'échappera pas!"20 PR 343 1 Le jour du règlement des comptes était venu pour le "profane, méchant prince d'Israël". "La tiare sera ôtée, déclarait Dieu, le diadème sera enlevé." Il ne sera pas permis à Juda d'avoir un autre roi jusqu'à ce que le Christ lui-même vienne établir son royaume. "J'en ferai une ruine, une ruine, une ruine", tel était le décret divin au sujet du trône de la maison de David. "Mais cela n'aura lieu qu'à la venue de celui à qui appartient le jugement et à qui je le remettrai."21 ------------------------Chapitre 37 -- La déportation à Babylone PR 345 1 La neuvième année du règne de Sédécias, "Nebucadnetsar, roi de Babylone, vint avec toute son armée contre Jérusalem" pour en faire le siège.1 La situation de Juda était désespérée. "Voici, j'en veux à toi", déclarait Dieu par la bouche d'Ezéchiel. "Moi, l'Eternel, j'ai tiré mon épée de son fourreau. Elle n'y rentrera plus. ... Tous les coeurs s'alarmeront, toutes les mains deviendront faibles, tous les esprits seront abattus, tous les genoux se fondront en eau. ... Je répandrai sur toi ma colère, je soufflerai contre toi avec le feu de ma fureur, et je te livrerai entre les mains d'hommes qui dévorent, qui ne travaillent qu'à détruire."2 PR 345 2 Les Egyptiens essayèrent de porter secours à la ville assiégée. Mais les Chaldéens, pour les en éloigner, se retirèrent momentanément de la capitale judéenne, remplissant ainsi d'espoir Sédécias qui envoya un messager à Jérémie pour lui demander d'intercéder auprès de Dieu en faveur de la nation. Le prophète répondit par de terribles paroles: les Chaldéens reviendraient, et brûleraient Jérusalem. Le sort avait été jeté: la nation impénitente ne pouvait plus éviter les jugements divins: "Ne vous faites pas illusion, dit le Seigneur à son peuple, en disant: les Chaldéens s'en iront loin de nous! car ils ne s'en iront pas. PR 346 1 "Et même quand vous battriez toute l'armée des Chaldéens qui vous font la guerre, quand il ne resterait d'eux que des hommes blessés, ils se relèveraient chacun dans sa tente, et brûleraient cette ville par le feu."3 Juda devait aller en captivité pour comprendre par l'adversité les leçons qu'il avait refusé d'apprendre dans des circonstances plus favorables. Il n'était accordé aucun sursis au décret du Gardien suprême. PR 346 2 Parmi les justes qui se trouvaient encore à Jérusalem et qui connaissaient les desseins de Dieu, quelques-uns étaient déterminés à placer hors d'atteinte des mains impitoyables de l'ennemi l'arche sainte contenant les tables de pierre sur lesquelles étaient gravés les préceptes du Décalogue. Ils réussirent à mettre leur projet à exécution. Tristes, versant des larmes, ils enlevèrent secrètement l'arche et la cachèrent dans une grotte. Elle devait rester là, dans cet endroit ignoré du peuple d'Israël et de Juda, à cause de leurs péchés; et elle ne leur serait plus jamais restituée. Cette arche sainte est toujours cachée; elle n'a jamais été déplacée depuis lors. PR 346 3 Pendant de nombreuses années, Jérémie s'était dressé devant le peuple comme le témoin fidèle du Seigneur. Or, maintenant que la malheureuse ville allait tomber aux mains des païens, il considérait son oeuvre comme achevée, et il voulait l'abandonner. Mais il en fut empêché par le fils d'un faux prophète, qui fit courir le bruit qu'il se joindrait aux Babyloniens auxquels, d'après ses nombreuses exhortations, les hommes de Juda devaient se soumettre. Jérémie démentit cette accusation mensongère, ce qui n'empêcha pas les chefs d'être irrités contre lui; ils le "frappèrent, et le mirent en prison".4 PR 346 4 L'espoir que nourrissaient les princes et le peuple de Juda au moment où les armées de Nebucadnetsar se dirigeaient vers le sud pour rencontrer les Egyptiens s'évanouit rapidement. Dieu avait dit: "Voici, j'en veux à toi, Pharaon, roi d'Egypte." La puissance égyptienne n'était qu'un roseau brisé. "Tous les habitants de l'Egypte sauront que je suis l'Eternel, déclarait la Parole inspirée, parce qu'ils ont été un soutien de roseau pour la maison d'Israël. ... Je fortifierai les bras du roi de Babylone, et les bras de Pharaon tomberont. Et ils sauront que je suis l'Eternel, quand je mettrai mon épée dans la main du roi de Babylone, et qu'il la tournera contre le pays d'Egypte."5 PR 347 1 Tandis que les princes de Juda attendaient vainement l'aide de l'Egypte, le roi Sédécias, rempli de sombres présages, pensait au prophète de Dieu, jeté en prison. Au bout d'un certain temps, il l'envoya chercher, et l'interrogea secrètement: "Y a-t-il une parole de la part de l'Eternel?" lui demanda-t-il. "Jérémie répondit: Oui. Et il ajouta: Tu seras livré entre les mains du roi de Babylone. Jérémie dit encore au roi Sédécias: En quoi ai-je péché contre toi, contre tes serviteurs, et contre ce peuple, pour que vous m'ayez mis en prison? Et où sont vos prophètes qui vous prophétisaient, en disant: Le roi de Babylone ne viendra pas contre vous, ni contre ce pays? Maintenant, écoute, je te prie, ô roi, mon seigneur, et que mes supplications soient favorablement reçues devant toi! Ne me renvoie pas dans la maison de Jonathan, le secrétaire, de peur que je n'y meure."6 Alors "le roi Sédécias ordonna qu'on gardât Jérémie dans la cour de la prison, et qu'on lui donnât chaque jour un pain de la rue des boulangers, jusqu'à ce que tout le pain de la ville fût consommé. Ainsi Jérémie demeura dans la cour de la prison!"7 PR 347 2 Le roi n'osait pas manifester ouvertement sa confiance en Jérémie. Sa crainte le poussait à interroger secrètement le prophète, mais il était trop faible pour braver la critique de ses serviteurs et du peuple, et se soumettre à la volonté divine, révélée par le prophète. PR 347 3 De la cour de la prison, Jérémie continuait à conseiller la soumission au roi de Babylone. Résister aurait été courir à une mort certaine. Voici le message que Dieu fit parvenir à Juda: "Celui qui restera dans cette ville mourra par l'épée, par la famine ou par la peste; mais celui qui sortira pour se rendre aux Chaldéens aura la vie sauve, sa vie sera son butin, et il vivra." Ces paroles étaient claires et décisives. Le prophète déclarait avec assurance, au nom de Dieu: "Cette ville sera livrée à l'armée de Babylone, qui la prendra."8 PR 348 1 Irrités, finalement, par les conseils réitérés de Jérémie, contraires à leur politique résolue de résistance, les chefs adressèrent une protestation au roi. Ils insistèrent sur le fait que le prophète était un ennemi du pays, que ses paroles avaient affaibli les mains du peuple et attiré sur eux le malheur. En conséquence, il fallait le mettre à mort. PR 348 2 Le roi pusillanime savait que ces accusations étaient fausses. Mais pour apaiser ceux qui occupaient des situations en vue dans le royaume, il feignit de croire à leurs mensonges, et il livra Jérémie entre leurs mains pour qu'ils en disposent selon leur volonté. Le prophète fut donc jeté "dans la citerne de Malkija, fils du roi, laquelle se trouvait dans la cour de la prison; ils descendirent Jérémie avec des cordes. Il n'y avait point d'eau dans la citerne, mais il y avait de la boue; et Jérémie enfonça dans la boue."9 Alors Dieu lui suscita des amis, qui supplièrent le roi d'agir en sa faveur, et ils le ramenèrent dans la cour de la prison. PR 348 3 Le roi fit à nouveau chercher le prophète en secret, et lui ordonna de lui dire sincèrement quel était le dessein de Dieu envers Jérusalem. Jérémie répondit en posant cette question: "Si je te le dis, ne me feras-tu pas mourir? Et si je te donne un conseil, tu ne m'écouteras pas. Le roi jura secrètement à Jérémie, en disant: ... Je ne te ferai pas mourir, et je ne te livrerai pas entre les mains de ces hommes qui en veulent à ta vie."10 PR 348 4 Le roi avait donc encore une occasion de tenir compte des avertissements du ciel et d'atténuer ainsi les châtiments qui allaient s'abattre sur Jérusalem et sur la nation. "Si tu vas te rendre aux chefs du roi de Babylone, dit le prophète, tu auras la vie sauve, et cette ville ne sera pas brûlée par le feu; tu vivras, toi et ta maison. Mais si tu ne te rends pas aux chefs du roi de Babylone, cette ville sera livrée entre les mains des Chaldéens, qui la brûleront par le feu; et toi, tu n'échapperas pas à leurs mains. ... Je crains les Juifs qui ont passé aux Chaldéens, dit Sédécias à Jérémie; je crains qu'on ne me livre entre leurs mains, et qu'ils ne m'outragent. Jérémie répondit: On ne te livrera pas." Et il ajouta en suppliant le roi: "Ecoute la voix de l'Eternel dans ce que je te dis; tu t'en trouveras bien, et tu auras la vie sauve."11 PR 349 1 C'est ainsi que, jusqu'au dernier moment, Dieu faisait nettement connaître son désir de manifester sa miséricorde envers ceux qui se soumettraient à sa volonté. Si le roi avait obéi au Seigneur, la vie de ses sujets aurait été épargnée, et la ville aurait évité la catastrophe. Mais il pensa qu'il était allé trop loin pour revenir en arrière; il eut peur des Juifs, peur du ridicule, peur pour sa vie. Après avoir vécu des années en révolte contre Dieu, il trouvait que c'était trop humiliant pour lui de dire au peuple: "J'accepte la parole du Seigneur, telle que l'a prononcée Jérémie. Je n'ose m'aventurer dans une guerre contre l'ennemi devant tous ses avertissements." PR 349 2 Le prophète supplia Sédécias avec larmes de se sauver lui-même et de sauver son peuple. Plein d'angoisse, il lui assura que, s'il ne tenait pas compte des conseils divins, il perdrait la vie et tous ses biens tomberaient entre les mains des Babyloniens. Mais le roi, engagé sur une mauvaise voie, ne voulut pas revenir en arrière; il décida de suivre le conseil des faux prophètes et celui des hommes pour lesquels il n'avait en réalité que du mépris, qui ridiculisaient sa faiblesse et le faisaient céder si facilement à leurs désirs. Il sacrifia sa liberté pour devenir l'esclave de l'opinion publique. Indécis en présence du mal, Sédécias n'avait pas le courage de lutter pour le bien. Convaincu de la valeur des paroles de Jérémie, il manquait d'énergie pour s'y conformer; et, en conséquence, il s'engagea résolument dans une fausse direction. PR 349 3 Le roi avait une si grande crainte des hommes qu'il n'osait même pas dire à ses courtisans et à son peuple qu'il avait eu un entretien avec Jérémie. S'il avait déclaré nettement qu'il croyait aux paroles du prophète, déjà à moitié accomplies, que de catastrophes auraient pu être évitées! S'il avait dit: "J'obéirai au Seigneur, et j'épargnerai ainsi à Jérusalem une ruine totale; je ne veux pas mépriser les ordres de Dieu par crainte des hommes ou pour me ménager leur faveur; j'aime la vérité, j'ai horreur du péché, je suivrai les conseils du Tout-Puissant", alors on aurait respecté le courage du roi, et ceux qui hésitaient entre la foi et l'incrédulité se seraient rangés du côté du bien. Cette attitude courageuse et impartiale aurait suscité chez ses sujets l'admiration et la loyauté. Le roi aurait eu ainsi un puissant appui, et Juda n'aurait pas connu les fléaux dévastateurs du carnage, de la famine et de l'incendie. PR 350 1 La faiblesse de Sédécias était un péché dont il porta durement la peine. L'ennemi s'abattit comme une avalanche irrésistible et dévasta la ville. Les armées juives furent mises en déroute; le pays, conquis. Le roi fut fait prisonnier et ses fils égorgés sous ses yeux. Il fut emmené en captivité, on lui creva les yeux et, arrivé à Babylone, il périt misérablement. Le temple admirable, qui couronnait le sommet de la montagne de Sion depuis plus de quatre siècles, ne fut pas épargné par les Chaldéens. "Ils brûlèrent la maison de Dieu; ils démolirent les murailles de Jérusalem; ils livrèrent au feu tous ses palais et détruisirent tous les objets précieux."12 PR 350 2 Lorsque Nebucadnetsar détruisit Jérusalem, un grand nombre d'Israélites, qui avaient échappé aux horreurs d'un long siège, furent tués par l'épée. Parmi ceux qui survécurent, en particulier le chef des prêtres et les princes du royaume, quelques-uns furent emmenés à Babylone où on les exécuta comme traîtres. D'autres furent déportés et assujettis à Nebucadnetsar et à ses fils "jusqu'à la domination du royaume de Perse, afin que s'accomplît la parole de l'Eternel prononcée par la bouche de Jérémie".13 PR 350 3 L'Ecriture nous dit, en parlant de Jérémie: "Nebucadnetsar, roi de Babylone, avait donné cet ordre au sujet de Jérémie par Nebuzaradan, chef des gardes: Prends-le, et veille sur lui; ne lui fais aucun mal, mais agis à son égard comme il te dira."14 Relâché de prison par les officiers babyloniens, le prophète voulut rester avec les faibles restes de Juda, "certains pauvres du pays", laissés par les Chaldéens pour cultiver le sol. Les Babyloniens nommèrent Guedalia gouverneur de ces restes. Mais il fut traîtreusement massacré quelques mois plus tard. Ces miséreux, après avoir subi de douloureuses épreuves, furent finalement persuadés par leurs chefs de se réfugier en Egypte. Jérémie protesta contre ce départ. "N'allez pas en Egypte", leur dit-il. Mais on ne tint aucun compte de ce conseil inspiré, et "tous les restes de Juda ... les hommes, les femmes et les enfants" s'enfuirent en Egypte. "Ils n'obéirent pas à la voix de l'Eternel, et ils arrivèrent à Tachpanès."15 PR 351 1 Les prophéties de Jérémie, relatives au jugement et adressées aux restes qui s'étaient révoltés contre Nebucadnetsar, en s'enfuyant en Egypte, contenaient aussi des promesses de pardon pour tous ceux qui se repentiraient de leur folie et seraient disposés à revenir dans leur pays. Dieu n'épargnerait pas ceux qui se détournaient de son conseil et subiraient l'influence corruptrice de l'idolâtrie égyptienne, mais il se montrerait miséricordieux envers ceux qui feraient preuve de fidélité à son égard. "Ceux, en petit nombre, qui échapperont à l'épée retourneront du pays d'Egypte au pays de Juda, disait-il. Mais tout le reste de Juda, tous ceux qui sont venus au pays d'Egypte pour y demeurer sauront si ce sera ma parole ou la leur qui s'accomplira."16 PR 351 2 La tristesse du prophète provenant de la grande perversité de ceux qui auraient dû être la lumière spirituelle du monde, sa douleur concernant le sort de Sion et du peuple déporté à Babylone, tout cela se révèle dans les lamentations qu'il a laissées comme un mémorial de la folie qui consiste à se détourner des conseils de Dieu pour suivre la sagesse des hommes. Au milieu des ruines accumulées, Jérémie pouvait encore déclarer: "Les bontés de l'Eternel ne sont pas épuisées." Sa prière constante était: "Recherchons nos voies et les sondons, et retournons à l'Eternel."17 Alors que Juda était encore un royaume parmi les nations, le prophète avait demandé à Dieu: "As-tu donc rejeté Juda, et ton âme a-t-elle pris Sion en horreur?" Il avait poussé l'audace jusqu'à dire: "A cause de ton nom, ne méprise pas."18 La foi absolue du prophète dans les desseins éternels de Dieu -- desseins qui devaient apporter l'ordre dans la confusion et rendre témoignage devant les nations et tout l'univers des attributs divins de justice et d'amour -- l'amenait maintenant à prier avec confiance en faveur de ceux qui auraient pu se détourner du mal. Mais Sion était totalement détruite; le peuple de Dieu était en captivité. Accablé par le désespoir, le prophète s'écriait: "Eh quoi! elle est assise solitaire, cette ville si peuplée! Elle est semblable à une veuve! Grande entre les nations, souveraine parmi les Etats, elle est réduite à la servitude! Elle pleure durant la nuit, et ses joues sont couvertes de larmes; de tous ceux qui l'aimaient nul ne la console; tous ses amis lui sont devenus infidèles; ils sont devenus ses ennemis. PR 352 1 "Juda est en exil, victime de l'oppression et d'une grande servitude; il habite au milieu des nations, et n'y trouve point de repos; tous ses persécuteurs l'ont surpris dans l'angoisse. Les chemins de Sion sont dans le deuil, car on ne va plus aux fêtes; toutes ses portes sont désertes, ses sacrificateurs gémissent, ses vierges sont affligées, et elle est remplie d'amertume. Ses oppresseurs triomphent, ses ennemis sont en paix; car l'Eternel l'a humiliée, à cause de la multitude de ses péchés; ses enfants ont marché captifs devant l'oppresseur. ... PR 352 2 "Eh quoi! le Seigneur, dans sa colère, a couvert de nuages la fille de Sion! Il a précipité du ciel sur la terre la magnificence d'Israël! Il ne s'est pas souvenu de son marchepied, au jour de sa colère! Le Seigneur a détruit sans pitié toutes les demeures de Jacob; il a, dans sa fureur, renversé les forteresses de la fille de Juda, il les a fait rouler à terre; il a profané le royaume et ses chefs. Il a, dans son ardente colère, abattu toute la force d'Israël; il a retiré sa droite en présence de l'ennemi; il a allumé dans Jacob des flammes de feu, qui dévorent de tous côtés. Il a tendu son arc comme un ennemi; sa droite s'est dressée comme celle d'un assaillant; il a fait périr tout ce qui plaisait aux regards; il a répandu sa fureur comme un feu sur la tente de la fille de Sion. ... PR 352 3 "Que dois-je te dire? A quoi te comparer, fille de Jérusalem? Qui trouver de semblable à toi, et quelle consolation te donner, vierge, fille de Sion? Car ta plaie est grande comme la mer: qui pourra te guérir? ... PR 352 4 "Souviens-toi, Eternel, de ce qui nous est arrivé! Regarde, vois notre opprobre! Notre héritage a passé à des étrangers, nos maisons à des inconnus. Nous sommes orphelins, sans père; nos mères sont comme des veuves. ... Nos pères ont péché, ils ne sont plus, et c'est nous qui portons la peine de leurs iniquités. Des esclaves dominent sur nous, et personne ne nous délivre de leurs mains. ... Notre coeur est souffrant, nos yeux sont obscurcis. ... PR 353 1 "Toi, Eternel, tu règnes à jamais; ton trône subsiste de génération en génération. Pourquoi nous oublierais-tu pour toujours, nous abandonnerais-tu pour de longues années? Fais-nous revenir vers toi, ô Eternel, et nous reviendrons! Donne-nous encore des jours comme ceux d'autrefois!"19 ------------------------Chapitre 38 -- Lumière dans les ténèbres PR 355 1 Les sombres années qui caractérisèrent la fin du royaume de Juda auraient apporté le désespoir au coeur le plus affermi, si les paroles prophétiques des messagers de Dieu n'avaient été pleines d'encouragement. Par Jérémie à Jérusalem, Daniel à la cour de Babylone, Ezéchiel sur les rives du Kebar, le Seigneur, dans sa miséricorde, avait fait connaître clairement son dessein éternel, et il avait donné l'assurance qu'il accomplirait à l'égard de son peuple les promesses mentionnées dans les écrits de Moïse. Ce qu'il avait promis à ceux qui lui seraient fidèles, il le ferait sûrement. La parole de Dieu est "vivante et permanente".1 PR 355 2 Lorsque son peuple errait dans le désert, Dieu avait tout fait pour qu'il se souvînt des paroles de sa loi. Après l'établissement des Israélites en Canaan, les préceptes divins devaient être répétés chaque jour et dans chaque foyer. Il fallait les écrire "sur les poteaux de sa maison et sur les portes", ainsi que sur des tablettes, les mettre en musique et les faire chanter par les jeunes et par les vieux. Il était recommandé aux prêtres de les enseigner aux assemblées, et les chefs du pays devaient les étudier chaque jour. "Méditez-le jour et nuit, avait ordonné le Seigneur à Josué, en parlant du livre de la loi, pour agir fidèlement selon tout ce qui y est écrit; car c'est alors que tu auras du succès dans tes entreprises, c'est alors que tu réussiras."2 PR 356 1 Josué fit connaître les écrits de Moïse à tout le peuple d'Israël. "Il n'y eut rien de tout ce que Moïse avait prescrit, que Josué ne lût en présence de toute l'assemblée d'Israël, des femmes et des enfants, et des étrangers qui marchaient au milieu d'eux."3 Ceci était en harmonie avec l'ordre formel que Dieu avait donné au sujet de la lecture du livre de la loi, qui devait se faire tous les sept ans, à la fête des tabernacles. "Tu rassembleras le peuple, les hommes, les femmes, les enfants, et l'étranger qui sera dans tes portes, était-il ordonné aux conducteurs spirituels d'Israël, afin qu'ils t'entendent, et afin qu'ils apprennent à craindre l'Eternel, votre Dieu, à observer et à mettre en pratique toutes les paroles de cette loi. Et leurs enfants qui ne la connaîtront pas l'entendront, et ils apprendront à craindre l'Eternel, votre Dieu, tout le temps que vous vivrez dans le pays dont vous prendrez possession, après avoir passé le Jourdain."4 PR 356 2 Combien différente eût été l'histoire d'Israël si cet ordre avait été observé au cours des années qui suivirent! Ce n'est qu'en révérant la Parole de Dieu que les Israélites pouvaient s'attendre à voir s'accomplir le plan divin. C'est la vénération de la loi qui donna de la force à Israël sous le règne de David et pendant les premières années de celui de Salomon. C'est par la foi en la Parole de Dieu qu'une réforme fut opérée à l'époque d'Elie et de Josias. Et c'est à cette même Parole de vérité, précieux héritage d'Israël, que s'en référait Jérémie dans son désir d'arriver à une réforme. Partout où il exerçait son ministère, il suppliait le peuple en ces termes: "Ecoutez les paroles de cette alliance",5 -- paroles qui devaient leur apporter une totale compréhension du plan divin destiné à faire connaître à toutes les nations la vérité salvatrice. PR 356 3 Au cours des dernières années de l'apostasie de Juda, les exhortations des prophètes semblaient avoir bien peu d'efficacité, et alors que les armées des Chaldéens faisaient pour la troisième et dernière fois le siège de Jérusalem, tout espoir s'était évanoui. Jérémie prédisait la ruine totale de la ville sainte, et c'est parce qu'il insistait sur la capitulation qu'il avait été jeté en prison. Mais Dieu n'abandonna pas à un découragement sans espoir le fidèle reste qui se trouvait encore dans la ville. Alors même que Jérémie était gardé sous une étroite surveillance par ceux qui se moquaient de ses messages, de nouvelles révélations lui parvinrent concernant le désir de Dieu de pardonner et de sauver. Ces révélations ont été pour les croyants de tous les âges une source de consolation. S'appuyant fortement sur les promesses de Dieu, Jérémie illustra par une parabole, devant les habitants de la ville éprouvée, sa foi inébranlable dans l'accomplissement final des desseins du Seigneur en faveur de son peuple. En présence de témoins, et en observant avec soin toutes les formes légales nécessaires, il acheta pour dix-sept sicles d'argent un champ appartenant à ses ancêtres, situé dans le voisinage du village d'Anathoth. PR 357 1 A vues humaines, l'acquisition de ce terrain en pays déjà sous contrôle babylonien semblait être une folie. Le prophète avait lui-même prédit la destruction de Jérusalem, la désolation de Juda et la ruine totale du royaume. Il avait prophétisé une longue période d'exil à Babylone. Déjà avancé en âge, il ne pouvait espérer recevoir un bénéfice personnel de cette acquisition. Cependant, l'étude des prophéties de l'Ecriture avait fait naître dans son coeur la ferme conviction que Dieu allait rendre aux captifs leurs anciennes possessions de la terre promise. Avec l'oeil de la foi, le prophète vit les exilés revenir à la fin des années de leurs tribulations occuper à nouveau le pays de leurs pères. En achetant le champ d'Anathoth, il faisait tout ce qu'il pouvait pour susciter chez autrui l'espoir qui réconfortait son coeur. PR 357 2 Lorsqu'il eut signé l'acte d'acquisition et fait signer les témoins, Jérémie donna cet ordre à Baruc, son secrétaire: "Prends ces écrits, ce contrat d'acquisition, celui qui est cacheté et celui qui est ouvert, et mets-les dans un vase de terre, afin qu'ils se conservent longtemps. Car ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: On achètera encore des maisons, des champs et des vignes, dans ce pays."6 PR 358 1 La situation pour Juda était si désespérée à l'époque de cette transaction extraordinaire que lorsque le prophète eut mis au point les détails de l'achat et fait les arrangements pour la conservation des documents, sa foi, jusqu'ici inébranlable, fut sérieusement éprouvée. Avait-il, dans son désir d'encourager Juda, commis un acte présomptueux? Avait-il donné lieu à de faux espoirs, en voulant inspirer la confiance dans les promesses divines? Ceux qui avaient contracté alliance avec Dieu avaient, depuis bien longtemps, tourné en ridicule les assurances données. Les promesses destinées au peuple élu se réaliseraient-elles jamais totalement? PR 358 2 En proie au plus profond désarroi, accablé de tristesse en songeant aux souffrances de ceux qui avaient refusé de se repentir de leurs péchés, le prophète invoqua Dieu, afin d'être éclairé sur ses intentions envers l'humanité. "Ah! Seigneur Eternel, s'écria-t-il, voici, tu as fait les cieux et la terre par ta grande puissance et par ton bras étendu: rien n'est étonnant de ta part. Tu fais miséricorde jusqu'à la millième génération, et tu punis l'iniquité des pères dans le sein de leurs enfants après eux. Tu es le Dieu grand, le puissant, dont le nom est l'Eternel des armées. Tu es grand en conseil et puissant en action; tu as les yeux ouverts sur toutes les voies des enfants des hommes, pour rendre à chacun selon ses voies, selon le fruit de ses oeuvres. Tu as fait des miracles et des prodiges dans le pays d'Egypte jusqu'à ce jour, et en Israël et parmi les hommes, et tu t'es fait un nom comme il l'est aujourd'hui. Tu as fait sortir du pays d'Egypte ton peuple d'Israël, avec des miracles et des prodiges, à main forte et à bras étendu, et avec une grande terreur. Tu leur as donné ce pays, que tu avais juré à leurs pères de leur donner, pays où coulent le lait et le miel. Ils sont venus, et ils en ont pris possession. Mais ils n'ont point obéi à ta voix, ils n'ont point observé ta loi, ils n'ont pas fait tout ce que tu leur avais ordonné de faire. Et c'est alors que tu as fait fondre sur eux tous ces malheurs!"7 PR 359 1 Les armées de Nebucadnetsar étaient sur le point de faire l'assaut des murailles de Sion. Des milliers d'Israélites périssaient dans un effort désespéré pour défendre la ville. Des milliers d'autres mouraient de faim ou de maladie. Le sort de Jérusalem était déjà décidé. Les tours d'assaut de l'ennemi s'élevaient au-dessus des murailles. "Voici, ajoutait le prophète dans sa prière, les terrasses s'élèvent contre la ville et la menacent; la ville sera livrée entre les mains des Chaldéens qui l'attaquent, vaincue par l'épée, par la famine et par la peste. Ce que tu as dit est arrivé, et tu le vois. Néanmoins, Seigneur Eternel, tu m'as dit: Achète un champ pour de l'argent, prends des témoins. ... Et la ville est livrée entre les mains des Chaldéens!"8 PR 359 2 Dieu exauça la prière du prophète. A cette heure troublée, alors que la foi du messager du Seigneur était soumise à une rude épreuve, "la parole de l'Eternel lui fut adressée en ces mots: Voici, je suis l'Eternel, le Dieu de toute chair. Y a-t-il rien qui soit étonnant de ma part?"9 La ville allait bientôt capituler; ses portes et ses palais être incendiés. Mais bien que cette destruction ait été imminente, et les Israélites sur le point d'être déportés, le dessein de Dieu en leur faveur restait à accomplir. Pour encourager ceux qui allaient subir le châtiment, le Seigneur répondit à la prière de son serviteur: "Voici, je les rassemblerai de tous les pays où je les ai chassés, dans ma colère, dans ma fureur, et dans ma grande irritation; je les ramènerai dans ce lieu, et je les y ferai habiter en sûreté. Ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu. Je leur donnerai un même coeur et une même voie, afin qu'ils me craignent toujours, pour leur bonheur et celui de leurs enfants après eux. Je traiterai avec eux une alliance éternelle, je ne me détournerai plus d'eux, je leur ferai du bien, et je mettrai ma crainte dans leur coeur, afin qu'ils ne s'éloignent pas de moi. Je prendrai plaisir à leur faire du bien, et je les planterai véritablement dans ce pays, de tout mon coeur et de toute mon âme. Car ainsi parle l'Eternel: De même que j'ai fait venir sur ce peuple tous ces grands malheurs, de même je ferai venir sur eux tout le bien que je leur promets. On achètera des champs dans ce pays dont vous dites: C'est un désert, sans hommes ni bêtes, il est livré entre les mains des Chaldéens. On achètera des champs pour de l'argent, on écrira des contrats, on les cachètera, on prendra des témoins, dans le pays de Benjamin et aux environs de Jérusalem, dans les villes de Juda, dans les villes de la montagne, dans les villes de la plaine et dans les villes du midi; car je ramènerai leurs captifs, dit l'Eternel."10 PR 360 1 Pour confirmer ces promesses rassurantes, "la parole de l'Eternel fut adressée à Jérémie une seconde fois, en ces mots, pendant qu'il était encore enfermé dans la cour de la prison: Ainsi parle l'Eternel, qui fait ces choses, l'Eternel, qui les conçoit et les exécute, lui, dont le nom est l'Eternel: Invoque-moi, et je te répondrai; je t'annoncerai de grandes choses, des choses cachées que tu ne connais pas. Car ainsi parle l'Eternel, le Dieu d'Israël, sur les maisons de cette ville et sur les maisons des rois de Juda, qui seront abattues par les terrasses et par l'épée, quand on avancera pour combattre les Chaldéens. ... Voici, je lui donnerai la guérison et la santé, je les guérirai, et je leur ouvrirai une source abondante de paix et de fidélité. Je ramènerai les captifs de Juda et les captifs d'Israël, et je les rétablirai comme autrefois. Je les purifierai de toutes les iniquités qu'ils ont commises contre moi, je leur pardonnerai toutes les iniquités par lesquelles ils m'ont offensé. ... Cette ville sera pour moi un sujet de joie, de louange et de gloire, parmi toutes les nations de la terre, qui apprendront tout le bien que je leur ferai; elles seront étonnées et émues de tout le bonheur et de toute la prospérité que je leur accorderai. PR 360 2 "Ainsi parle l'Eternel: On entendra encore dans ce lieu dont vous dites: Il est désert, il n'y a plus d'hommes, plus de bêtes; on entendra dans les villes de Juda et dans les rues de Jérusalem ... les cris de réjouissance et les cris d'allégresse, les chants du fiancé et les chants de la fiancée, la voix de ceux qui disent: Louez l'Eternel des armées, car l'Eternel est bon, car sa miséricorde dure à toujours! La voix de ceux qui offrent des sacrifices d'actions de grâces dans la maison de l'Eternel. Car je ramènerai les captifs du pays, je les rétablirai comme autrefois, dit l'Eternel. PR 361 1 "Ainsi parle l'Eternel des armées: Il y aura encore dans ce lieu qui est désert, sans hommes ni bêtes, et dans toutes ses villes, il y aura des demeures pour les bergers faisant reposer leurs troupeaux. Dans les villes de la montagne, dans les villes de la plaine, dans les villes du midi, dans le pays de Benjamin et aux environs de Jérusalem, et dans les villes de Juda, les brebis passeront encore sous la main de celui qui les compte, dit l'Eternel. PR 361 2 "Voici, les jours viennent, dit l'Eternel, où j'accomplirai la bonne parole que j'ai dite sur la maison d'Israël et sur la maison de Juda."11 PR 361 3 Ainsi le peuple de Dieu était-il réconforté aux heures les plus sombres de son combat avec les forces du mal. Il semblait que Satan avait réussi à triompher dans sa tentative d'anéantir Israël. Mais Dieu dirigeait les événements et, au cours des années qui suivirent, son peuple devait trouver l'occasion de racheter le passé. Voici le message qui lui était adressé: PR 361 4 "Et toi, mon serviteur Jacob, ne crains pas, dit l'Eternel; ne t'effraie pas, Israël! Car je te délivrerai de la terre lointaine, je délivrerai ta postérité du pays où elle est captive; Jacob reviendra, il jouira du repos et de la tranquillité, et il n'y aura personne pour le troubler. Car je suis avec toi, dit l'Eternel, pour te délivrer. ... Je te guérirai, je panserai tes plaies."12 PR 361 5 Aux jours heureux de la restauration, les dix tribus séparées devaient être réunies avec Juda pour former un seul peuple. Dieu serait reconnu comme le roi de "toutes les familles d'Israël". "Ils seront mon peuple, déclarait-il. ... Poussez des cris de joie sur Jacob, éclatez d'allégresse à la tête des nations! Elevez vos voix, chantez des louanges et dites: Eternel, délivre ton peuple, le reste d'Israël! Voici, je les ramène du pays du septentrion, je les rassemble des extrémités de la terre; parmi eux sont l'aveugle et le boiteux. ... Ils viennent en pleurant, et je les conduis au milieu de leurs supplications; je les mène vers des torrents d'eau, par un chemin où ils ne chancellent pas; car je suis un père pour Israël, et Ephraïm est mon premier-né."13 PR 362 1 Humiliés aux yeux des païens, ceux qui autrefois avaient été, parmi tous les peuples de la terre, favorisés du ciel, devaient apprendre en exil l'obéissance si nécessaire à leur bonheur futur. Aussi longtemps qu'ils ne l'auraient pas compris, Dieu ne pouvait accomplir pour eux ce qu'il désirait. "Je te châtierai avec équité, déclarait-il, je ne puis pas te laisser impuni."14 Mais ce châtiment avait pour but le bien spirituel des Israélites. Ceux qui étaient l'objet de son tendre amour ne seraient pas rejetés à toujours. Devant toutes les nations du monde, il démontrerait, selon ses desseins, que la victoire est cachée dans la défaite apparente et qu'il désire sauver plutôt que perdre. PR 362 2 Voici le message qui fut donné au prophète: PR 362 3 "Celui qui a dispersé Israël le rassemblera, et il le gardera comme le berger garde son troupeau. Car l'Eternel rachète Jacob, il le délivre de la main d'un plus fort que lui. Ils viendront, et pousseront des cris de joie sur les hauteurs de Sion; ils accourront vers les biens de l'Eternel, le blé, le moût, l'huile, les brebis et les boeufs; leur âme sera comme un jardin arrosé, et ils ne seront plus dans la souffrance. ... Je changerai leur deuil en allégresse, et je les consolerai; je leur donnerai de la joie après leurs chagrins. Je rassasierai de graisse l'âme des sacrificateurs, et mon peuple se rassasiera de mes biens, dit l'Eternel." PR 362 4 "Ainsi parle l'Eternel des armées, le Dieu d'Israël: Voici encore ce que l'on dira dans le pays de Juda et dans ses villes, quand j'aurai ramené leurs captifs: Que l'Eternel te bénisse, demeure de la justice, montagne sainte! Là s'établiront Juda et toutes ses villes, les laboureurs et ceux qui conduisent les troupeaux. Car je rafraîchirai l'âme altérée, et je rassasierai toute âme languissante." PR 362 5 "Voici, les jours viennent, dit l'Eternel, où je ferai avec la maison d'Israël et la nation de Juda une alliance nouvelle, non comme l'alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je les saisis par la main pour les faire sortir du pays d'Egypte, alliance qu'ils ont violée, quoique je fusse leur maître, dit l'Eternel. Mais voici l'alliance que je ferai avec la maison d'Israël, après ces jours-là, dit l'Eternel: Je mettrai ma loi au-dedans d'eux, je l'écrirai dans leur coeur; et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. Celui-ci n'enseignera plus son prochain, ni celui-là son frère, en disant: Connaissez l'Eternel! Car tous me connaîtront, depuis le plus petit jusqu'au plus grand, dit l'Eternel; car je pardonnerai leur iniquité, et je ne me souviendrai plus de leur péché."15 ------------------------Chapitre 39 -- À la cour de Babylone PR 365 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 1. PR 365 1 Parmi les enfants d'Israël captifs à Babylone, au début de l'exil qui devait durer soixante-dix ans, se trouvaient des hommes solidement ancrés dans leurs principes, ne s'abandonnant pas à leur égoïsme, mais honorant leur Dieu au risque de tout perdre. Leur seul but était de faire triompher les desseins de l'Eternel, en communiquant aux païens les bénédictions célestes. Représentants du Seigneur, ils ne devaient jamais se compromettre avec eux, mais conserver leur foi intacte et faire honneur à leur nom. Ils glorifiaient Dieu dans l'adversité comme ils l'avaient fait dans la prospérité. PR 365 2 Cependant leurs vainqueurs étaient bien persuadés que la religion babylonienne était supérieure à celle des Hébreux. La preuve, c'est que ces hommes, adorateurs de Jéhovah, avaient été emmenés à Babylone et que les ustensiles sacrés de leur culte se trouvaient maintenant dans le temple des dieux de ce pays. PR 366 1 Toutefois, c'est par les humiliations mêmes imposées à Israël, à cause de son infidélité, que Dieu voulait donner à Babylone la preuve de sa suprématie et des heureux résultats de l'obéissance. Mais il ne pouvait le faire que par ceux qui lui étaient restés fidèles. PR 366 2 Parmi ceux-ci, il faut compter Daniel et ses trois compagnons -- exemple remarquable de ce que deviennent les hommes vivant en communion avec Dieu, qui est sage et puissant. De leur foyer palestinien, relativement modeste, ces jeunes gens de lignée royale furent transplantés dans une des villes les plus opulentes et à la cour de l'un des plus grands monarques du monde. Nebucadnetsar "donna l'ordre à Aschpenaz, chef des eunuques, d'amener quelques-uns des enfants d'Israël, de race royale ou de famille noble, de jeunes garçons sans défaut corporel, beaux de figure, doués de sagesse, d'intelligence, d'instruction, capables de servir dans le palais du roi. ..." PR 366 3 "Il y avait parmi eux, d'entre les enfants de Juda, Daniel, Hanania, Mischaël et Azaria." Devinant chez ces jeunes gens des signes d'une rare intelligence, Nebucadnetsar décida de les former pour qu'ils occupent des situations importantes dans le royaume. Afin qu'ils puissent bien remplir leur rôle, il leur fit apprendre la langue des Chaldéens; et pendant trois ans, ils jouirent des avantages exceptionnels réservés à l'éducation des princes. PR 366 4 Les noms de Daniel et de ses compagnons furent échangés contre des noms représentant des divinités païennes. On attachait à ce moment-là une grande importance aux noms donnés aux enfants par les parents hébreux. Ces noms représentaient souvent les traits de caractère que les parents auraient aimé voir se développer chez l'enfant. Le prince qui avait la surveillance des jeunes captifs "leur donna des noms, à Daniel celui de Beltschatsar, à Hanania celui de Schadrac, à Mischaël celui de Méschac, et à Azaria celui d'Abed-Nego". PR 366 5 Le roi n'exigea pas des jeunes gens qu'ils renoncent à leur foi pour se joindre à l'idolâtrie, mais il espérait y arriver graduellement. En leur donnant des noms ayant une signification dans le langage idolâtre, en les plaçant journellement en contact avec les coutumes païennes et sous l'influence des rites séducteurs du culte des faux dieux, le monarque espérait les amener à renoncer à la religion de leur pays pour accepter celle des Babyloniens. PR 367 1 Mais au début même de leur vie à la cour, ils eurent à subir une épreuve décisive: on leur servit des mets et du vin provenant de la table du roi. Celui-ci pensait témoigner ainsi sa bienveillance et sa sollicitude en faveur de leur bien-être. Mais une portion étant offerte aux idoles, tous les mets étaient consacrés à l'idolâtrie, et celui qui en usait était considéré comme offrant un hommage aux dieux babyloniens. Alors Daniel et ses compagnons, voulant rester fidèles au Seigneur, refusèrent de s'unir à cet hommage. Même le simple fait de manger ces aliments et de boire ce vin serait un reniement de leur foi. Ils pactiseraient ainsi avec le paganisme et déshonoreraient les principes de la loi divine. PR 367 2 D'un autre côté, ils redoutaient les effets excitants d'une alimentation qui aurait pu les conduire à la débauche et à l'immoralité, puis influencer leur développement physique, mental et spirituel. Ils n'avaient pas oublié l'histoire de Nadab et d'Abihu, dont l'intempérance et ses conséquences étaient relatées au livre du Pentateuque, et ils savaient que l'usage du vin affecterait gravement leurs facultés physiques et mentales. PR 367 3 Daniel et ses compagnons avaient été élevés selon les principes d'une stricte tempérance. On leur avait enseigné que le Seigneur les rendrait responsables de leurs dons, et qu'ils ne devaient en aucun cas amoindrir leurs forces. Cette éducation fut pour Daniel et ses compagnons le moyen de les préserver des influences démoralisantes de la cour de Babylone. Les tentations qui les entouraient étaient violentes, mais ils restèrent fidèles. Aucune puissance, aucune influence ne pouvait les détourner des principes qui leur avaient été inculqués dans leur enfance, grâce à l'étude de la Parole et des oeuvres de Dieu. PR 367 4 Si Daniel l'avait désiré, il aurait pu trouver dans son entourage une excuse valable pour renoncer à ses habitudes de tempérance. Il aurait pu prétendre que, dépendant de la faveur royale, il ne pouvait éviter de manger des mets du roi et de boire de son vin; car, en se conformant aux enseignements divins, il offenserait le monarque et risquerait de perdre sa situation et même sa vie. S'il se détournait des commandements de Dieu, il s'attirerait les faveurs du roi et s'assurerait des avantages intellectuels et un brillant avenir. PR 368 1 Mais Daniel n'hésita pas un seul instant. L'approbation divine lui était plus précieuse que toutes les faveurs du plus puissant potentat du monde, plus précieuse que la vie elle-même. Il résolut en conséquence de rester ferme dans son intégrité quoi qu'il advienne. Il décida "de ne pas se souiller par les mets du roi et par le vin dont le roi buvait". Et ses trois compagnons le suivirent dans sa résolution. PR 368 2 En prenant cette décision, les jeunes Hébreux n'agirent pas avec présomption, mais en se confiant en Dieu. Ils ne cherchèrent pas non plus à se singulariser, mais à se conduire de façon à ne pas déshonorer Jéhovah. S'ils s'étaient compromis avec le mal dans ce cas particulier, cédant aux exigences de la situation, l'abandon de leurs principes aurait singulièrement affaibli leur sentiment du bien et leur aversion du mal. Leur premier faux-pas les aurait conduits à en commettre d'autres, jusqu'à ce qu'enfin, perdant tout contact avec le ciel, ils aient été emportés par la tentation. PR 368 3 "Dieu fit trouver à Daniel faveur et grâce devant le chef des eunuques", et la demande du jeune homme exprimant son désir de ne pas se souiller par les mets du roi fut accueillie avec respect. Toutefois, le prince hésita à l'accorder. "Je crains mon seigneur le roi, lui dit-il, qui a fixé ce que vous devez manger et boire; car pourquoi verrait-il votre visage plus abattu que celui des jeunes gens de votre âge? Vous exposeriez ma tête auprès du roi." PR 368 4 Daniel s'adressa alors à l'officier chargé spécialement de la surveillance des jeunes Hébreux pour lui demander de bien vouloir les dispenser de la nourriture et de la boisson royales. Il lui proposa de les soumettre à cette épreuve pendant dix jours: ils se contenteraient d'une nourriture frugale alors que les autres jeunes gens mangeraient les mets du monarque. PR 369 1 Bien que l'intendant craignît d'encourir la défaveur de Nebucadnetsar en accédant à cette demande, il l'accorda cependant, et Daniel comprit que sa cause était gagnée. Au bout de dix jours, le résultat fut contraire à celui que redoutait le prince. Daniel et ses compagnons "avaient meilleur visage et plus d'embonpoint que tous les jeunes gens qui mangeaient les mets du roi". La santé des Hébreux s'avérait nettement meilleure que celle des autres. Il en résulta que Daniel et ses trois amis purent continuer à observer leur régime frugal pendant toute la durée de leurs études à Babylone. PR 369 2 Durant trois ans, les jeunes Hébreux étudièrent "les lettres et la langue des Chaldéens". Fermement attachés au Seigneur, ils se soumirent constamment à sa puissance, alliant à leur désintéressement le sérieux, le zèle et la fidélité. Ce n'était ni l'ambition ni l'orgueil qui les avaient amenés à la cour royale -- en contact avec des hommes qui ne connaissaient ni ne craignaient Dieu. Captifs sur une terre étrangère, ils étaient placés là par la sagesse infinie. Eloignés des influences familiales et de leurs liens sacrés, ils cherchaient à s'acquitter honorablement de leur rôle pour le renom de leur nation opprimée et la gloire de celui dont ils étaient les serviteurs. PR 369 3 Dieu approuva la fermeté et l'abnégation de ces jeunes Hébreux, ainsi que la pureté de leurs intentions, et sa bénédiction les accompagna. Il "accorda à ces quatre jeunes gens de la science, de l'intelligence dans toutes les lettres, et de la sagesse; et Daniel expliquait toutes les visions et tous les songes". Ainsi s'accomplissait la promesse de Dieu: "J'honorerai celui qui m'honore."1 PR 369 4 Alors que Daniel s'attachait au Seigneur avec une inébranlable confiance, l'Esprit de prophétie lui était donné. Tout en recevant de l'homme les instructions relatives aux devoirs de la cour royale, Dieu l'initiait dans la connaissance des mystères de l'avenir. Il relaterait aux générations futures, par des symboles et des comparaisons, les événements qui allaient se dérouler au cours de l'histoire de ce monde, jusqu'à la fin des temps. PR 369 5 Le moment venu, les jeunes étudiants durent subir un examen avec d'autres candidats destinés au service du royaume. Mais, "parmi tous ces jeunes gens, il ne s'en trouva aucun comme Daniel, Hanania, Mischaël et Azaria". Leur vive intelligence, leurs connaissances, leur langage choisi et précis témoignaient en faveur de l'incomparable vigueur de leurs facultés intellectuelles. "Sur tous les objets qui réclamaient de la sagesse et de l'intelligence, et sur lesquels le roi les interrogeait, il les trouvait dix fois supérieurs à tous les magiciens et astrologues qui étaient dans tout son royaume." "Ils furent donc admis au service du roi." PR 370 1 La cour de Babylone réunissait des représentants de toutes les nationalités, des hommes dotés des plus riches dons naturels et possédant la culture la plus vaste que le monde pouvait offrir. Et cependant, parmi tous ces hommes, nul ne pouvait rivaliser avec ces jeunes Hébreux, en force physique, en beauté, en vigueur intellectuelle et en connaissances. Leur maintien assuré, leur démarche souple, leur visage agréable, leur lucidité, leur haleine saine -- toutes ces choses constituaient autant de certificats de bonne conduite et de noblesse dont la nature se plaît à gratifier ceux qui se soumettent à ses lois. PR 370 2 Dans l'étude de la sagesse des Babyloniens, Daniel et ses compagnons surpassaient tous les autres élèves, mais leur savoir n'était pas dû à la chance. Ils accroissaient leurs connaissances grâce à un sage emploi de leurs facultés, sous la direction du Saint-Esprit. Ils puisaient à la source de toute sagesse, et faisaient de la connaissance de Dieu la base de leur éducation. Ils priaient avec foi et vivaient en harmonie avec leurs prières. Ils recherchaient la bénédiction constante de Dieu, évitant tout ce qui risquait d'affaiblir leurs facultés, saisissant toutes les occasions pour les développer. Un seul but les préoccupait: celui d'honorer le Seigneur. Ils savaient que pour représenter la véritable religion, au sein du paganisme, ils devaient posséder une intelligence lucide, et perfectionner leur caractère. C'est Dieu lui-même qui était leur instructeur. Ainsi, constamment en prière, consciencieusement à l'étude et sans cesse en contact étroit avec l'Invisible, ils marchaient avec Dieu, comme Hénoc. PR 370 3 Le vrai succès dans tous les domaines du travail n'est pas l'effet de la chance, du hasard ou du destin. C'est le résultat des bénédictions divines, la rémunération de la foi et de la sagesse, de la vertu et de la persévérance. De brillantes qualités intellectuelles, un niveau moral élevé ne sont pas accidentels. Dieu suscite les occasions, le succès dépend de l'usage que l'on en fait. PR 371 1 Alors que le Seigneur produisait en Daniel et en ses compagnons "le vouloir et le faire, selon son bon plaisir",2 les jeunes Hébreux travaillaient à leur propre salut. Ainsi se manifeste l'oeuvre du principe divin de coopération, sans laquelle nul vrai succès ne peut être obtenu. Les tentatives humaines sont vouées à l'échec sans la puissance d'en haut; et sans la participation de l'homme, l'action divine n'est d'aucun effet sur de nombreux individus. Pour que la grâce de Dieu puisse devenir nôtre, il nous faut jouer un rôle personnel. Cette grâce nous est offerte pour produire en nous "le vouloir et le faire", et non pour se substituer à notre oeuvre propre. PR 371 2 De même que le Seigneur collabora avec Daniel et ses compagnons, de même collaborera-t-il avec tous ceux qui s'efforcent de faire sa volonté. Et par le don de son Esprit, il encouragera toute intention sincère, toute noble résolution. Ceux qui suivent le sentier de l'obéissance se heurteront à de nombreux obstacles. Des influences subtiles et fortes pourront les entraîner vers le monde, mais Dieu est capable de faire échouer tous les moyens mis en oeuvre pour faire tomber ses enfants. Par sa force, ils surmonteront toutes les tentations, vaincront toutes les difficultés. PR 371 3 Dieu mit Daniel et ses compagnons en contact avec les hommes les plus célèbres de Babylone, afin qu'au sein d'une nation païenne, ces jeunes Hébreux puissent représenter le caractère divin. Comment purent-ils remplir une fonction si lourde de responsabilité et d'honneur? C'est par la fidélité dans les petites choses qui caractérisait leur vie. Ils glorifiaient Dieu dans les tâches les plus modestes aussi bien que dans les charges les plus écrasantes. PR 371 4 De même que le Seigneur appela Daniel à rendre témoignage de lui à Babylone, de même il nous appelle aujourd'hui à être ses témoins. Dans les affaires les plus infimes comme dans les plus importantes, il veut que nous révélions les principes de son royaume. Nombreux sont ceux qui attendent une tâche importante alors qu'ils perdent chaque jour des occasions de témoigner à Dieu leur fidélité. Ils omettent journellement de s'acquitter des menus devoirs de la vie, et alors qu'ils attendent d'exercer leurs talents éventuels dans une vaste entreprise satisfaisant leurs désirs ambitieux, le temps s'écoule. PR 372 1 Dans la vie du vrai chrétien, rien n'est secondaire; aux yeux du Tout-Puissant, n'importe quelle tâche est essentielle. Le Seigneur estime avec précision toute capacité mise à son service; il tient aussi bien compte des possibilités non utilisées que des autres. Nous serons jugés d'après les actes que nous n'avons pas accomplis parce que nous n'avons pas employé nos talents à la gloire de Dieu. PR 372 2 Un caractère noble n'est pas le résultat du hasard; il n'est pas dû aux faveurs ou aux dons spéciaux de la Providence. Il découle de la discipline de soi-même, de l'abandon des sentiments bas pour des sentiments élevés, de l'abdication de soi pour le service de Dieu et de l'homme. PR 372 3 Par la fidélité des jeunes Hébreux aux principes de tempérance, Dieu parle encore à la jeunesse actuelle. Le monde a besoin d'hommes qui, comme Daniel, agissent et osent pour la cause du bien. Il a besoin de coeurs purs, de mains fortes, de courage indomptable; car la lutte entre le vice et la vertu exige une vigilance constante. Satan nous assaille par ses nombreuses tentations sous les formes les plus séduisantes, lorsque nous nous abandonnons à nos appétits pervers. PR 372 4 Le corps est le moyen essentiel par lequel l'esprit et l'âme se développent pour l'édification du caractère. C'est pourquoi l'ennemi de nos âmes dirige ses tentations vers l'affaiblissement et l'avilissement des forces physiques. S'il parvient à atteindre ce but, alors c'est souvent la reddition de l'être tout entier au mal. Les dispositions de la nature, non contrôlées par une puissance supérieure, amènent l'homme à la déchéance et à la mort. Le corps doit être soumis à cette puissance supérieure, et ses passions contrôlées par la volonté, soumise elle-même au Seigneur. Le pouvoir suprême de la raison, sanctifiée par la grâce divine, aura la prépondérance dans la vie. Les forces intellectuelles, la vigueur physique, comme la durée de la vie, dépendent de lois immuables. En obéissant à ces lois, l'homme arrive à se dominer, à maîtriser ses propres inclinations, ainsi que les principautés et les puissances "de ce monde de ténèbres", et "des esprits méchants dans les lieux célestes".3 PR 373 1 Dans l'ancien culte rituel, symbole de l'Evangile, aucune offrande imparfaite ne pouvait être apportée sur l'autel divin. La victime qui représentait le Christ devait être sans tache. La Parole se sert de cette illustration pour montrer que les enfants de Dieu doivent s'offrir "comme un sacrifice vivant", "saints et irrépréhensibles."4 PR 373 2 Les jeunes Hébreux avaient les mêmes passions que nous, mais, malgré les influences séduisantes de la cour de Babylone, ils demeuraient inébranlables, car ils dépendaient d'une force qui est infinie. Les païens avaient en eux l'illustration de la bonté et de la miséricorde de Dieu, ainsi que celle de l'amour du Christ. Leur vie est pour nous l'exemple du triomphe des principes sur la tentation, de la pureté sur la dépravation, de la foi et de la fidélité sur l'athéisme et l'idolâtrie. PR 373 3 Les jeunes d'aujourd'hui peuvent posséder l'esprit qui animait Daniel; ils peuvent s'abreuver à la même source, posséder la même puissance sur eux-mêmes, et révéler dans leur vie la même grâce spirituelle, même dans les circonstances les plus défavorables. Bien que portés à l'indulgence envers eux-mêmes, en particulier dans nos grandes villes où le sensualisme se présente sous une forme alléchante, ils doivent rester fermes dans leur foi. En prenant de fortes résolutions, et en exerçant une vigilance de tous les instants, ils vaincront toutes les tentations qui pourraient les assaillir. Ce n'est qu'à ce prix qu'ils remporteront la victoire. PR 373 4 Quel magnifique rôle furent appelés à jouer ces nobles Hébreux! En disant adieu à la maison où s'était écoulée leur enfance, ils étaient bien loin de s'imaginer quelle destinée leur était réservée. Mais ils se plièrent avec fidélité et résolution aux directives divines, afin que par eux les desseins d'en haut puissent s'accomplir. PR 374 1 Dieu désire que les vérités révélées par Daniel et ses compagnons soient aussi révélées par les enfants et la jeunesse de nos jours. La vie des jeunes Hébreux est une démonstration de ce que Dieu peut faire pour ceux qui s'abandonnent entre ses mains, et cherchent de tout leur coeur à accomplir ses desseins. ------------------------Chapitre 40 -- Le songe de Nebucadnetsar PR 375 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 2. PR 375 1 Aussitôt après l'entrée de Daniel et de ses compagnons au service du roi de Babylone, se produisirent des événements qui révélèrent à une nation idolâtre la puissance et la fidélité du Dieu d'Israël. Nebucadnetsar fit un songe étrange, "il avait l'esprit agité, et ne pouvait dormir". Mais, bien qu'il ait été profondément impressionné, le monarque était incapable de se souvenir des détails de ce songe. PR 375 2 Dans son embarras, il réunit les sages de son pays, "les magiciens, les astrologues, les enchanteurs", et fit appel à leurs lumières. "J'ai eu un songe, leur dit-il; mon esprit est agité, et je voudrais connaître ce songe." Et tout en leur faisant part de son trouble, il leur demanda de lui donner une explication qui calme son esprit. Les sages lui répondirent: "O roi, vis éternellement! dis le songe à tes serviteurs, et nous en donnerons l'explication." PR 376 1 Déçu par cette réponse évasive, et doutant de la sagesse de ces hommes, qui se vantaient de dévoiler les secrets et semblaient ne pas vouloir le sortir d'embarras, le roi ordonna alors que ces sages lui révèlent, non seulement l'explication du songe, mais le songe lui-même; et il leur promit de riches présents, tout en les menaçant de mort. "La chose m'a échappé, dit-il; si vous ne me faites connaître le songe et son explication, vous serez mis en pièces, et vos maisons seront réduites en un tas d'immondices. Mais si vous me dites le songe et son explication, vous recevrez de moi des dons et des présents, et de grands honneurs." Les sages répondirent: "Que le roi dise le songe à ses serviteurs, et nous en donnerons l'explication." PR 376 2 Alors Nebucadnetsar, irrité par la perfidie manifeste de ces hommes en qui il avait mis sa confiance, déclara: "Je m'aperçois, en vérité, que vous voulez gagner du temps, parce que vous voyez que la chose m'a échappé. Si donc vous ne me faites pas connaître le songe, la même sentence vous enveloppera tous; vous voulez vous préparer à me dire des mensonges et des faussetés, en attendant que les temps soient changés. C'est pourquoi dites-moi le songe, et je saurai si vous êtes capables de m'en donner l'explication." PR 376 3 Remplis de crainte en pensant aux conséquences de leur insuccès, les magiciens s'efforcèrent d'expliquer au monarque que sa requête était déraisonnable, et qu'on n'avait jamais exigé d'aucun homme épreuve aussi difficile. "Il n'est personne sur la terre, reprirent-ils, qui puisse dire ce que demande le roi; aussi jamais roi, quelque grand et puissant qu'il ait été, n'a exigé une pareille chose d'aucun magicien, astrologue ou Chaldéen. Ce que le roi demande est difficile; il n'y a personne qui puisse le dire au roi, excepté les dieux dont la demeure n'est pas parmi les hommes." PR 376 4 Alors "le roi se mit en colère, et s'irrita violemment. Il ordonna qu'on fît périr tous les sages de Babylone". PR 376 5 Parmi ceux qui étaient visés par la sentence royale, se trouvaient Daniel et ses compagnons. Lorsqu'ils apprirent qu'ils devaient mourir, Daniel s'adressa "d'une manière prudente et sensée" à Arjoc, chef des gardes du roi. "Pourquoi, lui demanda-t-il, la sentence du roi est-elle si sévère?" Arjoc le mit au courant de la perplexité du monarque au sujet de son étrange songe et de l'incapacité de ceux en qui il avait placé sa confiance de l'expliquer. A l'ouïe de ces paroles, Daniel se rendit vers le roi, au péril de sa vie, et le pria de lui accorder un certain temps pour demander à son Dieu de lui révéler le songe et son explication. PR 377 1 Le monarque accéda à cette requête. "Daniel alla dans sa maison, et il instruisit de cette affaire Hanania, Mischaël et Azaria, ses compagnons." Ils demandèrent ensemble la sagesse à la source de la lumière et de la connaissance. Ils avaient la ferme assurance d'être là où Dieu les avait placés, de faire son oeuvre et d'accomplir leur devoir. Dans les tribulations comme dans le danger, ils s'étaient constamment tournés vers celui qui les guidait et les protégeait, et qui était pour eux un appui toujours présent. Le coeur contrit, ils supplièrent donc à nouveau le Juge de toute la terre de leur accorder la délivrance à l'heure du danger. Ils ne prièrent pas en vain. L'Esprit de Dieu reposa sur eux, et, "dans une vision pendant la nuit", le songe du roi et sa signification furent révélés à Daniel. PR 377 2 Le premier mouvement du jeune homme fut de bénir le Seigneur pour l'exaucement de sa prière. "Béni soit le nom de Dieu d'éternité en éternité! s'écria-t-il. A lui appartiennent la sagesse et la force. C'est lui qui change les temps et les circonstances, qui renverse et qui établit les rois, qui donne la sagesse aux sages et la science à ceux qui ont de l'intelligence. Il révèle ce qui est profond et caché, il connaît ce qui est dans les ténèbres, et la lumière demeure avec lui. Dieu de mes pères, je te glorifie et je te loue de ce que tu m'as donné la sagesse et la force, et de ce que tu m'as fait connaître ce que nous t'avons demandé, de ce que tu nous as révélé le secret du roi." PR 377 3 Daniel se rendit ensuite immédiatement auprès d'Arjoc, qui avait reçu l'ordre du roi de faire périr tous les sages de Babylone, et il lui dit: "Ne fais pas périr les sages de Babylone! Conduis-moi devant le roi, et je donnerai au roi l'explication." Arjoc introduisit aussitôt Daniel devant le monarque, et il lui parla en ces termes: "J'ai trouvé parmi les captifs de Juda un homme qui donnera l'explication au roi." PR 378 1 Voici donc le jeune captif hébreu, calme et en pleine possession de lui-même, en présence du plus puissant monarque de la terre. Dès ses premières paroles, il déclina tout honneur personnel, et exalta le Seigneur, source de toute sagesse. A la question angoissée du roi: "Es-tu capable de me faire connaître le songe que j'ai eu et son explication?" il répondit: "Ce que le roi demande est un secret que les sages, les astrologues, les magiciens et les devins ne sont pas capables de découvrir au roi. Mais il y a dans les cieux un Dieu qui révèle les secrets, et qui a fait connaître au roi Nebucadnetsar ce qui arrivera dans la suite des temps. PR 378 2 "Voici ton songe, dit Daniel, et les visions que tu as eues sur ta couche. Sur ta couche, ô roi, il t'est monté des pensées touchant ce qui sera après ces temps-ci; et celui qui révèle les secrets t'a fait connaître ce qui arrivera. Si ce secret m'a été révélé, ce n'est point qu'il y ait en moi une sagesse supérieure à celle de tous les vivants; mais c'est afin que l'explication soit donnée au roi, et que tu connaisses les pensées de ton coeur. PR 378 3 "O roi, tu regardais, et tu voyais une grande statue; cette statue était immense, et d'une splendeur extraordinaire; elle était debout devant toi, et son aspect était terrible. La tête de cette statue était d'or pur; sa poitrine et ses bras étaient d'argent; son ventre et ses cuisses étaient d'airain; ses jambes, de fer; ses pieds, en partie de fer et en partie d'argile. Tu regardais, lorsqu'une pierre se détacha sans le secours d'aucune main, frappa les pieds de fer et d'argile de la statue, et les mit en pièces. Alors le fer, l'argile, l'airain, l'argent et l'or, furent brisés ensemble, et devinrent comme la balle qui s'échappe d'une aire en été; le vent les emporta, et nulle trace n'en fut retrouvée. Mais la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne, et remplit toute la terre. PR 378 4 "Voilà le songe", déclara Daniel avec assurance. Le roi, qui écoutait avec la plus grande attention tous les détails de ce récit, reconnut que c'était vraiment le songe qui l'avait tant troublé. Il était maintenant préparé à en recevoir l'explication. Le Roi du ciel allait lui révéler une grande vérité. Il lui ferait savoir qu'il avait tout pouvoir sur les royaumes de ce monde, tout pouvoir pour placer les rois sur le trône et pour les en faire descendre. Nebucadnetsar serait mis en face de ses responsabilités envers le ciel, et les événements de l'avenir allaient lui être dévoilés jusqu'à la fin des temps. PR 379 1 "O roi, lui dit Daniel, tu es le roi des rois, car le Dieu des cieux t'a donné l'empire, la puissance, la force et la gloire; il a remis entre tes mains, en quelque lieu qu'ils habitent, les enfants des hommes, les bêtes des champs et les oiseaux du ciel, et il t'a fait dominer sur eux tous: c'est toi qui es la tête d'or. Après toi, il s'élèvera un autre royaume, moindre que le tien; puis un troisième royaume, qui sera d'airain, et qui dominera sur toute la terre. Il y aura un quatrième royaume, fort comme du fer; de même que le fer brise et rompt tout, il brisera et rompra tout, comme le fer qui met tout en pièces. PR 379 2 "Et comme tu as vu les pieds et les orteils en partie d'argile de potier et en partie de fer, ce royaume sera divisé; mais il y aura en lui quelque chose de la force du fer, parce que tu as vu le fer mêlé avec l'argile. Et comme les doigts des pieds étaient en partie de fer et en partie d'argile, ce royaume sera en partie fort et en partie fragile. Tu as vu le fer mêlé avec l'argile, parce qu'ils se mêleront par des alliances humaines; mais ils ne seront point unis l'un à l'autre, de même que le fer ne s'allie point avec l'argile. PR 379 3 "Dans le temps de ces rois, le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit, et qui ne passera point sous la domination d'un autre peuple; il brisera et anéantira tous ces royaumes-là, et lui-même subsistera éternellement. C'est ce qu'indique la pierre que tu as vue se détacher de la montagne sans le secours d'aucune main, et qui a brisé le fer, l'airain, l'argile, l'argent et l'or. Le grand Dieu a fait connaître au roi ce qui doit arriver après cela. Le songe est véritable, et son explication est certaine." PR 380 1 Nebucadnetsar fut convaincu de la véracité de cette explication. Humilié, terrifié, il "tomba sur sa face et se prosterna devant Daniel", en disant: "En vérité, votre Dieu est le Dieu des dieux et le Seigneur des rois, et il révèle les secrets, puisque tu as pu découvrir ce secret." Il annula alors le décret de mort des sages. Ceux-ci eurent donc la vie sauve grâce à Daniel qui avait dévoilé les secrets du roi. PR 380 2 Le monarque "éleva Daniel, et lui fit de nombreux et riches présents. Il lui donna le commandement de toute la province de Babylone et l'établit chef suprême de tous les sages de Babylone. Daniel pria le roi de remettre l'intendance de la province de Babylone à Schadrac, Méschac et Abed-Nego. Et Daniel était à la cour du roi." PR 380 3 Il semble, à lire les annales de l'histoire humaine, que l'avènement et la chute des empires dépendent de la volonté et des exploits des hommes. La tournure des événements paraît se modifier au gré de leur puissance, de leur ambition ou de leur caprice. Mais la Parole de Dieu soulève le voile, et nous contemplons au-dessus, derrière et à travers tout le jeu des intérêts, du pouvoir et des passions des hommes l'action de celui qui, dans sa souveraine miséricorde, accomplit silencieusement et avec patience les desseins de sa volonté. PR 380 4 Avec des paroles d'une beauté et d'une douceur incomparables, l'apôtre Paul exposa aux sages d'Athènes le but divin dans la création et la répartition des races et des nations. "Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qui s'y trouve, affirma-t-il, ... a fait que tous les hommes, sortis d'un seul sang, habitassent sur toute la surface de la terre, ayant déterminé la durée des temps et les bornes de leur demeure; il a voulu qu'ils cherchassent le Seigneur, et qu'ils s'efforçassent de le trouver."1 PR 380 5 Dieu a fait connaître clairement que quiconque le désire peut être mis "dans les liens de l'alliance".2 Le dessein du Seigneur dans la création était que la terre fût habitée par des êtres dont l'existence devait être une bénédiction pour eux-mêmes et pour les autres, ainsi qu'un honneur pour le Créateur. Tous ceux qui le désirent ont le pouvoir de participer à ce dessein. Le prophète Esaïe dit à ce sujet: "Le peuple que je me suis formé publiera mes louanges."3 PR 381 1 Dieu nous a fait connaître dans sa loi les principes qui conditionnent la vraie prospérité pour les nations comme pour les individus. Moïse déclarait aux Israélites, en parlant de cette loi: "Ce sera votre sagesse et votre intelligence." "Ce n'est pas une chose sans importance pour vous; c'est votre vie."4 Les bénédictions promises à Israël sont aussi promises, dans les mêmes conditions et au même degré, à toute nation et à tout individu. PR 381 2 Des centaines d'années avant que certaines nations entrent en jeu dans l'histoire du monde, le Dieu omniscient a prévu les événements et prédit la grandeur et la décadence des royaumes universels. Il a fait connaître à Nebucadnetsar que son royaume s'écroulerait, qu'un autre prendrait sa place et qu'il aurait aussi sa période d'épreuve. N'exaltant pas le vrai Dieu, sa gloire disparaîtrait, et il serait remplacé par un troisième. Celui-ci disparaîtrait à son tour, subjugué par un quatrième aussi fort que le fer, qui soumettrait toutes les nations du globe. PR 381 3 Si les rois de Babylone -- le plus puissant de tous les empires -- avaient manifesté de la crainte envers Dieu, ils auraient reçu la sagesse et le pouvoir qui, les unissant au souverain Maître, auraient continué à assurer leur force. Mais ce n'est que dans les difficultés et la perplexité qu'ils firent de Jéhovah leur refuge. Ce n'est que lorsqu'ils ne trouvaient plus de secours auprès de leurs sages qu'ils en appelaient à des hommes tels que Daniel. PR 381 4 Ces hommes, ils le savaient, honoraient le Dieu vivant et étaient honorés de lui. C'est à eux qu'ils durent s'adresser pour que leur fussent dévoilés les mystères de la Providence, car, bien que les chefs de la fière Babylone fussent doués d'une intelligence supérieure, ils s'étaient éloignés de Dieu par leurs transgressions au point de ne pouvoir comprendre les révélations et les avertissements qui leur étaient donnés concernant l'avenir. PR 381 5 Celui qui sonde la Parole de Dieu peut voir dans les événements de l'histoire des nations l'accomplissement littéral de la prophétie divine. Babylone, vaincue et écrasée, disparut; car au temps de sa prospérité ses chefs voulurent s'affranchir de Dieu, attribuant la gloire de leur royaume aux succès humains. L'empire médo-persan encourut la colère de Jéhovah, la loi divine y étant bafouée. La majorité du peuple n'avait pas la crainte de Dieu. La méchanceté, le blasphème, la corruption régnaient dans cet empire. Les royaumes qui lui succédèrent furent encore plus corrompus, et ils sombrèrent de plus en plus dans le vice. PR 382 1 Le pouvoir exercé par les chefs de ce monde est légué par Dieu, et son succès dépend de l'usage qu'ils en font. Voici la parole adressée à chacun d'eux par le Maître vigilant: "Je t'ai ceint, avant que tu me connusses."5 L'avertissement donné jadis à Nebucadnetsar doit leur servir de leçon: "Mets un terme à tes péchés en pratiquant la justice, et à tes iniquités en usant de compassion envers les malheureux, et ton bonheur pourra se prolonger."6 PR 382 2 Comprendre ces choses, savoir que "la justice élève une nation", que "c'est par la justice que le trône s'affermit", et que le roi "soutient son trône par la bonté",7 reconnaître l'effet de ces principes dans la manifestation du pouvoir de Dieu qui "renverse et établit les rois" -- c'est comprendre la philosophie de l'histoire. PR 382 3 Seule la Parole de Dieu établit clairement ces principes. Elle nous montre que la force des nations comme celle des individus ne réside ni dans les faveurs du sort, ni dans les succès qui semblent les rendre invincibles. Elle ne réside pas non plus dans le pouvoir dont ils se glorifient. Elle est fonction de la fidélité avec laquelle ces nations et ces individus accomplissent le dessein de Dieu. ------------------------Chapitre 41 -- La fournaise ardente PR 383 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 3. PR 383 1 Le songe de Nebucadnetsar, par lequel la grande statue lui avait révélé le déroulement des événements jusqu'à la fin des temps, lui avait été donné pour qu'il puisse comprendre le rôle qu'il allait jouer dans l'histoire du monde, et les rapports qui devaient s'établir entre son royaume et le royaume du ciel. PR 383 2 Par l'interprétation de ce songe, le roi avait été clairement instruit au sujet de l'instauration du royaume éternel. "Dans le temps de ces rois, lui avait déclaré Daniel, le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit, et qui ne passera point sous la domination d'un autre peuple; il brisera et anéantira tous ces royaumes-là, et lui-même subsistera éternellement. .. Le songe est véritable, et son interprétation est certaine."1 PR 383 3 Nebucadnetsar avait reconnu la puissance de Dieu. Il avait dit à Daniel: "En vérité, votre Dieu est le Dieu des dieux et le Seigneur des rois, et il révèle les secrets."2 PR 384 1 Le roi éprouva, pendant un certain temps, la crainte de l'Eternel; mais son coeur n'était pas complètement dépouillé des ambitions terrestres, ni du désir de s'encenser. Il cessa d'honorer le Seigneur, et retourna à l'idolâtrie avec un zèle et un fanatisme accrus. La prospérité qui marqua son règne le remplit d'orgueil. PR 384 2 Ces paroles: "C'est toi qui es la tête d'or"3 avaient produit sur l'esprit du monarque une profonde impression. Les sages de son royaume, profitant des circonstances et de son retour au culte idolâtre, lui proposèrent de dresser une statue semblable à celle qu'il avait vue en songe, et de la placer de manière que tout le monde puisse en voir la tête d'or -- tête qui, d'après l'explication du songe, représentait son royaume. PR 384 3 Grisé par cette proposition flatteuse, Nebucadnetsar décida de mettre ce projet à exécution, et même de faire mieux. Au lieu de reproduire la statue qu'il avait vue en songe, il décida d'en faire une qui surpasserait l'original. Elle serait composée, de la tête aux pieds, non de métaux décroissants, mais entièrement d'or -- parfait symbole de Babylone, royaume éternel, indestructible et tout-puissant, qui réduirait en pièces tous les autres. PR 384 4 L'idée d'établir une domination et une dynastie qui n'auraient point de fin frappait vivement l'imagination du monarque, aux armées duquel nulle nation au monde ne pouvait résister. Avec un enthousiasme déchaîné par son ambition démesurée et son orgueil insensé, il convoqua les sages de son royaume pour qu'ils le conseillent sur le moyen d'arriver à ses fins. Oubliant les magnifiques révélations du songe, oubliant que le Dieu d'Israël, par son serviteur Daniel, avait révélé la signification de ce songe, oubliant que cette interprétation avait sauvé de la mort les grands du royaume, oubliant enfin tout, si ce n'est le désir d'établir leur souveraineté et leur pouvoir personnel, le roi et ses conseillers décidèrent de faire l'impossible pour que la suprématie soit accordée à Babylone, digne d'un honneur universel. PR 384 5 La statue symbolique, par laquelle Dieu avait révélé au monarque et au peuple ses desseins en faveur des nations, allait maintenant servir à glorifier l'homme. L'interprétation de Daniel serait rejetée et oubliée, la vérité mal comprise et faussement appliquée. Cette statue symbolique, destinée à révéler aux hommes les événements importants de l'avenir, deviendrait un obstacle au développement de la connaissance de la vérité que Dieu voulait communiquer au monde. Satan se servait ainsi des desseins ambitieux des hommes pour contrecarrer les plans divins en faveur de l'humanité. L'ennemi des âmes savait que la vérité intégrale est une force puissante pour sauver; mais, lorsque cette vérité est mise au service de la propre glorification de l'homme ou de la réalisation de ses propres désirs, alors elle devient une force pour le mal. Nebucadnetsar eut recours à ses riches réserves de métaux précieux, et il fit construire une immense statue semblable à celle qu'il avait vue en songe. Elle en différait seulement par la nature du métal qui la composait. PR 385 1 Habitués aux proportions colossales des divinités païennes, les Chaldéens n'avaient cependant jamais encore édifié de statue aussi imposante, aussi majestueuse que celle-ci, haute de soixante coudées et large de six coudées. PR 385 2 Dans ce pays où régnait l'idolâtrie, il était tout naturel que cette magnifique statue d'un prix inestimable, s'élevant dans la plaine de Dura et représentant la gloire, la splendeur et la puissance de Babylone, fût un objet de culte. On décréta que le jour de sa dédicace tous les habitants du royaume témoigneraient leur fidélité au roi en se prosternant devant elle. PR 385 3 Le jour venu, on vit affluer dans la plaine de Dura "tous les peuples, les nations, les hommes de toutes langues". Selon l'ordonnance royale, au son des instruments de musique, toute l'assistance se prosterna et adora la statue d'or. PR 385 4 Les puissances des ténèbres semblaient, en ce jour mémorable, remporter un éclatant succès: l'adoration de cette statue était en passe de devenir un rite permanent de l'idolâtrie, reconnue comme religion officielle du royaume. Satan espérait ainsi faire échouer le plan divin au sujet des captifs qui devaient être une source de bénédictions pour toutes les nations païennes. PR 385 5 Mais le Seigneur en décida autrement. Tous ne fléchirent pas le genou devant le symbole païen. Au sein de la multitude des adorateurs, trois hommes étaient fermement résolus à ne pas déshonorer le Dieu du ciel en se prosternant devant cette statue. Ils adoraient le Rois des rois et le Seigneur des seigneurs; ils ne s'agenouilleraient devant aucun autre. PR 386 1 On vint en informer Nebucadnetsar, alors au comble de la gloire. Certains courtisans, parmi les sages du royaume, jaloux des honneurs conférés aux fidèles compagnons de Daniel, furent heureux d'apprendre au roi que des Juifs avaient refusé d'exécuter son décret. "O roi, vis éternellement! lui dirent-ils, il y a des Juifs à qui tu as remis l'intendance de la province de Babylone, Schadrac, Méschac et Abed-Nego, hommes qui ne tiennent aucun compte de toi, ô roi; ils ne servent pas tes dieux, et ils n'adorent point la statue d'or que tu as élevée." PR 386 2 Le roi ordonna aussitôt que ces trois hommes lui fussent amenés. "Est-ce de propos délibéré, leur dit-il ... que vous ne servez pas mes dieux, et que vous n'adorez pas la statue d'or que j'ai élevée?" Et il les invita en les menaçant à s'unir à la multitude des adorateurs. Puis, leur montrant la fournaise ardente, il leur rappela que s'ils persistaient à refuser de faire sa volonté, ils trouveraient là leur châtiment. PR 386 3 Mais les trois jeunes Hébreux déclarèrent avec fermeté qu'ils resteraient fidèles au Dieu du ciel, dont la puissance pour délivrer était connue. Se prosterner devant la statue d'or, c'était aux yeux de tous un acte d'adoration; et cet hommage ne pouvait être rendu qu'à Dieu seul. PR 386 4 Alors que ces trois Hébreux se tenaient en présence du roi, celui-ci avait la conviction qu'ils possédaient quelque chose que n'avaient pas les sages de son royaume. Ils avaient toujours été fidèles dans l'accomplissement de leurs devoirs. S'ils faisaient maintenant preuve de bonne volonté en s'unissant à la foule pour se prosterner devant la statue, tout irait bien pour eux. Mais si "vous ne l'adorez pas, leur dit-il, vous serez jetés à l'instant même au milieu d'une fournaise ardente". Et levant la main vers le ciel en signe de défi, il ajouta: "Quel est le dieu qui vous délivrera de ma main?" PR 386 5 Mais les menaces du roi demeurèrent vaines. Il ne pouvait empêcher ces jeunes gens d'être fidèles au Roi de l'univers. Ils avaient appris en étudiant l'histoire de leurs pères que désobéir à Dieu, c'était sombrer dans le déshonneur, la catastrophe et la mort; et que la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse, la source de toute prospérité véritable. Regardant la fournaise avec calme, ils répliquèrent: "Nous n'avons pas besoin de te répondre là-dessus. Voici, notre Dieu que nous servons peut nous délivrer de la fournaise ardente, et il nous délivrera de ta main, ô roi." Leur foi étant fortifiée par l'idée que Dieu serait glorifié par leur délivrance, ils ajoutèrent avec une assurance triomphante: "Sinon, sache, ô roi, que nous ne servirons pas tes dieux, et que nous n'adorerons pas la statue d'or que tu as élevée." PR 387 1 La colère du roi ne connut alors plus de bornes. "Rempli de fureur, il changea de visage, en tournant ses regards vers Schadrac, Méschac et Abed-Nego", représentants d'une race méprisée et captive. Il ordonna qu'on fît chauffer la fournaise sept fois plus qu'il n'était nécessaire, et que quelques-uns des plus vigoureux soldats de son armée lient les jeunes adorateurs du Dieu d'Israël, en vue de leur rapide exécution. PR 387 2 Alors "ces hommes furent liés avec leurs caleçons, leurs tuniques, leurs manteaux et leurs autres vêtements, et jetés au milieu de la fournaise ardente. Comme l'ordre du roi était sévère, et que la fournaise était extraordinairement chauffée, la flamme tua les hommes qui y avaient jeté Schadrac, Méschac et Abed-Nego." PR 387 3 Mais Dieu n'abandonna pas ses enfants. Lorsque ces jeunes gens furent jetés dans la fournaise, le Sauveur se révéla à eux en personne, et ensemble ils marchèrent au milieu du feu. En présence du Seigneur, auteur de la chaleur et du froid, les flammes avaient perdu leur pouvoir consumant. PR 387 4 Le monarque avait suivi la scène de son trône royal; il s'attendait à voir brûler ces hommes qui l'avaient défié. Mais soudain ses sentiments orgueilleux se modifièrent. Les nobles du royaume qui se tenaient à ses côtés le virent pâlir, alors qu'il se levait de son trône pour mieux voir les flammes de la fournaise. Effrayé, il se tourna vers ses conseillers, et leur demanda: "N'avons-nous pas jeté au milieu du feu trois hommes liés? ... Eh bien, je vois quatre hommes sans liens, qui marchent au milieu du feu, et qui n'ont point de mal; et la figure du quatrième ressemble à celle d'un fils des dieux." PR 388 1 Comment ce roi païen pouvait-il savoir à qui ressemble le Fils de Dieu? En s'acquittant des missions qui leur avaient été confiées à Babylone, les jeunes Hébreux révélèrent la vérité au roi par leur conduite et leur caractère. Questionnés au sujet de leur religion, ils avaient répondu sans hésiter et présenté avec clarté et simplicité les principes de justice de cette religion. Ils avaient ainsi appris à ceux qui les entouraient quel était le Dieu qu'ils adoraient. Ils avaient parlé du Messie, le Rédempteur, qui devait venir ici-bas. C'est ce qui explique que le roi reconnut au milieu de la fournaise, sous les traits du quatrième homme, le Fils de Dieu. PR 388 2 Or donc, oubliant son rang et sa grandeur, Nebucadnetsar descendit les marches de son trône, et, s'approchant de l'entrée de la fournaise, il s'écria: "Serviteurs du Dieu suprême, sortez et venez!" Alors Schadrac, Méschac et Abed-Nego se présentèrent devant la multitude assemblée, et montrèrent qu'ils n'avaient eu aucun mal. La présence de leur Sauveur les avait protégés. Seuls leurs liens avaient été consumés. "Les satrapes, les intendants, les gouverneurs, et les conseillers du roi s'assemblèrent; ils virent que le feu n'avait eu aucun pouvoir sur le corps de ces hommes, que les cheveux de leur tête n'avaient pas été brûlés, que leurs caleçons n'avaient point été endommagés, et que l'odeur du feu ne les avait pas atteints." PR 388 3 Elle était oubliée alors l'imposante statue d'or, élevée avec tant de faste. En présence du Dieu vivant, les hommes étaient pris de panique. "Béni soit le Dieu de Schadrac, de Méschac et d'Abed-Nego, s'écria le roi humilié, lequel a envoyé son ange et délivré ses serviteurs qui ont eu confiance en lui, et qui ont violé l'ordre du roi et livré leurs corps plutôt que de servir et d'adorer aucun autre dieu que leur Dieu!" PR 388 4 Les événements de cette journée poussèrent Nebucadnetsar à proclamer ce décret: "Tout homme, à quelque peuple, nation ou langue qu'il appartienne, qui parlera mal du Dieu de Schadrac, de Méschac et d'Abed-Nego, sera mis en pièces, et sa maison sera réduite en un tas d'immondices, parce qu'il n'y a aucun autre dieu qui puisse délivrer comme lui." PR 389 1 Par ces paroles et d'autres semblables, le roi de Babylone s'efforçait de faire connaître à tous les peuples de la terre sa conviction que le Dieu des Hébreux était digne de l'adoration suprême. Et le Seigneur accueillait avec satisfaction ce désir du monarque qui cherchait à lui témoigner de la révérence, et à propager sa confession royale de fidélité, jusque dans les points les plus reculés de son vaste royaume. PR 389 2 C'était une bonne chose que le roi fît cette confession publique, et cherchât à exalter le Dieu du ciel au-dessus de tous les autres dieux; mais en voulant obliger ses sujets à faire semblable confession, et à témoigner semblable révérence, il outrepassait ses droits de souverain temporel. Il ne lui était pas plus permis, politiquement ou moralement, de menacer les hommes de mort, s'ils n'adoraient pas Dieu, que de lancer un décret vouant aux flammes tous ceux qui refusaient de se prosterner devant la statue d'or. Le Seigneur ne force jamais personne à lui obéir. Il laisse chacun libre de servir le dieu de son choix. PR 389 3 En délivrant ses fidèles serviteurs, Dieu manifesta sa sollicitude envers les opprimés. Il châtie toutes les puissances de ce monde en révolte contre son autorité. PR 389 4 Les trois Hébreux firent connaître à tout l'empire babylonien leur foi en celui qu'ils adoraient. Ils se reposaient sur Dieu. A l'heure de l'épreuve, ils se souvinrent de cette belle promesse: "Si tu traverses les eaux, je serai avec toi; et les fleuves, ils ne te submergeront point; si tu marches dans le feu, tu ne te brûleras pas, et la flamme ne t'embrasera pas."4 PR 389 5 La foi de ces jeunes gens avait été magnifiée aux yeux de tous d'une façon merveilleuse. Les représentants des divers pays invités par Nebucadnetsar à la dédicace de la statue publièrent partout la nouvelle de cette magnifique délivrance. Dieu fut glorifié sur toute la terre par la fidélité de ses enfants. PR 390 1 Comme elles sont importantes ces leçons enseignées par les trois jeunes Hébreux dans la plaine de Dura! Aujourd'hui, bien qu'innocents, de nombreux serviteurs de Dieu auront encore à souffrir des humiliations et des outrages de la part des hommes qui, sous l'inspiration de Satan, seront animés par l'envie et le fanatisme religieux. Leur colère se manifestera tout particulièrement contre les observateurs du quatrième commandement. Finalement, un décret universel les dénoncera comme passibles de mort. PR 390 2 Le temps de détresse, par lequel passera le peuple de Dieu, exigera une foi inébranlable. Il devra montrer que seul le Seigneur est l'objet de son adoration, et que nulle considération humaine, pas même sa propre vie, ne saurait l'amener à la moindre concession à un faux culte. Pour un coeur loyal, les ordres donnés par des hommes pécheurs, aux vues limitées, ne seront d'aucune importance en regard de la Parole de Dieu. Il faut suivre la vérité, qu'il en coûte l'emprisonnement, l'exil ou même la mort. PR 390 3 Comme aux jours de Schadrac, Méschac et Abed-Nego, le Seigneur agira avec puissance, vers la fin des temps, en faveur de ceux qui prennent résolument le parti de la justice. Celui qui soutint les courageux Hébreux dans la fournaise ardente, marchera à leur côté où qu'ils se trouvent. Le sentiment de sa présence sera pour eux une consolation et un soutien. Au plus fort de la persécution -- telle qu'il n'y en eut jamais -- les élus demeureront inébranlables. Satan, avec toutes ses armées, ne parviendra pas à détruire le plus faible des saints. Des anges puissants les protégeront, et le Seigneur se révélera à eux comme le "Dieu des dieux", capable de sauver parfaitement tous ceux qui ont mis leur confiance en lui. ------------------------Chapitre 42 -- La vraie grandeur PR 391 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 4. PR 391 1 Parvenu au sommet des honneurs terrestres, et reconnu par les écrits sacrés comme le "roi des rois",1 Nebucadnetsar voulut bien attribuer, à certains moments de sa vie, la gloire de son royaume et la splendeur de son règne à la faveur de Jéhovah. C'est ce qu'il fit après le songe de la grande statue. Il avait été profondément influencé par cette vision, qui lui révélait que l'empire babylonien bien qu'universel devait s'écrouler un jour, et que d'autres royaumes lui succéderaient jusqu'à ce qu'enfin toutes les puissances terrestres soient remplacées par un royaume instauré par le Dieu du ciel -- royaume qui ne serait jamais détruit. PR 391 2 Mais plus tard, le roi de Babylone perdit de vue la noble idée qu'il se faisait des desseins de Dieu envers les nations. Cependant, lorsqu'il consentit à s'humilier devant la multitude assemblée dans la plaine de Dura, il confessa une fois de plus que le règne de Dieu "est un règne éternel" et que "sa domination subsiste de génération en génération". PR 392 1 Idolâtre par hérédité et par éducation, régnant sur un peuple idolâtre, Nebucadnetsar possédait néanmoins un sens inné de la justice et du droit. Dieu pouvait donc s'en servir pour châtier les rebelles et accomplir ses desseins. Après des années d'une préparation patiente et laborieuse, roi "du plus violent" pays "d'entre les peuples",2 ce monarque réussit à s'emparer de Tyr et de l'Egypte. Et alors qu'il ajoutait nation sur nation à son empire babylonien, sa renommée comme potentat le plus puissant de l'époque s'étendait au loin. PR 392 2 Il ne faut donc pas s'étonner que ce glorieux monarque à l'ambition et à l'orgueil démesurés ait été tenté de se détourner du sentier de l'humilité, qui seul conduit à la véritable grandeur. Dans l'intervalle de ses conquêtes, il apportait beaucoup de soin à la fortification et à l'embellissement de sa capitale, si bien qu'elle devint l'orgueil principal de son royaume, "la ville d'or", celle dont "la gloire remplissait la terre entière". Sa passion pour la construction, l'éclatant triomphe qu'il remporta en faisant de Babylone l'une des sept merveilles du monde, contribuait à entretenir son orgueil au point que fut gravement compromise la sagesse proverbiale de ce souverain dont Dieu aurait pu se servir pour l'accomplissement de ses desseins. PR 392 3 Dans sa miséricorde, le Seigneur envoya au roi un nouveau songe, afin de le mettre en garde contre le piège tendu pour sa perte. Pendant son sommeil, Nebucadnetsar vit un arbre immense, "au milieu de la terre". Sa "cime s'élevait jusqu'aux cieux, et on le voyait des extrémités de toute la terre". Les troupeaux des montagnes et des collines venaient chercher refuge sous son ombre, et les oiseaux du ciel bâtissaient leurs nids dans ses branches. "Son feuillage était beau, et ses fruits abondants; il portait de la nourriture pour tous. ... Tout être vivant tirait de lui sa nourriture." Comme le roi regardait cet arbre majestueux, il aperçut "un de ceux qui veillent et qui sont saints", descendant du ciel. Il cria avec force: PR 393 1 "Abattez l'arbre, et coupez ses branches; secouez le feuillage, et dispersez les fruits; que les bêtes fuient de dessous, et les oiseaux du milieu de ses branches! Mais laissez en terre le tronc où se trouvent les racines, et liez-le avec des chaînes de fer et d'airain, parmi l'herbe des champs. Qu'il soit trempé de la rosée du ciel, et qu'il ait, comme les bêtes, l'herbe de la terre pour partage. Son coeur d'homme lui sera ôté, et un coeur de bête lui sera donné; et sept temps passeront sur lui. Cette sentence est un décret de ceux qui veillent, cette résolution est un ordre des saints, afin que les vivants sachent que le Très-Haut domine sur le règne des hommes, qu'il le donne à qui il lui plaît, et qu'il y élève le plus vil des hommes." PR 393 2 Profondément troublé par ce songe qui, de toute évidence, prédisait l'adversité, le roi en fit part aux magiciens, aux astrologues, aux Chaldéens et aux devins. Mais bien que ce songe ait été très clair, aucun sage ne put en donner l'explication. PR 393 3 Une fois de plus, il fallait à cette nation idolâtre un témoignage établissant le fait que seuls ceux qui aiment et craignent Dieu peuvent comprendre les mystères du royaume des cieux. Dans sa perplexité, le roi fit chercher Daniel, estimé pour son intégrité et sa fidélité, comme pour son incomparable sagesse. PR 393 4 Lorsque Daniel, en réponse à l'ordre royal, comparut devant Nebucadnetsar, celui-ci lui dit: "Beltschatsar, chef des magiciens, qui as en toi, je le sais, l'esprit des dieux saints, et pour qui aucun secret n'est difficile, donne-moi l'explication des visions que j'ai eues en songe." Après avoir relaté ce songe, le roi déclara: "Toi, Beltschatsar, donnes-en l'explication, puisque tous les sages de mon royaume ne peuvent me la donner; toi, tu le peux, car tu as en toi l'esprit des dieux saints." La signification était claire et troubla le prophète. "Il fut un moment stupéfait, et ses pensées le troublaient", dit le texte. Lorsque le roi vit Daniel hésiter et se décontenancer, il manifesta de la sympathie à son serviteur. "Beltschatsar, lui dit-il, que le songe et l'explication ne te troublent pas!" PR 393 5 "Mon seigneur, répondit Daniel, que le songe soit pour tes ennemis, et son explication pour tes adversaires!" Le prophète se rendit compte que Dieu le chargeait d'une mission solennelle -- celle de révéler à Nebucadnetsar le châtiment qui allait s'abattre sur lui à cause de son orgueil et de son arrogance. Daniel devait interpréter le songe de façon à se faire comprendre par le roi; et bien que la signification en ait été terrible, qu'elle l'ait rendu hésitant et jeté dans une muette perplexité, il fallait pourtant dire au roi la vérité, quelles qu'en puissent être les conséquences. PR 394 1 Daniel expliqua donc quel était l'ordre du Tout-Puissant. "L'arbre que tu as vu, dit-il au monarque, qui était devenu grand et fort, dont la cime s'élevait jusqu'aux cieux, et qu'on voyait de tous les points de la terre; cet arbre dont le feuillage était beau et les fruits abondants, qui portait de la nourriture pour tous, sous lequel s'abritaient les bêtes des champs, et parmi les branches duquel les oiseaux du ciel faisaient leur demeure, c'est toi, ô roi, qui es devenu grand et fort, dont la grandeur s'est accrue et s'est élevée jusqu'aux cieux, et dont la domination s'étend jusqu'aux extrémités de la terre. Le roi a vu l'un de ceux qui veillent et qui sont saints descendre des cieux et dire: Abattez l'arbre, et détruisez-le; mais laissez en terre le tronc où se trouvent les racines, et liez-le avec des chaînes de fer et d'airain, parmi l'herbe des champs; qu'il soit trempé de la rosée du ciel, et que son partage soit avec les bêtes des champs, jusqu'à ce que sept temps soient passés sur lui. Voici l'explication, ô roi, voici le décret du Très-Haut, qui s'accomplira sur mon seigneur le roi. On te chassera du milieu des hommes, tu auras ta demeure avec les bêtes des champs et l'on te donnera comme aux boeufs de l'herbe à manger; tu seras trempé de la rosée du ciel, et sept temps passeront sur toi, jusqu'à ce que tu saches que le Très-Haut domine sur le règne des hommes et qu'il le donne à qui il lui plaît. L'ordre de laisser le tronc où se trouvent les racines de l'arbre signifie que ton royaume te restera quand tu reconnaîtras que celui qui domine est dans les cieux." PR 394 2 Après avoir expliqué fidèlement le songe, Daniel invita l'orgueilleux monarque à se repentir et à se tourner vers Dieu, afin d'éviter les calamités qui le menaçaient. "O roi, puisse mon conseil te plaire! poursuivit le prophète, mets un terme à tes péchés en pratiquant la justice et à tes iniquités en usant de compassion envers les malheureux, et ton bonheur pourra se prolonger." PR 395 1 Les paroles du prophète produisirent pendant un certain temps sur l'esprit du roi une forte impression; mais le coeur qui n'est pas transformé par la grâce de Dieu a vite fait d'oublier l'action du Saint-Esprit. L'égoïsme et l'ambition, n'ayant pas encore été déracinés du coeur de Nebucadnetsar, ces traits de caractère ne tardèrent pas à réapparaître. Malgré les instructions qui lui avaient été données si miséricordieusement et les avertissements reçus dans le passé, le roi continua à jalouser les royaumes qui devaient lui succéder. Son règne, caractérisé jusqu'alors par une justice et une bonté extrêmes, devint tyrannique. Son coeur s'endurcit; et il employa les dons que lui avait accordés la Providence à sa glorification personnelle, s'élevant au-dessus de Dieu qui lui avait donné la vie et la puissance. PR 395 2 Pendant des mois, le Seigneur différa son jugement. Mais, au lieu d'être amené à la repentance, le roi donna libre cours à son orgueil. Il finit même par ne plus ajouter foi à l'explication qui lui avait été donnée au sujet du songe. Il en plaisantait volontiers en pensant à la frayeur qu'elle lui avait causée. PR 395 3 Or, un an après avoir reçu l'avertissement divin, Nebucadnetsar se promenait dans son palais. Grisé par sa souveraineté toute-puissante, ainsi que par ses triomphes de bâtisseur, il s'écria: "N'est-ce pas ici Babylone la grande, que j'ai bâtie, comme résidence royale, par la puissance de ma force et pour la gloire de ma magnificence?" PR 395 4 Le roi n'avait pas fini de prononcer ces paroles orgueilleuses qu'une voix se fit entendre du ciel, lui annonçant que l'heure du jugement fixée par Dieu avait sonné. "Apprends, roi Nebucadnetsar, lui dit cette voix, qu'on va t'enlever le royaume. On te chassera du milieu des hommes, tu auras ta demeure avec les bêtes des champs, on te donnera comme aux boeufs de l'herbe à manger; et sept temps passeront sur toi, jusqu'à ce que tu saches que le Très-Haut domine sur le règne des hommes et qu'il le donne à qui il lui plaît." PR 396 1 Il perdit instantanément la raison. Son jugement qu'il croyait parfait, sa sagesse dont il était si fier, tout cela avait disparu. Ayant refusé d'écouter les messages d'avertissement qui lui avaient été prodigués, il était privé du pouvoir dont le Créateur l'avait gratifié. Chassé du milieu des hommes, Nebucadnetsar "mangea de l'herbe comme les boeufs, son corps fut trempé de la rosée du ciel; jusqu'à ce que ses cheveux crussent comme les plumes des aigles, et ses ongles comme ceux des oiseaux". PR 396 2 Pendant sept ans, le roi de Babylone fut un sujet d'étonnement pour ses sujets; pendant sept ans, il fut humilié aux yeux de tout le monde. Puis, il recouvra la raison. Levant les yeux au ciel, il s'humilia devant le Dieu vivant; dans le châtiment qui lui était infligé, il reconnut la main d'en haut. Il confessa publiquement son péché, et rendit gloire à la miséricorde divine qui l'avait réhabilité. "Après le temps marqué, déclara-t-il, moi, Nebucadnetsar, je levai les yeux vers le ciel, et la raison me revint. J'ai béni le Très-Haut, j'ai loué et glorifié celui qui vit éternellement, celui dont la domination est une domination éternelle, et dont le règne subsiste de génération en génération. Tous les habitants de la terre ne sont à ses yeux que néant: il agit comme il lui plaît avec l'armée des cieux et avec les habitants de la terre, et il n'y a personne qui résiste à sa main et qui lui dise: Que fais-tu? En ce temps, la raison me revint; la gloire de mon royaume, ma magnificence et ma splendeur me furent rendues; mes conseillers et mes grands me redemandèrent; je fus rétabli dans mon royaume, et ma puissance ne fit que s'accroître." PR 396 3 L'arrogant monarque d'autrefois n'était plus qu'un humble enfant de Dieu; le despote tyrannique, un roi compatissant et débonnaire. PR 396 4 Celui qui, jadis, avait défié et blasphémé le Dieu du ciel reconnaissait maintenant la toute-puissance du Très-Haut. Il s'efforçait de faire naître dans le coeur de ses sujets la crainte de Jéhovah. PR 396 5 Nebucadnetsar avait appris, dans la leçon infligée par le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, ce que tout souverain devrait connaître, à savoir que la vraie grandeur réside dans la vraie bonté. Il accepta Jéhovah comme le Dieu vivant, et déclara: "Maintenant, moi, Nebucadnetsar, je loue, j'exalte et je glorifie le roi des cieux, dont toutes les oeuvres sont vraies et les voies justes, et qui peut abaisser ceux qui marchent avec orgueil." PR 397 1 Dieu avait voulu que la plus grande nation du monde proclamât sa gloire. Ses desseins étaient maintenant accomplis. PR 397 2 La déclaration publique par laquelle Nebucadnetsar reconnaissait la miséricorde, la bonté et la toute-puissance de Dieu est le dernier acte de sa vie relaté dans le récit sacré. ------------------------Chapitre 43 -- Le spectateur invisible PR 399 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 5. PR 399 1 Vers la fin de sa vie, Daniel assista à de grands changements dans le pays où, soixante ans auparavant, il avait été emmené en captivité avec ses compagnons. Nebucadnetsar, roi du "plus violent d'entre les peuples",1 n'existait plus, et Babylone, sa capitale, "dont la gloire remplissait toute la terre"2 était gouvernée par ses incapables successeurs. Il en était résulté une corruption graduelle et profonde. PR 399 2 Cette ville orgueilleuse allait bientôt s'effondrer à cause de la folie et de la faiblesse de Belschatsar, petit-fils de Nebucadnetsar. Celui-ci, admis dès son jeune âge à prendre part à la direction des affaires du royaume, se glorifiait de sa puissance et défiait le Dieu du ciel. Il avait eu cependant bien des occasions de connaître la volonté divine et de comprendre la responsabilité de s'y soumettre. Il avait connu l'exil de son grand-père, ordonné par le Seigneur, et qui l'avait privé de la société des hommes. Il n'ignorait pas sa conversion et sa miraculeuse réhabilitation. Mais l'amour du plaisir et de la gloire personnelle effaça en lui les leçons qu'il n'aurait jamais dû oublier. Il laissa passer les occasions qui lui étaient si miséricordieusement offertes et négligea de profiter des moyens mis à sa portée pour acquérir une connaissance plus profonde de la vérité. Tout ce que Nebucadnetsar avait acquis au prix de souffrances et d'humiliations indicibles le laissait indifférent. PR 400 1 Mais bientôt les revers surgirent. Babylone fut assiégée par Cyrus, le neveu de Darius le Mède, général des armées médo-persanes. Cette ville passait pour une forteresse imprenable. Protégée par ses murs épais, ses portes d'airain et son fleuve, l'Euphrate, elle possédait des réserves pour plusieurs années. Le voluptueux monarque qu'était Belschatsar se sentait en toute sécurité dans cette enceinte, où il passait son temps en festivités. PR 400 2 Sans souci pour sa tranquillité, ce roi fier et arrogant "donna un grand festin à ses grands au nombre de mille". Toutes les réjouissances dont la richesse et la puissance pouvaient disposer rehaussaient cette scène de leur vive splendeur. De séduisantes femmes aux riches atours se mêlaient aux convives de ce banquet royal, composé d'hommes de génie et de grande distinction, de princes et d'hommes d'Etat. Et le vin coulait à flot, et tous se réjouissaient sous son influence grisante. PR 400 3 La raison obnubilée par son ivresse éhontée, le roi, livré à ses plus bas instincts et à ses plus viles passions, conduisait lui-même cette orgie obscène. Et tandis que la fête battait son plein, il ordonna qu'on apportât "les vases d'or et d'argent que ... Nebucadnetsar avait enlevés du temple, de la maison de Dieu à Jérusalem; et le roi et ses grands, ses femmes et ses concubines, s'en servirent pour boire". Il voulait montrer à ses convives que rien n'était trop sacré pour lui. PR 400 4 "Alors on apporta les vases d'or ... et ils burent du vin, et ils louèrent les dieux d'or, d'argent, d'airain, de fer, de bois et de pierre." PR 400 5 Belschatsar était loin de penser qu'un témoin céleste assistait à cette orgie païenne, qu'un spectateur invisible considérait cette scène de profanation, prêtait l'oreille à la joie sacrilège des invités et voyait leur idolâtrie. Mais bientôt l'hôte qui n'avait pas été invité fit sentir sa présence. Au moment où le festin atteignait le paroxysme du déchaînement, une main pâle apparut et traça sur la chaux de la muraille du palais royal des caractères étincelants comme du feu, des mots qui, bien qu'indéchiffrables pour la vaste assemblée, étaient de sinistres présages pour le roi et ses invités, repris maintenant dans leur conscience. PR 401 1 Les rires tumultueux cessèrent, alors que les assistants, saisis d'une terreur panique, aperçurent la main qui traçait silencieusement sur la muraille les caractères mystérieux. C'était comme un panorama où se déroulaient les détails de leurs mauvaises actions; il leur semblait comparaître à la barre du tribunal de Dieu dont ils venaient de défier le pouvoir. Dans ce lieu où, quelques instants auparavant, régnaient l'hilarité et le blasphème, des visages mortellement pâles se détachaient au milieu des cris d'épouvante. Lorsque Dieu jette la terreur chez les hommes, ils sont incapables de cacher l'intensité de leur frayeur. PR 401 2 Belschatsar était le plus épouvanté de tous. C'est lui qui était le principal responsable de la révolte contre Dieu. Devant ce spectateur invisible, représentant celui dont on avait défié et blasphémé le nom, le roi fut paralysé de terreur. Sa conscience s'éveilla; "les jointures de ses reins se relâchèrent, et ses genoux se heurtèrent l'un contre l'autre". Il s'était élevé contre le Dieu du ciel, il avait compté sur sa propre puissance, sans supposer que quelqu'un oserait lui dire un jour: "Pourquoi agis-tu ainsi?" Il comprenait maintenant que le moment était venu de rendre compte de la gestion qui lui était confiée, et qu'il n'avait plus d'excuse à présenter pour les occasions manquées et son attitude provocante. PR 401 3 Le roi essaya en vain de déchiffrer les lettres de feu Mais elles contenaient un secret qu'il ne pouvait pénétrer, un pouvoir qu'il ne savait ni comprendre ni contester. En désespoir de cause, il se tourna vers les sages de son royaume. Il "cria avec force qu'on fît venir les astrologues, les Chaldéens et les devins", afin de lui lire l'inscription. "Quiconque lira cette écriture, leur dit-il, et m'en donnera l'explication sera revêtu de pourpre, portera un collier d'or à son cou, et aura la troisième place dans le gouvernement du royaume." Mais, malgré ces riches récompenses, cet appel resta vain. La sagesse divine ne saurait ni s'acheter ni se vendre. "Tous les sages du roi ... ne purent pas lire l'Ecriture et en donner au roi l'explication." Ils ressemblaient en cela aux sages de la génération précédente, qui avaient été incapables d'interpréter le songe de Nebucadnetsar. PR 402 1 Alors la reine mère se souvint de Daniel qui, un demi-siècle auparavant, avait expliqué le songe de Nebucadnetsar. "O roi, dit-elle, vis éternellement! Que tes pensées ne te troublent pas, et que ton visage ne change pas de couleur! Il y a dans ton royaume un homme qui a en lui l'esprit des dieux saints; et du temps de ton père, on trouva chez lui des lumières, de l'intelligence, et une sagesse semblable à la sagesse des dieux. Aussi le roi Nebucadnetsar ... l'établit chef des magiciens, des astrologues, des Chaldéens, des devins, parce qu'on trouva chez lui, chez Daniel, nommé par le roi Beltschatsar, un esprit supérieur, de la science et de l'intelligence, la faculté d'interpréter les songes, d'expliquer les énigmes, et de résoudre les questions difficiles. Que Daniel soit donc appelé, et il donnera l'explication. PR 402 2 "Alors Daniel fut introduit devant le roi." S'efforçant de recouvrer ses esprits, Belschatsar dit au prophète: "Es-tu ce Daniel, l'un des captifs de Juda, que le roi, mon Père, a amenés de Juda? J'ai appris sur ton compte que tu as en toi l'esprit des dieux, et qu'on trouve chez toi des lumières, de l'intelligence et une sagesse extraordinaire. On vient d'amener devant moi les sages et les astrologues, afin qu'ils lussent cette écriture et m'en donnassent l'explication; mais ils n'ont pas su donner l'explication des mots J'ai appris que tu peux donner des explications et résoudre des questions difficiles; maintenant, si tu peux lire cette écriture et m'en donner l'explication, tu seras revêtu de pourpre, tu porteras un collier d'or à ton cou, et tu auras la troisième place dans le gouvernement du royaume." PR 402 3 Debout devant cette assemblée terrifiée, Daniel, nullement impressionné par les promesses du roi, manifestant la calme dignité d'un serviteur du Tout-Puissant, ne prononça aucune parole flatteuse. Il interpréta simplement ce message prophétique. "Garde tes dons, dit-il au roi, et accorde à un autre tes présents; je lirai néanmoins l'écriture au roi, et je lui en donnerai l'explication." PR 403 1 Le prophète rappela tout d'abord au monarque les faits qu'il connaissait bien, mais qui ne lui avaient pas appris l'humilité qui aurait pu le sauver. Il lui parla du péché et de la chute de Nebucadnetsar, des appels que Dieu lui avait adressés, de la domination et de la gloire qu'il lui avait accordées, du jugement qui avait attisé son orgueil au lieu de l'humilier, de l'aveu qu'il avait fait par la suite au sujet de la puissance et de la miséricorde célestes. Puis, Daniel exposa au roi son péché et son extrême perversité. Belschatsar se souvenait mal de la vie de son grandpère, il n'avait pas tenu compte des leçons des événements prédits, si lourds de signification pour lui-même. Il avait eu l'occasion de connaître le vrai Dieu et de lui obéir, mais il n'y avait pas appliqué son coeur; il allait maintenant en subir les conséquences. PR 403 2 "Toi, Belschatsar, déclara le prophète ... tu n'as pas humilié ton coeur, quoique tu susses toutes ces choses. Tu t'es élevé contre le Seigneur des cieux; les vases de sa maison ont été apportés devant toi, et vous vous en êtes servi pour boire du vin, toi et tes grands, tes femmes et tes concubines; tu as loué les dieux d'argent, d'or, d'airain, de fer, de bois et de pierre, qui ne voient point, qui n'entendent point, et ne savent rien; et tu n'as pas glorifié le Dieu qui a dans sa main ton souffle et toutes tes voies. C'est pourquoi il a envoyé cette extrémité de main qui a tracé cette écriture." PR 403 3 Et, se tournant vers le message divin inscrit sur la muraille, le prophète lut: MENE, MENE, THEKEL, UPHARSIN. La main qui avait tracé ces caractères n'était plus visible, mais les quatre mots, toujours lumineux, se détachaient avec une netteté impressionnante. L'assistance, haletante, écoutait le vieux prophète déclarer: "Voici l'explication de ces mots: MENE -- compté: Dieu a compté ton règne, et y a mis fin. THEKEL -- pesé: tu as été pesé dans la balance, et tu as été trouvé trop léger. PERES -- divisé: ton royaume sera divisé, et donné aux Mèdes et aux Perses." PR 404 1 Dans cette dernière nuit de folle débauche, Belschatsar et ses grands avaient mis le comble à leurs péchés et aux péchés du royaume chaldéen. La main qui avait retardé le châtiment divin ne pouvait plus le différer. Dieu s'était efforcé par des bénédictions répétées d'enseigner aux Babyloniens le respect de sa loi. "Nous avons voulu guérir Babylone, déclarait le prophète Jérémie, mais elle n'a pas guéri."3 L'extrême perversité du coeur humain ne permit plus de retarder la sentence divine. Belschatsar devait disparaître pour faire place à un autre royaume. PR 404 2 Lorsque Daniel eut achevé son explication, le roi ordonna qu'on lui attribuât les honneurs promis. En conséquence, "on [le] revêtit de pourpre, on lui mit au cou un collier d'or, et on publia qu'il aurait la troisième place dans le gouvernement du royaume". PR 404 3 Plus d'un siècle auparavant, la parole inspirée avait prédit que "la nuit ... de plaisir", au cours de laquelle le roi et ses conseillers chercheraient à rivaliser pour blasphémer contre Dieu, serait soudain changée en une nuit de terreur et de ruine. Or cette nuit-là de rapides événements se succédèrent, exactement comme l'avait prédit Daniel. PR 404 4 Tandis que Belschatsar se trouvait encore dans la salle du festin, entouré de ceux dont le sort était lié au sien, on vint annoncer que la "ville était prise" par l'ennemi contre lequel ils se croyaient si bien défendus, "que les passages étaient envahis, ... et que les hommes de guerre étaient consternés".4 Au moment même où le roi et ses grands buvaient dans les vases sacrés du temple de Jérusalem et louaient leurs dieux d'argent, d'or, d'airain, de bois, les Mèdes et les Perses, après avoir détourné les eaux de l'Euphrate, pénétraient au coeur de la ville privée de défense. Les armées de Cyrus se trouvaient maintenant sous les murs du palais. Babylone était envahie par les soldats ennemis, nombreux "comme les sauterelles",5 et leurs cris de triomphe dominaient ceux des convives terrifiés. PR 404 5 "Cette nuit, Belschatsar, roi des Chaldéens, fut tué", et un monarque étranger le remplaça sur le trône. PR 404 6 Avec quelle exactitude les prophètes hébreux avaient annoncé la chute de Babylone! Dans leurs visions des événements de l'avenir, ils s'étaient écriés: "Eh quoi! Schéschac est prise! celle dont la gloire remplissait toute la terre est conquise! Eh quoi! Babylone est détruite au milieu des nations!" "Eh quoi! il est rompu, brisé, le marteau de toute la terre! Babylone est détruite au milieu des nations!" "Au bruit de la prise de Babylone la terre tremble, et un cri se fait entendre parmi les nations." "Soudain Babylone tombe, elle est brisée!" "Oui, le dévastateur fond sur elle, sur Babylone; les guerriers de Babylone sont pris, leurs arcs sont brisés. Car l'Eternel est un Dieu qui rend à chacun selon ses oeuvres, qui paie à chacun son salaire. J'enivrerai ses princes et ses sages, ses gouverneurs, ses chefs et ses guerriers; ils s'endormiront d'un sommeil éternel, et ne se réveilleront plus, dit le roi, dont l'Eternel des armées est le nom." PR 405 1 "Je t'ai tendu un piège, et tu as été prise, Babylone, à l'improviste; tu as été atteinte, saisie, parce que tu as lutté contre l'Eternel. L'Eternel a ouvert son arsenal, et il en a tiré les armes de sa colère; car c'est là une oeuvre du Seigneur, de l'Eternel des armées, dans le pays des Chaldéens." PR 405 2 "Ainsi parle l'Eternel des armées: Les enfants d'Israël et les enfants de Juda sont ensemble opprimés; tous ceux qui les ont emmenés captifs les retiennent, et refusent de les relâcher. Mais leur vengeur est puissant, lui dont l'Eternel des armées est le nom; il défendra leur cause, afin de donner le repos au pays, et de faire trembler les habitants de Babylone."6 PR 405 3 Ainsi, "les larges murailles de Babylone" furent "renversées, ses hautes portes ... brûlées par le feu". Ainsi, l'Eternel des armées fit "cesser l'orgueil des hautains", et abattit "l'arrogance des tyrans" . Babylone, l'ornement des royaumes, la fière parure des Chaldéens, devint "comme Sodome et Gomorrhe", un lieu à jamais maudit. "Elle ne sera plus jamais habitée", déclarait le prophète. "Elle ne sera plus jamais peuplée; l'Arabe n'y dressera point sa tente, et les bergers n'y parqueront point leurs troupeaux. Les animaux du désert y prendront leur gîte, les hiboux rempliront ses maisons, les autruches en feront leur demeure et les boucs y sauteront. Les chacals hurleront dans ses palais, et les chiens sauvages dans ses maisons de plaisance." "J'en ferai le gîte du hérisson et un marécage, et je la balaierai avec le balai de la destruction, dit l'Eternel des armées."7 PR 406 1 Le spectateur invisible avait adressé cette sentence au dernier roi de Babylone: "Apprends ... qu'on va t'enlever le royaume."8 PR 406 2 Descends, et assieds-toi dans la poussière, Vierge, fille de Babylone! Assieds-toi à terre, sans trône. ... Assieds-toi en silence, et va dans les ténèbres, Fille des Chaldéens! On ne t'appellera plus la souveraine des royaumes. J'étais irrité contre mon peuple, J'avais profané mon héritage, Et je les avais livrés entre tes mains: Tu n'as pas eu pour eux de la compassion. ... Tu disais: A toujours je serai souveraine! Tu n'as point mis dans ton esprit, Tu n'as point songé que cela prendrait fin. Ecoute maintenant ceci, voluptueuse Qui t'assieds avec assurance, Et qui dis en ton coeur: Moi, et rien que moi! Je ne serai jamais veuve, Et je ne serai jamais privée d'enfants! Ces deux choses t'arriveront subitement, au même jour, La privation d'enfants et le veuvage; Elles fondront en plein sur toi, ... Malgré le grand nombre de tes enchantements. Tu avais confiance dans ta méchanceté, Tu disais: Personne ne me voit! Ta sagesse et ta science t'ont séduite. Et tu disais en ton coeur: Moi, et rien que moi! Le malheur viendra sur toi, Sans que tu en voies l'aurore; La calamité tombera sur toi, Sans que tu puisses la conjurer; Et la ruine fondra sur toi tout à coup, A l'improviste. Reste donc au milieu de tes enchantements Et de la multitude de tes sortilèges, Auxquels tu as consacré ton travail dès ta jeunesse; Peut-être pourras-tu en tirer profit, Peut-être deviendras-tu redoutable. Tu t'es fatiguée à force de consulter: Qu'ils se lèvent donc et qu'ils te sauvent, Ceux qui connaissent le ciel, Qui observent les astres, Qui annoncent, d'après les nouvelles lunes, Ce qui doit arriver! Voici, ils sont comme de la paille, le feu les consume, Ils ne sauveront pas leur vie des flammes. ... Il n'y aura personne qui vienne à ton secours. PR 407 1 C'est Dieu qui permet à toutes les nations, appelées à jouer un rôle important dans l'histoire, de s'établir ici-bas afin de voir si elles accompliront ses desseins. La prophétie a consigné la naissance et l'évolution des grands empires: Babylone, Médo-persan, Grec et Romain. Avec chacun d'eux, comme avec les nations de moindre importance, l'histoire s'est répétée. Chaque pays a connu son temps d'épreuve; chacun a failli à sa mission, a vu sa gloire s'évanouir et sa puissance disparaître. PR 407 2 Mais bien que les nations aient rejeté les principes divins et travaillé ainsi à leur propre ruine, le Tout-Puissant a poursuivi à travers tous les âges le but qu'il s'était proposé. C'est ce qu'il fut donné au prophète Ezéchiel de contempler dans une vision. Alors qu'il était en exil en Chaldée, une scène merveilleuse passa devant ses yeux, des symboles lui apparurent lui révélant qu'une puissance dirige les affaires de ce monde. PR 407 3 Sur les rives du fleuve de Kebar, le prophète entendit un vent impétueux qui semblait souffler du septentrion. "Une grosse nuée, et une gerbe de feu qui répandait de tous côtés une lumière éclatante, au centre de laquelle brillait comme de l'airain poli." Des roues s'entrecroisaient et étaient mues par quatre animaux. Au-dessus de ceux-ci "il y avait quelque chose de semblable à une pierre de saphir, en forme de trône; et sur cette forme de trône apparaissait comme une figure d'homme placé dessus en haut". "On voyait aux chérubins une forme de main d'homme sous leurs ailes."10 La structure des roues était si compliquée qu'elles paraissaient à première vue s'enchevêtrer, et cependant elles se mouvaient dans une harmonie parfaite. Des êtres célestes, soutenus et guidés par la main placée sous les ailes des chérubins, actionnaient ces roues. Au-dessus d'eux, sur le trône de saphir, se trouvait Jéhovah, et ce trône était environné d'un arc-en-ciel, emblème de la miséricorde divine. PR 408 1 De même que le mécanisme compliqué des roues était dirigé par la main placée sous les ailes des chérubins, de même le jeu compliqué des événements est sous le contrôle divin. Au milieu des luttes et du tumulte des nations, celui qui est assis au-dessus des chérubins continue à diriger les affaires de ce monde. PR 408 2 L'histoire des nations nous sert aujourd'hui d'enseignement. Dans son vaste plan, Dieu a assigné une place à chaque peuple, à chaque individu. De nos jours, hommes et nations seront mis à l'épreuve et jaugés avec la mesure placée dans la main de celui qui ne saurait se tromper. Hommes et nations décident de leur sort d'après leur propre choix, et Dieu dirige tout pour l'accomplissement de ses desseins. PR 408 3 Les prophéties que le grand JE SUIS a données dans sa Parole sont autant d'anneaux de la chaîne des événements qui relie l'éternité dans le passé à l'éternité dans l'avenir. C'est par elles que nous savons où nous en sommes aujourd'hui et ce que nous devons attendre des temps à venir. Tout ce que les prophéties ont prédit comme devant arriver jusqu'à nos jours a été consigné dans les pages de l'histoire, et on peut être assuré que tout ce qui doit se produire s'accomplira au moment voulu. PR 408 4 Les signes des temps proclament que nous sommes arrivés au seuil d'événements grands et solennels. Tout ici-bas est en agitation. Les prophéties du Sauveur relatives à ce qui va se passer avant son retour s'accomplissent sous nos yeux: "Vous entendrez parler de guerres et de bruits de guerres, a dit Jésus. ... Une nation s'élèvera contre une nation, et un royaume contre un royaume, et il y aura, en divers lieux, des famines et des tremblements de terre."11 PR 408 5 Notre époque offre un intérêt capital pour nous tous. Gouverneurs, hommes d'Etat, tous ceux qui occupent des postes de confiance, tous ceux qui réfléchissent ont l'attention fixée sur les événements qui se déroulent autour de nous. Ils suivent avec intérêt les rapports qui existent entre les nations; ils notent la tension qui s'exerce sur les éléments terrestres, et ils reconnaissent que quelque chose de grand et de décisif va se produire: le monde est à la veille d'une catastrophe effroyable. Seule la Bible nous donne une vue exacte de ces choses; elle nous révèle les grandes scènes finales de l'histoire de notre monde, nous parle d'événements qui projettent déjà leurs ombres lugubres ici-bas, nous fait entendre le bruit qui annonce leur approche, bruit qui fait trembler la terre et met les hommes dans un état où ils rendent l'âme de frayeur. PR 409 1 Parlant de cette époque, le prophète Esaïe s'exprime ainsi: PR 409 2 "Voici, l'Eternel dévaste le pays et le rend désert, il en bouleverse la face et en disperse les habitants. ... Car ils transgressaient les lois, violaient les ordonnances, ils rompaient l'alliance éternelle. C'est pourquoi la malédiction dévore le pays."12 PR 409 3 "Ah! quel jour! Car le jour de l'Eternel est proche: il vient comme un ravage du Tout-Puissant. ... Les semences ont séché sous les mottes; les greniers sont vides, les magasins sont en ruines, car il n'y a point de blé. Comme les bêtes gémissent! Les troupeaux de boeufs sont consternés, parce qu'ils sont sans pâturage; et même les troupeaux de brebis sont en souffrance." "La vigne est confuse, le figuier languissant; le grenadier, le palmier, le pommier, tous les arbres des champs sont flétris... La joie a cessé parmi les fils de l'homme!"13 PR 409 4 "Mes entrailles! mes entrailles! je souffre au-dedans de mon coeur, le coeur me bat, je ne puis me taire; car tu entends, mon âme, le son de la trompette, le cri de guerre. On annonce ruine sur ruine, car tout le pays est ravagé."14 PR 409 5 "Malheur! car ce jour est grand; il n'y en a point eu de semblable. C'est un temps d'angoisse pour Jacob; mais il en sera délivré."15 PR 409 6 "Tu es mon refuge, ô Eternel! tu fais du Très-Haut ta retraite. Aucun malheur ne t'arrivera, aucun fléau n'approchera de ta tente."16 PR 409 7 "Fille de Sion, ... l'Eternel te rachètera de la main de tes ennemis. Maintenant plusieurs nations se sont rassemblées contre toi: qu'elle soit profanée, disent-elles, et que nos yeux se rassasient dans Sion! Mais elles ne connaissent pas les pensées de l'Eternel, elles ne comprennent pas ses desseins."17 Dieu n'abandonnera pas son Eglise au moment où elle court le plus grand danger. Il a promis de la délivrer: "Voici, dit-il, je ramène les captifs des tentes de Jacob, j'ai compassion de ses demeures."18 PR 410 1 C'est ainsi que les desseins de Dieu s'accompliront et que les principes de son royaume seront honorés sur toute la terre. ------------------------Chapitre 44 -- Dans la fosse aux lions PR 411 0 Ce chapitre est basé sur Daniel 6. PR 411 1 Lorsque Darius le Mède s'empara du pouvoir, jusque-là aux mains des rois babyloniens, il procéda immédiatement à la réorganisation de l'administration. Il établit "cent vingt satrapes. ... Il mit à leur tête trois chefs, au nombre desquels était Daniel, afin que ces satrapes leur rendissent compte, et que le roi ne souffrît aucun dommage. Daniel surpassait les chefs et les satrapes, parce qu'il y avait en lui un esprit supérieur; et le roi pensait à l'établir sur tout le royaume." PR 411 2 Les honneurs dont Daniel était comblé excitèrent la jalousie des satrapes, qui cherchèrent une occasion pour l'accuser. Mais ils ne purent en trouver, car "il était fidèle et on n'apercevait chez lui ni faute, ni rien de mauvais". PR 411 3 Cette conduite irréprochable de Daniel ne fit que lui attirer encore davantage la haine de ses ennemis. "Nous ne trouvons aucune occasion contre ce Daniel, furent-ils obligés de reconnaître, à moins que nous n'en trouvions une dans la loi de son Dieu." PR 412 1 Là-dessus, les chefs et les satrapes se concertèrent pour tramer un complot qui, espéraient-ils, mettrait fin aux jours du prophète. Ils décidèrent donc de demander au roi d'émettre un décret défendant à tous les habitants du royaume, pendant trente jours, d'adresser des prières à Dieu ou à un homme à l'exception du roi Darius. Celui qui le violerait serait jeté dans la fosse aux lions. PR 412 2 En demandant à Darius de signer ce décret, les satrapes s'efforcèrent de lui démontrer qu'il renforcerait sa gloire et son autorité. Et le roi, ignorant tout de ce complot rusé et ne soupçonnant même pas la haine des satrapes, se laissa aller à leur flatterie. Il signa le décret. PR 412 3 Alors les ennemis de Daniel se retirèrent, tout heureux d'avoir réussi à tendre un piège au serviteur de Dieu. Satan avait joué un rôle important dans cette affaire. Il craignait que le prophète, qui exerçait une grande autorité dans le royaume, n'affaiblît son influence sur les chefs. Ce furent ses mauvais anges qui suscitèrent chez les satrapes l'envie et la jalousie; ils leur suggérèrent l'élaboration de ce décret pour se débarrasser de Daniel. PR 412 4 Les ennemis du prophète comptaient sur sa ferme adhésion à ses principes pour la réussite de leur plan. Et ils ne se trompèrent pas. Daniel discerna rapidement la méchanceté qui se cachait dans ce décret, mais il ne modifia en rien sa conduite. Pourquoi cesserait-il de prier alors qu'il avait le plus besoin de force spirituelle? Plutôt renoncer à la vie qu'à son espoir en Dieu. Sans se départir de son calme habituel, il continua à s'acquitter de sa tâche de chef des satrapes. A l'heure de la prière, il se retirait dans sa maison dont les fenêtres s'ouvraient dans la direction de Jérusalem; et, selon son habitude, il invoquait son Dieu. Il n'essayait pas de se cacher pour se livrer à la prière. Bien qu'il sût parfaitement ce qui l'attendait, il ne faiblit pas un seul instant. Il n'aurait pas voulu que ceux qui complotaient sa mort croient que ses relations avec le Très-Haut s'étaient modifiées. PR 413 1 Daniel obéissait à Darius sur tout ce qu'il lui reconnaissait le droit de commander; mais ni lui ni son décret ne pouvaient le détourner de sa loyauté envers le Roi des rois. Il affirmait ainsi courageusement, mais humblement et silencieusement, que nul n'a le droit de s'interposer entre la conscience et Dieu. Au sein de l'idolâtrie où il vivait, il rendait un fidèle témoignage à cette vérité. Sa ferme adhésion à ce qui est juste était une lumière qui resplendissait au milieu de l'obscurité morale de la cour païenne. Daniel reste ainsi pour tous les âges un exemple courageux de fidélité chrétienne. PR 413 2 Les satrapes observèrent Daniel pendant toute une journée. Ils le virent se rendre dans sa maison et, à trois reprises, l'entendirent élever la voix vers Dieu, dans une fervente prière. Ils se présentèrent dès le lendemain matin devant le roi pour lui faire part de la chose. Daniel, le plus honoré, le plus fidèle de ses chefs, avait osé défier le décret royal. "N'as-tu pas écrit une défense, lui rappelèrent-ils, portant que quiconque dans l'espace de trente jours adresserait des prières à quelque dieu ou à quelque homme, excepté à toi, ô roi, serait jeté dans la fosse aux lions? Le roi répondit: La chose est certaine, selon la loi des Mèdes et des Perses, qui est immuable." PR 413 3 Triomphants, ils apprirent alors à Darius quelle était la conduite de son plus sûr conseiller. "Daniel, lui dirent-ils, l'un des captifs de Juda, n'a tenu aucun compte de toi, ô roi, ni de la défense que tu as écrite, et il a fait sa prière trois fois le jour." PR 413 4 Lorsque le monarque entendit ces paroles, il se rendit compte immédiatement qu'on avait voulu tendre un piège à son fidèle serviteur, et que ce n'était pas par enthousiasme pour la gloire royale qu'on l'avait amené à promulguer ce décret, mais plutôt par jalousie à l'égard de Daniel. "Le roi fut très affligé" d'avoir joué un mauvais rôle dans ce complot. "Il prit à coeur ... jusqu'au coucher du soleil" de délivrer son ami. PR 413 5 Les satrapes s'attendaient à cette initiative de la part du roi. Ils vinrent lui dire: "Sache, ô roi, que la loi des Mèdes et des Perses exige que toute défense ou tout décret confirmé par le roi soit irrévocable." Bien que rédigé hâtivement ce décret était donc intangible, et il devait être appliqué intégralement. PR 414 1 "Alors le roi donna l'ordre qu'on amenât Daniel, et qu'on le jetât dans la fosse aux lions. Le roi prit la parole et dit à Daniel: Puisse ton Dieu, que tu sers avec persévérance, te délivrer! On apporta une pierre, et on la mit sur l'ouverture de la fosse; le roi la scella de son anneau et de l'anneau de ses grands, afin que rien ne fût changé à l'égard de Daniel. Le roi se rendit ensuite dans son palais; il passa la nuit à jeun, il ne fit point venir de concubine auprès de lui, et il ne put se livrer au sommeil." PR 414 2 Dieu n'empêcha pas les ennemis de Daniel de le jeter dans la fosse aux lions. Il permit aux démons et aux hommes pervers de réaliser jusqu'à ce point leur projet. Mais c'était afin de rendre plus éclatante la délivrance de son serviteur et plus totale la défaite des ennemis de la vérité et de la justice. "L'homme te célèbre, a dit le Psalmiste en parlant de Dieu, même dans sa fureur."1 Par le courage de ce prophète qui préféra le bien aux honneurs, Dieu allait exalter son nom et confondre Satan. PR 414 3 Le lendemain, au point du jour, le roi Darius se rendit en toute hâte à la fosse aux lions, et "il appela Daniel d'une voix triste: Daniel, serviteur du Dieu vivant, ton Dieu que tu sers avec persévérance, a-t-il pu te délivrer des lions?" Le prophète lui répondit: "Roi, vis éternellement! Mon Dieu a envoyé son ange et fermé la gueule des lions, qui ne m'ont fait aucun mal, parce que j'ai été trouvé innocent devant lui; et devant toi non plus, ô roi, je n'ai rien fait de mauvais. Alors le roi fut très joyeux, et il ordonna qu'on fît sortir Daniel de la fosse. Daniel fut donc retiré de la fosse, et on ne trouva sur lui aucune blessure, parce qu'il avait eu confiance en son Dieu. Le roi ordonna que ces hommes qui avaient accusé Daniel fussent amenés et jetés dans la fosse aux lions, eux, leurs enfants et leurs femmes; et avant qu'ils fussent parvenus au fond de la fosse, les lions les saisirent et brisèrent tous leurs os." PR 414 4 Une fois de plus on vit un roi païen faire paraître un édit exaltant le Dieu de Daniel comme le vrai Dieu. "Après cela, le roi Darius écrivit à tous les peuples, à toutes les nations, aux hommes de toutes langues, qui habitaient sur toute la terre: Que la paix vous soit donnée avec abondance! J'ordonne que, dans toute l'étendue de mon royaume, on ait de la crainte et de la frayeur pour le Dieu de Daniel. Car il est le Dieu vivant, et il subsiste éternellement; son royaume ne sera jamais détruit, et sa domination durera jusqu'à la fin. C'est lui qui délivre et qui sauve, qui opère des signes et des prodiges dans les cieux et sur la terre. C'est lui qui a délivré Daniel de la puissance des lions." PR 415 1 L'opposition qu'avait rencontrée le serviteur de Dieu était maintenant totalement brisée. "Daniel prospéra sous le règne de Darius, et sous le règne de Cyrus, le Perse." Les monarques païens avaient été obligés de reconnaître à la suite des rapports qu'ils avaient eus avec Daniel que son Dieu "est le Dieu vivant, qu'il subsiste éternellement et que son royaume ne sera jamais détruit". PR 415 2 Cette délivrance de Daniel nous apprend qu'au moment de l'épreuve et des tribulations les enfants de Dieu doivent continuer à se comporter comme aux jours où, évoluant dans un milieu facile, tous leurs projets s'annoncent pleins d'espoir. Le Daniel de la fosse aux lions était le même Daniel qui remplissait auprès du roi les fonctions de chef parmi ses ministres et celles de prophète du Très-Haut. L'homme qui s'appuiera sur Dieu ne changera ni dans les heures sombres de l'adversité, ni dans les jours heureux de la prospérité où la lumière divine et les faveurs humaines se répandent sur lui. La foi atteint l'invisible et s'empare des réalités éternelles. PR 415 3 Le ciel est tout près de ceux qui souffrent pour l'amour de la justice. Le Christ identifie ses intérêts à ceux de ses fidèles disciples; il souffre dans la personne de ses saints, et celui qui les touche le touche aussi. La puissance qui est prête à délivrer l'homme du danger physique ou de la détresse morale est prête aussi à le sauver de plus grands maux; elle permet au serviteur de Dieu de garder son intégrité dans toutes les circonstances et de triompher par la grâce divine. PR 415 4 La conduite de Daniel comme homme d'Etat des royaumes babylonien et médo-persan met en évidence le fait qu'un homme qui occupe une situation semblable n'est pas nécessairement un intrigant ou un arriviste, mais un homme qui peut recevoir constamment des instructions divines. Daniel, premier ministre du plus grand royaume du monde, était en même temps prophète du Très-Haut, et par conséquent inspiré par lui. Il n'était pas parfait cependant; c'était un homme de même nature que nous. Mais la plume inspirée nous le décrit comme étant irréprochable. Ses ennemis les plus acharnés ne pouvaient rien trouver à redire à la manière dont il s'acquittait de sa tâche. Son exemple devrait montrer aux hommes d'Etat comment se comporter quand on est converti et consacré au Seigneur. PR 416 1 Une stricte obéissance aux exigences divines procure de riches bénédictions matérielles et spirituelles. Daniel fut fidèle à son Dieu, et il ne perdit jamais la maîtrise de sa personne. Par sa noble dignité, son inébranlable intégrité, alors qu'il n'était qu'un jeune homme, il trouva "faveur et grâce"2 auprès du chef des eunuques qui s'occupait de lui. Ces caractéristiques, il les conserva constamment par la suite. Aussi s'éleva-t-il rapidement aux fonctions de premier ministre du royaume babylonien. Au cours des règnes successifs des monarques chaldéens, à la chute de l'empire et à l'instauration d'un nouveau royaume, il faisait preuve de tant de sagesse, de tant de compétence dans le gouvernement, il agissait avec un tel tact, une telle courtoisie, sa bonté était si réelle, sa fidélité aux principes si grande que ses ennemis étaient obligés de confesser "qu'on n'apercevait chez lui ni faute, ni rien de mauvais". PR 416 2 Honoré ici-bas comme homme d'Etat détenant les secrets des royaumes qui dominaient l'univers, Daniel était aussi honoré par Dieu dont il était l'ambassadeur et qui lui donnait des révélations concernant les mystères de l'avenir. Ces admirables prophéties, contenues aux chapitres sept à douze du livre qui porte son nom, ne furent pas entièrement comprises par lui; mais, avant de terminer sa tâche, il reçut la bienheureuse assurance qu'"au temps de la fin" -- quand l'histoire du monde arriverait à son terme -- il serait "debout pour son héritage". PR 416 3 Il ne lui fut pas donné de comprendre tout ce que Dieu lui avait révélé. "Tiens secrètes ces paroles, et scelle le livre jusqu'au temps de la fin",3 lui fut-il dit. C'est pourquoi, à mesure que nous approchons de la fin de toutes choses, les prophéties de Daniel exigent une attention toute particulière, car elles nous parlent de l'époque même où nous vivons. Ces prophéties doivent être rapprochées de celles de Jean dans l'Apocalypse. Satan s'est efforcé au cours des âges de faire croire à de nombreux chrétiens que les livres de Daniel et de l'Apocalypse étaient incompréhensibles. Mais il fut dit à Daniel: "Ceux qui auront de l'intelligence comprendront."4 Et Jean, de son côté, entendit ces paroles: "Heureux celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de la prophétie, et qui gardent les choses qui y sont écrites!"5 PR 417 1 La grandeur et la décadence des nations, telles que nous les ont décrites les livres de Daniel et de l'Apocalypse, devraient nous apprendre combien vaine est la gloire de ce monde. Babylone, dans toute sa magnificence et dont la puissance n'a jamais été égalée, semblait devoir durer éternellement. Mais où est-elle aujourd'hui? Elle a passé "comme la fleur de l'herbe".6 Les empires qui lui ont succédé: médo-persan, grec et romain passèrent de la même manière. Et ainsi périra tout ce qui n'a pas Dieu pour fondement. Seul demeure ce qui est selon ses desseins et qui exprime son caractère. Ses principes constituent les seules bases durables ici-bas. PR 417 2 Une étude attentive de l'accomplissement du plan divin dans l'histoire des nations et des prophéties relatives aux événements futurs nous aidera à estimer à leur juste valeur les choses visibles et invisibles, et à apprendre quel est le but véritable de la vie. Ainsi, en considérant les événements à la lumière de l'éternité, il est possible de vivre comme Daniel et ses compagnons pour ce qui est vrai, noble et durable. En apprenant ici-bas à nous conformer aux principes du royaume de notre Seigneur et Sauveur -- royaume qui durera éternellement -- nous serons prêts quand il apparaîtra une seconde fois à entrer avec lui dans sa gloire. ------------------------Chapitre 45 -- Retour de l'exil PR 419 1 L'arrivée des armées de Cyrus devant les murs de Babylone fut pour les Juifs le signe que leur délivrance approchait. Plus d'un siècle avant la naissance de ce monarque, la prophétie avait mentionné son nom. Elle avait annoncé le rôle qu'il devait jouer en s'emparant de Babylone à l'improviste et en préparant la voie pour le retour des Israélites de la captivité. Voici ce que nous dit à ce sujet le prophète Esaïe: PR 419 2 "Ainsi parle l'Eternel à son oint, à Cyrus, qu'il tient par la main, pour terrasser les nations devant lui, et pour relâcher la ceinture des rois, pour lui ouvrir les portes, afin qu'elles ne soient plus fermées: Je marcherai devant toi, j'aplanirai les chemins montueux, je romprai les portes d'airain, et je briserai les verrous de fer. Je te donnerai des trésors cachés, des richesses enfouies, afin que tu saches que je suis l'Eternel qui t'appelle par ton nom, le Dieu d'Israël."1 PR 419 3 Lorsque les armées du conquérant perse pénétrèrent inopinément dans la capitale babylonienne, en empruntant le lit de l'Euphrate dont les eaux avaient été détournées, lorsque Cyrus franchit les portes intérieures de la ville, laissées ouvertes par négligence et privant la capitale de défense, les Juifs eurent la preuve évidente que la prophétie d'Esaïe s'accomplissait littéralement -- prophétie relative à la ruine soudaine de leurs oppresseurs. Ils avaient là un signe éclatant que Dieu dirigeait les affaires des nations en leur faveur, car à la prophétie annonçant la chute de Babylone étaient ajoutées ces paroles: "Je dis de Cyrus: Il est mon berger, et il accomplira toute ma volonté; il dira de Jérusalem: Qu'elle soit rebâtie! et du temple: Qu'il soit fondé!" "C'est moi qui ai suscité Cyrus dans ma justice, et j'aplanirai toutes ses voies; il rebâtira ma ville, et libérera mes captifs, sans rançon ni présents, dit l'Eternel des armées."2 PR 420 1 Ces prophéties n'étaient pas les seules qui auraient dû permettre aux exilés de croire à leur prochaine délivrance. Les écrits de Jérémie étaient à leur portée, et ils pouvaient y lire nettement la période de temps qui s'écoulerait avant leur retour en Palestine. "Lorsque ces soixante et dix ans seront accomplis, écrivait le prophète, je châtierai le roi de Babylone et cette nation, dit l'Eternel. ... Je punirai le pays des Chaldéens, et j'en ferai des ruines éternelles."3 Dieu montrerait sa faveur envers le reste de Juda qui lui adresserait de ferventes prières. "Je me laisserai trouver par vous, dit l'Eternel, et je ramènerai vos captifs; je vous rassemblerai de toutes les nations et de tous les lieux où je vous ai chassés, dit l'Eternel, et je vous ramènerai dans le lieu d'où je vous ai fait aller en captivité."4 PR 420 2 Que de fois Daniel et ses compagnons s'étaient attardés sur ces prophéties et d'autres semblables soulignant les intentions de Dieu à l'égard de son peuple! Et maintenant que le cours rapide des événements montrait que la puissante main du Seigneur était à l'oeuvre parmi les nations, Daniel pensait tout particulièrement aux promesses faites à Israël. Sa foi dans la parole prophétique le poussait à approfondir les messages des écrivains sacrés. "Dès que soixante et dix ans seront écoulés pour Babylone, y était-il dit, je me souviendrai de vous, et j'accomplirai à votre égard ma bonne parole, en vous ramenant dans ce lieu. Car je connais les projets que j'ai formés sur vous, dit l'Eternel, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et de l'espérance. Vous m'invoquerez, et vous partirez; vous me prierez, et je vous exaucerai. Vous me chercherez, et vous me trouverez, si vous me cherchez de tout votre coeur."5 PR 421 1 Peu de temps avant la chute de Babylone, alors que Daniel méditait sur ces prophéties et suppliait Dieu de l'éclairer, il reçut un certain nombre de visions relatives à la grandeur et à la décadence des royaumes terrestres. La première de ces visions relatée au septième chapitre de son livre lui fut expliquée, et cependant tout ne lui parut pas clair. "Je fus extrêmement troublé par mes pensées, dit-il en parlant de cette vision, je changeai de couleur, et je conservai ces paroles dans mon coeur."6 Mais une autre vision lui fit comprendre ce qui allait se produire. C'est à la fin de celle-ci qu'il entendit "parler un saint; et un autre saint dit à celui qui parlait: Pendant combien de temps s'accomplira la vision?"7 Et lorsqu'il lui fut répondu: "Deux mille trois cents soirs et matins, puis le sanctuaire sera purifié",8 le prophète se sentit très perplexe. Il s'efforçait de pénétrer le sens de cette vision, mais il ne pouvait comprendre le rapport qui existait entre les soixante-dix ans de captivité prédits par Jérémie et les deux mille trois cents soirs et matins qui devaient s'écouler avant la purification du sanctuaire. L'ange Gabriel lui en donna une explication partielle; mais lorsque l'ange prononça ces paroles: "La vision ... se rapporte à des temps éloignés", le prophète s'évanouit. "Moi, Daniel, je fus plusieurs jours languissant et malade, dit-il; puis je me levai, et je m'occupai des affaires du roi. J'étais étonné de la vision, et personne n'en eut connaissance."9 PR 421 2 Toujours inquiet au sujet du sort d'Israël, Daniel étudia à nouveau les prophéties de Jérémie. Elles étaient très claires -- si claires qu'il comprit que soixante-dix ans devaient s'écouler "pour les ruines de Jérusalem, d'après le nombre des années dont l'Eternel avait parlé à Jérémie, le prophète".10 PR 421 3 Avec une foi fondée sur la parole certaine de la prophétie, Daniel supplia Dieu de hâter l'accomplissement de ses promesses. Il insista auprès de lui pour que l'honneur divin fût sauvegardé. Il s'identifia lui-même dans sa prière avec ceux qui n'avaient pas été fidèles, et il confessa leurs péchés comme s'ils avaient été les siens. "Je tournai ma face vers le Seigneur Dieu, dit-il, afin de recourir à la prière et aux supplications, en jeûnant et en prenant le sac et la cendre. Je priai l'Eternel, mon Dieu, et je lui fis cette confession."11 Bien que le prophète fût depuis longtemps au service de Dieu et qu'il eût reçu du ciel le nom de "bien-aimé", il se tenait maintenant devant le Seigneur comme un vil pécheur. Il lui présentait l'extrême dénuement du peuple qu'il aimait. Quelle éloquence dans la simplicité de sa prière, et quelle ferveur s'en dégage! Ecoutez-le plaidant avec son Dieu: PR 422 1 "Seigneur, Dieu grand et redoutable, toi qui gardes ton alliance et qui fais miséricorde à ceux qui t'aiment et qui observent tes commandements! Nous avons péché, nous avons commis l'iniquité, nous avons été méchants et rebelles, nous nous sommes détournés de tes commandements et de tes ordonnances. Nous n'avons pas écouté tes serviteurs, les prophètes, qui ont parlé en ton nom à nos rois, à nos chefs, à nos pères, et à tout le peuple du pays. A toi, Seigneur, est la justice, et à nous la confusion de face, en ce jour, aux hommes de Juda, aux habitants de Jérusalem, et à tout Israël, à ceux qui sont près et à ceux qui sont loin, dans tous les pays où tu les as chassés à cause des infidélités dont ils se sont rendus coupables envers toi. ... Auprès du Seigneur, notre Dieu, la miséricorde et le pardon, car nous avons été rebelles envers lui. ... PR 422 2 "Seigneur, selon ta grande miséricorde, que ta colère et ta fureur se détournent de ta ville de Jérusalem, de ta montagne sainte; car, à cause de nos péchés et des iniquités de nos pères, Jérusalem et ton peuple sont en opprobre à tous ceux qui nous entourent. Maintenant donc, ô notre Dieu, écoute la prière et les supplications de ton serviteur, et, pour l'amour du Seigneur, fais briller ta face sur ton sanctuaire dévasté! Mon Dieu, prête l'oreille et écoute! ouvre les yeux et regarde nos ruines, regarde la ville sur laquelle ton nom est invoqué! Car ce n'est pas à cause de notre justice que nous te présentons nos supplications, c'est à cause de tes grandes compassions. Seigneur, écoute! Seigneur, pardonne! Seigneur, sois attentif! agis et ne tarde pas, par amour pour toi, ô mon Dieu! Car ton nom est invoqué sur ta ville et sur ton peuple."12 PR 423 1 Le ciel s'abaissait tout près de la terre pour écouter la prière fervente du prophète; et avant même qu'il eût achevé de supplier Dieu pour obtenir le pardon et le retour de son peuple en Palestine, l'ange Gabriel lui apparut à nouveau dans toute sa puissance et attira son attention sur la vision qu'il avait eue avant la chute de Babylone et la mort de Belschatsar. Il lui expliqua en détail la période des soixante-dix semaines. Celle-ci devait commencer "au moment où la parole [aurait] annoncé que Jérusalem serait rebâtie".13 PR 423 2 Daniel avait prononcé cette prière "la première année de Darius",14 roi des Mèdes. Cyrus, son général, s'était emparé du sceptre babylonien qui s'étendait alors sur tout l'univers. Le règne de Darius fut honoré de Dieu. L'ange Gabriel fut envoyé à ce monarque "pour l'aider et le soutenir".15 A sa mort, deux ans environ après la chute de Babylone, Cyrus lui succédait. Son accession au trône marqua la fin des soixante-dix ans qui avaient commencé au moment où les premiers captifs Hébreux étaient déportés à Babylone par Nebucadnetsar. PR 423 3 En délivrant Daniel de la fosse aux lions, Dieu avait voulu créer une impression favorable sur l'esprit de Cyrus le Grand. Les qualités de l'homme de Dieu, ministre aux vues larges, amenèrent le monarque perse à le respecter et à honorer son jugement. Au moment fixé par le Très-Haut pour la reconstruction de son temple à Jérusalem, il fit comprendre à Cyrus, "son serviteur", les prophéties qui le concernaient -- si familières à Daniel -- et il lui suggéra d'accorder la liberté au peuple juif. PR 423 4 Lorsque le roi apprit que les prophéties avaient annoncé plus d'un siècle avant sa naissance la manière dont serait prise Babylone, lorsqu'il lut le message qui lui était adressé par le Roi de l'univers: "Je t'ai ceint avant que tu me connusses. C'est afin que l'on sache, du soleil levant au soleil couchant, que hors moi il n'y a point de Dieu"; lorsqu'il eut sous les yeux la proclamation du Seigneur: "Pour l'amour de mon serviteur Jacob, et d'Israël, mon élu, je t'ai appelé par ton nom, je t'ai parlé avec bienveillance, avant que tu me connusses", lorsqu'il lut ces paroles inspirées: "C'est moi qui ai suscité Cyrus dans ma justice, et j'aplanirai toutes ses voies; il rebâtira ma ville, et libérera mes captifs, sans rançon ni présents",16 alors son coeur fut profondément remué, et il résolut d'accomplir la mission divine qui lui était confiée. Il libérerait les captifs de Judée, il les aiderait à rebâtir le temple de Jérusalem. Dans une proclamation écrite, publiée "dans tout son royaume", il fit connaître son intention de pourvoir au retour des Hébreux dans leur patrie et à la reconstruction de leur temple. "L'Eternel, le Dieu des cieux, reconnaissait-il publiquement, m'a donné tous les royaumes de la terre, et il m'a commandé de lui bâtir une maison à Jérusalem en Juda. Qui d'entre vous est de son peuple? Que son Dieu soit avec lui, et qu'il monte à Jérusalem ... et bâtisse la maison de l'Eternel, le Dieu d'Israël! C'est le Dieu qui est à Jérusalem. Dans tout lieu où séjournent des restes du peuple de l'Eternel, les gens du lieu leur donneront de l'argent, de l'or, des effets, et du bétail, avec des offrandes volontaires."17 PR 424 1 "Que la maison soit rebâtie, ordonna-t-il plus tard, pour être un lieu où l'on offre des sacrifices, et qu'elle ait de solides fondements. Elle aura soixante coudées de hauteur, soixante coudées de largeur, trois rangées de pierres de taille et une rangée de bois neuf. Les frais seront payés par la maison du roi. De plus, les ustensiles d'or et d'argent de la maison de Dieu, que Nebucadnetsar avait enlevés du temple de Jérusalem et transportés à Babylone, seront rendus, transportés au temple de Jérusalem à la place où ils étaient, et déposés dans la maison de Dieu."18 PR 424 2 La proclamation du décret parvint jusqu'aux provinces les plus éloignées de l'empire, et partout où se trouvaient des enfants de la dispersion, la joie était très grande. Beaucoup d'entre eux connaissaient, comme Daniel, les prophéties et avaient supplié Dieu d'intervenir, selon sa promesse, en faveur de Sion. Et voici que leurs prières trouvaient une réponse; aussi avec quel bonheur s'unissaient-ils pour chanter avec le Psalmiste: "Quand l'Eternel ramena les captifs de Sion, nous étions comme ceux qui font un rêve. Alors notre bouche était remplie de cris de joie, et notre langue de chants d'allégresse; alors on disait parmi les nations: L'Eternel a fait pour eux de grandes choses! L'Eternel a fait pour nous de grandes choses; nous sommes dans la joie."19 PR 425 1 "Les chefs de famille de Juda et de Benjamin, les sacrificateurs et les Lévites, tous ceux dont Dieu réveilla l'esprit" (il en restait un assez grand nombre, près de cinq mille environ, parmi les Juifs exilés) profitèrent de l'occasion exceptionnelle qui leur était offerte pour "se lever et pour aller bâtir la maison de l'Eternel à Jérusalem". Leurs amis ne les laissèrent pas partir les mains vides. "Tous leurs alentours leur donnèrent des objets d'argent, de l'or, des effets, du bétail et des choses précieuses." Ils y ajoutèrent, outre les offrandes volontaires, "les ustensiles de la maison de l'Eternel, que Nebucadnetsar avait emportés de Jérusalem ... et que Cyrus, roi de Perse ... fit sortir par Mithredath, le trésorier". Ces ustensiles "étaient au nombre de cinq mille quatre cents".20 PR 425 2 Cyrus chargea Scheschbatsar, descendant du roi David, plus connu sous le nom de Zorobabel,21 de la garde des Hébreux qui retournaient en Judée. Il lui adjoignit le grand prêtre Josué. Les exilés se mirent en route et traversèrent les immenses solitudes du désert sans encombre, le coeur débordant de reconnaissance et de joie pour les miséricordes divines infinies dont ils étaient l'objet. Arrivés en Palestine, ils se mirent aussitôt à l'oeuvre pour restaurer le pays. "Plusieurs chefs de famille" firent des offrandes pour participer aux frais de la reconstruction du temple; et le peuple, suivant cet exemple, donna joyeusement, selon ses maigres ressources.22 PR 425 3 Ils dressèrent aussi rapidement que possible un autel sur les fondements mêmes de l'ancien. Tous s'assemblèrent "comme un seul homme" pour en faire la dédicace et rétablir les services sacrés interrompus par Nebucadnetsar à la destruction de Jérusalem. Avant de regagner leurs demeures, qu'ils s'efforçaient de restaurer, "ils célébrèrent la fête des tabernacles".23 PR 425 4 L'autel où l'on offrait quotidiennement des holocaustes réjouit grandement le coeur des fidèles. Ces hommes entreprirent courageusement la reconstruction du temple, et leurs forces grandissaient de mois en mois, à mesure que s'élevait l'édifice. Pendant de longues années, ils avaient été privés des témoignages visibles de la présence de Dieu. Maintenant, au milieu des tristes souvenirs de l'apostasie de leurs pères, ils soupiraient après une preuve tangible du pardon divin. Ce qu'ils appréciaient par-dessus tout, ce n'étaient ni leurs biens personnels, ni leurs anciens privilèges, mais l'approbation de Dieu. Il avait opéré des merveilles en leur faveur, et ils éprouvaient le besoin d'avoir l'assurance de sa présence. Désirant encore de plus grandes bénédictions, ils attendaient avec impatience le moment où, le temple rebâti, ils pourraient contempler l'éclat de la gloire céleste dans le sanctuaire. PR 426 1 Les ouvriers occupés à la préparation du matériel de construction découvrirent parmi les ruines quelques-unes des pierres apportées sur l'emplacement du temple à l'époque de Salomon. Ces pierres étaient toutes prêtes à servir; avec les matériaux qu'on y ajouta, le travail avança de telle manière que les fondations purent être posées. Cela se fit en présence de milliers de spectateurs qui s'étaient assemblés pour constater les progrès des travaux et pour exprimer leur joie d'y avoir participé. Tandis que l'on posait les fondements, les assistants, accompagnés par les trompettes des prêtres et les cymbales des fils d'Asa, "chantaient, célébrant et louant l'Eternel par ces paroles: Car il est bon, car sa miséricorde pour Israël dure à toujours!"24 PR 426 2 La maison qui se reconstruisait avait été le thème de maintes prophéties relatives aux bénédictions dont le Seigneur désirait combler Sion. Tous ceux qui assistaient à la pose des fondements du temple auraient dû se réjouir de l'esprit qui régnait à cette occasion. Mais parmi les chants de louange qui retentissaient en ce jour, il y avait une note discordante. "Plusieurs des sacrificateurs et des Lévites, et des chefs de famille âgés, qui avaient vu la première maison, pleuraient à grand bruit pendant qu'on posait sous leurs yeux les fondements de cette maison."25 PR 426 3 Il était naturel que la tristesse débordât du coeur de ces hommes âgés, qui pensaient aux résultats de l'impénitence prolongée. S'ils avaient été fidèles, eux et ceux de leur génération, s'ils avaient accompli les desseins de Dieu en faveur d'Israël, le temple de Salomon n'aurait jamais été détruit, et leur captivité, nécessaire. PR 427 1 Les conditions étaient maintenant bien différentes. Dans sa tendre miséricorde, le Seigneur avait visité à nouveau son peuple, lui permettant de retourner dans son pays. La tristesse provoquée par les péchés du passé aurait dû faire place à des sentiments de joie débordante. Dieu avait touché le coeur de Cyrus pour aider les Hébreux à reconstruire leur temple, ce qui aurait dû faire naître chez eux des sentiments de profonde gratitude. Mais certains d'entre eux ne surent pas discerner les bontés manifestes du ciel. Au lieu de se réjouir, ils se laissaient aller à des pensées de mécontentement et de tristesse. Ils avaient contemplé la magnificence du temple de Salomon, et ils se lamentaient parce que l'édifice que l'on construisait était moins beau. PR 427 2 Les murmures et les plaintes, les comparaisons défavorables, eurent une influence décourageante sur l'esprit d'un grand nombre d'Israélites, et affaiblirent les mains des constructeurs. Les ouvriers se demandaient s'ils devaient continuer à travailler à l'érection de cet édifice qui donnait lieu, dès ses fondations, à tant de critiques et de lamentations. PR 427 3 Cependant, nombreux furent ceux qui, au sein de l'assemblée, possédant une foi plus grande et des vues plus larges, ne se laissaient pas abattre à l'idée que ce monument n'aurait pas la gloire du précédent. "Beaucoup d'autres faisaient éclater leur joie par des cris, en sorte qu'on ne pouvait distinguer le bruit des cris de joie d'avec le bruit des pleurs parmi le peuple, car le peuple poussait de grands cris dont le son s'entendait au loin."26 PR 427 4 Si ceux qui se désolaient à la pose des fondements du temple avaient pu prévoir les conséquences de leur manque de foi, leur consternation aurait été grande. En manifestant leur mécontentement, ils étaient loin de se douter de l'importance de leurs paroles de désappointement, loin de penser au retard qu'ils apporteraient à l'achèvement des travaux. PR 427 5 La magnificence du temple de Salomon, les rites imposants des services religieux qui s'y tenaient avant la captivité avaient été une source de fierté pour les Israélites; mais leur culte avait été bien souvent dépourvu des qualités essentielles. La gloire du premier temple, la splendeur de ses services ne pouvaient pas justifier le peuple devant Dieu; car la seule chose qui ait de la valeur à ses yeux c'est un coeur contrit et humilié, ce que les Juifs omettaient de lui offrir. PR 428 1 C'est lorsque les principes vitaux du royaume de Dieu sont perdus de vue que l'on multiplie les fastueuses cérémonies. C'est lorsque la formation du caractère est négligée, lorsqu'on est dépourvu des beautés de l'âme, qu'on méprise la simplicité de la religion, que l'orgueil et l'amour de ce qui flatte la vanité exigent de magnifiques églises, de riches ornements, d'imposantes cérémonies. Mais Dieu n'est nullement honoré par de telles manifestations. La valeur de son Eglise ne se mesure pas d'après ses richesses extérieures, mais d'après la piété qui la différencie du monde. Il l'évalue selon la croissance spirituelle de ses membres, selon leur connaissance du Christ. Il s'attache aux principes d'amour et de bonté. Toutes les beautés artistiques du monde ne sauraient souffrir la comparaison avec la beauté de l'âme et du caractère manifestée chez ceux qui représentent le Christ. PR 428 2 Une église peut être la plus pauvre de la terre, la plus dépourvue d'apparence extérieure, si ses membres se conforment aux principes qui constituent le caractère du Christ, les anges se joindront à eux pour participer à leur culte. Les louanges et les actions de grâces qui s'échapperont de leurs coeurs reconnaissants s'élèveront vers Dieu comme une douce oblation. PR 428 3 Louez l'Eternel, car il est bon, Car sa miséricorde dure à toujours! Qu'ainsi disent les rachetés de l'Eternel, Ceux qu'il a délivrés de la main de l'ennemi. PR 428 4 Chantez, chantez en son honneur! Parlez de toutes ses merveilles! Glorifiez-vous de son saint nom! Que le coeur de ceux qui cherchent l'Eternel se réjouisse! PR 428 5 Car il a satisfait l'âme altérée, Il a comblé de biens l'âme affamée. ------------------------Chapitre 46 -- Les prophètes de Dieu les assistaient PR 429 1 Les Israélites, occupés à la reconstruction du temple, avaient pour voisins les Samaritains. C'était une race issue de mariages contractés entre les païens, venus en Palestine après la déportation des Israélites, et des membres des dix tribus restées en Samarie et en Galilée. Plus tard, ces Samaritains se réclamèrent du culte du vrai Dieu; mais ils demeuraient idolâtres par le coeur et les pratiques de leur religion. Il est vrai qu'ils considéraient leurs idoles comme devant simplement leur rappeler le Dieu vivant, le maître de l'univers. Néanmoins, ils étaient portés à révérer les images taillées. PR 429 2 Pendant la période de la restauration, ces Samaritains étaient connus comme "ennemis de Juda et de Benjamin". Lorsqu'ils apprirent que "les fils de la captivité bâtissaient un temple à l'Eternel, le Dieu d'Israël", "ils vinrent auprès de Zorobabel et des chefs de famille" pour exprimer leur désir de s'unir à eux dans leur travail. "Nous bâtirons avec vous, dirent-ils, car, comme vous, nous invoquons votre Dieu, et nous lui offrons des sacrifices depuis le temps d'Esar-Haddon, roi d'Assyrie, qui nous a fait monter ici." Mais on ne put leur accorder ce privilège. "Ce n'est pas à vous et à nous de bâtir la maison de notre Dieu; nous la bâtirons nous seuls à l'Eternel, le Dieu d'Israël, comme nous l'a ordonné le roi Cyrus, roi de Perse",1 leur déclara le chef des Israélites. PR 430 1 Un reste seulement avait décidé de retourner à Jérusalem. Et maintenant que ces hommes entreprenaient un travail au-dessus de leurs forces, voici que leurs plus proches voisins leur offraient de les aider dans leur tâche. Les Samaritains prétendaient adorer le vrai Dieu, et ils exprimèrent le désir de partager le privilège et les bénédictions qui découlaient du service du temple. "Nous bâtirons avec vous", dirent-ils. Mais si les chefs israélites avaient accepté cette offre, ils auraient ouvert la porte à l'idolâtrie. Ils discernèrent la dissimulation des Samaritains, et se rendirent compte que l'aide obtenue en s'alliant avec eux ne serait rien comparativement aux bénédictions qu'ils comptaient recevoir en suivant scrupuleusement les ordres de Dieu. PR 430 2 Le Seigneur avait en effet déclaré par Moïse, au sujet des relations qu'Israël devait entretenir avec les nations voisines: "Tu ne traiteras point d'alliance avec elles, et tu ne leur feras point grâce. Tu ne contracteras point de mariage avec ces peuples; ... car ils détourneraient de moi tes fils, qui serviraient d'autres dieux, et la colère de l'Eternel s'enflammerait contre vous: il te détruirait promptement." "Car tu es un peuple saint pour l'Eternel, ton Dieu; et l'Eternel, ton Dieu, t'a choisi, pour que tu fusses un peuple qui lui appartînt entre tous les peuples qui sont sur la face de la terre."2 PR 430 3 Les conséquences d'une alliance avec les nations voisines étaient nettement prédites à Israël: "L'Eternel te dispersera parmi tous les peuples, d'une extrémité de la terre à l'autre, avait déclaré Moïse; et là, tu serviras d'autres dieux que n'ont connu ni toi, ni tes pères, du bois et de la pierre. Parmi ces nations, tu ne seras pas tranquille, et tu n'auras pas un lieu de repos pour la plante de tes pieds. L'Eternel rendra ton coeur agité, tes yeux languissants, ton âme souffrante. Ta vie sera comme en suspens devant toi, tu trembleras la nuit et le jour, tu douteras de ton existence. Dans l'effroi qui remplira ton coeur et en présence de ce que tes yeux verront, tu diras: Puisse le soir être là! et tu diras le soir: Puisse le matin être là."3 "C'est de là aussi que tu chercheras l'Eternel, ton Dieu, et que tu le trouveras, avait-il promis au peuple juif, si tu le cherches de tout ton coeur et de toute ton âme!"4 PR 431 1 Zorobabel et les chefs de famille connaissaient bien ces prédictions, ainsi que d'autres semblables. Au cours de leur récente captivité, ils avaient eu maintes preuves de leur accomplissement. Mais ils s'étaient repentis des péchés qui avaient amené sur eux et leurs pères les jugements prédits par Moïse. S'étant tournés de tout leur coeur vers le Seigneur, ils avaient renouvelé leur alliance avec lui. C'est pourquoi il leur fut permis de retourner en Judée pour restaurer ce qui y avait été détruit. Allaient-ils au début même de leur mission s'allier avec des idolâtres? Dieu avait dit: "Tu ne feras point d'alliance avec eux." En se consacrant à nouveau au Seigneur, ils se rendaient compte que la ligne de démarcation entre le peuple élu et le monde doit toujours être strictement observée. Ils refusaient de contracter une alliance avec le peuple qui, bien que connaissant la loi divine, ne se soumettait pas à ses exigences. PR 431 2 Les directives données dans le Deutéronome, et destinées à instruire Israël, doivent être suivies jusqu'à la fin des temps. La vraie prospérité dépend de la fidélité qu'on manifeste à l'égard de l'alliance contractée avec Dieu. Il ne faut jamais transiger avec les principes en s'alliant avec ceux qui ne craignent pas le Seigneur. PR 431 3 Les chrétiens de profession courent un grave danger lorsque, pour exercer une influence sur les mondains, ils croient devoir, dans une certaine mesure, se conduire comme eux. Mais si cette manière d'agir semble offrir des avantages, elle aboutit toujours à un naufrage spirituel. Le peuple de Dieu doit bien prendre garde à cette influence subtile qui pénètre dans l'âme par les artifices séduisants des ennemis de la vérité. Les chrétiens sont des pèlerins et des voyageurs sur la terre; ils cheminent dans un sentier hérissé d'obstacles. Ils ne doivent pas prêter attention aux habiles subterfuges et sollicitations flatteuses qui les entraîneraient à la désobéissance. Ce ne sont pas les ennemis déclarés de la cause de Dieu qu'on doit le plus redouter. Tous ceux qui, comme les ennemis de Juda et de Benjamin, se présentent avec des paroles aimables, avec de beaux discours, dans l'intention apparente d'entrer en relations amicales avec les enfants de Dieu, réussiront le plus sûrement à les tromper. PR 432 1 Il faut faire preuve de vigilance à l'égard de telles personnes, de peur d'être pris à l'improviste dans un piège savamment tendu. Dieu demande à ses enfants de déployer une vigilance de tous les instants, particulièrement à la fin de l'histoire de notre monde. Mais, bien que le conflit ne connaisse aucune trêve, nul n'est seul à le soutenir. Les anges soutiennent et protègent tous ceux qui marchent humblement devant Dieu. Le Seigneur ne trahira jamais celui qui se confie en lui. Lorsque ses enfants s'approchent de lui pour réclamer sa protection contre le mal, rempli de pitié et d'amour, il déploie son étendard devant l'ennemi. Ne les touche pas, lui dit-il, car ils sont à moi; je les ai gravés sur la paume de mes mains. PR 432 2 Persistant dans leur hostilité, les Samaritains "découragèrent le peuple de Juda; ils l'intimidèrent pour l'empêcher de bâtir, et ils gagnèrent à prix d'argent des conseillers pour faire échouer son entreprise. Il en fut ainsi pendant toute la vie de Cyrus, roi de Perse, et jusqu'au règne de Darius, roi de Perse."5 Par de faux rapports, ils suscitèrent la défiance dans les esprits prompts à la suspicion. Cependant, les forces du mal furent tenues en échec de longues années, et le peuple de Juda put continuer à travailler librement à l'érection du temple. PR 432 3 Tandis que Satan s'efforçait d'influencer les personnages les plus en vue de l'empire médo-persan, et essayait de jeter le discrédit sur le peuple de Dieu, les anges travaillaient pour les exilés. Tout le ciel s'intéressait à ce conflit. Le prophète Daniel nous donne un aperçu de cette lutte gigantesque entre les forces du bien et celles du mal. Pendant trois semaines, Gabriel combattit contre les puissances des ténèbres; il s'efforça de contrecarrer les influences qui s'exerçaient sur l'esprit de Cyrus. Avant la fin de ce combat, le Christ lui-même vint au secours de Gabriel. "Le chef du royaume de Perse m'a résisté vingt et un jours, déclare Gabriel; mais voici, Micaël, l'un des principaux chefs, est venu à mon secours, et je suis demeuré là auprès des rois de Perse."6 Tout ce que le ciel pouvait faire en faveur du peuple de Dieu avait été accompli. La victoire était finalement remportée; les forces du mal avaient été tenues en échec pendant tout le règne de Cyrus et de son fils Cambyse, qui occupa le trône environ sept ans et demi. PR 433 1 Une occasion magnifique s'offrait alors aux Juifs. Le ciel agissait sur le coeur des rois. Il incombait au peuple de Dieu de faire l'impossible pour que le décret de Cyrus fût appliqué. Les Juifs auraient dû profiter de construire le temple, de rétablir ses services, et en même temps de se réinstaller dans leurs foyers. Mais, au moment favorable, beaucoup d'entre eux firent preuve de mauvaise volonté. L'opposition ennemie était ferme et résolue, et peu à peu les ouvriers perdirent courage. Certains n'oubliaient pas qu'à l'occasion de la pose de la première pierre, plusieurs avaient exprimé leur crainte de voir échouer cette entreprise. Et alors que les Samaritains se montraient plus hardis, la plupart des Juifs se demandaient si, après tout, le moment était bien venu de reconstruire le temple. Cette idée gagna bientôt tout le peuple. La plupart des ouvriers, découragés et démoralisés, retournèrent dans leurs foyers pour y reprendre leurs occupations habituelles. PR 433 2 Sous le règne de Cambyse, la construction du temple avança lentement. Sous celui du faux Smerdis (appelé Artaxerxès dans Esdras 4:7), les Samaritains suggérèrent à cet imposteur sans scrupule de lancer un décret interdisant aux Juifs la reconstruction de leur temple et de leur ville. Pendant plus d'un an, les travaux furent interrompus et presque abandonnés. Les gens restèrent chez eux, et s'ingénièrent à acquérir des biens matériels; mais leur situation était déplorable. Malgré tout leur travail, ils ne prospéraient pas. Les éléments même semblaient conspirer contre eux: la sécheresse détruisit leurs récoltes. Dieu leur avait accordé des fruits sauvages et cultivés, du blé, du vin, de l'huile comme témoignage de sa faveur. Mais comme ils usèrent de ces dons généreux d'une manière égoïste, il leur retira ses bénédictions. PR 434 1 Telle était la situation au début du règne de Darius. L'état spirituel et matériel des Israélites était pitoyable. Ils avaient murmuré et douté si longtemps, ils avaient si longtemps fait passer leurs intérêts personnels en premier, ils s'étaient tellement désintéressés des ruines du temple qu'un grand nombre avait perdu de vue le dessein de Dieu de rétablir son peuple en Judée. Ils disaient: "Le temps n'est pas venu, le temps de rebâtir la maison de l'Eternel."7 PR 434 2 L'heure était très sombre, mais elle n'était pas sans espoir pour ceux qui se confiaient en Dieu. Les prophètes Aggée et Zacharie furent suscités pour faire face à la crise. Leurs témoignages émouvants révélèrent aux Israélites la cause de leurs difficultés. Si tout ne marchait pas comme ils l'auraient voulu, c'était parce qu'ils avaient oublié de faire passer avant tous les autres les intérêts du royaume des cieux. S'ils avaient honoré Dieu, s'ils lui avaient témoigné du respect et de la révérence, en s'occupant d'abord de la construction de sa maison, ils se seraient ainsi assuré sa présence et sa bénédiction. PR 434 3 A ceux qui se laissaient aller au découragement, le prophète Aggée demandait: "Est-ce le temps pour vous d'habiter vos demeures lambrissées, quand cette maison est détruite? Ainsi parle maintenant l'Eternel des armées: Considérez attentivement vos voies!" Pourquoi avez-vous fait si peu pour moi? Pourquoi vous inquiétez-vous au sujet de vos demeures et vous désintéressez-vous de la maison de l'Eternel? Où est le zèle que vous témoigniez autrefois pour la reconstruction du temple? Qu'avez-vous gagné en ne vous occupant que de vous-mêmes? Votre désir d'échapper à la pauvreté vous a conduits à négliger le temple, mais cette négligence vous a apporté ce que vous redoutiez. "Vous semez beaucoup, et vous recueillez peu, vous mangez, et vous n'êtes pas rassasiés, vous buvez, et vous n'êtes pas désaltérés, vous êtes vêtus, et vous n'avez pas chaud; le salaire de celui qui est à gages tombe dans un sac percé."8 PR 434 4 Dieu révéla au peuple la cause de sa misère par des paroles qui ne pouvaient prêter à confusion. "Vous comptiez sur beaucoup, et voici, vous avez eu peu; vous l'avez rentré chez vous, mais j'ai soufflé dessus. Pourquoi? dit l'Eternel des armées. A cause de ma maison qui est détruite, tandis que vous vous empressez chacun pour sa maison. C'est pourquoi les cieux vous ont refusé la rosée, et la terre a refusé ses produits. J'ai appelé la sécheresse sur le pays, sur les montagnes, sur le blé, sur le moût, sur l'huile, sur ce que la terre peut rapporter, sur les hommes et sur les bêtes, et sur tout le travail des mains."9 "Considérez attentivement vos voies! suppliait le Seigneur. Montez sur la montagne, apportez du bois et bâtissez la maison: j'en aurai de la joie, et je serai glorifié."10 PR 435 1 Le message délivré par Aggée toucha le coeur des chefs israélites et celui du peuple. Ils comprirent que les paroles de Dieu étaient graves, et ils n'osèrent pas rejeter les instructions répétées qui leur étaient adressées. Ils savaient que la prospérité matérielle et les bénédictions spirituelles dépendaient de leur obéissance aux commandements de Dieu. Touchés par les paroles du prophète, Zorobabel et Josué, ainsi que "tout le reste du peuple, entendirent la voix de l'Eternel, leur Dieu".11 PR 435 2 Dès qu'Israël se décida à obéir, le message de reproche fut suivi par des paroles de réconfort. "Aggée ... dit au peuple, d'après l'ordre de l'Eternel: Je suis avec vous, dit l'Eternel. L'Eternel réveilla l'esprit de Zorobabel ... et l'esprit de Josué ... et l'esprit de tout le reste du peuple. Ils vinrent et ils se mirent à l'oeuvre dans la maison de l'Eternel des armées, leur Dieu."12 PR 435 3 Moins d'un mois après la reprise des travaux, les constructeurs reçurent un nouveau message d'encouragement. "Fortifie-toi, Zorobabel! dit l'Eternel. Fortifie-toi, Josué. ... Fortifie-toi, peuple entier du pays! dit l'Eternel. Et travaillez! Car je suis avec vous, dit l'Eternel des armées."13 PR 435 4 Le Seigneur avait déclaré au peuple d'Israël, lorsqu'il campait au pied du Sinaï: "J'habiterai au milieu des enfants d'Israël, et je serai leur Dieu. Ils connaîtront que je suis l'Eternel, leur Dieu, qui les a fait sortir du pays d'Egypte, pour habiter au milieu d'eux. Je suis l'Eternel, leur Dieu."14 Et maintenant, bien qu'ils se soient montrés si souvent "rebelles et qu'ils aient attristé son esprit saint",15 par les messages de son prophète, le Seigneur leur tendait une main secourable. Puisqu'ils collaboraient à l'exécution de ses desseins, Dieu renouvelait son alliance avec eux: son Esprit serait au milieu d'eux. Ils n'avaient rien à craindre. PR 436 1 De nos jours aussi Dieu déclare à celui qui le sert: "Fortifie-toi. ... Travaille. Je suis avec toi." Le chrétien ne cesse d'avoir un grand secours avec le Seigneur. Comment interviendra-t-il en notre faveur? Nous pouvons l'ignorer, mais ce que nous savons, c'est qu'il n'abandonnera jamais celui qui se confie en lui. Que de fois il nous a dirigés de manière à faire échouer les plans de l'ennemi! Si nous pouvions nous en rendre compte, nous avancerions résolument sans jamais maugréer. Notre foi serait solide, et nulle épreuve n'arriverait à nous ébranler. Dieu serait notre sagesse et notre force, et il accomplirait sa volonté par notre moyen. PR 436 2 Les exhortations et les encouragements du prophète Aggée étaient renforcés par Zacharie. Dieu suscita ce dernier pour qu'il se tienne au côté d'Aggée lorsqu'il pressait Israël de se lever et de bâtir. Le premier message de Zacharie assurait le peuple de Dieu que la parole du Très-Haut ne faillit jamais, et que des bénédictions sont accordées à tous ceux qui écoutent la parole prophétique. PR 436 3 Bien que leurs champs fussent ravagés, que leurs faibles provisions s'épuisassent rapidement, et qu'ils fussent entourés de peuples hostiles, les Israélites marchèrent par la foi, en réponse à l'appel des envoyés de Dieu; ils se mirent courageusement à l'oeuvre pour relever les ruines du temple. C'était un travail qui exigeait une ferme confiance dans le Seigneur. Alors qu'ils s'efforçaient de s'acquitter de leur tâche et recherchaient un renouveau de la grâce d'en haut, des messages répétés leur étaient adressés par Aggée et Zacharie. Ces messages les assuraient que leur foi serait richement récompensée, et que la parole du Seigneur se rapportant à la gloire future du nouveau temple ne faillirait pas. Dans ce temple même apparaîtrait, lorsque les temps seraient révolus, le Désiré des nations, le Maître et le Sauveur des hommes. PR 436 4 Les constructeurs du temple n'étaient donc pas abandonnés à eux-mêmes. "Avec eux étaient les prophètes de Dieu, qui les assistaient."16 Et Dieu lui-même avait déclaré: "Fortifiez-vous. ... Travaillez! Car je suis avec vous."17 Leur vif désir de se repentir et de marcher par la foi était accompagné de la promesse d'une grande prospérité matérielle. "Dès ce jour, déclarait le Seigneur, je répandrai ma bénédiction."18 PR 437 1 A Zorobabel, leur gouverneur -- qui depuis son retour de Babylone avait connu de dures tribulations -- était donné encore un plus précieux message. Le jour n'était pas loin où tous les ennemis du peuple élu seraient renversés. "En ce jour-là, dit l'Eternel des armées, je te prendrai, Zorobabel ... mon serviteur ... et je te garderai comme un sceau; car je t'ai choisi."19 Zorobabel comprit alors que c'était la providence qui l'avait fait passer par le découragement et le doute. Dans tout ce qui lui était arrivé, il pouvait discerner maintenant les desseins de Dieu. PR 437 2 Ces paroles adressées personnellement à Zorobabel sont consignées dans la sainte Ecriture pour servir d'encouragement aux enfants de Dieu de tous les temps. Le Seigneur a un but en envoyant des épreuves à ceux qui l'aiment. Il ne les dirige jamais dans une voie différente de celle qu'ils choisiraient eux-mêmes s'ils pouvaient voir la fin dès le commencement, et discerner la gloire du but qui leur est proposé. Toutes les épreuves, toutes les tribulations sont destinées à galvaniser leurs forces, en vue de ce qu'ils doivent faire et souffrir pour le ciel. PR 437 3 Les messages d'Aggée et de Zacharie stimulèrent les Israélites dans la reconstruction du temple. Mais ils ne cessaient d'être harcelés par les Samaritains et d'autres ennemis. Un jour où les gouverneurs du royaume médo-persan visitaient Jérusalem, ils demandèrent aux Juifs qui les avait autorisés à rebâtir leur temple. A ce moment-là, si les Juifs ne s'étaient pas confiés dans le Seigneur pour être dirigés, des conséquences désastreuses s'en seraient ensuivies. "Mais l'oeil de Dieu veillait sur les anciens des Juifs. Et on laissa continuer les travaux pendant l'envoi d'un rapport à Darius."20 La réponse que reçurent les gouverneurs était si raisonnable qu'ils décidèrent d'écrire à Darius, fils d'Hystaspe, roi de l'empire médo-persan, pour lui faire savoir qu'un décret de Cyrus avait ordonné la reconstruction du temple à Jérusalem, les frais devant être couverts par le trésor royal. PR 438 1 Darius rechercha ce décret; et, l'ayant trouvé, il ordonna à ceux qui avaient mené l'enquête de laisser poursuivre la construction. "Laissez continuer les travaux de cette maison de Dieu, ordonna-t-il, que le gouverneur des Juifs et les anciens des Juifs la rebâtissent sur l'emplacement qu'elle occupait. Voici l'ordre que je donne touchant ce que vous aurez à faire à l'égard de ces anciens des Juifs pour la reconstruction de cette maison de Dieu: les frais, pris sur les biens du roi provenant des tributs de l'autre côté du fleuve, seront exactement payés à ces hommes, afin qu'il n'y ait pas d'interruption. Les choses nécessaires pour les holocaustes du Dieu des cieux, jeunes taureaux, béliers et agneaux, froment, sel, vin et huile, seront livrées, sur leur demande, aux sacrificateurs de Jérusalem, jour par jour et sans manquer, afin qu'ils offrent des sacrifices de bonne odeur au Dieu des cieux et qu'ils prient pour la vie du roi et de ses fils."21 PR 438 2 De plus, le roi ordonna que de sévères mesures fussent prises contre ceux qui enfreindraient ce décret, et il termina par cette déclaration remarquable: "Que le Dieu qui fait résider en ce lieu son nom renverse tout roi et tout peuple qui étendraient la main pour transgresser ma parole, pour détruire cette maison de Dieu à Jérusalem! Moi, Darius, j'ai donné cet ordre. Qu'il soit ponctuellement exécuté."22 C'est ainsi que Dieu préparait la voie pour l'achèvement des travaux. PR 438 3 Pendant des mois, avant la promulgation de ce décret, les Israélites avaient continué à travailler par la foi, soutenus par les prophètes de Dieu qui leur délivraient de temps en temps des messages destinés à rappeler le plan divin les concernant. Deux mois après le dernier message d'Aggée, Zacharie eut une série de visions touchant l'oeuvre de Dieu sur la terre. Ces messages, adressés sous forme de paraboles et de symboles, furent donnés à un moment d'incertitude et d'anxiété. Ils avaient une signification particulière pour les hommes qui marchaient de l'avant au nom du Dieu d'Israël. Il semblait aux chefs du peuple juif que la permission accordée pour la reconstruction du temple allait être supprimée; l'avenir paraissait bien sombre. Mais Dieu savait que son peuple avait besoin d'être soutenu et fortifié par une révélation de son amour et de sa miséricorde infinie. Dans une vision, Zacharie entendit l'ange demander: "Eternel des armées, jusques à quand n'auras-tu pas compassion de Jérusalem et des villes de Juda contre lesquelles tu es irrité depuis soixante et dix ans? L'Eternel répondit par de bonnes paroles, par des paroles de consolation à l'ange qui parlait avec moi", dit Zacharie. PR 439 1 "Et l'ange qui parlait avec moi me dit: Crie et dis: Ainsi parle l'Eternel des armées: Je suis ému d'une grande jalousie pour Jérusalem et pour Sion, et je suis saisi d'une grande irritation contre les nations orgueilleuses; car je n'étais que peu irrité, mais elles ont contribué au mal. C'est pourquoi ainsi parle l'Eternel: Je reviens à Jérusalem avec compassion; ma maison y sera rebâtie, et le cordeau sera étendu sur Jérusalem."23 PR 439 2 Le prophète fut ensuite prié de déclarer: "Ainsi parle l'Eternel des armées: Mes villes auront encore des biens en abondance; l'Eternel consolera encore Sion, il choisira encore Jérusalem."24 Zacharie vit alors les puissances qui avaient dispersé Juda, Israël et Jérusalem, symbolisées par quatre cornes. Immédiatement après il vit quatre forgerons, représentant les chefs choisis par Dieu pour restaurer son peuple et son temple.25 PR 439 3 "Je levai les yeux et je regardai, dit le prophète, et voici, il y avait un homme tenant dans la main un cordeau pour mesurer. Je dis: Où vas-tu? Et il me dit: Je vais mesurer Jérusalem, pour voir de quelle largeur et de quelle longueur elle doit être. Et voici, l'ange qui parlait avec moi s'avança, et un autre ange vint à sa rencontre. Il lui dit: Cours, parle à ce jeune homme, et dis: Jérusalem sera une ville ouverte, à cause de la multitude d'hommes et de bêtes qui seront au milieu d'elle; et je serai pour elle, dit l'Eternel, une muraille de feu tout autour, et je serai sa gloire au milieu d'elle."26 PR 439 4 Dieu avait ordonné que Jérusalem fût rebâtie. La vision qui avait trait à la mesure de la ville représentait l'assurance qu'il accorderait les forces et le réconfort à ceux qu'il avait affligés, et qu'il accomplirait les promesses de son alliance éternelle. Sa tendre protection pour les Israélites, déclarait-il, serait comme "une muraille de feu tout autour", et par eux la gloire divine serait révélée à tous les enfants des hommes. Ce que Dieu accomplissait pour son peuple devait être connu par toute la terre. PR 440 1 Pousse des cris de joie et d'allégresse, habitant de Sion! Car il est grand au milieu de toi, le Saint d'Israël. ------------------------Chapitre 47 -- Josué et l'ange PR 441 1 Les rapides progrès des constructeurs du temple déconcertèrent et alarmèrent au plus haut point les forces du mal. Satan décida alors d'intensifier ses efforts pour affaiblir et décourager le peuple de Dieu en faisant ressortir ses imperfections. Si ceux qui avaient souffert si longtemps de leurs transgressions pouvaient à nouveau se laisser aller à mépriser les commandements de Dieu, ils retomberaient dans l'esclavage du péché. PR 441 2 Les Israélites, choisis pour faire connaître Dieu, attiraient particulièrement l'inimitié de Satan, qui avait juré leur perte. Aussi longtemps qu'ils restaient fidèles, le prince du mal ne pouvait leur nuire. Aussi concentrait-il toutes ses forces et toutes ses ruses pour arriver à ses fins. Ayant enfin réussi à les faire succomber à la tentation, leur ennemi triompha. Le peuple de Dieu transgressa la loi divine et devint la proie de ses ennemis. PR 441 3 Cependant, bien qu'ils aient été emmenés en captivité à Babylone, Dieu ne les abandonna pas. Il leur envoya ses prophètes avec des messages de reproches et d'avertissements, et il éveilla chez eux le sentiment de leur culpabilité. Lorsqu'ils s'humilièrent et revinrent à lui, repentants, il leur envoya des paroles de réconfort. Il leur promit de les délivrer de la captivité, de leur redonner sa faveur et de les rétablir dans leur pays. Et maintenant que cette oeuvre de restauration avait commencé et qu'un reste d'Israël occupait à nouveau la Judée, Satan redoublait d'efforts pour faire échouer le plan divin. Pour y arriver, il cherchait à exercer son influence sur les nations païennes, afin d'anéantir Israël. PR 442 1 Mais dans cette crise, Dieu fortifia son peuple "par de bonnes paroles, par des paroles de consolation".1 Par une illustration frappante, où il comparait l'oeuvre du Christ à celle de Satan, il montra avec quelle puissance le Médiateur des enfants de Dieu peut confondre leur accusateur. Dans une vision, le prophète aperçut "Josué, le souverain sacrificateur ... couvert de vêtements sales",2 debout devant l'ange et implorant la miséricorde divine pour son peuple qui était dans une grande affliction. Tandis qu'il suppliait Dieu, Satan se dressait plein d'arrogance pour l'accuser. Il rappelait les transgressions d'Israël pour l'empêcher de recevoir les faveurs divines. Il voulait faire de lui sa proie, et il insistait pour qu'il lui fût livré. PR 442 2 Le grand prêtre n'arrivait pas à se défendre. Il ne prétendait pas qu'Israël n'était pas coupable. Couvert de vêtements sales -- symbole des péchés du peuple dont il s'est chargé -- Josué, le représentant de ce dernier, se tient debout devant l'ange. Il confesse toutes ses transgressions en exprimant la repentance et l'humiliation de leurs auteurs. Il s'en remet au Rédempteur qui pardonne, et il invoque avec foi les promesses divines. PR 442 3 Alors l'ange qui représente le Christ, le Sauveur des pécheurs, réduisit au silence l'accusateur du peuple de Dieu. "L'Eternel dit à Satan: Que l'Eternel te réprime, lui qui a choisi Jérusalem! N'est-ce pas là un tison arraché du feu?"3 Israël était resté longtemps dans la fournaise de l'affliction à cause de ses péchés. Il avait été sur le point d'être consumé par la flamme allumée par Satan et ses suppôts pour l'anéantir; mais Dieu s'apprêtait à le réhabiliter. PR 443 1 Lorsque l'intercession de Josué fut acceptée, l'ange déclara: "Otez-lui les vêtements sales! Puis il dit à Josué: Vois, je t'enlève ton iniquité, et je te revêts d'habits de fête. Je dis: Qu'on mette sur sa tête un turban pur! Et ils mirent un turban pur sur sa tête, et ils lui mirent des vêtements."4 Ses péchés étaient pardonnés, ainsi que ceux de son peuple. Israël était revêtu "d'habits de fête", grâce à la justice du Christ. Le turban placé sur la tête de Josué ressemblait à la tiare que portaient les prêtres; on y lisait cette inscription: "Sainteté à l'Eternel",5 ce qui signifiait que, malgré ses transgressions, Josué était désormais qualifié pour remplir les fonctions de ministre du sanctuaire devant Dieu. PR 443 2 L'ange déclara alors à Josué: "Ainsi parle l'Eternel des armées: Si tu marches dans mes voies et si tu observes mes ordres, tu jugeras ma maison et tu garderas mes parvis, et je te donnerai libre accès parmi ceux qui sont ici."6 Si Josué était fidèle, il serait honoré comme juge ou chef du temple et de tous les services qui s'y rattachaient. Il jouirait de la compagnie des anges, même ici-bas; et à la fin des temps, il se joindrait à la grande foule des rachetés qui se pressera autour du trône de Dieu. PR 443 3 "Ecoute donc, Josué, souverain sacrificateur, toi et tes compagnons qui sont assis devant toi! -- car ce sont des hommes qui serviront de signes. -- Voici, je ferai venir mon serviteur, le germe."7 C'est en ces termes que Zacharie s'exprime au nom de Dieu pour parler du Libérateur qui devait venir. C'était là que se trouvait l'espoir d'Israël. C'est par la foi dans ce Sauveur que Josué et son peuple avaient obtenu le pardon; c'est par la foi en lui qu'ils avaient retrouvé la faveur divine. Par la vertu de ses mérites, s'ils observaient fidèlement les commandements de Dieu, ce seraient des "hommes qui serviraient de signes", honorés comme les élus du ciel parmi les peuples de la terre. PR 443 4 De même que Satan accusa Josué et son peuple, de même il ne cesse d'accuser ceux qui, dans tous les âges, recherchent la miséricorde et l'amour de Dieu. Il est "l'accusateur des frères, celui qui les accuse devant notre Dieu jour et nuit".8 Toute âme libérée du pouvoir du mal et dont le nom est inscrit dans le livre de vie de l'Agneau, subit ses assauts. Nul n'est reçu dans la famille divine sans susciter chez l'ennemi une résistance acharnée. Mais celui qui était l'espoir d'Israël, leur défenseur, leur justice et leur rédempteur, est aussi l'espoir de l'Eglise de nos jours. PR 444 1 Les accusations de Satan contre ceux qui recherchent le Seigneur ne sont pas provoquées par sa haine du péché. Il se réjouit au contraire des défauts de caractère des chrétiens, car il sait que seule la transgression de la loi divine lui assurera tout pouvoir sur eux. Ses accusations sont uniquement inspirées par son inimitié pour le Sauveur. Mais, par le plan du salut, Jésus supprime l'emprise de Satan sur la famille humaine, et il la délivre de sa puissance. Alors toute la haine, toute la malice du prince du mal s'exacerbent en présence de la suprématie du Christ. Aussi met-il en oeuvre sa puissance et sa ruse pour arracher au Seigneur les enfants des hommes qui ont accepté le salut. Il les pousse au scepticisme, les incite à perdre confiance en Dieu, et à se séparer de son amour. Il leur suggère de transgresser sa loi, puis il les revendique comme ses captifs et conteste au Christ le droit de les lui prendre. PR 444 2 Satan sait que tous ceux qui demandent à Dieu son pardon et sa grâce obtiendront gain de cause; c'est pourquoi il leur présente leurs péchés pour les décourager. Il ne cesse de susciter des occasions de se plaindre chez ceux qui s'efforcent d'obéir au Seigneur. Il cherche même à leur présenter comme viles leurs meilleures actions. Par d'innombrables stratagèmes, d'une subtilité et d'une cruauté incomparables, il s'applique à provoquer leur condamnation. PR 444 3 Il est impossible à l'homme, par ses propres forces, de tenir tête aux accusations de l'ennemi. Debout devant Dieu, vêtu de vêtements sales, il confesse ses péchés. Alors Jésus, notre avocat, plaide efficacement en sa faveur. Il défend sa cause, et, grâce au sacrifice du Calvaire, il triomphe de l'accusateur. Sa parfaite obéissance à la loi divine lui a donné tout pouvoir dans le ciel et sur la terre, et il supplie son Père d'accorder sa miséricorde au pécheur et de le réconcilier avec lui. Il déclare à l'accusateur de son peuple: "Que l'Eternel te réprime, Satan! Ce peuple a été racheté par mon sang, c'est un tison arraché du feu." Et à celui qui se confie en lui, il donne cette assurance: "Vois, je t'enlève ton iniquité, et je te revêts d'habits de fête."9 PR 445 1 Tous ceux qui ont revêtu la robe de justice du Christ se tiendront devant lui comme ses élus, ses fidèles, ses justes. Satan n'aura aucun pouvoir pour les ravir de la main du Sauveur. Aucune âme qui réclame sa protection avec foi ne tombera sous la puissance de l'ennemi. La Parole de Dieu nous en donne l'assurance. "Qu'on me prenne pour refuge, dit au nom du Seigneur le prophète Esaïe, qu'on fasse la paix avec moi, qu'on fasse la paix avec moi."10 La promesse faite à Josué est aussi pour nous: "Si tu marches dans mes voies et si tu observes mes ordres, ... je te donnerai libre accès parmi ceux qui sont ici."11 Les anges de Dieu seront à nos côtés dès ici-bas. PR 445 2 La vision de Zacharie relative à Josué et à l'ange s'applique particulièrement au peuple de Dieu et aux scènes finales du grand jour des expiations. L'Eglise des derniers temps connaîtra alors de terribles épreuves et une grande détresse. Ceux qui gardent les commandements de Dieu et qui ont le témoignage de Jésus subiront la colère du dragon et de ses suppôts. Satan considère le monde comme lui étant assujetti; il exerce même sa domination sur de nombreux chrétiens de profession. Mais voici une petite minorité de croyants qui résiste à sa suprématie. S'il arrivait à l'anéantir, sa victoire serait totale. De même qu'il a incité les nations païennes à détruire Israël, de même dans un proche avenir, il s'ingéniera à mobiliser les forces du mal pour anéantir le peuple de Dieu. Les hommes seront contraints d'obéir aux décrets humains et de violer la loi divine. PR 445 3 Ceux qui resteront fidèles au Seigneur seront menacés, dénoncés, proscrits. Cette parole du Christ s'accomplira pour eux: "Vous serez livrés même par vos parents, par vos frères, par vos proches et par vos amis, et ils vous feront mourir."12 La miséricorde divine sera leur unique recours, et leur seule défense, la prière. Comme Josué plaidait avec l'ange, l'Eglise "du reste" plaidera avec une foi inébranlable pour obtenir le pardon et la délivrance par Jésus, son avocat. Pleinement conscients de leurs iniquités, les enfants de Dieu verront leur faiblesse et leur indignité et seront prêts à se décourager. Le tentateur se tiendra tout près d'eux pour les accuser, comme il le fit pour Josué. Il attirera leur attention sur leurs vêtements sales: leurs imperfections de caractère. Il leur montrera leur faiblesse, leur folie, leur ingratitude, leur peu de ressemblance avec le Christ, tous les péchés qui ont déshonoré leur Rédempteur. Il s'efforcera de les effrayer en suscitant chez eux la pensée que leur cas est désespéré, que leur souillure ne pourra jamais être purifiée. Il espérera ainsi détruire leur foi et les faire succomber à la tentation. PR 446 1 Satan connaît bien tous les péchés que les hommes commettent à son instigation. Il accable les pécheurs de ses accusations en leur faisant croire qu'ils sont privés de la protection divine et qu'il a le droit de les anéantir. Il les exclut de la faveur céleste comme il s'en est exclu lui-même. "Est-ce là le peuple qui prétend usurper ma place au ciel, ainsi que celle de mes anges? dit-il. Obéit-il vraiment à la loi de Dieu, garde-t-il ses préceptes? Ces gens ne sont-ils pas plus attachés à leurs personnes qu'à Dieu? N'ont-ils pas placé leurs intérêts personnels avant ceux d'en haut? Ne sont-ils pas attachés aux choses du monde? Regardez les péchés qui souillent leur vie. Considérez leur égoïsme, leur malice, la haine qu'ils éprouvent les uns pour les autres. Dieu me chassera-t-il avec mes anges de sa présence pour récompenser ceux qui ont commis des péchés semblables aux nôtres? Tu ne peux agir ainsi, ô Dieu de justice. La justice exige qu'une sentence soit prononcée contre eux." PR 446 2 Mais si les disciples du Christ ont péché, ils ne sont pas abandonnés à la domination des forces du mal. Ils se sont repentis, et ils ont recherché le Seigneur avec humilité et contrition. Alors l'avocat divin a plaidé pour eux. Celui qui a connu l'ingratitude la plus noire de la part des hommes, mais qui a connu aussi leurs péchés et leur repentir, déclare: "Que l'Eternel te réprime, Satan! J'ai donné ma vie pour ces âmes; je les ai gravées sur la paume de ma main. Elles peuvent avoir des imperfections, avoir échoué dans leurs efforts pour parvenir à la sainteté; mais elles se sont repenties. Je leur ai pardonné et les ai acceptées." PR 447 1 Les assauts de l'ennemi sont puissants, ses tromperies subtiles; mais le regard du Seigneur est sur ses enfants. Leurs tribulations sont grandes, les flammes de la fournaise semblent être sur le point de les consumer; mais Jésus les purifie comme l'or est éprouvé par le feu. Il mettra fin à leur amour des choses terrestres, afin que par eux l'image du Sauveur soit parfaitement révélée. PR 447 2 Il semble parfois que le Seigneur oublie les périls auxquels son Eglise est exposée, ainsi que les assauts que lui livrent ses ennemis. Mais n'en croyons rien. Rien ici-bas ne lui est plus cher. Il ne permet pas que le monde porte atteinte à la réputation de cette Eglise. Il ne laisse pas ses enfants succomber aux tentations de l'adversaire. Il ne tiendra point pour innocent celui qui se montre indigne, mais il fera preuve de miséricorde envers celui qui se repentira sincèrement. Il viendra en aide à celui qui l'implorera pour recevoir la force de développer un caractère chrétien. PR 447 3 A la fin des temps, les enfants de Dieu se lamenteront sur les abominations qui se commettent ici-bas. Ils imploreront avec larmes les méchants de cesser de fouler aux pieds la loi divine, et ils s'humilieront avec une tristesse indicible devant le Seigneur en signe de contrition. Mais les méchants se moqueront de cette tristesse et de ces appels solennels. PR 447 4 L'angoisse et l'humiliation que manifestera le peuple de Dieu prouvera péremptoirement qu'il reconquiert la force et la noblesse de caractère perdues à la suite du péché. C'est parce qu'il s'approchera de plus en plus près du Christ et qu'il aura les regards fixés sur sa pureté absolue qu'il discernera si clairement l'effroyable malignité du péché. La douceur et l'humilité sont les conditions indispensables au succès et à la victoire. Une couronne de gloire attend tous ceux qui fléchissent les genoux au pied de la croix. PR 447 5 Les chrétiens fidèles qui font monter leurs prières vers le ciel sont gardés par lui, bien qu'ignorant la manière dont ils sont protégés. Sollicités par Satan, les chefs de ce monde cherchent à les anéantir; mais si ceux-ci pouvaient ouvrir les yeux, comme autrefois le serviteur du prophète Elisée à Dothan, ils verraient les anges camper autour d'eux et tenir en échec les forces du mal. PR 448 1 Alors que le peuple de Dieu se lamente et implore son Dieu pour obtenir la pureté du coeur, voici l'ordre qui est donné d'en haut: "Otez-lui les vêtements sales." Puis, suivent ces paroles réconfortantes: "Vois, je t'enlève ton iniquité, et je te revêts d'habits de fête."13 La robe immaculée de la justice du Christ est alors donnée aux enfants de Dieu qui, dans l'épreuve et la tentation, sont demeurés fidèles. Ceux qui composent ce "reste" méprisé sont revêtus de vêtements glorieux qui ne connaîtront jamais les souillures du monde. Leurs noms sont inscrits dans le livre de vie de l'Agneau, à côté de ceux des fidèles de tous les temps. Victorieux des ruses de Satan, ils sont restés inébranlables malgré les rugissements du dragon. Ils sont maintenant pour toujours à l'abri du tentateur; leurs péchés sont transférés sur l'auteur de tout mal. Un "turban pur" est placé sur leurs têtes. PR 448 2 Lorsque Satan intensifiait ses accusations, des anges invisibles allaient et venaient, plaçant sur les fidèles le sceau du Dieu vivant. Ce sont ceux qui se tiendront sur la montagne de Sion avec l'Agneau et qui porteront sur leur front le nom de Dieu. Ils chanteront un cantique nouveau devant le trône, cantique que nul, en dehors des cent quarante-quatre mille rachetés, ne peut entonner. "Ce sont ceux qui ... suivent l'Agneau partout où il va. Ils ont été rachetés d'entre les hommes, comme des prémices pour Dieu et pour l'Agneau; et dans leur bouche il ne s'est point trouvé de mensonge, car ils sont irrépréhensibles."14 PR 448 3 Alors seront pleinement accomplies ces paroles de l'ange: "Ecoute donc, Josué, souverain sacrificateur, toi et tes compagnons qui sont assis devant toi! -- car ce sont des hommes qui serviront de signes. -- Voici, je ferai venir mon serviteur, le germe."15 Le Christ se révèle comme le Rédempteur et le libérateur de son peuple. Et maintenant, voici vraiment le "reste", les "hommes servant de signes". Les larmes et les humiliations dont ils ont été abreuvés au cours de leur pèlerinage sont remplacées par la joie et l'honneur d'être auprès de Dieu et de l'Agneau. "En ce temps-là, le germe de l'Eternel aura de la magnificence et de la gloire, et le fruit du pays aura de l'éclat et de la beauté pour les réchappés d'Israël. Et les restes de Sion, les restes de Jérusalem, seront appelés saints, quiconque à Jérusalem sera inscrit parmi les vivants."16 ------------------------Chapitre 48 -- Ni par la puissance, ni par la force PR 451 1 Immédiatement après la vision de Josué et de l'ange, Zacharie reçut un message concernant le travail de Zorobabel. "L'ange qui parlait avec moi, dit le prophète, revint et il me réveilla comme un homme que l'on réveille de son sommeil. Il me dit: Que vois-tu? Je répondis: Je regarde, et voici, il y a un chandelier tout d'or, surmonté d'un vase et portant sept lampes, avec sept conduits pour les lampes qui sont au sommet du chandelier; et il a près de lui deux oliviers, l'un à la droite du vase, et l'autre à sa gauche. Et reprenant la parole, je dis à l'ange qui parlait avec moi: Que signifient ces choses, mon seigneur? ... Alors il reprit et me dit: C'est ici la parole que l'Eternel adresse à Zorobabel: Ce n'est ni par la puissance ni par la force, mais c'est par mon esprit, dit l'Eternel des armées. ... PR 451 2 "Je pris la parole et je lui dis: Que signifient ces deux oliviers, à la droite du chandelier et à sa gauche? Je pris une seconde fois la parole, et je lui dis: Que signifient les deux rameaux d'olivier qui sont près des deux conduits d'or d'où découle l'or? ... Et il dit: Ce sont les deux oints qui se tiennent devant le Seigneur de toute la terre."1 PR 452 1 Dans cette vision, les deux oliviers "qui se tiennent devant le Seigneur" déversent leur huile par des conduits d'or dans le vase du chandelier. C'est ainsi que sont entretenues les lampes du sanctuaire destinées à donner une lumière brillante et continuelle. Par ses deux oints, la plénitude de la lumière, de l'amour et de la puissance de Dieu est communiquée aux fidèles pour qu'ils puissent en faire part à d'autres. Ayant été ainsi enrichis, ils doivent enrichir leurs semblables par l'inestimable trésor de l'amour divin. PR 452 2 En reconstruisant le temple, Zorobabel s'était heurté à de multiples difficultés. Dès le début, ses adversaires "découragèrent le peuple de Juda; ils l'intimidèrent pour l'empêcher de bâtir ... et firent cesser leurs travaux par violence et par force".2 Mais Dieu intervint en faveur des constructeurs. Et maintenant, par son prophète, il s'adresse à Zorobabel en ces termes: "Qui es-tu, grande montagne, devant Zorobabel? Tu seras aplanie. Il posera la pierre principale au milieu des acclamations: Grâce, grâce pour elle!"3 PR 452 3 Tout au long de l'histoire du peuple de Dieu, des montagnes de difficultés, apparemment insurmontables, se sont dressées devant ceux qui s'efforçaient d'exécuter les desseins du ciel. Le Seigneur permet ces obstacles pour éprouver notre foi. C'est précisément quand nous sommes dans une impasse que nous devons placer notre confiance en Dieu et dans la puissance de son Esprit. Une foi vivante implique un accroissement de force spirituelle et une confiance inébranlable en Dieu. C'est ainsi que l'âme acquiert une puissance conquérante. Les obstacles que Satan fait surgir sur la route du chrétien disparaîtront avant même que soit formulée avec foi la demande du juste; car les puissances célestes viendront à son secours. "Si vous aviez de la foi, ... rien ne vous serait impossible, a dit Jésus."4 PR 452 4 Les mondains commencent habituellement leurs entreprises avec pompe et gloriole. La méthode de Dieu, au contraire, consiste à faire des modestes commencements le glorieux triomphe de la vérité et de la justice. Parfois, il fait subir à ses enfants des déceptions et des échecs apparents, car il désire leur apprendre à surmonter les difficultés. PR 453 1 Les hommes sont souvent tentés de chanceler en face des épreuves et des obstacles qui se dressent devant eux. Mais si la confiance qu'ils ont manifestée au début se maintient jusqu'au bout, Dieu leur facilitera la route. Leur succès sera fonction de leurs luttes contre les difficultés. Devant la fermeté et la foi inébranlable de Zorobabel, les hautes montagnes de difficultés s'aplanirent, et celui qui avait posé les fondations du temple, "de ses mains l'achèvera. ... Il posera la pierre principale au milieu des acclamations: Grâce, grâce pour elle!"5 PR 453 2 Aucun pouvoir humain ne saurait établir l'Eglise de Dieu, ni la détruire. Ce n'est pas sur le roc de la force des hommes, mais sur Jésus-Christ, le rocher des siècles, que l'Eglise fut fondée, et "les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle."6 La présence de Dieu assure la stabilité de sa cause. "Ne vous confiez pas aux grands, aux fils de l'homme, qui ne peuvent sauver", nous dit le Psalmiste."7 "C'est dans la tranquillité et le repos que sera votre salut."8 L'oeuvre glorieuse de Dieu, fondée sur les principes de la justice, ne saurait sombrer. Elle progressera résolument, avec toujours plus de force. "Ce n'est ni par la puissance, ni par la force, mais c'est par mon esprit, dit l'Eternel des armées."9 PR 453 3 La promesse: "Les mains de Zorobabel ont fondé cette maison, et ses mains l'achèveront",10 s'était accomplie littéralement. "Les anciens des Juifs bâtirent avec succès, selon les prophéties d'Aggée, le prophète, et de Zacharie, fils d'Iddo; ils bâtirent et achevèrent, d'après l'ordre du Dieu d'Israël, et d'après l'ordre de Cyrus, de Darius et d'Artaxerxès, roi de Perse. La maison fut achevée le troisième jour du mois d'Adar, dans la sixième année du règne du roi Darius."11 On fit la dédicace du temple peu de temps après sa restauration. "Les enfants d'Israël, les sacrificateurs et les Lévites, et le reste des fils de la captivité, firent avec joie la dédicace de cette maison de Dieu"; et "le quatorzième jour du premier mois", ils "célébrèrent la Pâque."12 PR 454 1 Le second temple n'atteignait pas la splendeur du premier. Il ne fut pas sanctifié par des témoignages visibles de la présence divine, comme celui de Salomon. Aucune manifestation surnaturelle ne marqua sa dédicace, aucune nuée de gloire ne vint remplir le nouveau sanctuaire, aucun feu ne descendit du ciel pour consommer l'holocauste placé sur l'autel. On ne vit plus la sainte Schekinah reposer entre les deux chérubins du lieu très saint. On ne vit pas non plus l'arche de l'alliance, ni le propitiatoire, ni les tables du témoignage. Aucun signe du ciel ne manifesta la volonté de Dieu. PR 454 2 Et cependant c'était bien cette maison au sujet de laquelle le Seigneur avait déclaré à Aggée: "La gloire de cette dernière maison sera plus grande que celle de la première." "J'ébranlerai toutes les nations; les trésors de toutes les nations viendront, et je remplirai de gloire cette maison, dit l'Eternel des armées."13 Pendant des siècles, des théologiens se sont efforcés de comprendre comment s'était accomplie la promesse divine faite à Aggée. Malgré l'avènement de Jésus de Nazareth, le Désiré des nations, qui sanctifia par sa présence l'enceinte du temple, un grand nombre d'entre eux ont pourtant refusé obstinément de voir dans cette prophétie une signification particulière. L'orgueil et l'incrédulité ont aveuglé leur esprit au sujet de la vraie signification des paroles du prophète. PR 454 3 Le second temple ne fut pas honoré par la nuée de la gloire de Dieu, mais par la présence même de celui en qui habite "toute la plénitude de la divinité", par Dieu "manifesté en chair."14 C'est donc bien parce que le Christ y vint en personne que le second temple surpassa en gloire le premier. Le "Désiré des nations" était réellement venu dans son temple, lorsque Jésus de Nazareth enseigna et guérit les foules dans les parvis sacrés de ce sanctuaire. ------------------------Chapitre 49 -- Aux jours de la reine Esther PR 455 1 Lorsque Cyrus permit aux Juifs de retourner dans leur pays, environ cinquante mille d'entre eux en profitèrent. Comparés aux centaines de mille dispersés dans les provinces de l'empire médo-persan, ce nombre ne représentait qu'un faible reste. La grande majorité des Juifs préféraient rester en exil plutôt que d'affronter les souffrances possibles d'un retour et d'une réinstallation dans des villes et des maisons dévastées. PR 455 2 Une vingtaine d'années après le décret de Cyrus, Darius en promulgua un deuxième tout aussi favorable que le précédent. Ainsi, dans sa miséricorde, Dieu suscita une nouvelle occasion pour les Juifs de regagner leur patrie. Il avait prévu les temps fâcheux du règne de Xerxès -- l'Assuérus du livre d'Esther. Il n'opéra pas seulement un changement dans le coeur des dirigeants, mais il inspira aussi à Zacharie l'idée d'insister auprès des exilés pour qu'ils retournent en Judée. PR 455 3 "Fuyez, fuyez du pays du septentrion!" proclamait le prophète aux tribus dispersées d'Israël, qui s'étaient établies dans des contrées lointaines de la Judée. "Je vous ai dispersés aux quatre vents des cieux, dit l'Eternel. Sauve-toi, Sion, toi qui habites chez la fille de Babylone! Car ainsi parle l'Eternel des armées: Après cela, viendra la gloire! Il m'a envoyé vers les nations qui vous ont dépouillés; car celui qui vous touche, touche la prunelle de son oeil. Voici, je lève ma main contre elles, et elles seront la proie de ceux qui leur étaient asservis. Et vous saurez que l'Eternel des armées m'a envoyé."1 PR 456 1 Le dessein de Dieu restait toujours le même: son peuple devait être ici-bas une louange à la gloire de son nom. Il avait suscité au cours d'un long exil de fréquentes occasions de retourner à lui. Certains Israélites avaient écouté ses avertissements et en avaient profité. D'autres avaient trouvé le salut au sein de l'affliction. Ils représentaient la plus grande partie de ce reste qui retourna en Judée. La Parole inspirée les compare à "la cime d'un grand cèdre", planté "sur une montagne haute et élevée, ... sur une haute montagne d'Israël".2 PR 456 2 Ces Israélites comptaient parmi "ceux dont Dieu réveilla l'esprit".3 Mais le Seigneur ne cessa de plaider avec les autres qui demeuraient volontairement en terre d'exil. A eux aussi, il multipliait les occasions pour faciliter leur retour. Cependant, la grande majorité des Juifs qui n'avaient pas répondu au décret de Cyrus se moquèrent de ces sollicitations. Ils refusèrent d'écouter l'appel de Zacharie, qui les invitait à quitter Babylone. PR 456 3 En attendant, la situation du royaume médo-persan évoluait rapidement. A Darius, si favorable aux Juifs, succéda Xerxès. C'est sous son règne que les Juifs, insensibles à l'appel de Zacharie, durent affronter une crise terrible. Ayant refusé de profiter de l'occasion nouvelle que Dieu leur offrait pour retourner en Palestine, ils se trouvaient maintenant placés en face de la mort. PR 456 4 Par l'intermédiaire d'Haman, l'Agaguite, homme sans scrupule qui jouissait des pleins pouvoirs dans le royaume, Satan chercha à contrecarrer les desseins de Dieu. Haman nourrissait des sentiments de haine envers Mardochée qui était Juif. Ce dernier n'avait fait aucun mal à Haman, mais il avait refusé de lui témoigner de la vénération. Haman "dédaigna de porter la main sur Mardochée seul"; il voulait "détruire le peuple de Mardochée, tous les Juifs qui se trouvaient dans tout le royaume d'Assuérus".4 PR 457 1 Trompé par les faux rapports d'Haman, Xerxès fut amené à publier un édit ordonnant le massacre de tous les Juifs, ce "peuple dispersé et à part parmi les peuples"5 du royaume médo-persan. Un certain jour fut fixé pour les exterminer et confisquer leurs biens. Le roi était loin de se douter de la répercussion que cet édit pourrait avoir s'il était appliqué à la lettre. Satan, l'instigateur secret de ce complot, s'efforçait de débarrasser la terre de ce peuple qui avait conservé la connaissance du vrai Dieu. PR 457 2 "Dans chaque province, partout où arrivaient l'ordre du roi et son édit, il y eut une grande désolation parmi les Juifs; ils jeûnaient, pleuraient et se lamentaient, et beaucoup se couchaient sur le sac et la cendre."6 L'édit des Mèdes et des Perses ne pouvait être révoqué; il n'y avait donc en apparence aucun espoir possible. Tous les Israélites étaient voués à la mort. PR 457 3 Mais les machinations de l'ennemi furent déjouées par celui qui règne sur les enfants des hommes. Dans sa providence, Dieu avait élevé au rang de reine, dans l'empire médo-persan, Esther, jeune juive qui craignait le Très-Haut. Mardochée était l'un de ses proches parents. Désespérés, ils décidèrent d'en référer à Xerxès pour qu'il intervienne en faveur des Juifs. Esther devait prendre le risque de se présenter devant le roi comme intercesseur. "Qui sait, lui dit Mardochée, si ce n'est pas pour un temps comme celui-ci que tu es parvenue à la royauté?"7 PR 457 4 Esther avait à faire face à une crise telle qu'il fallait prendre une décision rapide. Mais elle savait, ainsi que Mardochée, que si Dieu n'intervenait pas puissamment en leur faveur leur démarche resterait vaine. Esther passa donc une partie de son temps en communion avec Dieu d'une manière toute particulière. "Va, ordonna-t-elle à Mardochée, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à Suse, et jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours, ni la nuit ni le jour. Moi aussi, je jeûnerai de même avec mes servantes, puis j'entrerai chez le roi, malgré la loi; et si je dois périr, je périrai."8 PR 458 1 Les événements se succédèrent alors rapidement: l'apparition d'Esther devant Assuérus, la faveur qu'il lui témoigna, le festin du roi et de la reine avec Haman comme seul invité, le sommeil agité du monarque, les honneurs rendus à Mardochée, l'humiliation et la disgrâce d'Haman à la découverte du complot qu'il avait tramé -- tout cela fait partie d'une histoire qui nous est bien familière. Dieu opéra merveilleusement en faveur de son peuple repentant, et l'édit du roi permettant aux Juifs de défendre leur vie fut rapidement communiqué à tout le royaume par des courriers à cheval "qui partirent aussitôt et en toute hâte, d'après l'ordre du roi". "Dans chaque province et dans chaque ville, partout où arrivaient l'ordre du roi et son édit, il y eut parmi les Juifs de la joie et de l'allégresse, des festins et des fêtes. Et beaucoup de gens d'entre les peuples du pays se firent Juifs, car la crainte des Juifs les avait saisis."9 PR 458 2 Lorsque le jour fixé pour leur extermination arriva, "les Juifs se rassemblèrent dans leurs villes, dans toutes les provinces du roi Assuérus, pour mettre la main sur ceux qui cherchaient leur perte; et personne ne put leur résister, car la crainte qu'on avait d'eux s'était emparée de tous les peuples". Les anges qui excellent en force avaient été envoyés par Dieu pour protéger ses enfants alors "qu'ils défendaient leur vie".10 PR 458 3 Mardochée reçut la place d'honneur qui avait été occupée par Haman. Il "était le premier après le roi Assuérus; considéré parmi les Juifs et aimé de la multitude de ses frères".11 Il s'efforça de favoriser le bien-être d'Israël. C'est ainsi que Dieu intervint une fois de plus pour que son peuple obtînt les faveurs de la cour médo-persane et qu'il rendît possible l'accomplissement de ses desseins: rétablir les Juifs au pays de la promesse. Mais ce ne fut que quelques années plus tard, sept ans après l'avènement d'Artaxerxès I, successeur de Xerxès, qu'un grand nombre de Juifs retourna à Jérusalem sous la conduite d'Esdras. PR 458 4 Les tribulations que subit le peuple d'Israël à l'époque d'Esther n'étaient pas particulières à ce moment-là. Le voyant de Patmos, parlant de la fin des temps, déclare: "Le dragon fut irrité contre la femme, et il s'en alla faire la guerre aux restes de sa postérité, à ceux qui gardent les commandements de Dieu et qui ont le témoignage de Jésus."12 Il faut donc nous attendre à voir aujourd'hui s'accomplir cette prophétie. L'esprit qui poussa jadis les hommes à persécuter la véritable Eglise les amènera à user des mêmes procédés envers ceux qui restent fidèles au Seigneur. Des préparatifs se font déjà en ce moment en vue du dernier conflit où s'affronteront les enfants de Dieu et les forces du mal. PR 459 1 Un décret semblable à celui d'Assuérus concernant les Juifs sera promulgué contre le peuple de Dieu. De nos jours, les ennemis de la véritable Eglise considèrent le petit peuple qui observe le quatrième commandement comme un Mardochée à la porte du roi. Le respect que montrent les enfants de Dieu à l'égard de la loi est comme un reproche continuel adressé à tous ceux qui ont abandonné la crainte de Dieu et foulé aux pieds son saint sabbat. PR 459 2 Satan fera naître l'indignation contre la minorité qui refuse de se soumettre aux coutumes et aux traditions du monde. Les hommes influents et réputés s'allieront aux gens douteux et sans principes pour comploter contre le peuple de Dieu. La fortune, le génie, la science s'associeront pour le couvrir de mépris. Les dirigeants, les pasteurs et les membres d'église conspireront contre lui. Ils chercheront à détruire la foi des enfants de Dieu par tous les moyens, oralement, par écrit, par la flatterie, les menaces, les sarcasmes. On excitera les passions humaines par de faux rapports. A défaut d'un passage formel des Ecritures au sujet du sabbat, on aura recours à des mesures coercitives. PR 459 3 Pour s'assurer la popularité, les législateurs voteront des lois relatives à l'observation du dimanche. Mais ceux qui craignent Dieu ne sauraient se soumettre à une institution qui viole les préceptes du Décalogue. Le grand conflit entre la vérité et l'erreur aura comme enjeu ce sujet brûlant. Mais nous ne sommes pas laissés dans le doute quant à l'issue de ce combat. Aujourd'hui, comme au temps d'Esther, Dieu vengera sa vérité et son peuple. ------------------------Chapitre 50 -- Esdras, prêtre et scribe PR 461 1 Artaxerxès Longuemain monta sur le trône du royaume médo-persan environ soixante-dix ans après le retour du premier convoi juif, conduit par Zorobabel et Josué. Le nom de ce roi est associé dans le récit sacré à une suite de bénédictions remarquables dont fut l'objet le peuple juif. C'est pendant son règne que vécurent Esdras et Néhémie. C'est ce monarque qui, en 457, promulgua le troisième et ultime décret ordonnant la restauration de Jérusalem. C'est encore sous son ordre que se produisit le retour d'un petit groupe de Juifs conduits par Esdras, et que furent achevés les murs de la ville par Néhémie et ses collaborateurs. C'est aussi à ce moment-là que furent réorganisés les services du temple et qu'Esdras et Néhémie procédèrent à d'importantes réformes. Artaxerxès, au cours de son long règne, favorisa le peuple de Dieu et reconnut dans Esdras et Néhémie, qu'il affectionnait tout particulièrement et en qui il avait une pleine confiance, des hommes choisis par Dieu et appelés à une oeuvre spéciale. PR 462 1 La conduite d'Esdras, alors qu'il vivait parmi les Juifs à Babylone, était si exceptionnelle qu'elle attira l'attention d'Artaxerxès. Esdras discutait librement avec le monarque sur des questions relatives à la puissance divine et sur les desseins de Dieu de rétablir les Juifs en Palestine. PR 462 2 Descendant d'Aaron, Esdras reçut une formation de prêtre; mais il se livrait aussi à l'étude des livres des magiciens, des astrologues et des sages du royaume médo-persan. Cependant, il n'était pas satisfait de son état spirituel; il désirait ardemment vivre en pleine harmonie avec le Seigneur et soupirait après la sagesse d'en haut, afin de pouvoir accomplir la volonté divine. Il appliqua donc "son coeur à méditer et à mettre en pratique la loi de l'Eternel".1 Ceci le poussa à étudier sérieusement l'histoire du peuple de Dieu, telle qu'elle est rapportée dans les écrits des prophètes et des rois. Il examina les livres historiques et poétiques de la Bible, afin de comprendre pourquoi le Seigneur avait permis la destruction de Jérusalem et la captivité des Juifs en pays païen. PR 462 3 Esdras approfondit tout spécialement l'histoire d'Israël depuis l'époque où Abraham reçut une promesse de la part de Dieu. Il étudia les instructions données au mont Sinaï, et celles que le peuple juif avait reçues pendant ses pérégrinations au désert. Son coeur était remué à mesure qu'il comprenait mieux les hauts faits de Dieu envers son peuple et qu'il concevait mieux la sainteté du Décalogue. Il passa alors par une conversion véritable, et il décida d'étudier à fond l'histoire sacrée, afin de pouvoir en faire profiter le peuple juif. PR 462 4 Esdras s'efforça de se préparer pour l'oeuvre qu'il croyait lui incomber. Il rechercha le Seigneur avec beaucoup de sérieux, afin de pouvoir être un sage docteur en Israël. Alors qu'il apprenait à soumettre sa volonté et son esprit à l'autorité divine, les principes de la véritable sanctification pénétraient dans sa vie. Ces principes contribuèrent plus tard, non seulement à transformer le caractère des jeunes, mais aussi celui de tous ceux qui entraient en contact avec lui. PR 462 5 Dieu choisit Esdras pour en faire un instrument de bénédiction envers Israël, et pour qu'il redonne aux fonctions de prêtre l'honneur et la gloire qu'elles avaient perdus au cours de la captivité. Esdras devint un homme remarquable au point de vue des connaissances, "un scribe versé dans la loi de Moïse".2 Ces caractéristiques le rendirent célèbre dans l'empire médo-persan. PR 463 1 Il fut l'interprète de Dieu, instruisant tous ceux qui l'approchaient sur les principes qui régissent le ciel. Jusqu'à la fin de ses jours, sa tâche principale fut d'enseigner, soit à la cour médo-persane, soit à Jérusalem. Sa capacité de travail augmentait à mesure qu'il faisait part à d'autres des vérités qu'il connaissait. Il devint aussi un homme pieux et fervent. Témoin de Dieu, il démontrait au monde la puissance des vérités bibliques qui ennoblissent la vie quotidienne. PR 463 2 Les efforts qu'il déploya pour raviver l'intérêt dans l'étude des Ecritures furent permanents. Toute sa vie se passa à un travail laborieux destiné à conserver et à propager la Parole de Dieu. Il recueillit tous les exemplaires de la loi qu'il réussit à découvrir, et il les fit transcrire et distribuer. La vérité ainsi répandue, placée dans les mains d'un grand nombre, apporta des connaissances d'une valeur inestimable. PR 463 3 Esdras croyait que Dieu accomplirait une grande oeuvre en faveur de son peuple. C'est pourquoi il fit part à Artaxerxès de son désir de retourner à Jérusalem pour raviver l'intérêt dans l'étude de la Parole de Dieu et pour aider ses frères à restaurer la sainte cité. Le monarque fut profondément impressionné par la confiance manifestée par Esdras dans le Dieu d'Israël qu'il croyait capable de protéger et de garder son peuple. Il comprenait que les Israélites devaient retourner à Jérusalem pour y servir le Seigneur, et il avait une telle confiance dans l'intégrité d'Esdras qu'il accéda à sa requête et lui remit de riches présents pour le service du temple. Il en fit le représentant particulier de l'empire médo-persan, et lui donna pleins pouvoirs pour l'exécution de ses projets. PR 463 4 Le décret d'Artaxerxès Longuemain relatif à la restauration de Jérusalem était le troisième publié depuis la fin des soixante-dix ans de captivité. Ce décret est remarquable par ses expressions concernant le Dieu du ciel, par son témoignage des connaissances d'Esdras et les libéralités accordées au reste du peuple de Dieu. Artaxerxès parle d'Esdras comme d'un "sacrificateur et scribe, versé dans la loi du Dieu des cieux". D'accord avec ses conseillers, il offre généreusement "au Dieu d'Israël, dont la demeure est à Jérusalem", une somme à laquelle il ajoute un supplément destiné à faire face aux autres dépenses. Ce supplément devait être tiré "de la maison des trésors du roi."3 "Tu es envoyé par le roi et ses sept conseillers, dit Artaxerxès à Esdras, pour inspecter Juda et Jérusalem d'après la loi de ton Dieu, laquelle est entre tes mains." Et le roi ajoutait: "Que tout ce qui est ordonné par le Dieu des cieux se fasse ponctuellement pour la maison du Dieu des cieux, afin que sa colère ne soit pas sur le royaume, sur le roi et sur ses fils."4 PR 464 1 En permettant aux Israélites de retourner dans leur pays, Artaxerxès prit des mesures pour que soient rétablis les membres du sacerdoce avec leurs anciens rites et privilèges. "Nous vous faisons savoir, disait-il, qu'il ne peut être levé ni tribut, ni impôt, ni droit de passage, sur aucun des sacrificateurs, des Lévites, des chantres, des portiers, des Néthiniens et des serviteurs de cette maison de Dieu." Le roi prit aussi des dispositions pour faire nommer des magistrats, afin de gouverner le peuple avec justice, selon le code hébreu. "Et toi, Esdras, disait le roi, selon la sagesse de Dieu que tu possèdes, établis des juges et des magistrats qui rendent la justice à tout le peuple de l'autre côté du fleuve, à tous ceux qui connaissent les lois de ton Dieu; et fais-les connaître à ceux qui ne les connaissent pas. Quiconque n'observera pas ponctuellement la loi de ton Dieu et la loi du roi sera condamné à la mort, au bannissement, à une amende, ou à la prison."5 PR 464 2 Ainsi, comme "la bonne main de son Dieu était sur lui", Esdras décida le roi à faire le nécessaire pour le retour de tout le peuple d'Israël, des sacrificateurs et des Lévites qui se trouvaient dans l'empire médo-persan, et qui étaient "disposés à partir ... pour Jérusalem".6 Les exilés avaient ainsi une nouvelle occasion de retourner au pays dont la possession était liée aux promesses faites à la maison d'Israël. Le décret du roi réjouit grandement tous ceux qui s'étaient penchés avec Esdras sur les desseins de Dieu à l'égard de son peuple. "Béni soit l'Eternel, le Dieu de nos pères, s'écriait Esdras, qui a disposé le coeur du roi à glorifier ainsi la maison de l'Eternel à Jérusalem, et qui m'a rendu l'objet de la bienveillance du roi, de ses conseillers, et de tous ses puissants chefs!"7 PR 465 1 La providence divine était manifeste dans la proclamation de ce décret d'Artaxerxès. Certains Juifs le comprirent et profitèrent avec joie du privilège qui leur était offert, leur permettant de retourner chez eux dans des circonstances si favorables. Un lieu de rassemblement fut prévu et, au jour fixé, ceux qui désiraient se rendre à Jérusalem entreprirent ce long voyage. "Je les rassemblai près du fleuve qui coule vers Ahava, dit Esdras, et nous campâmes là trois jours."8 PR 465 2 Esdras avait espéré que beaucoup d'Israélites retourneraient à Jérusalem; mais ceux qui répondirent à l'appel le désappointèrent par leur petit nombre. La plupart des exilés qui avaient acquis des maisons et des terres ne voulaient pas les abandonner. Ils aimaient leurs aises et le confort, et ils désiraient les conserver. Leur exemple fut un obstacle pour ceux qui auraient voulu partager le sort des hommes qui marchaient par la foi. PR 465 3 En considérant les exilés qui s'étaient rassemblés, Esdras fut surpris de n'y voir aucun des fils de Lévi. Où étaient donc les membres de la tribu mise à part pour le service sacré du temple? A l'appel: "Qui est du côté du Seigneur?" les Lévites auraient dû être les premiers à répondre. Ils avaient joui de nombreux privilèges au cours de la captivité, et même plus tard, ainsi que d'une complète liberté pour s'occuper des besoins spirituels de leurs frères exilés. Des synagogues avaient été construites, où ils pouvaient officier et instruire le peuple. L'observation du sabbat et les rites sacrés particuliers à la religion juive avaient pu être pratiqués librement par les exilés. PR 465 4 Mais au cours des années qui suivirent la captivité, les conditions se modifièrent, et de nombreuses et nouvelles responsabilités incombèrent aux chefs d'Israël. Le temple de Jérusalem ayant été reconstruit et dédicacé, il fallait un plus grand nombre de prêtres pour assurer les services. Un besoin urgent d'hommes de Dieu se faisait sentir pour instruire le peuple. En outre, les Juifs restés à Babylone étaient menacés dans leur liberté. Par le prophète Zacharie, ainsi que par les faits récents qui s'étaient produits à l'époque troublée d'Esther et de Mardochée, ils avaient été nettement invités à retourner dans leur pays. Le moment était donc venu où il aurait été dangereux pour eux de rester plus longtemps sous l'influence païenne. En face de tels changements, les prêtres qui se trouvaient encore à Babylone auraient dû discerner dans le décret d'Artaxerxès un appel spécial à retourner à Jérusalem. PR 466 1 Le roi et les princes avaient fait plus qu'ils ne devaient pour préparer le chemin du retour. Ils y avaient largement pourvu; mais où se trouvaient maintenant les hommes? Les fils de Lévi firent défaut alors que leur décision d'accompagner leurs frères aurait déterminé les autres à suivre leur exemple. Leur étrange indifférence est un triste témoignage de l'attitude des exilés à l'égard des desseins de Dieu envers son peuple. PR 466 2 Esdras, une fois de plus, fit appel aux Lévites; il les invita d'une manière pressante à se joindre au groupe qui retournait à Jérusalem. Pour faire ressortir l'importance d'agir rapidement, il fit parvenir un message par des "chefs" et des "docteurs"9 d'Israël. Pendant ce temps, Esdras et les pèlerins attendaient le retour des messagers porteurs de cette requête: Amenez-nous "des serviteurs pour la maison de notre Dieu."10 Cet appel ne resta pas sans réponse; parmi ceux qui hésitaient, certains prirent finalement la décision de partir. Quarante prêtres et deux cent vingt Néthiniens -- hommes sur lesquels Esdras pouvait compter, tant comme ministres éclairés que comme docteurs et auxiliaires avisés -- furent amenés au camp. PR 466 3 Tous étaient prêts maintenant pour le départ. Les exilés emmenaient leurs femmes, leurs enfants, leurs provisions de route, ainsi qu'une somme importante destinée aux services du temple. Esdras savait que des ennemis les attendaient sur leur chemin, prêts à les détrousser et à les tuer; mais il ne réclama au roi ni armes, ni soldats pour les protéger. "J'aurais eu honte, dit-il, de demander au roi une escorte et des cavaliers pour nous protéger contre l'ennemi pendant la route, car nous avions dit au roi: La main de notre Dieu est pour leur bien sur tous ceux qui le cherchent, mais sa force et sa colère sont sur tous ceux qui l'abandonnent."11 PR 467 1 Esdras et ses compagnons virent là une occasion de magnifier le nom du Seigneur devant les païens. Leur foi dans la puissance d'un Dieu vivant serait fortifiée si les Israélites eux-mêmes témoignaient une confiance implicite en leur divin conducteur. Ils décidèrent donc de placer toute leur confiance en lui. Ils se passeraient de soldats, pour ne pas donner aux païens l'occasion d'attribuer à la force de l'homme la gloire qui ne revient qu'à Dieu seul. Ils ne voulaient pas faire naître le doute dans l'esprit de leurs amis païens sur la sincérité de leur confiance en Dieu. Leur force ne dépendait ni de la richesse, ni de la puissance ou de l'influence des idolâtres, mais de la faveur divine. Ce n'est qu'en observant la loi de Dieu qu'ils seraient protégés. PR 467 2 Conscients des conditions grâce auxquelles ils continueraient à jouir de la main secourable du Seigneur, ils accordèrent plus de solennité que de coutume au service de consécration présidé par Esdras et ses fidèles compagnons immédiatement avant leur départ. "Là, près du fleuve d'Ahava, dit Esdras, je publiai un jeûne d'humiliation devant notre Dieu, afin d'implorer de lui un heureux voyage pour nous, pour nos enfants, et pour tout ce qui nous appartenait. ... C'est à cause de cela que nous jeunâmes et que nous invoquâmes notre Dieu. Et il nous exauça."12 PR 467 3 La bénédiction divine n'excluait pas cependant toute prudence et toute prévoyance. Esdras prit des précautions spéciales pour la sécurité du trésor. Il "choisit douze chefs des sacrificateurs" -- hommes à la foi et à la fidélité éprouvées -- "et pesa devant eux l'argent, l'or et les ustensiles, donnés en offrande pour la maison de notre Dieu par le roi, ses conseillers et ses chefs, et par tous ceux d'Israël qu'on avait trouvés". Ces hommes reçurent la charge solennelle de veiller sur le trésor. "Vous êtes consacrés à l'Eternel, leur dit Esdras; ces ustensiles sont des choses saintes, et cet argent et cet or sont une offrande volontaire à l'Eternel, le Dieu de vos pères. Soyez vigilants, et prenez cela sous votre garde, jusqu'à ce que vous le pesiez devant les chefs des sacrificateurs et les Lévites, et devant les chefs de famille d'Israël, à Jérusalem, dans les chambres de la maison de l'Eternel."13 PR 468 1 Le soin pris par Esdras pour la sécurité du trésor du Seigneur nous donne une leçon que nous devons méditer soigneusement. On n'avait choisi pour cela que ceux qui s'étaient montrés dignes de confiance. Des instructions précises leur avaient été données concernant leurs responsabilités. En désignant des prêtres fidèles pour s'occuper du trésor, Esdras reconnaissait la nécessité de l'ordre et de l'organisation dans l'oeuvre de Dieu. PR 468 2 Au cours des dernières journées passées sur les rives du fleuve Ahava, les Israélites pourvurent à tout ce qui leur serait nécessaire pour leur long voyage. "Nous partîmes du fleuve Ahava pour nous rendre à Jérusalem, dit Esdras, le douzième jour du premier mois. La main de notre Dieu fut sur nous et nous préserva des attaques de l'ennemi et de toute embûche pendant la route."14 PR 468 3 Le voyage dura environ quatre mois. La foule qui accompagnait Esdras comprenait plusieurs milliers de personnes, parmi lesquelles se trouvaient des femmes et des enfants, qui n'avançaient que lentement. Mais tout se passa très bien. Leur voyage fut particulièrement béni, et le premier jour du cinquième mois de la septième année d'Artaxerxès, ils atteignirent Jérusalem. ------------------------Chapitre 51 -- Réveil spirituel PR 469 1 L'arrivée d'Esdras à Jérusalem fut très opportune. Sa présence dans cette ville était absolument nécessaire, car elle apportait du réconfort et de l'espoir à ceux qui travaillaient depuis longtemps au milieu d'insurmontables difficultés. De grandes tâches avaient été accomplies depuis le retour du premier groupe d'exilés conduits par Zorobabel et Josué, soixante-dix ans auparavant. Le temple avait été achevé, et les murailles de la ville en partie reconstruites. Mais il restait encore beaucoup à faire. PR 469 2 La plupart des Israélites revenus à Jérusalem étaient restés fidèles au Seigneur jusqu'à leur mort, mais le plus grand nombre de leurs enfants avaient perdu de vue le caractère sacré de la loi divine. Des hommes même chargés de responsabilités vivaient ouvertement dans le péché. Leur conduite neutralisait les efforts de ceux qui avaient à coeur l'avancement de la cause de Dieu; car tant que les violations flagrantes de la loi restaient impunies, la bénédiction du ciel ne pouvait reposer sur le peuple juif. PR 469 3 Dieu, dans sa providence, avait suscité des occasions spéciales pour que ceux qui retournaient à Jérusalem sous la conduite d'Esdras reviennent à lui. Le miracle qui s'était opéré en leur faveur lors de leur retour -- retour qui s'était effectué sans protection humaine -- leur avait enseigné de riches leçons spirituelles. Beaucoup d'entre eux s'étaient fortifiés dans leur foi; aussi, en se mêlant aux découragés et aux indifférents de Jérusalem, contribuèrent-ils par leur influence à hâter la réforme qui allait bientôt s'opérer. Le quatrième jour après leur arrivée, l'or et l'argent, ainsi que les ustensiles du service du sanctuaire, furent remis par ceux qui détenaient le trésor aux hommes chargés des offices du temple, en présence de témoins et après une rigoureuse vérification. Chaque article fut contrôlé, "soit pour le nombre, soit pour le poids".1 PR 470 1 "Les fils de la captivité revenus de l'exil offrirent un holocauste au Dieu d'Israël" pour témoigner leur gratitude d'avoir été protégés par les saints anges pendant leur retour. "Ils transmirent les ordres du roi aux satrapes du roi et aux gouverneurs de ce côté du fleuve, lesquels honorèrent le peuple et la maison de Dieu."2 PR 470 2 Peu de temps après, les chefs d'Israël vinrent se plaindre amèrement auprès d'Esdras de ce que "le peuple d'Israël, les sacrificateurs et les Lévites" avaient méprisé les commandements de Dieu interdisant les mariages avec les peuples étrangers. "Ils ont pris, dirent-ils, de leurs filles pour eux et pour leurs fils, et ils ont mêlé la race sainte avec les peuples de ces pays; et les chefs et les magistrats ont été les premiers à commettre ce péché."3 PR 470 3 En étudiant les causes de la captivité babylonienne, Esdras avait appris que l'apostasie des Israélites était due en grande partie à ses alliances avec les païens. Il avait vu que s'ils avaient obéi aux commandements de Dieu leur interdisant de s'unir aux nations idolâtres, bien des tristesses et des humiliations leur auraient été épargnées. Lorsqu'il sut qu'en dépit des leçons du passé, des hommes en vue avaient osé violer les lois données comme une sauvegarde contre l'apostasie, son coeur fut profondément bouleversé. Il pensa à la bonté de Dieu qui avait permis à ses enfants de prendre pied à nouveau dans leur terre natale, et il fut comme accablé par une indignation et une douleur légitimes. "Lorsque j'entendis cela, dit-il, je déchirai mes vêtements et mon manteau, je m'arrachai les cheveux de la tête et les poils de la barbe, et je m'assis désolé. Auprès de moi s'assemblèrent tous ceux que faisaient trembler les paroles du Dieu d'Israël, à cause du péché des fils de la captivité; et moi, je restai assis et désolé, jusqu'à l'offrande du soir."4 PR 471 1 A ce moment-là, Esdras se leva, et déchirant une fois encore ses vêtements et son manteau, il tomba à genoux et soulagea son âme accablée en adressant au ciel une supplication. Les bras tendus vers le Seigneur, il s'exclama: "Mon Dieu, je suis dans la confusion, et j'ai honte, ô mon Dieu, de lever ma face vers toi; car nos iniquités se sont multipliées par-dessus nos têtes, et nos fautes ont atteint jusqu'aux cieux. Depuis les jours de nos pères nous avons été grandement coupables jusqu'à ce jour, et c'est à cause de nos iniquités que nous avons été livrés, nous, nos rois et nos sacrificateurs, aux mains des rois étrangers, à l'épée, à la captivité, au pillage, et à la honte qui couvre aujourd'hui notre visage. Et cependant l'Eternel, notre Dieu, vient de nous faire grâce en nous laissant quelques réchappés et en nous accordant un abri dans son saint lieu, afin d'éclaircir nos yeux et de nous donner un peu de vie au milieu de notre servitude. Car nous sommes esclaves, mais Dieu ne nous a pas abandonnés dans notre servitude. Il nous a rendus les objets de la bienveillance des rois de Perse, pour nous conserver la vie afin que nous pussions bâtir la maison de notre Dieu et en relever les ruines, et pour nous donner une retraite en Juda et à Jérusalem. Maintenant, que dirons-nous après cela, ô notre Dieu? Car nous avons abandonné tes commandements, que tu nous avais prescrits par tes serviteurs les prophètes. ... Après tout ce qui nous est arrivé à cause des mauvaises actions et des grandes fautes que nous avons commises, quoique tu ne nous aies pas, ô notre Dieu, punis en proportion de nos iniquités, et maintenant que tu nous as conservé ces réchappés, recommencerions-nous à violer tes commandements et à nous allier avec ces peuples abominables? Ta colère n'éclaterait-elle pas encore contre nous jusqu'à nous détruire, sans laisser ni reste, ni réchappés? Eternel, Dieu d'Israël, tu es juste, car nous sommes aujourd'hui un reste de réchappés. Nous voici devant toi comme des coupables, et nous ne saurions ainsi subsister devant ta face."5 PR 472 1 La tristesse d'Esdras et de ses collaborateurs au sujet des maux qui s'étaient glissés insidieusement au coeur même de l'oeuvre de Dieu amena la repentance. La plupart de ceux qui avaient péché en étaient sérieusement affectés. "Le peuple répandait d'abondantes larmes."6 Les infidèles commencèrent à éprouver la haine du péché et à comprendre l'horreur qu'elle inspire au Seigneur. Ils se rendirent compte de la sainteté de la loi donnée au Sinaï, et beaucoup tremblèrent en pensant à leurs transgressions. PR 472 2 Parmi ceux qui se trouvaient là, Schecania reconnut que tout ce qu'avait dit Esdras était vrai. "Nous avons péché contre notre Dieu, confessa-t-il, en nous alliant à des femmes étrangères qui appartiennent aux peuples du pays. Mais Israël ne reste pas pour cela sans espérance. Faisons maintenant une alliance avec notre Dieu." Et Schecania proposa que tous ceux qui s'étaient rendus coupables prennent la décision d'abandonner leurs péchés et soient jugés "d'après la loi". "Lève-toi, dit-il à Esdras, car cette affaire te regarde. Nous serons avec toi. Prends courage et agis. Esdras se leva, et il fit jurer aux chefs des sacrificateurs, des Lévites et de tout Israël, de faire ce qui venait d'être dit. Et ils le jurèrent."7 PR 472 3 C'était le début d'une réforme remarquable. Avec beaucoup de tact et de patience, ainsi qu'une sérieuse considération des droits et des avantages de chaque personne intéressée, Esdras et ses collaborateurs s'efforcèrent de ramener les repentants dans le sentier véritable. Esdras était par-dessus tout un docteur de la loi; et alors qu'il examinait le cas de chacun avec une attention particulière, il cherchait à impressionner les gens par le caractère sacré de la loi divine et par les bénédictions qui découlent de son observation. PR 472 4 Partout où Esdras se trouvait, il suscitait un nouvel intérêt pour l'étude des saintes Ecritures. Des instructeurs étaient désignés pour enseigner le peuple; la loi divine était exaltée et honorée. On étudiait les livres des prophètes avec soin, et les passages qui prédisent la venue du Messie apportaient l'espoir et le réconfort à de nombreuses âmes fatiguées et chargées. PR 473 1 Plus de deux mille ans se sont écoulés depuis qu'Esdras appliquait son coeur "à étudier et à mettre en pratique la loi de l'Eternel".8 Et cependant, cette période n'a pas diminué l'influence de son pieux exemple. Le récit de sa vie consacrée a fait naître à travers les siècles, chez de nombreux croyants, le désir d'appliquer leur coeur "à étudier et à mettre en pratique la loi de l'Eternel". PR 473 2 Les mobiles qui animaient Esdras étaient nobles et saints. Dans tout ce qu'il faisait, il manifestait un profond amour pour les âmes. La compassion et la tendresse qu'il témoigna à l'égard de ceux qui avaient péché, volontairement ou inconsciemment, devraient servir de leçon à tous ceux qui cherchent à opérer des réformes. Les serviteurs de Dieu doivent être aussi fermes que le roc lorsqu'il s'agit de principes rigoureux, et cependant faire preuve de sympathie et d'indulgence. Comme Esdras, qu'ils enseignent aux pécheurs le chemin de la vie, en inculquant les principes qui sont à la base du bien. PR 473 3 De nos jours, alors que Satan s'efforce par tous les moyens d'aveugler les hommes et les femmes sur les exigences de la loi divine, il faut que des serviteurs de Dieu se lèvent et "fassent trembler devant les commandements de Dieu".9 Il faut de vrais réformateurs qui montrent aux transgresseurs le grand Législateur et leur enseignent que "la loi de l'Eternel est parfaite, qu'elle restaure l'âme."10 Il faut des hommes qui connaissent bien les Ecritures, des hommes dont chaque acte, chaque parole exalte les commandements de Dieu, des hommes qui cherchent à fortifier la foi. Des instructeurs sont nécessaires; il en faut un grand nombre qui suscitent dans les coeurs le respect et l'amour de la Parole. PR 473 4 L'iniquité, qui se multiplie à notre époque, est due en grande partie à la négligence de l'étude des Ecritures et au mépris de ses enseignements. En effet, lorsque la Parole de Dieu est mise de côté, son pouvoir de résistance aux viles passions du coeur charnel est anéanti. Les hommes sèment pour la chair, et ils récoltent la corruption. En se détournant de la Bible, on s'éloigne de la loi divine. La doctrine enseignant que les hommes sont dégagés de l'obéissance aux préceptes divins affaiblit la force de l'obligation morale, et ouvre sur le monde les écluses de l'iniquité. La licence, la dissipation, la corruption déferlent sur nous comme une marée dévastatrice. Partout se dressent l'envie, la suspicion, l'hypocrisie, l'hostilité, la rivalité, la guerre, l'abandon des devoirs sacrés et la complaisance dans les plaisirs. Tout le système des principes et des doctrines de la religion qui devrait être la base et l'ossature de la vie sociale semble être une masse branlante, prête à s'effondrer. PR 474 1 A la fin de l'histoire du monde, la voix qui retentit sur le Sinaï déclare encore: "Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face."11 L'homme s'est dressé contre Dieu, mais il ne peut imposer silence à la voix du commandement. L'esprit humain ne saurait soustraire ses obligations à une puissance supérieure. Les théories et les spéculations peuvent abonder, les hommes essayer d'opposer la science à l'Ecriture et abolir ainsi la loi divine, mais le commandement se fait de plus en plus impérieux: "Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul."12 PR 474 2 On ne peut affaiblir ou renforcer la loi de Dieu. Telle elle a été, telle elle restera. Elle a toujours été et sera toujours sainte, juste, bonne, complète en elle-même; elle ne peut être ni abrogée, ni changée. L'honorer ou la déshonorer n'est que langage d'homme. PR 474 3 Le dernier grand conflit entre l'erreur et la vérité naîtra du heurt des lois humaines à celles de Dieu. Nous sommes déjà engagés dans ce combat, qui ne relève pas des rivalités entre Eglises luttant pour la suprématie, mais qui se livre entre la religion de la Bible et les religions basées sur des fables ou des traditions. Les ennemis qui se sont coalisés contre la vérité agissent maintenant avec puissance. La Parole de Dieu qui nous a été transmise au prix de tant de souffrances et de sang versé par les martyrs semble avoir bien peu de valeur. Comme ils sont rares ceux qui l'acceptent vraiment comme règle de conduite! L'incrédulité règne d'une manière alarmante, non seulement dans le monde, mais aussi dans l'Eglise. On en vient à nier les doctrines qui sont les fondements mêmes de la foi. Les grands faits de la création présentés par les auteurs inspirés de la Bible: la chute de l'homme, l'expiation, la perpétuité de la loi -- tout cela est pratiquement rejeté par une forte proportion de soi-disant chrétiens. Des milliers de gens qui se glorifient de leurs connaissances considèrent comme une preuve évidente de faiblesse le fait de croire implicitement à l'Ecriture sainte; ils spiritualisent et expliquent à leur façon les vérités essentielles du livre sacré. PR 475 1 Les chrétiens devraient se préparer à l'orage qui va bientôt éclater et les surprendre d'une manière terrifiante. Pour cela, il faut une étude approfondie de la Parole de Dieu et une vie conforme à ses préceptes. Le terrible dénouement de l'éternité exige de nous autre chose qu'une religion imaginaire, faite de paroles et de formes, et où la vérité est absente. Ce que Dieu veut, c'est un réveil et une réforme radicale. On ne devrait entendre du haut de la chaire que les paroles de la Bible et de la Bible seule. Mais celle-ci a été dépossédée de sa puissance, et il en est résulté un abaissement de la vie spirituelle. Dans la plupart des sermons prêchés aujourd'hui, on ne trouve pas cette manifestation divine qui éveille la conscience et procure la vie de l'âme. Les auditeurs ne peuvent pas dire, comme autrefois les disciples d'Emmaüs: "Notre coeur ne brûlait-il pas au-dedans de nous, lorsqu'il nous parlait en chemin et nous expliquait les Ecritures?"13 Pourtant ils sont nombreux ceux qui crient après le Dieu vivant et aspirent à sa présence en eux. Il faut que la Parole de Dieu s'adresse au coeur, et que ceux dont les oreilles n'ont entendu qu'une religion de tradition, que des maximes et des théories humaines, écoutent la voix de celui qui peut redonner à l'âme la vie éternelle. PR 475 2 Une grande lumière rayonnait de la vie des patriarches et des prophètes. De Sion, la cité de Dieu, sortaient des paroles merveilleuses. C'est ainsi que le Seigneur désire voir se dégager la lumière de ceux qui le servent aujourd'hui. Si les saints hommes de l'Ancien Testament rendaient un témoignage si magnifique, pourquoi ceux qui profitent des connaissances accumulées au cours des siècles ne rendraient-ils pas un témoignage plus éclatant encore en faveur de la vérité? La gloire des prophéties projette sa lumière sur notre sentier. Dans la mort du Fils de Dieu, le type a rencontré son antitype. Le Christ est ressuscité en proclamant sur le sépulcre vaincu: "Je suis la résurrection et la vie."14 Il a envoyé son Esprit dans le monde pour nous rappeler tout ce qu'il a dit. Par un miracle d'une extraordinaire puissance, il a inspiré au cours des âges sa parole écrite. PR 476 1 Les réformateurs dont les protestations leur ont valu le nom de protestants, se sont sentis poussés à diffuser la lumière de l'Evangile dans le monde. Dans cette intention, ils ne craignaient pas de sacrifier leurs biens, leur liberté et même leur vie; et malgré la persécution et la mort, l'Evangile était proclamé au près et au loin. La Parole de Dieu était annoncée aux riches, aux pauvres, aux humbles et aux grands, aux savants et aux ignorants. Veuille Dieu nous aider, alors que nous approchons de la fin de toutes choses, à être aussi fidèles à notre mission que les premiers réformateurs! PR 476 2 Le prophète Joël a écrit: PR 476 3 Sonnez de la trompette en Sion! Publiez un jeûne, une convocation solennelle! Assemblez le peuple, formez une sainte réunion! Assemblez les vieillards, Assemblez les enfants. ... Qu'entre le portique et l'autel Pleurent les sacrificateurs, Serviteurs de l'Eternel, Et qu'ils disent: Eternel, épargne ton peuple! Ne livre pas ton héritage à l'opprobre! PR 476 4 Revenez à moi de tout votre coeur, Avec des jeûnes, avec des pleurs et des lamentations! Déchirez vos coeurs et non vos vêtements, Et revenez à l'Eternel, votre Dieu; Car il est compatissant et miséricordieux, Lent à la colère et riche en bonté, Et il se repent des maux qu'il envoie. Qui sait s'il ne reviendra pas et ne se repentira pas, Et s'il ne laissera pas après lui la bénédiction? ------------------------Chapitre 52 -- L'homme de la situation PR 477 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 1, 2. PR 477 1 Néhémie, exilé hébreu, occupait à la cour persane de hautes fonctions honorifiques. Echanson du roi, il avait libre accès auprès du souverain. Grâce à sa situation, à ses capacités et à sa loyauté, il était devenu l'ami et le conseiller du monarque. Mais bien que jouissant de la faveur royale et habitué au faste et à l'opulence, il n'oubliait ni son Dieu ni ses compatriotes. Son coeur se tournait avec émotion vers Jérusalem; ses espérances et ses joies étaient liées à la prospérité de cette ville. C'est par l'intermédiaire de cet homme, préparé pour l'oeuvre à laquelle il allait être appelé, alors qu'il résidait à la cour persane, que Dieu se proposait d'accorder à son peuple, dans la terre de ses pères, de riches bénédictions. PR 477 2 Le patriote hébreu apprit par des messagers de Juda que Jérusalem, la cité de Dieu, traversait de cruelles épreuves. Les exilés qui y étaient retournés connaissaient le malheur et l'opprobre. Le temple et une partie de la ville avaient été reconstruits, mais les travaux de restauration étaient interrompus, les services du temple troublés, et le peuple tenu constamment en alarme du fait que les murailles de la ville étaient en grande partie en ruine. PR 478 1 Accablé de tristesse, Néhémie ne pouvait plus ni boire ni manger. Il pleurait et fut "plusieurs jours dans la désolation". Il jeûna. Dans sa douleur, il se tourna vers le divin Maître, et fidèlement confessa ses péchés et ceux de son peuple. Il supplia le Seigneur pour qu'il soutienne Israël, qu'il lui redonne force et courage et l'aide à reconstruire les ruines de Juda. PR 478 2 Alors que Néhémie priait, sa foi et son courage se fortifiaient. De saints arguments affluaient à ses lèvres; il savait le déshonneur qui rejaillirait sur la cause de Dieu, si le peuple élu, maintenant revenu à lui, était abandonné à lui-même et à l'oppression. Il suppliait le Seigneur d'accomplir sa promesse: "Si vous observez mes commandements et les mettez en pratique, alors quand vous serez exilés à l'extrémité du ciel, de là je vous rassemblerai et je vous ramènerai dans le lieu que j'ai choisi pour y faire résider mon nom."1 Cette promesse avait été faite à Israël, au nom du Seigneur, par Moïse, avant qu'il s'établisse en Canaan, et elle attendait depuis des siècles son accomplissement. Le peuple de Dieu était maintenant revenu à l'Eternel, le coeur plein de repentance et de foi; la promesse divine s'accomplirait certainement. PR 478 3 Néhémie avait souvent prié Dieu en faveur de son peuple; mais maintenant, alors qu'il le suppliait, une sainte pensée germait dans son esprit. S'il obtenait le consentement du roi et l'aide nécessaire pour se procurer les matériaux dont il avait besoin, il se chargerait lui-même de restaurer les murs de Jérusalem et de redonner à Israël sa puissance nationale. Il demanda au Seigneur de l'aider à trouver grâce aux yeux du roi, afin de pouvoir mener à bien sa tâche. "Donne aujourd'hui du succès à ton serviteur, dit-il, et fais-lui trouver grâce devant cet homme!" PR 478 4 Néhémie attendit quatre mois le moment favorable pour présenter au roi sa requête. Bien que son coeur fût pendant ce temps alourdi de tristesse, il s'efforça de paraître joyeux en présence du monarque. Dans les salles somptueuses et imposantes du palais, tous devaient avoir l'air heureux. Nul ennui ne devait paraître sur le visage des serviteurs royaux. Mais dans ses heures de solitude, loin des regards indiscrets, Néhémie était vu de Dieu et des anges qui entendaient ses prières, ses confessions, ses larmes. PR 479 1 Toutefois la douleur du patriote hébreu ne pouvait demeurer longtemps secrète. Ses nuits d'insomnie, ses jours d'inquiétude laissaient des traces sur son visage. Le roi, inquiet au sujet de sa sécurité personnelle, avait l'habitude de lire sur les physionomies et de pénétrer les artifices. Il devina qu'un chagrin secret tourmentait son échanson. "Pourquoi as-tu mauvais visage? lui demanda-t-il. Tu n'es pourtant pas malade; ce ne peut être qu'un chagrin de coeur." PR 479 2 Cette question remplit Néhémie de crainte. Le roi ne serait-il pas furieux d'apprendre que les pensées du courtisan, engagé à son service, étaient bien loin de là, auprès de ses frères affligés? Sa vie n'était-elle pas en danger? Le projet qui lui était cher au sujet de la restauration de Jérusalem allait-il échouer? PR 479 3 "Je fus saisi d'une grande crainte", écrit-il. Les lèvres tremblantes, les yeux inondés de larmes, il révéla la cause de son chagrin. "Que le roi vive éternellement! répondit-il. Comment n'aurais-je pas mauvais visage lorsque la ville où sont les sépulcres de mes pères est détruite et que ses portes sont consumées par le feu?" PR 479 4 Le rapport de la situation de Jérusalem suscita la sympathie du monarque sans éveiller ses préjugés. Il posa une nouvelle question qui permit à Néhémie de dire ce qu'il avait depuis si longtemps sur le coeur. "Que demandes-tu?" dit le roi. Mais l'homme de Dieu ne se hasarda pas à répondre avant d'avoir cherché conseil auprès de celui qui était plus puissant qu'Artaxerxès. Il avait une mission à remplir, pour laquelle l'aide du roi lui était indispensable. Il comprenait que la réussite de son plan dépendait en grande partie de la manière dont il le présenterait. Il pourrait ainsi gagner l'approbation du souverain et la promesse de son assistance. "Je priai le Dieu des cieux", dit-il; et, dans cette courte prière, il obtint du Roi des rois une force qui pouvait gagner les coeurs. PR 480 1 Prier comme le fit Néhémie au moment du besoin, c'est une ressource qui est à la portée de chaque enfant de Dieu. O vous qui peinez sur les chemins rocailleux de la vie, vous qui êtes comme submergés par les difficultés, faites monter vos requêtes vers le Seigneur! Il vous accordera son secours. Et vous qui, sur terre ou sur mer, êtes menacés d'un grand péril, confiez-vous en celui qui seul peut vous protéger. Dans les heures sombres ou de danger soudain, faites entendre votre cri à celui qui a promis de secourir ses fidèles enfants dans toutes les circonstances de la vie. Où que vous soyez, dans n'importe quelle condition, accablés par la tristesse et les soucis, assaillis par la tentation, trouvez l'assurance, le soutien et le réconfort dans l'amour indéfectible et la puissance d'un Dieu qui est fidèle à ses promesses. PR 480 2 Pendant sa courte prière, adressée au Roi des rois, Néhémie raffermit son courage pour faire part à Artaxerxès de son désir d'être relevé de ses fonctions à la cour. Il lui demanda l'autorisation de se rendre à Jérusalem pour restaurer ses ruines et en faire à nouveau une place forte. De grandes conséquences pour la nation juive allaient découler de cette requête. Le roi accéda à cette demande. "La bonne main de mon Dieu était sur moi", dit Néhémie. PR 480 3 Lorsqu'il fut assuré de l'aide dont il avait besoin, Néhémie fit les arrangements nécessaires pour le succès de son entreprise. Il prit toutes les précautions utiles pour faire aboutir son projet. Il n'en parla même pas à ses compatriotes, bien qu'il sût que beaucoup d'entre eux se réjouiraient de son succès. Mais il craignait que certaines indiscrétions ne fissent naître la jalousie chez leurs ennemis et ne contribuassent peut-être à faire échouer son plan. PR 480 4 Sa demande ayant été si favorablement accueillie par le roi, Néhémie fut encouragé à lui demander une aide plus importante. Pour donner de la dignité et de l'autorité à sa mission, ainsi que pour être protégé au cours de son voyage, il obtint une escorte militaire et il fut nanti de lettres royales pour les gouverneurs des provinces de l'autre côté de l'Euphrate -- territoire qu'il devait traverser pour se rendre au pays de Juda. On lui donna aussi une lettre pour le garde forestier des montagnes du roi le priant de fournir à Néhémie le bois de charpente nécessaire. PR 481 1 L'homme de Dieu prit bien soin de définir clairement les privilèges qui lui étaient accordés, afin qu'on ne l'accuse pas d'outrepasser ses droits. PR 481 2 Cette sage prévoyance et cette ferme résolution devraient servir d'exemple à tous les chrétiens. Il ne suffit pas de prier avec foi, mais il faut aussi travailler prudemment et avec diligence. Dans les difficultés, il arrive souvent que l'on retarde les progrès de l'oeuvre de Dieu parce que l'on pense que la prudence et l'ardeur au travail n'ont rien à faire avec la religion. Mais Néhémie ne considéra pas sa tâche accomplie après avoir pleuré et prié devant le Seigneur. Il joignit ses prières à un saint zèle; il déploya des efforts sincères et persévérants pour la réussite de l'entreprise dans laquelle il s'était engagé. PR 481 3 Pour mener à bien aujourd'hui les saintes entreprises, comme à l'époque où l'on reconstruisait les murs de Jérusalem, il faut de la prudence, des plans mûrement réfléchis. PR 481 4 Néhémie ne comptait pas sur le hasard. Dans le besoin, il avait recours à ceux qui étaient capables de lui venir en aide. Dieu est toujours prêt à toucher le coeur des hommes qui détiennent les biens de ce monde pour que ceux-ci servent à la cause de la vérité. Les serviteurs de Dieu qui travaillent pour le Maître doivent profiter de l'aide offerte par les hommes, sur l'instigation du ciel. Leurs dons peuvent ouvrir des voies par où la lumière de la vérité pénétrera au sein de nombreux pays enténébrés. Les donateurs peuvent ne pas posséder la foi en Christ et n'avoir aucune connaissance de sa Parole, mais leurs dons ne doivent pas être refusés pour cela. ------------------------Chapitre 53 -- Les réparateurs des murailles PR 483 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 2, 3 et 4. PR 483 1 Le voyage de Néhémie à Jérusalem s'effectua sans encombre. Les lettres du roi, destinées aux gouverneurs des provinces situées sur le trajet de l'homme de Dieu, lui assurèrent des réceptions honorables et une assistance empressée. Nul n'osa s'attaquer au personnage officiel, protégé par les forces du monarque persan, et traité avec beaucoup de considération par les gouverneurs de provinces. PR 483 2 Cependant, le fait d'arriver à Jérusalem avec une escorte militaire, montrant que Néhémie avait une mission importante, excita la jalousie des tribus païennes qui vivaient près de la cité et avaient si souvent témoigné leur hostilité envers les Juifs en leur adressant des injures. A leur tête se trouvaient les chefs Sanballat, le Horonite, Tobija, l'Ammonite, et Guéschem, l'Arabe. Dès l'arrivée de Néhémie, ils virent d'un mauvais oeil les activités de l'homme de Dieu et s'efforcèrent de faire échouer ses plans, en entravant son oeuvre par tous les moyens. PR 484 1 Mais Néhémie conserva la même attitude prudente et réservée qui l'avait jusque-là caractérisé. Il n'ignorait pas que ses ennemis, cruels et résolus, étaient prêts à s'opposer à lui; aussi cacha-t-il la nature de sa mission jusqu'au moment, où, instruit sur la situation, il put préparer ses plans. Il espérait ainsi s'assurer la collaboration du peuple qu'il mettrait au travail, avant que se produise l'opposition de ses ennemis. PR 484 2 Choisissant quelques hommes dignes de confiance, Néhémie leur fit part des raisons qui l'avaient amené à Jérusalem, du but qu'il se proposait, des plans qu'il allait suivre. Cette initiative éveilla aussitôt l'intérêt de ses compatriotes, et leur concours lui fut assuré. PR 484 3 La troisième nuit après son arrivée, Néhémie se leva à minuit, et, avec quelques hommes de confiance, il alla se rendre compte de l'état de désolation de Jérusalem. Monté sur sa mule, il parcourut la ville en tous sens, et vit les murs et les portes démolis de la cité de ses pères. De douloureuses réflexions assaillaient son esprit. Alors que, le coeur déchiré de tristesse, il considérait les ruines de sa Jérusalem bien-aimée, des souvenirs de la grandeur d'Israël surgissaient dans sa pensée, contrastant vivement avec les preuves tangibles de son humiliation. PR 484 4 Secrètement, et sans bruit, Néhémie acheva son inspection des murailles. "Les magistrats ignoraient où j'étais allé, dit-il, et ce que je faisais." "Jusqu'à ce moment, je n'avais rien dit aux Juifs, ni aux sacrificateurs, ni aux grands, ni aux magistrats, ni à aucun de ceux qui s'occupaient des affaires." Il passa le reste de la nuit en prière, car il savait qu'il serait appelé dans la matinée à faire de sérieux efforts pour ranimer le zèle de ses compatriotes, démoralisés et divisés. PR 484 5 Néhémie était chargé d'une mission royale. Il devait réparer les murailles de la ville avec la participation des Israélites. Mais il ne voulait pas exercer son autorité; il chercha plutôt à gagner la confiance et la sympathie du peuple, car il savait que cette grande tâche exigeait autant l'union des coeurs que celle des mains. Lorsqu'il réunit ses hommes, dans la matinée, il leur présenta les arguments susceptibles de stimuler leur courage et de regrouper les fidèles dispersés. PR 485 1 Les auditeurs de Néhémie n'avaient aucune connaissance du périple qu'il avait accompli au cours de la nuit précédente, et lui-même ne leur en dit rien. Mais le fait d'avoir visité la ville contribua largement au succès de son entreprise, car il pouvait parler de la situation avec une précision et une abondance de détails qui étonnaient. L'impression qu'il avait éprouvée en considérant les ruines de Jérusalem donnait à ses paroles de la force et de la ferveur. Il reprocha à ses compatriotes leur conduite parmi les païens: leur religion déshonorée, leur Dieu blasphémé. Il leur expliqua qu'au pays lointain où il se trouvait, il avait entendu parler de leur détresse. Il leur dit qu'il avait intercédé en leur faveur auprès du Seigneur, et décidé, pendant sa prière, de demander au roi la permission de leur venir en aide. Il avait supplié Dieu de l'aider à obtenir du roi, non seulement cette permission, mais l'autorité et les moyens nécessaires pour accomplir sa tâche. Sa prière fut exaucée de telle manière qu'il comprit que ses plans étaient en harmonie avec ceux du Seigneur. PR 485 2 Lorsqu'il eut terminé son récit, et montré qu'il était soutenu à la fois par l'autorité du Dieu d'Israël et celle du roi de Perse, Néhémie s'adressa directement au peuple. Il lui demanda s'il voulait profiter de l'occasion et se mettre à l'oeuvre pour reconstruire la muraille. Cet appel alla droit au coeur de ses auditeurs. Lorsqu'ils comprirent de quelle manière la faveur divine s'était manifestée à leur égard, ils eurent honte de leurs craintes. Avec un nouveau courage, ils s'écrièrent d'une seule voix: "Levons-nous, et bâtissons! Et ils se fortifièrent dans cette bonne résolution." PR 485 3 Néhémie avait mis toute son âme dans l'oeuvre qu'il avait entreprise. Son espoir, son énergie, son enthousiasme, sa ténacité, tout cela était contagieux, et inspirait à ses compatriotes un courage aussi noble, un but aussi élevé. Chacun devint à son tour un Néhémie, et contribua à affermir le coeur et les mains de son prochain. PR 485 4 Lorsque les ennemis d'Israël eurent connaissance de ce que les Juifs espéraient accomplir, ils se moquèrent d'eux et les méprisèrent. Ils dirent: "Que faites-vous là? Vous révoltez-vous contre le roi?" Mais Néhémie leur répondit: "Le Dieu des cieux nous donnera le succès. Nous, ses serviteurs, nous nous lèverons et nous bâtirons; mais vous, vous n'avez ni part, ni droit, ni souvenir dans Jérusalem." PR 486 1 Parmi les premiers qui se laissèrent gagner par le zèle et l'ardeur de Néhémie, se trouvaient les prêtres. Ces hommes, grâce à leur position influente, pouvaient grandement contribuer au retard ou à l'avancement du travail, et leur collaboration spontanée, dès le début, favorisa largement le succès de cette entreprise. La plupart des princes et des chefs d'Israël accomplirent noblement eux aussi leur tâche. Ces fidèles serviteurs sont mentionnés honorablement dans le livre de Dieu. Mais quelques-uns d'entre eux, les nobles de la tribu des Tékoïtes, "ne se soumirent pas au service de leur seigneur". Le souvenir de ces serviteurs paresseux est flétri par la honte; il a été transmis à toutes les générations qui leur ont succédé, en signe d'avertissement. PR 486 2 Dans tous les mouvements religieux se trouvent toujours des gens qui, bien que persuadés de la vérité divine, se tiennent à l'écart et refusent de prêter leur concours. Il serait bon qu'ils se souviennent du livre du ciel où tout est enregistré -- de ce livre où il n'y a ni omission, ni erreur, et par lequel nous serons jugés au dernier jour. Là, sont mentionnées toutes les occasions perdues. Mais là aussi sont inscrits tous les actes de foi et d'amour dont le souvenir est immortel. PR 486 3 L'exemple donné par les nobles de la tribu des Tékoïtes était de peu d'importance comparé à l'influence grandissante de Néhémie. Le peuple en général manifestait son empressement et son patriotisme. Les hommes influents et capables organisèrent en compagnies les différentes classes de citoyens. Chaque chef se rendit responsable de la construction d'une certaine partie de la muraille. Quelques-uns, nous est-il rapporté, "travaillèrent chacun devant sa maison". PR 486 4 Le courage de Néhémie était loin de se relâcher, maintenant que les travaux étaient vraiment amorcés. Avec une vigilance infatigable, il surveillait les constructions, dirigeant les ouvriers, prenant note des difficultés et pourvoyant à tous les besoins. Son influence ne cessait de se faire sentir, tout au long de cette muraille de cinq kilomètres. Il savait encourager les craintifs, secouer les nonchalants, féliciter les laborieux. Cependant, il n'oubliait pas de surveiller les mouvements des ennemis qui, se tenant à distance, discutaient comme s'ils tramaient un complot, et parfois s'approchaient des ouvriers pour essayer de les distraire de leurs occupations. PR 487 1 Malgré ses multiples activités, Néhémie n'oubliait pas la source où il puisait sa force. Son coeur s'élevait sans cesse vers celui qui veille sur toutes choses. "Le Dieu des cieux, s'écriait-il, nous donnera le succès." Et ces paroles se répercutaient d'écho en écho, faisant tressaillir le coeur des ouvriers. PR 487 2 Mais la restauration des remparts de Jérusalem ne tarda pas à se heurter à de sérieux obstacles. Satan s'efforçait de susciter l'opposition et de semer le découragement. Sanballat, Tobija et Guéschem, les principaux instigateurs de ce mouvement, décidèrent d'intervenir pour arrêter les travaux. Ils essayèrent de faire naître la division parmi les travailleurs. Ils ridiculisèrent la peine qu'ils se donnaient, et prétendirent que leur entreprise était irréalisable, et par conséquent vouée à l'échec. PR 487 3 "A quoi travaillent ces Juifs impuissants? s'écria Sanballat ironiquement. Les laissera-t-on faire? ... Redonneront-ils la vie à des pierres ensevelies?" Et Tobija, toujours plus méprisant, ajouta: "Qu'ils bâtissent seulement! Si un renard s'élance, il renversera leur muraille de pierres." PR 487 4 Les travailleurs rencontrèrent bientôt une opposition plus vive encore. Ils furent contraints de se tenir constamment en garde contre les complots de leurs adversaires qui, sous des apparences d'amitié, s'ingéniaient de mille manières à causer parmi eux le trouble et la confusion, et à susciter la défiance. Ils s'efforcèrent de décourager les Juifs, et ils complotèrent d'attirer Néhémie dans leur piège. Des Juifs perfides étaient prêts à faciliter cette besogne. Le bruit circula que Néhémie conspirait contre le roi de Perse, qu'il avait l'intention de régner sur Israël, et que ses collaborateurs étaient tous des traîtres. PR 487 5 Mais Néhémie continua à chercher en Dieu le secours et la direction. "Et le peuple prit à coeur ce travail." La construction ne cessant d'avancer, les brèches furent réparées et la muraille restaurée jusqu'à la moitié de la hauteur que l'on s'était proposé d'atteindre. PR 488 1 Lorsque les ennemis d'Israël virent que leurs tentatives pour interrompre le travail étaient vaines, ils furent remplis de rage. Jusque-là ils n'avaient pas osé faire appel à la force, car ils savaient que Néhémie et ses compagnons agissaient conformément à la mission royale, et ils craignaient qu'une opposition ouverte ne déplût au monarque. Mais, poussés par la colère, ils se rendirent coupables du crime dont ils accusaient Néhémie. "Ils se liguèrent tous ensemble pour venir attaquer Jérusalem et lui causer du dommage." PR 488 2 Pendant que les Samaritains conspiraient ainsi contre Néhémie et contre son oeuvre, certains chefs parmi les Juifs se laissèrent gagner par le mécontentement, et cherchèrent à décourager l'homme de Dieu en exagérant les difficultés que faisait surgir une telle entreprise. "Les forces manquent à ceux qui portent les fardeaux, disaient-ils, et les décombres sont considérables; nous ne pourrons pas bâtir la muraille." PR 488 3 Le découragement provint encore d'une autre source. "Les Juifs qui habitaient près d'eux" (des travailleurs), ceux qui n'étaient pas engagés dans la restauration des murs, faisaient sans cesse le récit des propos et des rapports des ennemis, afin d'affaiblir leur courage et de susciter chez eux le mécontentement. Mais les railleries et les sarcasmes, la résistance et les menaces ne semblaient que renforcer Néhémie dans ses déterminations et le faire redoubler de vigilance. Il se rendait compte des dangers que présentait cette lutte avec ses ennemis, mais son courage était indomptable. "Nous priâmes notre Dieu, dit-il, et nous établîmes une garde jour et nuit pour nous défendre contre leurs attaques." "C'est pourquoi je plaçai, dans les enfoncements derrière la muraille et sur des terrains secs, le peuple par familles, tous avec leurs épées, leurs lances et leurs arcs. Je regardai, et m'étant levé, je dis aux grands, aux magistrats, et au reste du peuple: Ne les craignez pas! Souvenez-vous du Seigneur, grand et redoutable, et combattez pour vos frères, pour vos fils et vos filles, pour vos femmes et pour vos maisons! Lorsque nos ennemis apprirent que nous étions avertis, Dieu anéantit leur projet, et nous retournâmes tous à la muraille, chacun à son ouvrage. Depuis ce jour, la moitié de mes serviteurs travaillait, et l'autre moitié était armée de lances, de boucliers, d'arcs et de cuirasses. ... Ceux qui bâtissaient la muraille, et ceux qui portaient ou chargeaient les fardeaux, travaillaient d'une main et tenaient une arme de l'autre; chacun d'eux, en travaillant, avait son épée ceinte autour des reins." PR 489 1 Près de Néhémie se tenait un homme qui devait sonner de la trompette en cas de danger, et tout le long de la muraille étaient répartis des prêtres portant les trompettes sacrées. Le peuple était dispersé sur le vaste chantier, mais lorsque le danger était signalé sur un point, il devait s'y rendre sans délai. "C'est ainsi que nous poursuivions l'ouvrage, dit Néhémie, la moitié d'entre nous la lance à la main depuis le lever de l'aurore jusqu'à l'apparition des étoiles." PR 489 2 Ceux qui habitaient dans les villes et dans les villages, loin de Jérusalem, furent priés de loger dans l'enceinte de cette ville pour garder l'ouvrage la nuit et pour être prêts au travail le jour. Ainsi ne se produirait-il pas de retard inutile, et éviterait-on en même temps les attaques ennemies favorisées par les allées et venues des travailleurs. Néhémie et ses compagnons ne reculaient pas devant les souffrances et les peines. De nuit et de jour, pendant les quelques heures qu'ils accordaient au sommeil, ils demeuraient vêtus et ne se séparaient pas de leur armure. PR 489 3 L'opposition et le découragement que connurent les travailleurs au temps de Néhémie, parmi leurs ennemis et leurs soi-disant amis, sont un type des difficultés que rencontrent aujourd'hui tous les serviteurs de Dieu. Les chrétiens sont éprouvés, non seulement par la haine et la cruauté de leur adversaires, mais aussi par l'apathie, l'inconséquence, la tiédeur et la trahison de ceux qui prétendent être leurs amis et collaborateurs. On les critique, on les couvre de ridicule. Ces adversaires, portés à mépriser les croyants, ont recours à l'occasion à des mesures cruelles et même violentes. PR 489 4 Satan profite de tous les éléments non consacrés pour parvenir à ses fins. Parmi ceux qui prétendent soutenir la cause du Maître, il en est qui pactisent avec ses adversaires, et l'exposent aux attaques de ses pires antagonistes. Il arrive même que ceux qui désirent l'avancement du règne de Dieu découragent ses serviteurs en se faisant l'écho des calomnies et des menaces des ennemis du Seigneur. Satan obtient alors un plein succès, et tous ceux qui subissent son influence sont assujettis à une puissance de séduction qui annihile la sagesse de l'homme prudent. Mais, comme Néhémie, le peuple de Dieu ne doit ni craindre ni mépriser ses ennemis. Il faut qu'il se confie en l'Eternel, et marche résolument de l'avant, en s'acquittant de sa tâche avec désintéressement, tout en s'en remettant à la providence pour tout ce qui se rapporte à la cause qu'il défend. PR 490 1 Au sein des difficultés sans nombre, Néhémie plaçait toute sa confiance en Dieu. Celui qui, jadis, soutint son serviteur, a été au cours des âges un appui indéfectible pour son peuple. Dans toutes les périodes critiques, celui-ci a pu déclarer avec assurance: "Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?"1 Si habiles que soient les machinations de Satan et de ses suppôts, le Seigneur peut découvrir ses ennemis et déjouer leurs desseins. La réponse des hommes de foi sera, aujourd'hui, la même que celle de Néhémie: "Notre Dieu combattra pour nous." Car le Seigneur opère puissamment, et nul ne peut s'opposer au succès de son oeuvre. ------------------------Chapitre 54 -- Blâme de l'extorsion PR 491 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 5. PR 491 1 Les murailles de Jérusalem n'étaient pas encore achevées que l'attention de Néhémie fut attirée par la situation lamentable des classes nécessiteuses. Dans l'état d'instabilité où se trouvait le pays, la culture avait été en grande partie négligée. De plus, certains exilés de retour à Jérusalem se comportaient égoïstement, et la bénédiction divine ne reposait plus sur leurs terres. Il en résultait que les récoltes étaient maigres. PR 491 2 Pour subvenir aux besoins de leurs familles, les pauvres étaient obligés d'acheter, à crédit, à des prix exorbitants. Ils devaient aussi se procurer de l'argent, en empruntant avec intérêt, afin de s'acquitter des lourdes taxes imposées par les rois de Perse. Et comme pour aggraver encore leur détresse, certains Juifs riches profitaient de leur misère. PR 491 3 Dieu avait pourtant bien recommandé à Israël, par l'intermédiaire de Moïse, qu'une dîme fût prélevée tous les trois ans en faveur des pauvres. Ceux-ci jouissaient en outre d'un grand avantage du fait que la culture des terres était interrompue tous les sept ans. Les produits spontanés étaient alors abandonnés aux nécessiteux. PR 492 1 La fidélité témoignée dans ces offrandes, destinées aux pauvres et à d'autres oeuvres de bienfaisance, devait contribuer à rappeler au peuple cette vérité que Dieu est le possesseur de toutes choses et qu'il donne l'occasion à ses enfants d'être des sources de bénédictions. Le dessein de Dieu à l'égard des Israélites était de déraciner de leurs coeurs l'égoïsme et de développer la grandeur et la noblesse de leur caractère. PR 492 2 Voici les instructions données à Israël: "Si tu prêtes de l'argent à mon peuple, au pauvre qui est avec toi, tu ne seras point à son égard comme un créancier, tu n'exigeras de lui point d'intérêt." "Tu n'exigeras de ton frère aucun intérêt ni pour argent, ni pour vivres, ni pour rien de ce qui se prête à intérêt."1 "S'il y a chez toi quelque indigent d'entre tes frères, dans l'une de tes portes, au pays que l'Eternel, ton Dieu, te donne, tu n'endurciras point ton coeur et tu ne fermeras point ta main devant ton frère indigent. Mais tu lui ouvriras ta main, et tu lui prêteras de quoi pourvoir à ses besoins." "Il y aura toujours des indigents dans le pays; c'est pourquoi je te donne ce commandement: Tu ouvriras ta main à ton frère, au pauvre et à l'indigent dans ton pays."2 PR 492 3 Après le retour des exilés, il arriva que les Juifs fortunés se comportèrent d'une manière toute différente de ces recommandations. Lorsque les pauvres avaient été obligés d'emprunter de l'argent pour payer le tribut du roi, les riches le leur avaient prêté, mais en exigeant un intérêt élevé. En hypothéquant les terres des pauvres, ces riches Juifs avaient peu à peu réduit leurs malheureux débiteurs à la plus lamentable misère. La plupart d'entre eux avaient dû vendre leurs fils et leurs filles comme serviteurs. Il semblait qu'il n'y avait aucun espoir d'améliorer le sort des pauvres, aucun moyen pour racheter leurs enfants et leurs terres, aucune perspective devant eux, sinon une détresse toujours accrue par une misère et une servitude perpétuelles. Pourtant, ils étaient citoyens de la même nation, participants de la même alliance que leurs frères plus favorisés. PR 493 1 Enfin, excédés, ils vinrent se plaindre à Néhémie: "Voici, dirent-ils, nous soumettons à la servitude nos fils et nos filles, et plusieurs de nos filles y sont déjà réduites; nous sommes sans force, et nos champs et nos vignes sont à d'autres." Lorsque Néhémie entendit ces paroles, il fut rempli d'indignation. "Je fus très irrité, dit-il, lorsque j'entendis leurs plaintes et ces paroles-là." Il comprit que, s'il voulait arriver à remédier à la situation, il lui fallait prendre une attitude résolue en faveur de la justice. Avec l'énergie et la décision qui le caractérisaient, il se mit aussitôt à l'oeuvre pour adoucir le sort de ses frères. PR 493 2 Le fait que les exacteurs étaient des hommes fortunés, qui pourvoyaient à la restauration de la ville, n'influença pas un instant Néhémie. Il réprimanda sévèrement les grands et les magistrats; et, ayant réuni la foule, il lui exposa les exigences de Dieu au sujet de ce cas particulier. Il attira l'attention du peuple sur les événements qui s'étaient déroulés sous le règne d'Achaz. Il leur rappela le message que le Seigneur avait alors adressé à Israël pour réprimer sa cruauté et son oppression. Les enfants de Juda avaient été livrés, à cause de leur idolâtrie, entre les mains de leurs frères plus idolâtres encore, le peuple d'Israël. Celui-ci, dans sa fureur, était allé jusqu'à tuer, au cours d'une bataille, des milliers d'hommes de Juda, et à capturer les femmes et les enfants pour en faire des esclaves, ou pour les vendre aux païens. PR 493 3 A cause des péchés de Juda, Dieu n'intervint pas pour empêcher cette horreur. Mais par le prophète Oded, il condamna sévèrement les exploits cruels de l'armée victorieuse. "Vous pensez maintenant, dit l'homme de Dieu, faire des enfants de Juda et de Jérusalem vos serviteurs et vos servantes! Mais vous, n'êtes-vous pas coupables envers l'Eternel, votre Dieu?"3 Oded déclara au peuple d'Israël que son injustice et son oppression lui avaient attiré le jugement du ciel, que la colère divine s'était embrasée contre lui. PR 493 4 Après avoir entendu ces paroles, les guerriers libérèrent les captifs et apportèrent leur butin devant les chefs et toute l'assemblée. Alors certains principaux de la tribu d'Ephraïm "prirent les captifs; ils employèrent le butin à vêtir tous ceux qui étaient nus, ils leur donnèrent des habits et des chaussures, ils les firent manger et boire, ils les oignirent, ils conduisirent sur des ânes tous ceux qui étaient fatigués, et ils les amenèrent à Jéricho, la ville des palmiers, auprès de leurs frères".4 PR 494 1 Néhémie et d'autres Juifs avaient racheté certains captifs vendus aux païens. L'homme de Dieu mit en contraste cette manière de faire avec celle des riches qui, pour l'appât du gain, asservissaient leurs frères pauvres. "Ce que vous faites n'est pas bien, leur dit-il. Ne devriez-vous pas marcher dans la crainte de notre Dieu, pour n'être pas insultés par les nations nos ennemies?" PR 494 2 Néhémie expliqua au peuple qu'étant investi de l'autorité du roi de Perse, il aurait pu lui-même réclamer des fonds importants pour son compte personnel. Au lieu de cela, non seulement il n'était pas rentré en possession de ce qui lui appartenait, mais il avait donné généreusement ses biens pour soulager les nécessiteux. Il insista auprès des chefs qui s'étaient rendus coupables d'extorsion pour qu'ils cessent leur métier d'iniquité, rendent les terres des pauvres, ainsi que l'intérêt des sommes qu'ils avaient prêtées, et qu'ils leur prêtent dorénavant sans usure. PR 494 3 Néhémie prononça ces paroles devant toute l'assemblée. Si les chefs voulaient se justifier, ils en avaient l'occasion; mais ils n'alléguèrent aucune excuse. "Nous les rendrons, dirent-ils, et nous ne leur demanderons rien, nous ferons ce que tu dis." Alors l'homme de Dieu, en présence des prêtres, les fit "jurer de tenir parole". Et "toute l'assemblée dit: Amen! On célébra l'Eternel. Et le peuple tint parole." PR 494 4 Ce récit de l'Ecriture contient une importante leçon. "L'amour de l'argent est une racine de tous les maux",5 a dit l'apôtre saint Paul. De nos jours, l'argent est devenu une passion dévorante, et la richesse est souvent acquise par la fraude. Des multitudes se débattent dans la pauvreté; elles sont contraintes de se livrer à un dur travail pour un maigre salaire qui ne leur permet pas de s'assurer les éléments primordiaux indispensables à leur existence. PR 495 1 Un labeur écrasant, des privations, sans espoir d'un sort meilleur, alourdissent leur pesant fardeau. Minés par les soucis, opprimés, ils ne savent vers qui se tourner pour trouver du réconfort. Et tout cela pour que les riches puissent satisfaire leurs prodigalités, ou se livrer aux folies de la thésaurisation. PR 495 2 L'amour de l'argent et de l'apparat a fait de ce monde un repaire de voleurs. Les Ecritures nous dépeignent la cupidité et l'oppression qui régneront avant la seconde venue du Christ. "A vous maintenant, riches! écrit saint Jacques. Pleurez et gémissez, à cause des malheurs qui viendront sur vous. ... Voici, le salaire des ouvriers qui ont moissonné vos champs, et dont vous les avez frustrés, crie, et les cris des moissonneurs sont parvenus jusqu'aux oreilles du Seigneur des armées. Vous avez vécu sur la terre dans les voluptés et dans les délices, vous avez rassasié vos coeurs au jour du carnage. Vous avez condamné, vous avez tué le juste, qui ne vous a pas résisté."6 PR 495 3 Même parmi ceux qui prétendent posséder la crainte de Dieu, certains se conduisent encore comme les riches Israélites de jadis. Parce que les lois leur permettent de le faire, ils deviennent des oppresseurs. Et parce que ces gens qui se réclament du nom du Christ font preuve d'avarice et de perfidie, parce que l'Eglise conserve dans ses registres les noms de ceux qui ont acquis leur fortune injustement, la religion du Christ est considérée avec mépris. La prodigalité, la tromperie, l'extorsion corrompent la foi de maints croyants et détruisent leur spiritualité. L'Eglise est en grande partie responsable des péchés commis par ses membres. Elle encourage le mal si elle n'élève pas la voix contre ces péchés. PR 495 4 Les coutumes du monde ne doivent pas être le critère du chrétien. Il ne faut pas que celui-ci imite ses excès, ses tromperies, ses extorsions. Tout acte injuste à l'égard de son semblable est une violation de la règle d'or. Tout préjudice causé aux enfants de Dieu touche le Christ lui-même dans la personne de ses saints. Toute tentative pour profiter de l'ignorance, de la faiblesse ou de l'infortune du prochain est enregistrée comme une fraude dans les livres du ciel. Celui qui craint vraiment le Seigneur préférera travailler jour et nuit, manger le pain de la pauvreté, plutôt que de pratiquer la cupidité en opprimant la veuve et l'orphelin ou frustrer l'étranger. PR 496 1 Les plus petits écarts de la rectitude préparent le coeur aux pires injustices. Lorsqu'un homme s'enrichit au détriment d'un autre, son âme devient insensible à l'influence de l'Esprit de Dieu. Le gain obtenu dans de telles conditions est en réalité une terrible perte. PR 496 2 Nous étions tous débiteurs de la justice divine, et incapables de nous acquitter de notre dette. C'est alors que le Fils de Dieu eut compassion de nous, qu'il paya le prix de notre rédemption. Il se fit pauvre, afin que par sa pauvreté nous fussions enrichis. En montrant notre générosité à l'égard des nécessiteux, nous prouvons notre gratitude pour la miséricorde qui nous est octroyée. "Pratiquons le bien envers tous, dit saint Paul, et surtout envers les frères en la foi."7 Et ces paroles s'harmonisent avec celles du Sauveur: "Vous avez toujours les pauvres avec vous, et vous pouvez leur faire du bien quand vous voulez." "Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux, car c'est la loi et les prophètes."8 ------------------------Chapitre 55 -- Complots des païens PR 497 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 6. PR 497 1 Sanballat et ses complices n'osaient pas attaquer ouvertement les Juifs; mais avec une malice accrue, ils continuaient à faire secrètement l'impossible pour les décourager, les déconcerter, les injurier. Les murailles de Jérusalem allaient bientôt être achevées. Une fois celles-ci terminées, les portes mises, les ennemis d'Israël ne pourraient guère espérer pénétrer dans la ville. C'est pourquoi ils s'acharnaient particulièrement à vouloir faire cesser les travaux. Ils en arrivèrent finalement à forger un plan qui, espéraient-ils, destituerait Néhémie de ses fonctions et le livrerait en leur pouvoir. Alors ils l'emprisonneraient ou le tueraient. PR 497 2 Ils prétendirent faire un compromis avec leurs adversaires, et cherchèrent à entrer en pourparlers avec Néhémie, en lui proposant une entrevue dans un village de la vallée d'Ono. Mais, éclairé par le Saint-Esprit sur leur véritable intention, l'homme de Dieu refusa. "Je leur envoyai des messagers, dit-il, avec cette réponse: J'ai un grand ouvrage à exécuter, et je ne puis descendre; le travail serait interrompu pendant que je le quitterais pour aller vers vous." Mais ils s'obstinèrent. Quatre fois ils lui envoyèrent un messager avec la même demande, et chaque fois il leur fit la même réponse. PR 498 1 Devant l'insuccès de leurs démarches, ces ennemis eurent alors recours à un stratagème plus audacieux. Sanballat envoya à Néhémie un messager porteur d'une lettre ouverte ainsi conçue: "Le bruit se répand parmi les nations et Gaschmu affirme que toi et les Juifs, vous pensez à vous révolter, et que c'est dans ce but que tu rebâtis la muraille. Tu vas, dit-on, devenir leur roi, tu as même établi des prophètes pour te proclamer à Jérusalem roi de Juda. Et maintenant ces choses arriveront à la connaissance du roi. Viens donc, et consultons-nous ensemble." PR 498 2 Si les bruits mentionnés par l'ennemi avaient réellement circulé, Néhémie aurait eu raison de s'inquiéter, car ils seraient parvenus aux oreilles du roi, et le moindre soupçon de sa part aurait provoqué les sanctions les plus sévères. Mais l'homme de Dieu était persuadé que la lettre en question était fausse et avait pour but de l'intimider et de l'attirer dans un piège. Ce qui ancra Néhémie dans cette pensée, c'est le fait que la lettre avait été envoyée ouverte, avec le but évident d'être lue par le peuple qui, à son tour, aurait été effrayé et intimidé par son contenu. PR 498 3 Néhémie répondit immédiatement à Sanballat: "Ce que tu dis là n'est pas; c'est toi qui l'inventes!" Il n'ignorait pas les ruses de Satan; il savait que l'ennemi faisait des efforts désespérés pour décourager les travailleurs et faire cesser l'ouvrage. A maintes reprises, le diable avait été tenu en échec, et maintenant, avec une malice exacerbée, il tendait un piège au serviteur de Dieu. Sanballat et ses acolytes soudoyèrent donc des hommes qui prétendaient être des amis de Néhémie et qui devaient lui donner de mauvais conseils, comme s'ils émanaient de Dieu. A la tête de cette infâme entreprise, se trouvait Schemaeja que Néhémie avait beaucoup apprécié autrefois. Cet homme s'enferma dans une chambre située près du sanctuaire, comme s'il craignait pour sa vie. Le temple était alors protégé par des murs et par des portes, mais les portes de la ville n'étaient pas encore posées. Prétendant qu'il avait à coeur la sécurité de Néhémie, Schemaeja lui conseilla de se réfugier dans le temple. "Allons ensemble dans la maison de Dieu, proposa le traître, au milieu du temple, et fermons les portes du temple; car ils viennent pour te tuer, et c'est pendant la nuit qu'ils viendront pour te tuer." PR 499 1 Si Néhémie avait suivi ces conseils hypocrites, il aurait sacrifié sa foi en Dieu et paru aux yeux du peuple un être pleutre et méprisable. Pour accomplir l'oeuvre importante qu'il avait entreprise, et pour témoigner sa confiance en la puissance divine, il aurait été inconséquent en se cachant comme s'il avait peur. La crainte se serait répandue parmi le peuple, chacun aurait cherché sa propre sécurité, et la ville sans défense serait devenue une proie facile. Cet acte déraisonnable de la part de Néhémie eût été l'abandon virtuel de tout ce qu'on avait fait jusque-là. PR 499 2 Néhémie ne tarda pas à se rendre compte du véritable caractère et du but de la démarche de son conseiller. "Je reconnus que ce n'était pas Dieu qui l'envoyait, dit-il. Mais il prophétisa ainsi sur moi, parce que Sanballat et Tobija lui avaient donné de l'argent. En le gagnant ainsi, ils espéraient que j'aurais peur, et que je suivrais ses avis et commettrais un péché; et ils auraient profité de cette atteinte à ma réputation pour me couvrir d'opprobre." PR 499 3 L'infâme démarche de Schemaeja était appuyée par quelques hommes qui jouissaient d'une haute considération et qui, tout en se réclamant de l'amitié de Néhémie, s'associaient secrètement avec ses ennemis. Mais c'est en vain qu'ils tendirent un piège à l'homme de Dieu. Il leur fit cette réponse catégorique: "Un homme comme moi prendre la fuite! Et quel homme tel que moi pourrait entrer dans le temple et vivre? Je n'entrerai point." PR 499 4 Malgré les complots tramés ouvertement ou en secret par les ennemis d'Israël, l'ouvrage avançait rapidement. Moins de deux mois après l'arrivée à Jérusalem de Néhémie, la ville était entourée de son enceinte, et les ouvriers pouvaient circuler sur les murailles et voir leurs ennemis au-dessous d'eux, étonnés et humiliés. "Lorsque tous nos ennemis l'apprirent, dit Néhémie, toutes les nations qui étaient autour de nous furent dans la crainte; elles éprouvèrent une grande humiliation, et reconnurent que l'oeuvre s'était accomplie par la volonté de notre Dieu." PR 500 1 Mais malgré la preuve évidente que Dieu était à l'oeuvre, les Israélites ne purent réprimer leur mécontentement. "Dans ce temps-là, dit Néhémie, il y avait aussi des grands de Juda qui adressaient fréquemment des lettres à Tobija et qui en recevaient de lui. Car plusieurs en Juda étaient liés à lui par serment, parce qu'il était gendre de Schecania." On voit ici les conséquences désastreuses des mariages mixtes. C'était d'une famille alliée aux ennemis de Dieu qu'était né le complot contre Néhémie. Il y eut beaucoup d'autres cas analogues. Ces gens, comme tous ceux qui avaient contracté des mariages semblables et qui étaient sortis d'Egypte avec Israël, furent une source constante de troubles. Ils ne servaient pas le Seigneur de tout leur coeur, et lorsque son oeuvre exigeait un sacrifice, ils étaient prêts à violer le serment qu'ils avaient solennellement contracté. PR 500 2 Certains de ceux qui avaient été les premiers à vouloir faire du mal aux Juifs manifestaient maintenant le désir de devenir leurs amis. Les nobles de Juda qui étaient handicapés par des mariages avec les idolâtres et qui avaient entretenu une correspondance suspecte avec Tobija, en jurant de le servir, parlaient maintenant de cet homme comme d'un être capable et prévoyant, dont l'alliance serait infiniment précieuse aux Juifs. Et ils le renseignaient en même temps sur les projets et les agissements de Néhémie. Ainsi, l'oeuvre du peuple de Dieu était ouverte aux attaques de l'ennemi, ce qui donnait l'occasion de mal interpréter les paroles et les actes de Néhémie et d'entraver son travail. PR 500 3 Lorsque les pauvres et les opprimés avaient fait appel à Néhémie pour qu'il redresse les torts dont ils avaient été victimes, ce dernier avait pris courageusement leur défense, et réussi à faire disparaître l'opprobre qui pesait sur eux. Mais l'autorité dont il avait fait preuve pour soulager ses compatriotes opprimés, il n'en usa pas pour lui-même. Ses bienfaits avaient rencontré l'ingratitude et la trahison; cependant, il n'exerça pas son pouvoir pour punir les traîtres. Avec calme et désintéressement, il continua à travailler pour son peuple, ne se relâchant pas un seul instant dans ses efforts. PR 500 4 Les assauts de Satan ont toujours été dirigés contre ceux qui s'efforcent de faire avancer le règne de Dieu. Bien que l'ennemi de nos âmes ait été souvent bafoué, il n'a cessé de renouveler ses attaques avec une violence accrue, et avec des moyens jusqu'alors inconnus. Ce qu'il faut le plus redouter chez lui, c'est le travail qu'il accomplit secrètement par ceux qui prétendent aimer l'oeuvre de Dieu. L'opposition déclarée, si elle est farouche et cruelle, offre moins de péril pour la cause du Maître que la haine dissimulée de ceux qui déclarent le servir et qui sont, en réalité, les serviteurs de Satan. Ceux-ci favorisent l'action des hommes qui emploient leurs connaissances pour contrecarrer l'oeuvre de Dieu. PR 501 1 Le prince des ténèbres utilisera tous les stratagèmes possibles pour décider les serviteurs de Dieu à s'associer à ses suppôts. Par ses sollicitations répétées, il s'efforcera de les détourner de leurs devoirs; mais, comme Néhémie, ils devront répondre fermement: "J'ai un grand ouvrage à exécuter et je ne puis descendre." Que les ouvriers du Seigneur continuent leur besogne sans se soucier d'autre chose, tout en s'efforçant de réfuter les mensonges du malin pour leur porter préjudice. A l'instar des réparateurs des murailles de Jérusalem, qu'ils ne se laissent pas distraire de leurs travaux par les menaces, les moqueries ou les faux rapports, et ne se relâchent pas un seul instant, car les ennemis sont sans cesse sur leurs pas. Qu'ils fassent monter vers le Seigneur leurs prières, et établissent "une garde jour et nuit pour se défendre".1 PR 501 2 Satan redoublera ses tentations à mesure que s'approche la fin des temps. Il suscitera des hommes qui se moqueront et mépriseront les "réparateurs des brèches". Mais si ceux-ci ne font pas face aux attaques de l'ennemi, ils retarderont leur ouvrage. Qu'ils s'efforcent de déjouer les complots de leurs adversaires, sans se détourner de leur besogne. La vérité triomphe de l'erreur, et le droit prévaut sur l'injustice. PR 501 3 Les serviteurs de Dieu ne permettront pas que l'ennemi conquière leur amitié ou leur sympathie dans le dessein de les distraire de leur tâche. Celui qui, par quelque acte inconsidéré, expose la cause du Seigneur à l'opprobre ou affaiblit les mains de ses compagnons de travail, fait rejaillir sur son propre caractère une tache qui ne s'enlève pas facilement. Il dresse un obstacle sérieux sur le chemin qu'il doit suivre pour être utile. PR 502 1 "Ceux qui abandonnent la loi louent le méchant."2 Lorsque des hommes s'unissent au monde, tout en invoquant une grande pureté d'intention, et préconisent l'union avec ceux qui ont toujours combattu la vérité, il faut se méfier d'eux, les éviter comme le fit Néhémie. Tout cela est inspiré par l'ennemi du bien. C'est le langage des opportunistes, contre lequel nous devons nous insurger aussi farouchement aujourd'hui qu'autrefois. Que tout ce qui tend à troubler la foi du peuple de Dieu soit énergiquement combattu. PR 502 2 L'ennemi ne réussit pas à faire tomber Néhémie en son pouvoir parce que cet homme de Dieu témoigna autant de fermeté dans son dévouement à la cause sacrée que dans sa confiance en Jéhovah. L'âme indécise devient une proie facile à la tentation; mais celui qui poursuit un noble idéal, un but absorbant, ne prête pas le flanc au mal. Sa foi, loin de faiblir, s'affermit; car partout il discerne l'amour infini qui dirige toutes choses pour l'accomplissement du plan divin. Les vrais serviteurs de Dieu travaillent avec une résolution qui ne connaît aucune défaillance, car ils dirigent constamment leurs regards vers le trône de la grâce. PR 502 3 Dieu promet son assistance chaque fois que les ressources humaines font défaut. Il nous communique son Esprit pour nous venir en aide dans nos difficultés, pour ranimer notre espérance, illuminer notre esprit et purifier notre coeur. Il suscite des occasions à ses serviteurs, et leur ouvre la voie pour s'acquitter de leur tâche. Si son peuple suit ses directives, s'il est prêt à collaborer avec lui, il verra des choses merveilleuses. ------------------------Chapitre 56 -- Lecture solennelle de la loi de Dieu PR 503 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 8, 9, 10. PR 503 1 C'était au temps de la fête des trompettes, la foule était rassemblée à Jérusalem, et une impression de tristesse se dégageait du spectacle qui s'offrait aux regards. Les murailles de la ville avaient été reconstruites, les portes mises en place; mais une grande partie de la métropole juive était encore en ruine. PR 503 2 Sur une estrade, dressée dans l'une des artères les plus larges de Jérusalem, et entourée des tristes vestiges de la gloire d'antan, se tenait Esdras, maintenant un vieillard. A ses côtés se trouvaient les Lévites. De cette estrade on pouvait voir une mer de visages. De toutes les contrées environnantes les Israélites étaient accourus. "Esdras bénit l'Eternel, le grand Dieu, et tout le peuple répondit ...: Amen! ... Ils s'inclinèrent et se prosternèrent devant l'Eternel, le visage contre terre." PR 503 3 Et cependant, même dans cette assemblée, on pouvait constater les preuves du péché d'Israël. Par suite de mariages contractés entre différentes nations, la langue juive s'était corrompue, et il fallait expliquer la loi dans celle du peuple pour que tous puissent la comprendre. "Ils lisaient distinctement dans le livre de la loi de Dieu, et ils en donnaient le sens pour faire comprendre ce qu'ils avaient lu." PR 504 1 "Tout le peuple fut attentif à la lecture du livre de la loi." En écoutant cette lecture, les Israélites se sentaient coupables. Tous pleuraient à la pensée de leurs transgressions. Mais ce jour était un jour de fête, pendant lequel le Seigneur avait ordonné que l'on fût dans l'allégresse. Ils furent donc priés de retenir leurs larmes et de se réjouir à cause de la grande miséricorde de Dieu à leur égard. "Ce jour est consacré à l'Eternel, votre Dieu, dit Néhémie; ne soyez pas dans la désolation et dans les larmes! ... Allez, mangez des viandes grasses et buvez des liqueurs douces, et envoyez des portions à ceux qui n'ont rien de préparé, car ce jour est consacré à notre Seigneur; ne vous affligez pas, car la joie de l'Eternel sera votre force." PR 504 2 Le début de la matinée fut consacré aux services religieux, et le reste de la journée à louer l'Eternel, à se réjouir de ses bontés. On envoya des portions aux pauvres qui n'avaient rien préparé. Il y eut de grandes réjouissances, car la loi divine avait été lue et expliquée. PR 504 3 Le jour suivant on se livra au même exercice, et au moment fixé -- le dixième jour du septième mois -- sur l'ordre de Dieu, la fête des expiations fut célébrée. Entre le quinzième et le vingt-deuxième jour de ce même mois, le peuple et les principaux Juifs célébrèrent encore la fête des tabernacles. "Allez chercher à la montagne, dirent-ils, des rameaux de palmier, et des rameaux d'arbres touffus, pour faire des tentes, comme il est écrit. Alors le peuple alla chercher des rameaux, et ils se firent des tentes sur le toit de leurs maisons, dans leurs cours, dans les parvis de la maison de Dieu. ... Et il y eut de très grandes réjouissances. On lut dans le livre de la loi de Dieu, chaque jour, depuis le premier jusqu'au dernier." PR 504 4 En écoutant la lecture de la loi chaque jour, les Israélites avaient été convaincus de leurs transgressions, ainsi que de celles des générations précédentes. Ils comprirent alors qu'en s'éloignant de Dieu, les descendants d'Abraham, privés de sa protection, avaient été dispersés parmi les nations étrangères. Ils décidèrent donc de rechercher sa miséricorde et s'engagèrent à observer ses commandements. Avant de célébrer ce service solennel, le second jour après la fête des tabernacles, ils prirent la décision de se séparer des païens qui se trouvaient parmi eux. PR 505 1 Tandis que le peuple se prosternait devant le Seigneur, confessant ses péchés et en implorant le pardon, les chefs l'encourageaient à se confier en Dieu qui, selon sa promesse, exauce les prières. Il ne devait pas seulement se lamenter, pleurer et se repentir, mais aussi croire au pardon de Dieu. Il fallait qu'il montre sa foi en publiant le récit des bénédictions dont il avait été l'objet de la part du Seigneur, et en le louant pour sa grande bonté. PR 505 2 "Levez-vous, dit-on aux enfants d'Israël, bénissez l'Eternel, votre Dieu, d'éternité en éternité!" Alors, les bras tendus vers le ciel, ils entonnèrent ce cantique: PR 505 3 Que l'on bénisse ton nom glorieux, Qui est au-dessus de toute bénédiction Et de toute louange! C'est toi, Eternel, toi seul Qui as fait les cieux et toute leur armée, La terre et tout ce qui est sur elle, Les mers et tout ce qu'elles renferment. Tu donnes la vie à toutes ces choses, Et l'armée des cieux se prosterne devant toi. PR 505 4 Après que le peuple eut fait monter vers Dieu ses louanges, les chefs parlèrent du passé d'Israël, de son ingratitude manifeste, et tous reconnurent que le Seigneur avait été juste en le punissant. Alors toute l'assemblée prit la ferme résolution d'observer les commandements de Dieu. Tous s'engagèrent à rester fidèles, et pour que cet engagement fût durable, et conservé d'une façon permanente, tel un mémorial, il fut couché par écrit, et les chefs, les Lévites et les prêtres y apposèrent leur sceau. Cette alliance devait subsister comme un souvenir, une barrière à la tentation. Le peuple jura solennellement "de marcher dans la loi de Dieu donnée par Moïse, serviteur de Dieu, d'observer et de mettre en pratique tous les commandements de l'Eternel, notre Seigneur, ses ordonnances et ses lois". En outre, les Israélites promettaient de ne plus contracter de mariages avec des étrangers. PR 506 1 Avant que prît fin cette journée de jeûne, l'assemblée manifesta le désir de revenir au Seigneur, et s'engagea à ne plus profaner le jour du sabbat. Néhémie n'était pas encore intervenu, comme il le fera plus tard, pour empêcher les commerçants étrangers de venir à Jérusalem; mais pour mettre le peuple à l'abri de la tentation, il lui fit promettre par un serment solennel de ne rien acheter de ces vendeurs le jour du sabbat. Il espérait ainsi décourager ces derniers et les obliger à mettre un terme à leur commerce. PR 506 2 Il fut aussi pourvu à l'entretien du culte public. L'assemblée s'engagea à donner, en plus de la dîme, une contribution annuelle destinée au service du sanctuaire. "Nous résolûmes, dit Néhémie, d'apporter chaque année à la maison de l'Eternel les prémices de notre sol et les prémices de tous les fruits de tous les arbres; d'amener à la maison de notre Dieu ... les premiers-nés de nos fils et de notre bétail, comme il est écrit dans la loi, les premiers-nés de nos boeufs et de nos brebis." PR 506 3 Israël avait recouvré la faveur divine; il regrettait profondément son passé. Après avoir confessé ses péchés avec larmes, et reconnu qu'il avait été traité avec justice, il s'engagea à observer la loi divine. Il ne lui restait plus qu'à manifester sa foi. Dieu ayant accepté sa repentance, il pouvait se réjouir d'avoir reçu le pardon de ses iniquités. PR 506 4 Les tentatives de Néhémie pour restaurer le culte du vrai Dieu avaient été couronnées de succès. Tant que le peuple resterait fidèle, tant qu'il obéirait à la Parole de Dieu, le Seigneur accomplirait ses promesses et le comblerait de ses riches bénédictions. PR 506 5 Ce récit devrait servir de leçon à tous ceux qui sont convaincus de leurs péchés, et comme écrasés par le poids de leur indignité. L'Ecriture nous rapporte fidèlement les conséquences de l'apostasie d'Israël, mais elle nous décrit aussi son humiliation profonde, sa repentance sincère, sa foi ardente et ses sacrifices généreux lorsqu'il revint au Seigneur. PR 507 1 Tous les repentirs sincères procurent au croyant une joie durable. Lorsqu'un pécheur cède à l'influence de l'Esprit, il voit sa culpabilité et sa souillure jurer avec la sainteté du grand médecin des âmes. Il se voit condamné par ses transgressions; mais qu'il ne se laisse pas aller au désespoir, car le pardon lui a déjà été accordé. Il doit se réjouir lorsqu'il a le sentiment de la rémission de son péché, grâce à l'amour d'un Père céleste qui pardonne abondamment. C'est la gloire de Dieu d'entourer de sa tendre sollicitude tous les pécheurs qui se repentent, de bander leurs blessures, de laver leurs péchés et de les revêtir de la robe du salut. ------------------------Chapitre 57 -- OEuvre de réforme PR 509 0 Ce chapitre est basé sur Néhémie 13. PR 509 1 Le peuple de Dieu s'était solennellement et publiquement engagé à obéir à la loi divine. Mais, lorsque l'influence d'Esdras et de Néhémie cessa de se faire sentir, de nombreux croyants se détournèrent du Seigneur. Néhémie était retourné en Perse. Pendant son absence, le malin s'insinua parmi le peuple, menaçant de corrompre la nation. Non seulement les idolâtres avaient pris pied dans Jérusalem, mais ils avaient encore souillé, par leur présence, les parvis du temple. En s'alliant à une étrangère, le prêtre Eliaschib était devenu le parent de Tobija, l'ennemi le plus farouche d'Israël. Cette union avec une païenne eut comme conséquence de ménager à Tobija un appartement qui avait accès au temple -- appartement utilisé jusqu'alors comme dépôt pour les dîmes et les offrandes. PR 509 2 Dieu avait déclaré par Moïse aux Ammonites et aux Moabites, qui s'étaient montrés cruels et perfides à l'égard d'Israël: "Vous n'entrerez point dans l'assemblée de l'Eternel."1 Malgré cette défense, le grand prêtre avait enlevé les offrandes accumulées dans la chambre de la maison du Seigneur pour donner asile à ce représentant de la race proscrite. En conférant un tel honneur à cet ennemi de Dieu et de la vérité, on ne pouvait témoigner plus de mépris au Seigneur. PR 510 1 Lorsqu'il revint de Perse, Néhémie apprit cette odieuse profanation, et il prit de promptes mesures pour chasser l'intrus. "J'en éprouvai un vif déplaisir, dit-il, et je jetai hors de la chambre tous les objets qui appartenaient à Tobija; j'ordonnai qu'on purifiât les chambres, et j'y replaçai les ustensiles de la maison de Dieu, les offrandes et l'encens." PR 510 2 Non seulement le temple avait été profané, mais on avait mal employé les offrandes. Aussi le peuple avait-il tendance à se relâcher dans ses libéralités. Il avait perdu son zèle et sa ferveur, et il payait ses dîmes à contrecoeur. Le trésor de la maison de Dieu était insuffisamment pourvu; de nombreux chantres et d'autres officiants du service du temple, mal rétribués, avaient quitté l'oeuvre du Seigneur pour travailler ailleurs. PR 510 3 Néhémie se mit à la tâche pour corriger ces abus. Il réunit ceux qui avaient délaissé le service du temple et "les remit à leur poste". Cet acte inspira confiance au peuple, et "Juda apporta dans les magasins la dîme du blé, du moût et de l'huile". Les hommes qui "avaient la réputation d'être fidèles", nommés surveillants du trésor, "furent chargés de faire les distributions à leurs frères". PR 510 4 Un autre résultat des rapports entretenus avec les idolâtres, ce fut l'abandon du sabbat -- signe qui distinguait les Israélites de toutes les autres nations, comme adorateurs du vrai Dieu. Néhémie découvrit que des commerçants, des païens des nations voisines, venaient à Jérusalem et entraînaient une foule de Juifs à faire du commerce ce jour-là. D'aucuns restèrent fermes à leurs principes; mais d'autres les sacrifièrent et se joignirent aux païens qui s'efforçaient de vaincre les scrupules des plus consciencieux. Un grand nombre d'entre eux profanèrent ouvertement le jour du sabbat. "A cette époque, écrit Néhémie, je vis en Juda des hommes fouler au pressoir pendant le sabbat, rentrer des gerbes, charger sur des ânes même du vin, des raisins et des figues, et toutes sortes de choses, et les amener à Jérusalem le jour du sabbat. ... Il y avait aussi des Tyriens, établis à Jérusalem, qui apportaient du poisson et toutes sortes de marchandises, et qui les vendaient aux fils de Juda le jour du sabbat et dans Jérusalem." PR 511 1 Cet état de choses aurait pu être évité si les chefs de Juda avaient exercé leur autorité; mais leur désir de ménager leurs propres intérêts les avait poussés à favoriser les idolâtres. Néhémie les réprimanda énergiquement pour leur négligence. "Que signifie cette mauvaise action que vous faites, en profanant le jour du sabbat, leur demanda-t-il sévèrement. N'est-ce pas ainsi qu'ont agi vos pères, et n'est-ce pas à cause de cela que notre Dieu a fait venir tous ces malheurs sur nous et sur cette ville? Et vous, vous attirez de nouveau sa colère contre Israël, en profanant le sabbat!" Et il ordonna "qu'on fermât les portes de Jérusalem avant le sabbat, dès qu'elles seraient dans l'ombre, et qu'on ne les ouvrît qu'après le sabbat". Et comme Néhémie avait davantage confiance dans ses serviteurs que dans ceux qui étaient désignés par les magistrats, il les plaça aux portes pour se rendre compte si ses ordres seraient respectés. PR 511 2 Mais résolus à ne pas abandonner leur manière de procéder, "les marchands et les vendeurs de toutes sortes de choses passèrent une ou deux fois la nuit hors de Jérusalem". Ils espéraient ainsi faire du commerce avec les habitants de la ville ou de la campagne. Néhémie les avertit alors qu'ils seraient punis s'ils persévéraient dans cette pratique. "Pourquoi passez-vous la nuit devant la muraille?" leur demanda-t-il. "Dès ce moment, ils ne vinrent plus pendant le sabbat." Il ordonna aussi aux Lévites de garder les portes, car il savait qu'on les respecterait davantage que les gens du peuple. Etant liés étroitement au service divin, ils feraient preuve de plus de zèle pour faire respecter la loi de Dieu. PR 511 3 Néhémie porta ensuite son attention sur le danger qui menaçait à nouveau Israël par suite des mariages et des alliances contractés avec les païens. "A cette même époque, dit-il, je vis des Juifs qui avaient pris des femmes asdodiennes, ammonites, moabites. La moitié de leurs fils parlaient l'asdodien, et ne savaient pas parler le juif; ils ne connaissaient que la langue de tel ou tel peuple." Ces alliances illégitimes créaient une grande confusion en Israël, car quelques-uns de ceux qui les contractaient occupaient des situations en vue. C'étaient des chefs qu'on était en droit de considérer comme des conseillers et des exemples. Prévoyant les conséquences qui en résulteraient pour la nation, Néhémie réprimanda sévèrement ceux qui s'en rendaient coupables. Il leur rappela le cas de Salomon dont aucun roi au monde n'avait égalé la gloire. Dieu lui avait conféré une grande sagesse; mais les femmes païennes le détournèrent de Dieu, et son exemple avait corrompu Israël. "Faut-il donc apprendre à votre sujet, demandait sévèrement Néhémie, que vous commettez un aussi grand crime?" "Vous ne donnerez pas vos filles à leurs fils, et vous ne prendrez leurs filles ni pour vos fils ni pour vous." PR 512 1 En plaçant devant eux les commandements et les menaces de Dieu, ainsi que les terribles châtiments qui s'étaient abattus sur les Israélites à cause de leurs mésalliances, Néhémie réveilla la conscience de ses auditeurs et une oeuvre de réforme débuta, détournant ainsi la colère menaçante du Très-Haut. PR 512 2 Parmi ceux qui étaient engagés dans le service sacré, certains plaidèrent en faveur de leurs femmes païennes dont ils ne voulaient pas se séparer. Mais on ne fit aucune distinction; il ne fut tenu compte ni du rang ni de la position. Quiconque parmi les prêtres ou les principaux refusait de rompre avec les idolâtres était immédiatement rejeté du service de Dieu. Un petit-fils du grand prêtre, qui avait épousé la fille du fameux Sanballat, fut non seulement relevé de ses fonctions, mais aussitôt banni d'Israël. PR 512 3 Comme elle était angoissée l'âme du fidèle serviteur de Dieu qui devait agir avec une telle sévérité! Seul le jour du jugement le révélera. Il eut à combattre constamment contre les éléments adverses, et ce ne fut que par le jeûne, l'humiliation et la prière que l'oeuvre du Seigneur progressa. PR 512 4 Beaucoup de ceux qui avaient épousé des idolâtres voulurent les suivre en exil. Ils se joignirent aux Samaritains, et après quelque temps partagèrent leur fortune. Désireux de renforcer cette alliance, les Samaritains s'engagèrent à adopter plus entièrement la foi et les coutumes juives. Les renégats, décidés à surpasser leurs anciens frères, édifièrent un temple sur le mont Garizim, l'opposant ainsi au sanctuaire de Jérusalem. Leur religion continua à être un mélange de judaïsme et de paganisme, une rivalité entre les deux nations. Le fait pour les Samaritains de prétendre être le peuple de Dieu fut une source de schisme et d'inimitié pendant des générations. PR 513 1 Dans la réforme qui doit s'opérer de nos jours, il faut des hommes qui, comme Esdras et Néhémie, n'atténueront ni n'excuseront le péché, des hommes qui ne reculeront pas pour venger l'honneur de Dieu. Ceux qui assumeront cette responsabilité n'excuseront pas le mal; ils ne le recouvriront pas du manteau d'une fausse charité. Ils sauront que Dieu ne fait pas acception de personnes et que la sévérité témoignée envers quelques-uns est une preuve de miséricorde pour beaucoup. Ils sauront aussi que l'Esprit du Christ se manifestera toujours chez celui qui dénonce le péché. PR 513 2 Dans l'accomplissement de leur tâche, Esdras et Néhémie marchaient humblement devant Dieu. Ils confessaient leurs péchés et ceux du peuple; ils en imploraient le pardon, comme s'ils étaient eux-mêmes coupables. Patiemment, ils peinaient, priaient et souffraient. Ce qui compliquait le plus leur tâche, ce n'était pas l'hostilité ouverte des païens, mais l'opposition secrète de leurs soi-disant amis. Ces derniers, en mettant leur influence au service du mal, alourdissaient singulièrement le fardeau des serviteurs de Dieu. Ces traîtres fournissaient aux ennemis de la bonne cause le matériel que ceux-ci employaient dans leur lutte contre le peuple élu. PR 513 3 Le succès qui couronna les efforts de Néhémie montre ce que peuvent accomplir la prière, la foi, l'action prudente et énergique. Néhémie n'était ni prêtre, ni prophète; il n'avait aucune prétention à un titre quelconque. C'était un réformateur dans une période grave. Il avait pour but de ramener son peuple à l'obéissance envers le Seigneur. Inspiré par cet idéal élevé, il apporta tout son coeur à sa réalisation. Une intégrité noble et inflexible caractérisa son oeuvre. Il fit preuve d'une telle résolution qu'Israël fut amené à agir avec zèle et avec courage. Ce dernier ne pouvait que reconnaître la loyauté et le patriotisme du réformateur, ainsi que son amour profond pour le Seigneur. Cette attitude vaillante suscita chez le peuple le désir de suivre le serviteur de Dieu dans la voie qu'il lui indiquait. PR 514 1 La promptitude dans le service de Dieu est une partie importante de la vraie religion. On devrait saisir les circonstances favorables pour accomplir la volonté du Seigneur. L'action rapide et décisive au moment opportun assure d'éclatantes victoires, alors que le retard et la négligence aboutissent à l'insuccès qui déshonore Dieu. Si ceux qui sont à la tête de la cause de la vérité ne manifestent aucun zèle, s'ils se montrent indifférents et indécis, l'Eglise sera froide, endormie et portée au plaisir. Mais si les chefs sont remplis du saint désir de servir le Seigneur et lui seul, alors les fidèles seront unis, débordants d'espoir et d'ardeur. PR 514 2 La Parole de Dieu abonde en contrastes saisissants. Le péché et la sainteté sont placés côte à côte, afin qu'en les considérant nous puissions éviter l'un et rechercher l'autre. Les pages qui décrivent la haine, la pauvreté, la trahison de Sanballat et de Tobija décrivent aussi la noblesse, la sainteté et l'esprit de sacrifice d'Esdras et de Néhémie. Libre à nous d'imiter celui que nous préférons. Les terribles conséquences de la transgression des commandements de Dieu sont placées en regard des bénédictions qui résultent de l'obéissance. Il faut décider nous-mêmes si nous voulons souffrir ou être bénis. L'oeuvre de restauration et de réforme entreprise par les exilés revenus en Israël -- oeuvre placée sous la direction de Zorobabel, d'Esdras et de Néhémie -- nous offre le tableau de la rénovation spirituelle qui sera opérée à la fin des temps. Le reste d'Israël était faible, exposé comme une proie à ses ennemis; mais Dieu s'en servit pour maintenir ici-bas la connaissance des choses célestes. Il était le gardien du vrai culte, le dépositaire des oracles sacrés. Que de vicissitudes il eut à subir au cours de la reconstruction du temple et des murailles de Jérusalem! Comme ils furent lourds les fardeaux que durent porter les organisateurs de ces travaux! Mais ces hommes avançaient avec une confiance inébranlable, en s'humiliant et en s'appuyant fermement sur le Seigneur, persuadés que la vérité triompherait. Comme le roi Ezéchias, Néhémie "fut attaché à l'Eternel, il ne se détourna point de lui, et il observa ses commandements. ... Et l'Eternel fut avec Ezéchias."2 PR 515 1 La restauration spirituelle entreprise au temps de Néhémie est un symbole que mettent en relief les paroles du prophète Esaïe: "Ils rebâtiront sur d'anciennes ruines, ils relèveront d'antiques décombres, ils renouvelleront des villes ravagées, dévastées depuis longtemps." "Les tiens rebâtiront sur d'anciennes ruines, tu relèveras des fondements antiques; on t'appellera réparateur des brèches, celui qui restaure les chemins, qui rend le pays habitable."3 PR 515 2 Le prophète parle ici d'un peuple qui, à une époque d'abandon général de la vérité et de la justice, s'efforcera de restaurer les principes qui sont à la base du royaume des cieux. Ils seront les réparateurs des brèches pratiquées dans la loi de Dieu -- loi qui est comme une muraille placée autour de ses élus pour les protéger. L'obéissance à ces préceptes de justice et de pureté sera leur perpétuelle sauvegarde. Avec des paroles sur lesquelles on ne saurait se méprendre, le prophète indique la tâche particulière du peuple de Dieu des derniers temps: "Si tu retiens ton pied pendant le sabbat, pour ne pas faire ta volonté en mon saint jour, si tu fais du sabbat tes délices, pour sanctifier l'Eternel en le glorifiant, et si tu l'honores en ne suivant point tes voies, en ne te livrant pas à tes penchants et à de vains discours, alors tu mettras ton plaisir en l'Eternel, et je te ferai monter sur les hauteurs du pays, je te ferai jouir de l'héritage de Jacob, ton père; car la bouche de l'Eternel a parlé."4 PR 515 3 A la fin des temps, toutes les institutions divines seront restaurées. La brèche faite à la loi de Dieu, alors que le jour du sabbat a été changé, doit être réparée. Le peuple de Dieu des derniers temps montrera que cette loi est à la base de toute réforme durable, et que le quatrième commandement demeure comme le mémorial de la création, comme le rappel constant de la puissance divine. En termes clairs et précis, il montrera la nécessité d'obéir à tous les préceptes du Décalogue. Contraint par l'amour du Christ, le peuple de Dieu coopérera avec le Seigneur pour "rebâtir sur d'anciennes ruines. Il sera le réparateur des brèches, celui qui restaure les chemins et rend le pays habitable."5 ------------------------Chapitre 58 -- La venue d'un libérateur PR 517 1 Au cours des longs siècles de "détresse, d'obscurité et de sombres angoisses",1 qui caractérisèrent l'histoire de l'humanité, depuis le jour où nos premiers parents furent chassés du jardin d'Eden jusqu'à l'époque où le Fils de Dieu parut pour sauver les pécheurs, l'espoir de l'humanité s'est concentré sur la venue d'un libérateur. Ce libérateur délivrerait enfin les hommes de l'esclavage du péché et de la mort. La première fois qu'il est parlé d'une telle espérance, c'est lorsque Dieu fit à Adam et à Eve cette déclaration, en s'adressant au serpent: "Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité: celle-ci t'écrasera la tête, et tu lui blesseras le talon."2 PR 517 2 Alors que le couple pécheur écoutait ces déclarations, une lueur d'espoir brilla dans leur coeur; car dans la prophétie annonçant la destruction du pouvoir de Satan, il discernait une promesse de délivrance. Il pourrait enfin échapper à la ruine provoquée par sa transgression. Bien qu'ils aient dû souffrir du pouvoir de l'adversaire dont ils avaient subi l'influence séductrice, et qu'ils violèrent le commandement de Dieu, Adam et Eve ne devaient cependant pas se laisser aller au désespoir. Le Fils de Dieu offrirait son sang pour les racheter de leur transgression. Un temps d'épreuve leur serait accordé, au cours duquel ils pourraient, par la foi en la puissance salvatrice du Messie, redevenir enfants de Dieu. PR 518 1 Grâce au succès qu'il s'assura en détournant l'homme du sentier de l'obéissance, Satan devint "le dieu de ce siècle."3 La domination qui avait appartenu à Adam passa à l'usurpateur. Toutefois le Fils de Dieu allait venir sur cette terre pour payer la rançon du péché et non seulement pour racheter l'homme, mais aussi pour reconquérir la domination perdue. C'est de cette restauration que parle le prophète Michée lorsqu'il écrit ces paroles: "Et toi, tour du troupeau, colline de la fille de Sion, à toi viendra, à toi arrivera l'ancienne domination, le royaume de la fille de Jérusalem."4 L'apôtre Paul parle aussi de "la rédemption de ceux que Dieu s'est acquis."5 Et le Psalmiste fait écho quand il mentionne la restauration finale de l'héritage originel. "Les justes, dit-il, posséderont le pays, et ils y demeureront à jamais."6 PR 518 2 Cet espoir de rédemption par l'avènement du Fils de Dieu comme Sauveur et Roi ne s'est jamais éteint dans le coeur des hommes. Dès les origines du monde, certains ont fait preuve d'une foi qui, dépassant les ombres du présent, a atteint les réalités de l'avenir. Par l'intermédiaire d'Adam, de Seth, d'Hénoc, de Metuschélah, de Noé, de Sem, d'Abraham, d'Isaac, de Jacob et de beaucoup d'autres hommes de Dieu, le Créateur conserva les précieuses révélations de sa volonté. De même le Seigneur fit connaître aux enfants d'Israël -- peuple élu par qui devait être donnée au monde la promesse du Messie -- les exigences de sa loi et l'assurance du salut, de ce salut obtenu par le sacrifice expiatoire de son Fils bien-aimé. PR 518 3 L'espoir d'Israël avait pris corps avec la promesse faite à Abraham lorsqu'il avait été appelé à suivre Dieu. Cette promesse fut répétée à plusieurs reprises par la suite à la postérité du patriarche. "Toutes les familles de la terre seront bénies en toi",7 lui fut-il dit. Alors que les desseins de Dieu relatifs à la rédemption de l'homme étaient révélés à Abraham, le Soleil de justice brillait dans le coeur de ce dernier et dissipait les ténèbres de son âme. Et lorsque enfin le Sauveur lui-même vint chez les enfants des hommes et s'entretint avec eux, il donna aux Juifs le témoignage de l'espoir lumineux de la délivrance du patriarche, délivrance obtenue par la venue du Rédempteur. "Abraham, votre père, a-t-il dit, a tressailli de joie de ce qu'il verrait mon jour: il l'a vu, et il s'est réjoui."8 PR 519 1 Cette même bienheureuse espérance fut énoncée dans la bénédiction que prononça sur son lit de mort le patriarche Jacob: "Juda, dit-il, tu recevras les hommages de tes frères; ta main sera sur la nuque de tes ennemis, les fils de ton père se prosterneront devant toi. ... Le sceptre ne s'éloignera point de Juda, ni le bâton souverain d'entre ses pieds, jusqu'à ce que vienne le Schilo, et que les peuples lui obéissent."9 PR 519 2 La venue du Rédempteur fut prédite une fois encore sur les confins de la terre promise par l'oracle de Balaam: "Je le vois, dit-il, mais non maintenant, je le contemple, mais non de près. Un astre sort de Jacob, un sceptre s'élève d'Israël. Il perce les flancs de Moab, et il abat tous les enfants de Seth."10 PR 519 3 Le but que se proposait le Seigneur en envoyant son Fils pour racheter l'homme perdu fut placé devant Israël par Moïse. Un jour, peu de temps avant sa mort, l'homme de Dieu déclara: "L'Eternel, ton Dieu, te suscitera du milieu de toi, d'entre tes frères, un prophète comme moi: vous l'écouterez!" Moïse avait reçu des instructions précises pour le peuple d'Israël au sujet de l'oeuvre que devait accomplir le Messie promis. "Je leur susciterai du milieu de leurs frères un prophète comme toi, je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui commanderai."11 PR 519 4 A l'époque patriarcale, les sacrifices d'expiation étaient destinés à rappeler perpétuellement la venue du Sauveur. Il en était de même pour tout le rituel se rapportant aux services du sanctuaire au cours de l'histoire d'Israël. Dans le tabernacle, comme dans le temple qui le remplaça, on enseignait les grandes vérités relatives à l'avènement du Christ, en tant que rédempteur, sacrificateur et roi. Une fois l'an, on rappelait à Israël les événements qui mettraient fin au grand conflit opposant le Christ à Satan, la purification finale de l'univers enfin débarrassé du péché et du pécheur. PR 520 1 Les sacrifices et les offrandes du rituel mosaïque désignaient un service plus excellent, c'est-à-dire le céleste. Le sanctuaire était "une figure pour le temps actuel", et on y présentait des offrandes et des sacrifices. Le lieu saint et le lieu très saint étaient "les images des choses qui sont dans les cieux"; car le Christ, notre grand prêtre, est aujourd'hui le "ministre du sanctuaire et du véritable tabernacle, qui a été dressé par le Seigneur et non par un homme".12 PR 520 2 Depuis le jour où Dieu dit au serpent, dans le jardin d'Eden: "Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité",13 Satan sut qu'il n'aurait jamais le pouvoir absolu sur les habitants de la terre. Lorsque Adam et ses fils commencèrent à offrir des sacrifices cérémoniels ordonnés par le Seigneur comme types de la venue du Rédempteur, Satan vit dans ces sacrifices le symbole de la communion entre le ciel et la terre. Au cours des longs siècles qui suivirent, ses efforts se portèrent constamment sur la suppression de cette communion. Il s'est acharné avec une application soutenue à dénaturer les rites annonçant le Sauveur, et il a triomphé auprès d'une grande majorité des membres de la famille humaine. PR 520 3 Alors que le Seigneur enseignait aux hommes que grâce à son amour nous pouvions être réconciliés avec lui, l'ennemi suprême s'efforçait de représenter Dieu comme un être qui prend plaisir à détruire le genre humain. Ainsi, les sacrifices et les ordonnances destinés à révéler l'amour divin ont été faussés. Ce n'étaient plus que des dons et des bonnes oeuvres destinés à apaiser la colère d'un Dieu offensé. PR 520 4 Satan s'est appliqué en même temps à éveiller et à intensifier les passions des hommes, afin que, par leurs transgressions répétées, les multitudes s'éloignent de plus en plus de Dieu et soient désespérément enlacées dans les pièges de l'ennemi. PR 520 5 Lorsque la volonté de Dieu fut révélée par les prophètes hébreux, Satan voulut approfondir les messages concernant le Messie. Il étudia soigneusement les déclarations qui soulignaient avec une clarté manifeste l'oeuvre du Christ parmi les hommes en tant que victime expiatoire et roi triomphant. Dans les rouleaux de parchemins de l'Ancien Testament, il vit que le Messie devait paraître comme "un agneau qu'on mène à la boucherie", que son visage serait "défiguré", que "son aspect n'avait rien pour nous plaire". Le Sauveur de l'humanité devait être "méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance, ... frappé de Dieu et humilié".14 Cependant, ce Sauveur devait exercer son pouvoir pour "faire droit aux malheureux", pour sauver "les enfants du pauvre" et pour "écraser l'oppresseur."15 Ces prophéties firent trembler Satan. Pourtant il ne renonça pas à son projet de combattre la miséricordieuse providence en faveur de la rédemption des pécheurs. Il décida d'aveugler les hommes sur la signification réelle des prophéties messianiques, afin de les préparer à rejeter le Christ lorsqu'il se présenterait. PR 521 1 Au cours des siècles qui précédèrent immédiatement le déluge, Satan avait réussi à faire régner sur toute la terre un esprit de rébellion à l'égard de Dieu. Mais les leçons terribles du déluge ne furent pas conservées longtemps dans le souvenir des hommes. Par d'habiles insinuations, Satan poussa peu à peu ceux-ci à une révolte délibérée. Il semblait être à nouveau sur le point de triompher; mais le plan de Dieu en faveur des pécheurs ne fut pas abandonné. Par la postérité du fidèle Abraham, de la descendance de Sem, la connaissance des desseins salutaires du Seigneur devait être conservée pour le bénéfice des générations futures. De temps en temps, des messagers de la vérité, choisis par Dieu, étaient suscités pour appeler l'attention des hommes sur la signification des cérémonies sacrificielles. Ils insistaient particulièrement sur la promesse de Dieu relative à l'avènement de celui que désignaient toutes les cérémonies mosaïques. Le monde était ainsi préservé de l'apostasie universelle. PR 521 2 Ce n'est pas sans susciter une opposition farouche que le plan de Dieu fut mis à exécution. L'ennemi de la vérité et de la justice fit l'impossible pour faire oublier aux descendants d'Abraham la noble et sainte mission dont ils devaient s'acquitter, et il s'efforça de les entraîner vers le culte des faux dieux. Les tentatives de l'adversaire furent couronnées de succès. Pendant les siècles qui précédèrent la première venue de Jésus, les ténèbres couvrirent la terre. Satan projetait son ombre infernale sur le chemin des enfants des hommes pour les empêcher d'obtenir la connaissance de Dieu et du monde futur. Des multitudes étaient assises à l'ombre de la mort. Leur seul espoir résidait dans la disparition de ces ténèbres, afin que Dieu leur fût révélé. PR 522 1 Dans une vision prophétique, David, l'oint du Seigneur, avait prédit que la venue du Messie serait semblable "à la lumière du matin, quand le soleil brille et que la matinée est sans nuages".16 Et le prophète Osée avait déclaré que "sa venue est aussi certaine que celle de l'aurore."17 Celle-ci paraît lentement et silencieusement; elle dissipe les ténèbres et éveille l'univers à la vie. Le Soleil de justice allait se lever de la même manière "et la guérison" serait "sous ses ailes."18 Les multitudes qui vivaient dans "le pays de l'ombre de la mort" verraient "resplendir une grande lumière."19 PR 522 2 Le prophète Esaïe, qui contempla avec ravissement cette glorieuse délivrance, s'exclamait: "Un enfant nous est né, un fils nous est donné, et la domination reposera sur son épaule; on l'appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Prince éternel, Prince de la paix. Donner à l'empire de l'accroissement et une paix sans fin au trône de David et à son royaume, l'affermir et le soutenir par le droit et par la justice, dès maintenant et à toujours: voilà ce que fera le zèle de l'Eternel des armées."20 PR 522 3 Aux derniers siècles de l'histoire d'Israël, avant le premier avènement du Christ, on comprenait généralement que cette prophétie annonçait la venue du Messie. "C'est peu, disait le prophète, que tu sois mon serviteur, pour relever les tribus de Jacob et pour ramener les restes d'Israël: je t'établis pour être la lumière des nations, pour porter mon salut jusqu'aux extrémités de la terre." "Alors la gloire de l'Eternel sera révélée", avait dit encore le prophète, "et au même instant toute chair la verra."21 C'est de cette lumière des hommes que Jean-Baptiste rendit témoignage avec tant de hardiesse, lorsqu'il déclara: "Je suis la voix de celui qui crie dans le désert: Aplanissez le chemin du Seigneur, comme a dit Esaïe, le prophète."22 PR 523 1 Au sujet du Christ fut faite cette promesse prophétique: "Ainsi parle l'Eternel, le rédempteur, le Saint d'Israël, à celui qu'on méprise, qui est en horreur au peuple. ... Ainsi parle l'Eternel. ... Je te garderai, et je t'établirai pour traiter alliance avec le peuple, pour relever le pays, et pour distribuer les héritages désolés; pour dire aux captifs: Sortez! et à tous ceux qui sont dans les ténèbres: Paraissez! ... Ils n'auront pas faim et ils n'auront pas soif; le mirage et le soleil ne les feront point souffrir; car celui qui a pitié d'eux sera leur guide, et il les conduira vers des sources d'eaux."23 PR 523 2 Ceux qui, au sein de la nation juive, étaient restés fidèles affermirent leur foi. Descendants de la lignée à laquelle avait été conservée la connaissance de Dieu, ils s'appuyaient sur ces passages des Ecritures et sur d'autres semblables. Avec quelle joie débordante ils lisaient les paroles indiquant comment le Seigneur oindrait celui qui devait "porter de bonnes nouvelles aux malheureux", "guérir ceux qui ont le coeur brisé" et "proclamer aux captifs la liberté", "publier une année de grâce de l'Eternel"!24 PR 523 3 Cependant, leur coeur était rempli de tristesse en pensant aux souffrances que devait subir le Messie pour accomplir le plan divin. Avec quelle humiliation ils s'appesantissaient sur ces paroles du prophète: "Qui a cru à ce qui nous était annoncé? Qui a reconnu le bras de l'Eternel? Il s'est élevé devant lui comme une faible plante, comme un rejeton qui sort d'une terre desséchée; il n'avait ni beauté, ni éclat pour attirer nos regards, et son aspect n'avait rien pour nous plaire. Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance, semblable à celui dont on détourne le visage, nous l'avons dédaigné, nous n'avons fait de lui aucun cas. Cependant, ce sont nos souffrances qu'il a portées, c'est de nos douleurs qu'il s'est chargé; et nous l'avons considéré comme puni, frappé de Dieu, et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait sa propre voie; et l'Eternel a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous. Il a été maltraité et opprimé, et il n'a point ouvert la bouche, semblable à un agneau qu'on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la tondent; il n'a point ouvert la bouche. Il a été enlevé par l'angoisse et le châtiment; et parmi ceux de sa génération, qui a cru qu'il était retranché de la terre des vivants et frappé pour les péchés de mon peuple? On a mis son sépulcre parmi les méchants, son tombeau avec le riche, quoiqu'il n'eût point commis de violence et qu'il n'y eût point de fraude dans sa bouche."25 PR 524 1 Et par le prophète Zacharie, en parlant des souffrances du Sauveur, Dieu déclara: "Epée, lève-toi sur mon pasteur et sur l'homme qui est mon compagnon!"26 PR 524 2 Le Christ devait subir la justice divine, prendre la place du pécheur et le racheter. Il fallait qu'il comprenne la signification de la justice céleste et ce que cela signifie pour l'homme de comparaître devant Dieu sans intercesseur. PR 524 3 Par l'intermédiaire du Psalmiste, Dieu fit cette déclaration: "L'opprobre me brise le coeur, et je suis malade; j'attends de la pitié, mais en vain, des consolateurs, et je n'en trouve aucun. Ils mettent du fiel dans ma nourriture, et, pour apaiser ma soif, ils m'abreuvent de vinaigre."27 PR 524 4 Au sujet du traitement qui lui serait réservé, voici ce que disait encore la parole prophétique: "Car des chiens m'environnent, une bande de scélérats rôdent autour de moi, ils ont percé mes mains et mes pieds. Je pourrais compter tous mes os. Eux, ils observent, ils me regardent; ils se partagent mes vêtements, ils tirent au sort ma tunique."28 PR 524 5 Ces descriptions de l'amère souffrance du Messie et de sa mort cruelle, pour si tristes qu'elles fussent, contenaient de riches promesses, car Dieu déclarait au sujet de celui qui devait être "brisé par la souffrance" et offert "en sacrifice pour le péché": "Il verra une postérité et prolongera ses jours; et l'oeuvre de l'Eternel prospérera entre ses mains. A cause du travail de son âme, il rassasiera ses regards; par sa connaissance mon serviteur juste justifiera beaucoup d'hommes, et il se chargera de leurs iniquités."29 PR 524 6 C'est son amour pour les pécheurs qui poussa le Christ à payer le prix de la rédemption. "Il voit qu'il n'y a pas un homme, il s'étonne de ce que personne n'intercède." Nul ne pouvait payer la rançon des hommes pour les libérer du pouvoir de l'ennemi. "Alors son bras lui vient en aide, et sa justice lui sert d'appui."30 PR 525 1 "Voici mon serviteur, que je soutiendrai, mon élu, en qui mon âme prend plaisir. J'ai mis mon esprit sur lui; il annoncera la justice aux nations."31 PR 525 2 Sa vie devait être exempte d'orgueil. L'hommage que le monde rend à la position, à la fortune, au talent serait tout à fait étranger au Fils de Dieu. Il n'emploierait aucun moyen humain pour demeurer fidèle ou pour s'imposer. Son renoncement total à lui-même avait été prédit en ces termes: "Il ne criera point, il n'élèvera point la voix, et ne la fera point entendre dans les rues. Il ne brisera point le roseau cassé, et il n'éteindra point la mèche qui brûle encore."32 PR 525 3 La conduite du Sauveur devait offrir aux hommes un contraste frappant avec celle des docteurs de son temps. Dans la vie du Christ, il n'y eut jamais de contestations bruyantes, d'ostentation, d'actes destinés à recueillir les hommages. Le Messie devait être "caché en Dieu". Sans la connaissance du Très-Haut, l'humanité aurait été perdue à tout jamais. Sans l'aide divine, la déchéance des pécheurs aurait été de plus en plus profonde. La vie et le pouvoir sont communiqués par celui qui a créé le monde. Impossible de pourvoir aux besoins des hommes d'une manière différente. PR 525 4 La parole prophétique dit encore ceci: "Il ne se découragera point et ne se relâchera point, jusqu'à ce qu'il ait établi la justice sur la terre, et que les îles espèrent en sa loi. ... L'Eternel a voulu, pour le bonheur d'Israël, publier une loi grande et magnifique."33 L'importance de cette loi et ses exigences ne devaient être diminuées en aucun cas. Il fallait plutôt l'exalter. Le Sauveur allait dégager en même temps les préceptes divins des lourdes obligations imposées par les hommes, obligations qui avaient amené maints croyants à se décourager dans leurs efforts pour offrir au Seigneur un service acceptable. PR 525 5 Au sujet de la mission du Messie, voici ce que Dieu avait déclaré: "Moi, l'Eternel, je t'ai appelé pour le salut, et je te prendrai par la main, je te garderai, et je t'établirai pour traiter alliance avec le peuple, pour être la lumière des nations, pour ouvrir les yeux des aveugles, pour faire sortir de prison le captif, et de leur cachot ceux qui habitent dans les ténèbres. Je suis l'Eternel, c'est là mon nom; et je ne donnerai pas ma gloire à un autre, ni mon honneur aux idoles. Voici, les premières choses se sont accomplies, et je vous en annonce de nouvelles; avant qu'elles arrivent, je vous les prédis."34 PR 526 1 Le Dieu d'Israël devait assurer la délivrance de Sion par la postérité prédite. "Un rameau sortira du tronc d'Isaï, dit le prophète, et un rejeton naîtra de ses racines." "Voici, la jeune fille deviendra enceinte, elle enfantera un fils, et elle lui donnera le nom d'Emmanuel."35 PR 526 2 "L'Esprit de l'Eternel reposera sur lui: Esprit de sagesse et d'intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de connaissance et de crainte de l'Eternel. Il respirera la crainte de l'Eternel; il ne jugera point sur l'apparence, il ne prononcera point sur un ouï-dire. Mais il jugera les pauvres avec équité, et il prononcera avec droiture sur les malheureux de la terre; il frappera la terre de sa parole comme d'une verge, et du souffle de ses lèvres il fera mourir le méchant. La justice sera la ceinture de ses flancs, et la fidélité la ceinture de ses reins." "En ce jour, le rejeton d'Isaï sera là comme une bannière pour les peuples; les nations se tourneront vers lui, et la gloire sera sa demeure."36 "Voici un homme, dont le nom est germe. ... Il bâtira le temple de l'Eternel; il portera les insignes de la majesté; il s'assiera et dominera sur son trône, il sera sacrificateur sur son trône."37 PR 526 3 Une source serait ouverte "pour le péché et l'impureté",38 les enfants des hommes entendraient alors cette invitation sublime: "Vous tous qui avez soif, venez aux eaux, même celui qui n'a pas d'argent! Venez, achetez et mangez, venez, achetez du vin et du lait, sans argent, sans rien payer! Pourquoi pesez-vous de l'argent pour ce qui ne nourrit pas? Pourquoi travaillez-vous pour ce qui ne rassasie pas? Ecoutez-moi donc, et vous mangerez ce qui est bon, et votre âme se délectera de mets succulents. Prêtez l'oreille, et venez à moi, écoutez, et votre âme vivra: je traiterai avec vous une alliance éternelle, pour rendre durables mes faveurs envers David."39 PR 527 1 Voici la promesse faite à Israël: "Je t'ai établi comme témoin auprès des peuples, comme chef et dominateur des peuples. Voici, tu appelleras des nations que tu ne connais pas, et les nations qui ne te connaissent pas accourront vers toi, à cause de l'Eternel, ton Dieu, du Saint d'Israël, qui te glorifie."40 PR 527 2 "Je fais approcher ma justice: elle n'est pas loin; et mon salut: il ne tardera pas. Je mettrai le salut en Sion, et ma gloire sur Israël."41 PR 527 3 Au cours de son ministère, le Messie devait révéler à l'humanité la gloire de Dieu, le Père. Chacun de ses actes, chacune de ses paroles, chacun de ses miracles était destiné à faire connaître à l'humanité perdue l'amour infini du Seigneur. "Monte sur une haute montagne, Sion, écrit le prophète Esaïe, pour publier la bonne nouvelle; élève avec force ta voix, Jérusalem, pour publier la bonne nouvelle; élève ta voix, ne crains point, dis aux villes de Juda: Voici votre Dieu! Voici, le Seigneur, l'Eternel vient avec puissance, et de son bras il commande; voici, le salaire est avec lui, et les rétributions le précèdent. Comme un berger, il paîtra son troupeau, il prendra les agneaux dans ses bras, et les portera dans son sein; il conduira les brebis qui allaitent."42 PR 527 4 "En ce jour-là, les sourds entendront les paroles du livre; et, délivrés de l'obscurité et des ténèbres, les yeux des aveugles verront. Les malheureux se réjouiront de plus en plus en l'Eternel, et les pauvres feront du Saint d'Israël le sujet de leur allégresse. ... Ceux dont l'esprit s'égarait acquerront de l'intelligence, et ceux qui murmuraient recevront instruction."43 PR 527 5 C'est ainsi que par les patriarches et les prophètes, par des types et des symboles, Dieu parlait au monde de la venue du libérateur. Une longue série de prophéties signalaient l'avènement du "trésor de toutes les nations".44 Le lieu même de sa naissance, le moment de son apparition étaient minutieusement spécifiés. PR 527 6 Le fils de David naîtrait dans la cité de David. De Bethléhem, déclarait le prophète, devait sortir "celui qui dominera sur Israël, et dont l'origine remonte aux temps anciens, aux jours de l'éternité".45 PR 528 1 "Et toi, Bethléhem, terre de Juda, tu n'es certes pas la moindre entre les principales villes de Juda, car de toi sortira un chef qui paîtra Israël, mon peuple."46 PR 528 2 Le moment de la première venue du Christ et des principaux événements qui se groupent autour des activités terrestres du Sauveur fut révélé à Daniel par l'ange Gabriel: "Soixante et dix semaines, déclara l'ange, ont été fixées sur ton peuple et sur ta ville sainte, pour faire cesser les transgressions et mettre fin aux péchés, pour expier l'iniquité et amener la justice éternelle, pour sceller la vision et le prophète, et pour oindre le Saint des saints."47 Un jour pour une année.48 Les soixante et dix semaines ou quatre cent quatre-vingt-dix jours représentent autant d'années. Le point de départ de cette période nous est donné dans le livre de Daniel: "Depuis le moment où la parole a annoncé que Jérusalem sera rebâtie jusqu'à l'Oint, au Conducteur, il y a sept semaines et soixante-deux semaines",49 soit soixante-neuf semaines ou quatre cent quatre-vingt-trois ans. L'ordre de restaurer Jérusalem, tel qu'il fut complété par Artaxerxès Longuemain,50 entra en vigueur en automne de l'année quatre cent cinquante-sept avant notre ère. Or, quatre cent quatre-vingt-trois ans s'écoulèrent à partir de cette date, jusqu'à l'année vingt-sept de notre ère, en automne. Selon la prophétie, cette période devait aboutir au Messie, à l'Oint. En l'an vingt-sept, Jésus reçut à son baptême l'onction du Saint-Esprit, et son ministère débuta bientôt après. Alors fut proclamé le message: "Le temps est accompli."51 PR 528 3 L'ange dit encore à Daniel: "Il fera une solide alliance avec plusieurs pendant une semaine" (sept ans). Pendant sept ans, après le début du ministère du Sauveur, l'Evangile devait être prêché aux Juifs: trois ans et demi par le Christ lui-même et trois ans et demi par les apôtres. "Durant la moitié de la semaine il fera cesser le sacrifice et l'offrande."52 Au printemps de l'an trente et un de notre ère, Jésus-Christ, le Sauveur du monde, le véritable sacrifice, fut offert sur la croix du Calvaire. Alors le voile du temple se déchira en deux, prouvant ainsi que le caractère sacré et la signification du service sacrificiel avaient cessé. Le moment était venu où devaient prendre fin "le sacrifice et l'offrande". PR 529 1 La semaine -- ou sept ans -- se termina en l'an trente-quatre de notre ère. Par la lapidation d'Etienne, le premier martyr chrétien, les Juifs scellèrent définitivement leur sort: ils rejetaient l'Evangile. Les disciples furent alors dispersés par la persécution; ils allèrent "de lieu en lieu, annonçant la bonne nouvelle de la parole".53 Peu de temps après, Saul, le persécuteur, se convertissait et devenait Paul, l'apôtre des Gentils. PR 529 2 Les nombreuses prophéties relatives à l'avènement du Sauveur conduisaient les Hébreux à vivre dans une attente continuelle. Beaucoup d'entre eux moururent dans la foi, "sans avoir obtenu les choses promises". Mais ils les avaient "vues de loin"; ils crurent et reconnurent qu'ils étaient étrangers et voyageurs sur la terre. Depuis l'époque d'Hénoc, les patriarches et les prophètes ont gardé vivant l'espoir de voir apparaître le Sauveur promis. PR 529 3 Dieu ne révéla pas tout d'abord l'époque exacte de la première venue du Christ, et même lorsque la prophétie de Daniel la fit connaître, beaucoup ne comprirent pas le message qu'elle contenait. Les siècles se succédèrent, et finalement la voix des prophètes s'éteignit. La main de l'oppresseur s'appesantissait lourdement sur Israël. A mesure que celui-ci s'éloignait du Seigneur, la foi s'affaiblissait, et l'espoir était sur le point de cesser d'illuminer l'avenir. Les paroles des prophètes étaient incompréhensibles à beaucoup d'entre eux, et ceux dont la foi demeurait solide étaient près de s'écrier: "Les jours se prolongent, et toutes les visions restent sans effet."54 Mais l'heure de la venue du Christ était fixée par le Conseil céleste, et "lorsque les temps ont été accomplis, Dieu a envoyé son Fils ... afin qu'il rachetât ceux qui étaient sous la loi, afin que nous reçussions l'adoption."55 PR 529 4 On doit donner à l'humanité des leçons dans un langage humain. Le messager de l'alliance parlera; sa voix sera entendue dans son propre temple. L'auteur de la vérité séparera la vérité des paroles trompeuses de l'homme qui ont rendu celle-ci sans effet. Les principes du gouvernement divin et le plan de la rédemption doivent être clairement définis. Il faut que les hommes connaissent bien les leçons contenues dans l'Ancien Testament. PR 530 1 Lorsque le Sauveur parut enfin, "en prenant une forme de serviteur",56 et commença son ministère, Satan ne put que le blesser au talon, alors que l'humiliation et les souffrances du Christ le blessaient à la tête. L'angoisse provoquée par le péché oppressait celui qui était sans péché. Et cependant, alors qu'il subissait l'opposition, il payait la rançon pour les pécheurs, et supprimait l'esclavage où l'humanité était plongée. Chaque serrement de coeur, chaque insulte, tout participait à la délivrance des hommes. PR 530 2 Si Satan avait pu réussir à faire céder le Christ à une seule tentation, s'il avait pu le pousser par un acte ou même par une pensée à ternir sa pureté, le prince des ténèbres aurait triomphé de celui qui était infaillible, et il aurait ainsi réussi à dominer toute la famille humaine. Mais si Satan avait le pouvoir de décourager, il lui était impossible de corrompre; il pouvait provoquer l'agonie, non la souillure. Il fit de la vie du Christ une longue scène de luttes et d'épreuves. Toutefois, dans chacune de ses attaques, il perdait son pouvoir sur l'humanité. PR 530 3 Au désert de la tentation, au jardin de Gethsémané, et sur la croix, notre Sauveur affronta le prince des ténèbres. Ses blessures devinrent les trophées de sa victoire pour le salut de l'humanité. Lorsqu'il agonisait sur le Calvaire, que les esprits malins l'approchaient et que les hommes l'insultaient, Jésus reçut une véritable blessure au talon. Mais, par cet acte même, la tête du serpent était écrasée. Par la mort, le Sauveur anéantit "celui qui a la puissance de la mort, c'est-à-dire le diable."57 Ce fait décida de la destinée du chef rebelle, et scella définitivement le plan du salut. Jésus triompha de la puissance de la mort, et, en ressuscitant, il ouvrit à tous ses disciples les portes du tombeau. Dans ce dernier grand conflit, nous voyons s'accomplir la prophétie: "Celle-ci t'écrasera la tête, et tu lui blesseras le talon."58 PR 530 4 "Bien-aimés, dit l'apôtre Jean, nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n'a pas encore été manifesté; mais nous savons que, lorsque cela sera manifesté, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu'il est."59 Notre rédempteur a ouvert la voie, afin que les plus souillés, les plus misérables, les plus opprimés et les plus méprisés puissent trouver accès auprès du Père. PR 531 1 O Eternel! tu es mon Dieu; Je t'exalterai, je célébrerai ton nom, Car tu as fait des choses merveilleuses; PR 531 2 Tes desseins conçus à l'avance se sont fidèlement accomplis. ------------------------Chapitre 59 -- La maison d'Israël PR 533 1 En proclamant les vérités de l'Evangile éternel à toute nation, à toute tribu, à toute langue et à tout peuple, l'Eglise accomplit cette ancienne prophétie: "Israël poussera des fleurs et des rejetons, et il remplira le monde de ses fruits."1 PR 533 2 Les disciples de Jésus de concert avec les esprits célestes ont occupé rapidement les vastes régions du globe, et leur travail a produit une ample moisson d'âmes. Aujourd'hui, comme jamais auparavant, la proclamation des vérités bibliques par une Eglise fidèle apporte aux enfants des hommes les bénédictions promises il y a des siècles à Abraham et à sa descendance. "Je te bénirai ... et tu seras une source de bénédiction",2 avait déclaré le Seigneur au patriarche. PR 533 3 Cette promesse divine aurait dû être pleinement réalisée au cours des siècles qui suivirent le retour des Juifs en Palestine. Le dessein de Dieu était que la terre entière soit préparée pour la première venue du Christ, de même qu'est préparée aujourd'hui la voie pour sa seconde venue. A la fin de l'exil humiliant du peuple d'Israël, Dieu donna à ce peuple, par le prophète Zacharie, cette assurance miséricordieuse: "Je retourne à Sion, et je veux habiter au milieu de Jérusalem. Jérusalem sera appelée ville fidèle, et la montagne de l'Eternel des armées, montagne sainte." Il dit encore: "Voici, je délivre mon peuple. ... Je serai leur Dieu avec vérité et droiture."3 PR 534 1 Ces promesses dépendaient de l'obéissance d'Israël. Les péchés qui avaient caractérisé ce peuple avant la captivité ne devaient plus se renouveler. "Rendez véritablement la justice, disait le Seigneur à ceux qui reconstruisaient Jérusalem, et ayez l'un pour l'autre de la bonté et de la miséricorde. N'opprimez pas la veuve et l'orphelin, l'étranger et le pauvre, et ne méditez pas l'un contre l'autre le mal dans vos coeurs. ... Dites la vérité chacun à son prochain; jugez dans vos portes selon la vérité et en vue de la paix."4 PR 534 2 De riches récompenses à la fois temporelles et spirituelles étaient promises à qui mettrait en pratique ces principes de justice. "Les semailles prospéreront, la vigne rendra son fruit, la terre donnera ses produits, déclarait le Seigneur, et les cieux enverront leur rosée; je ferai jouir de toutes ces choses le reste de ce peuple. De même que vous avez été en malédiction parmi les nations, maison de Juda et maison d'Israël, de même je vous sauverai, et vous serez en bénédiction."5 PR 534 3 La déportation babylonienne avait chez les Israélites fait disparaître le culte des idoles. Lorsqu'ils retournèrent à Jérusalem, ils prêtèrent une grande attention à l'étude de la loi et des prophètes. La restauration du temple leur permit de revenir à la pratique des services du sanctuaire. Sous la direction de Zorobabel, d'Esdras et de Néhémie, ils renouvelèrent fréquemment l'alliance qui les engageait à observer tous les commandements et toutes les ordonnances du Seigneur. Les périodes de prospérité qui suivirent prouvèrent d'une manière éloquente que Dieu reçoit ses enfants et leur pardonne. Et cependant, leur étroitesse de vue les détournait sans cesse de leur glorieuse destinée. Ils s'appropriaient égoïstement les bienfaits qui auraient dû apporter la guérison et la vie spirituelle à des foules innombrables. PR 535 1 L'échec que les Israélites firent subir au plan divin fut particulièrement sensible au temps de Malachie. Les messagers de Dieu reprenaient avec une grande sévérité les péchés qui privaient Israël de la prospérité temporelle et spirituelle. En censurant les transgresseurs, le prophète n'épargnait ni le peuple, ni les prêtres. PR 535 2 L'oracle "parole de l'Eternel", de Malachie, invitait Israël à ne pas oublier les leçons du passé et à ne jamais perdre de vue l'alliance contractée avec Dieu. Seule une repentance totale pouvait lui assurer la bénédiction du ciel. "Priez Dieu maintenant, pour qu'il ait pitié de nous!"6 s'écriait le prophète. PR 535 3 Cependant, le dessein de Dieu concernant la rédemption de l'humanité n'aurait pu être anéanti par l'infidélité d'Israël. Ceux à qui s'adressait le prophète pouvaient détourner l'oreille de son message, l'accomplissement du plan divin n'en était pas perturbé. "Depuis le lever du soleil jusqu'à son couchant, déclarait le Seigneur par son messager, mon nom est grand parmi les nations, et en tout lieu on brûle de l'encens en l'honneur de mon nom et l'on présente des offrandes pures; car grand est mon nom parmi les nations."7 PR 535 4 L'alliance de "vie et de paix" que le Seigneur avait conclue avec les fils de Lévi -- alliance qui aurait procuré d'incomparables bienfaits si elle avait été respectée -- il offrait de la renouveler avec les anciens conducteurs spirituels. Ceux-ci s'étaient rendus "méprisables et vils aux yeux de tout le peuple",8 par suite de leurs transgressions. PR 535 5 Les pécheurs étaient solennellement avertis du jour prochain du jugement et de la destruction rapide qui fondrait, selon le plan divin, sur les transgresseurs. Et cependant aucun ne restait sans espoir. Les prophéties de Malachie relatives au jugement s'accompagnaient d'une invitation aux impénitents à revenir au Seigneur. "Revenez à moi, leur disait le Seigneur, et je reviendrai à vous."9 PR 535 6 Il semble que chacun devrait répondre à une telle invitation. Le Dieu du ciel supplie ses enfants égarés de revenir à lui, afin de prendre part à l'oeuvre qu'il accomplit ici-bas. Il tend la main pour saisir celle d'Israël, et l'aider à suivre le sentier étroit du renoncement et du sacrifice afin de partager avec lui l'héritage des enfants de Dieu. PR 536 1 Comme elles sont tristes les paroles de l'Ecriture nous rapportant qu'au temps de Malachie les Israélites hésitaient à livrer leur coeur endurci dans un élan de tendre obéissance et de sincère coopération! Leur propre justice se fait jour dans leur réponse: "En quoi devons-nous revenir?" demandent-ils. L'Eternel révèle à son peuple un de ses péchés particuliers. "Un homme trompe-t-il Dieu? demande-t-il, car vous me trompez." PR 536 2 Mais non convaincus de leur péché, les rebelles posent cette question: "En quoi t'avons-nous trompé?" La réponse est catégorique: "Dans les dîmes et les offrandes. Vous êtes frappés par la malédiction, et vous me trompez, la nation tout entière! Apportez à la maison du trésor toutes les dîmes, afin qu'il y ait de la nourriture dans ma maison; mettez-moi de la sorte à l'épreuve, dit l'Eternel des armées, et vous verrez si je n'ouvre pas pour vous les écluses des cieux, si je ne répands pas sur vous la bénédiction en abondance. Pour vous, je menacerai celui qui dévore, et il ne vous détruira pas les fruits de la terre, et la vigne ne sera pas stérile dans vos campagnes, dit l'Eternel des armées. Toutes les nations vous diront heureux, car vous serez un pays de délices, dit l'Eternel des armées."10 PR 536 3 Dieu bénit le travail des hommes; mais il veut que ceux-ci lui réservent sa part. Il leur dispense le soleil et la pluie; il leur accorde la santé et la possibilité de gagner leur vie. Tout provient de sa main généreuse. Il désire qu'hommes et femmes lui prouvent leur reconnaissance et lui apportent dîmes et offrandes: offrandes d'actions de grâces, volontaires, de culpabilité. Ils doivent mettre leurs ressources à son service, afin que sa vigne ne soit pas stérile. Il faut qu'ils se demandent ce que Jésus ferait à leur place et qu'ils lui soumettent toutes leurs difficultés. Ils feront ainsi preuve de désintéressement dans leur participation à l'oeuvre divine qui s'accomplit sur toute la terre. PR 536 4 Par des messages tels que ceux de Malachie -- le dernier des prophètes de l'Ancien Testament -- ainsi que par l'oppression des ennemis païens, les Israélites apprirent que la vraie prospérité dépend de l'obéissance à la loi divine. Mais pour nombre d'entre eux, cette obéissance n'était pas la conséquence de la foi et de l'amour. Leurs mobiles étaient égoïstes; les formes extérieures du culte n'étaient que des moyens pour parvenir à la grandeur nationale. Au lieu d'être la lumière du monde, le peuple élu s'isola pour éviter les séductions de l'idolâtrie. Les restrictions imposées par le Seigneur au sujet des mariages mixtes ou des relations avec les peuples païens furent perverties au point d'édifier un mur de séparation entre Israël et les autres nations. Les Juifs gardaient ainsi égoïstement pour eux les bénédictions dont ils auraient dû faire bénéficier le monde. PR 537 1 Les Israélites se séparaient en même temps de Dieu par leurs péchés. Ils ne pouvaient comprendre la signification spirituelle de leurs services symboliques. Imbus de leur propre justice, ils croyaient à leurs propres oeuvres, aux sacrifices et aux ordonnances, au lieu de se confier dans les mérites de celui que préfiguraient ces sacrifices et ces ordonnances. Ainsi, "cherchant à établir leur propre justice",11 ils se retranchaient dans un formalisme orgueilleux. Privés de l'Esprit et de la grâce de Dieu, ils essayaient de compenser leur pauvreté spirituelle par une observance rigoureuse des cérémonies et des rites religieux. Non satisfaits des ordonnances que le Seigneur lui-même avait établies, ils encombraient les commandements d'une infinité d'exigences de leur propre invention. Plus ils s'éloignaient de Dieu, plus sévère se faisait l'observation de ces formes. PR 537 2 Avec ces exigences rigoureuses et lourdes, le peuple était pratiquement incapable d'observer la loi. Les grands principes de justice du Décalogue et les glorieuses vérités du service symbolique étaient à la fois obscurcis et ensevelis sous une foule de traditions et d'ordonnances humaines. Ceux qui désiraient réellement servir le Seigneur et qui essayaient d'observer toute la loi, telle que l'ordonnaient les prêtres et les principaux, gémissaient sous un lourd fardeau. PR 537 3 Tout en désirant l'avènement du Messie, la nation israélite était séparée de Dieu de coeur et d'esprit, au point de ne plus comprendre le caractère de la mission du Rédempteur promis. Au lieu de désirer être délivrés du péché, de rechercher la paix et la sainteté, les Israélites ne pensaient qu'à être délivrés de leurs ennemis et à recouvrer leur autonomie. Ce qu'ils attendaient, c'était un Messie conquérant qui briserait tous les jougs qui leur étaient imposés et ferait d'eux une nation qui dominerait toutes les autres. C'est ainsi que Satan avait réussi à préparer le peuple à rejeter le Sauveur dès son apparition. L'orgueil des Israélites et leur fausse conception du caractère et de la mission du Christ les empêchaient de reconnaître les preuves évidentes de la messianité du Seigneur. PR 538 1 Le peuple juif avait attendu plus de mille ans la venue du Sauveur promis. Ses plus grands espoirs s'étaient concentrés sur cet événement. Pendant plus de mille ans, il avait exalté le nom du Messie dans le chant et la prophétie, dans les rites du temple, dans la prière familiale. Et cependant, lorsque le Christ parut, les Juifs repoussèrent celui qu'ils attendaient depuis si longtemps. "Elle est venue chez les siens (la lumière), et les siens ne l'ont point reçue."12 Pour leurs coeurs attachés aux choses du monde, le bien-aimé de Dieu "s'éleva comme un rejeton qui sort d'une terre desséchée". A leurs yeux, "son aspect n'avait rien pour (leur) plaire". "Il n'avait ni beauté, ni éclat pour attirer (leurs) regards."13 Toute la vie de Jésus au sein du peuple juif fut une condamnation de l'égoïsme manifesté à son égard, égoïsme qui empêcha de reconnaître les justes revendications du maître de la vigne où les Juifs étaient établis comme vignerons. Ces derniers haïssaient l'exemple de vérité et de sainteté donné par le Christ. Lorsque se présenta l'épreuve finale -- épreuve qui impliquait l'obéissance pour obtenir la vie éternelle, ou la désobéissance pour mériter la mort éternelle -- ils rejetèrent le Saint d'Israël et se rendirent coupables de sa crucifixion sur la croix du Calvaire. PR 538 2 Dans la parabole des vignerons, le Christ qui approchait de la fin de son ministère, appela l'attention des docteurs juifs sur les riches bénédictions conférées à Israël, et il leur montra ainsi quel était le but de Dieu en réclamant leur obéissance. Il exposa clairement devant eux le glorieux plan divin qu'ils auraient pu réaliser, s'ils avaient été fidèles. Et, soulevant le voile de l'avenir, le Sauveur leur montra comment, en faisant échouer ce plan, ils avaient privé toute la nation des bénédictions célestes et provoqué sa perte. PR 539 1 "Il y avait un homme, maître de maison, leur dit Jésus, qui planta une vigne. Il l'entoura d'une haie, y creusa un pressoir, et bâtit une tour; puis il l'afferma à des vignerons, et quitta le pays."14 Le Sauveur voulait parler de "la vigne de l'Eternel des armées", que le prophète Esaïe avait déclaré être, des siècles auparavant, "la maison d'Israël."15 "Lorsque le temps de la récolte fut arrivé, continua le Christ, il envoya ses serviteurs vers les vignerons, pour recevoir le produit de sa vigne. Les vignerons, s'étant saisis de ses serviteurs, battirent l'un, tuèrent l'autre, et lapidèrent le troisième. Il envoya encore d'autres serviteurs, en plus grand nombre que les premiers; et les vignerons les traitèrent de la même manière. Enfin, il envoya vers eux son fils, en disant: Ils auront du respect pour mon fils. Mais, quand les vignerons virent le fils, ils dirent entre eux: Voici l'héritier; venez, tuons-le, et emparons-nous de son héritage. Et ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne, et le tuèrent." PR 539 2 Après avoir dépeint aux prêtres l'acte suprême de leur méchanceté, le Sauveur leur posa cette question: "Lorsque le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons?" Les prêtres avaient suivi le récit avec beaucoup d'intérêt, sans saisir le rapport qu'il y avait entre eux et ce récit. Ils se joignirent à la foule pour répondre: "Il fera périr misérablement ces misérables, et il affermera la vigne à d'autres vignerons, qui lui en donneront le produit au temps de la récolte." Ils se condamnaient ainsi involontairement. Jésus les observait. Son regard scrutateur pénétrait les secrets de leurs coeurs. Sa divinité éclatait à leurs yeux avec une puissance manifeste. Ils virent dans les vignerons l'image de leur propre condition, et ils s'écrièrent involontairement: "A Dieu ne plaise!" PR 539 3 Le Christ leur demanda alors avec solennité, et avec regret: "N'avez-vous jamais lu dans les Ecritures: La pierre qu'on rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l'angle; c'est du Seigneur que cela est venu, et c'est un prodige à nos yeux? C'est pourquoi, je vous le dis, le royaume de Dieu vous sera enlevé, et sera donné à une nation qui en rendra les fruits. Celui qui tombera sur cette pierre s'y brisera, et celui sur qui elle tombera sera écrasé."16 PR 540 1 Si les Israélites avaient reçu le Sauveur, il aurait pu leur épargner le châtiment. Mais l'envie et la jalousie rendaient ce peuple inflexible; il était bien déterminé à ne pas reconnaître Jésus de Nazareth comme Messie. Il a rejeté la lumière du monde; c'est pourquoi les ténèbres l'environnèrent, aussi épaisses qu'en pleine nuit. Le châtiment prédit s'abattit sur lui. Ses passions violentes et déchaînées amenèrent sa propre perte. Dans sa fureur aveugle, il s'extermina lui-même. PR 540 2 L'orgueil inflexible et révolté amena sur les Juifs la colère des conquérants romains. Jérusalem fut détruite, le temple démoli et son emplacement labouré comme un champ Les enfants de Juda succombèrent de la mort la plus atroce. Des millions d'entre eux furent vendus comme esclaves. Ce que le Seigneur se proposait de faire pour le monde par Israël, le peuple élu, il le fera par son Eglise. Il a "affermé" sa vigne à d'autres vignerons, à ceux qui gardent son alliance et qui donnent le produit de sa vigne "au temps de la récolte". Dieu n'a jamais manqué, sur la terre, de vrais représentants qui ont considéré les intérêts divins comme les leurs. Ces témoins de Dieu font partie de l'Israël spirituel, et c'est pour eux que s'accompliront toutes les promesses de l'alliance conclue par le Seigneur avec son peuple d'autrefois. PR 540 3 Aujourd'hui, l'Eglise peut librement accomplir le plan divin destiné à sauver un monde perdu. Pendant de longs siècles, le peuple de Dieu souffrit du manque de liberté. La prédication de l'Evangile dans sa pureté était interdite, et les châtiments les plus cruels s'abattaient sur ceux qui osaient enfreindre les décrets des hommes. En conséquence, la vigne du Seigneur fut presque totalement abandonnée. Le peuple était privé des lumières de l'Evangile, les ténèbres de l'erreur et de la superstition menaçaient de faire disparaître la connaissance de la véritable religion. Au cours de cette longue période de persécutions, l'Eglise fut captive, comme les enfants d'Israël à Babylone. PR 540 4 Mais grâce au Seigneur, elle n'est plus dans l'esclavage. Les privilèges accordés au peuple élu, au moment où il fut délivré de l'exil, ont été restitués aux enfants de Dieu. Dans toutes les parties du monde, des hommes et des femmes répondent au message envoyé par le Seigneur, ce message qui devait être proclamé avant la seconde venue du Sauveur, comme l'annonçait le livre de l'Apocalypse: "Craignez Dieu, et donnez-lui gloire, car l'heure de son jugement est venue."17 PR 541 1 Les armées du mal n'ont plus le pouvoir de rendre l'Eglise captive; car "elle est tombée, Babylone, la grande, qui a abreuvé toutes les nations du vin de la fureur de son impudicité". Et voici le message adressé à l'Israël spirituel: "Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés, et que vous n'ayez point de part à ses fléaux."18 PR 541 2 De même que les captifs israélites se conformèrent au message qui leur était adressé: "Fuyez de Babylone",19 et que la terre promise leur fut restituée, de même de nos jours ceux qui craignent le Seigneur sortent de la Babylone spirituelle. Bientôt ils seront comme des trophées de la grâce divine sur la terre nouvelle, la Canaan céleste. PR 541 3 Avec quelle solennité, le prophète Malachie répondit à la question pleine d'ironie des impénitents: "Où est le Dieu de la justice?" "Et soudain entrera dans son temple le Seigneur ... le Messager de l'alliance. ... Qui pourra soutenir le jour de sa venue? Qui restera debout quand il paraîtra? Car il sera comme le feu du fondeur, comme la potasse des foulons. Il s'assiéra, fondra et purifiera l'argent; il purifiera les fils de Lévi, il les épurera comme on épure l'or et l'argent, et ils présenteront à l'Eternel des offrandes avec justice. Alors l'offrande de Juda et de Jérusalem sera agréable à l'Eternel, comme aux anciens jours, comme aux armées d'autrefois."20 PR 541 4 Voici le message que proclamait le précurseur du Christ avant son apparition: "Repentez-vous", publicains, pécheurs, sadducéens et pharisiens, "car le royaume des cieux est proche".21 PR 541 5 De nos jours, des serviteurs de Dieu, animés de l'esprit et de la puissance d'Elie et de Jean-Baptiste, attirent l'attention d'un monde destiné au jugement divin sur les événements solennels qui doivent bientôt se dérouler -- événements qui précéderont les dernières heures de l'épreuve suprême et de l'apparition de Jésus-Christ, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs. Bientôt chacun d'entre nous sera jugé selon ses oeuvres. Il appartient à tous les enfants de Dieu d'avertir les hommes qui courent à leur perte éternelle. Qu'il soit dit clairement à toute personne du vaste monde qu'il s'agit là des principes qui sont en jeu dans le grand conflit qui oppose Dieu à Satan, principes dont dépend la destinée de l'humanité. PR 542 1 Aux heures finales du temps de grâce, alors que le sort de toute âme est sur le point d'être décidé pour toujours, le Seigneur attend que son Eglise se réveille pour agir comme jamais auparavant. PR 542 2 Ceux qui ont été libérés en Christ par la connaissance de la vérité, sont considérés par Dieu comme ses élus, qu'il favorise plus que tous les peuples de la terre. Les bénédictions qui leur sont si généreusement accordées doivent être communiquées aux autres. Il faut que la bonne nouvelle du salut soit portée à toute nation, à toute tribu, à toute langue et à tout peuple. Dans les prophéties de l'Ancien Testament, Dieu est représenté comme répandant sa lumière sur son Eglise aux jours où les ténèbres de l'erreur et de l'incrédulité caractérisaient l'époque qui précédera la seconde venue du Rédempteur. Comme "le Soleil de justice", il se lèvera sur cette Eglise, "et la guérison sera sous ses ailes".22 De chaque vrai disciple du Seigneur se dégagera une influence vivifiante, réconfortante. PR 542 3 La venue de Jésus aura lieu au moment le plus sombre de l'histoire de notre monde. Les jours de Noé et de Lot se répéteront avant cette venue. Les écrits sacrés dépeignent les temps actuels, en déclarant que Satan opérera avec une grande puissance, "avec toutes les séductions de l'iniquité".23 Son oeuvre se manifeste clairement dans l'ignorance qui se fait sentir de plus en plus, dans les erreurs qui se multiplient, dans les mensonges et les hérésies des temps actuels. Satan ne se contente plus de conduire le monde vers l'esclavage; ses tromperies corrompent les Eglises qui prétendent être celles de notre Seigneur Jésus-Christ. Une apostasie se produira, aussi ténébreuse que la nuit la plus profonde. Ce sera un temps d'épreuve pour le peuple de Dieu, une nuit de lamentations, une nuit de persécutions pour l'amour de la vérité. Mais la lumière de Dieu resplendira dans cette obscurité profonde. PR 543 1 Le Seigneur fait briller la lumière "du sein des ténèbres."24 Lorsque la "terre était informe et vide", "qu'il y avait des ténèbres à la surface de l'abîme", "l'esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. Dieu dit: Que la lumière soit! Et la lumière fut."25 Il en est de même pour la nuit spirituelle; la Parole de Dieu ordonne que la lumière soit. Le Seigneur dit à son peuple: "Lève-toi, sois éclairée, car ta lumière arrive, et la gloire de l'Eternel se lève sur toi."26 "Voici, dit encore le prophète, les ténèbres couvrent la terre, et l'obscurité les peuples; mais sur toi l'Eternel se lève, sur toi sa gloire apparaît."27 Le Christ, reflet de la gloire du Père, vint dans le monde pour y apporter la lumière céleste, présenter Dieu aux hommes, et c'est de lui qu'il est écrit qu'il fut "oint du Saint-Esprit et de force", et qu'il "allait de lieu en lieu faisant du bien."28 Il déclara à la synagogue de Nazareth: "L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres; il m'a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur."29 C'est la mission qu'il confia à ses disciples: "Vous êtes la lumière du monde, leur dit-il, que votre lumière luise ainsi devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes oeuvres, et qu'ils glorifient votre Père qui est dans les cieux."30 PR 543 2 Le prophète Esaïe déclare à ce sujet: "Partage ton pain avec celui qui a faim, et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile; si tu vois un homme nu, couvre-le, et ne te détourne pas de ton semblable. Alors ta lumière poindra comme l'aurore, et ta guérison germera promptement; ta justice marchera devant toi, et la gloire de l'Eternel t'accompagnera."31 PR 543 3 C'est ainsi qu'au sein des ténèbres spirituelles la gloire de Dieu doit resplendir par l'intermédiaire de son Eglise, en relevant les opprimés et en réconfortant les affligés. PR 543 4 Les gémissements d'un monde éprouvé s'élèvent tout autour de nous. Partout on voit des pauvres et des gens dans la détresse. C'est à nous qu'il incombe le devoir de soulager et d'adoucir les tribulations et les misères de la vie. Seul l'amour du Christ peut répondre aux besoins de l'âme. Si Jésus demeure en nous, notre coeur débordera de sympathie divine. Les sources d'un zèle ardent jailliront sous l'impulsion d'un amour semblable à celui du Sauveur. PR 544 1 Que de gens ont perdu tout espoir! Ramenons le soleil dans leurs coeurs. Combien d'autres sont découragés! Adressons-leur des paroles de réconfort. Prions pour eux. D'aucuns ont besoin de recevoir le pain de vie. Lisons-leur la Parole de Dieu. D'autres sont tourmentés, ils ne peuvent recevoir aucun baume terrestre, et nul ne saurait les soulager. Amenons ces âmes en détresse à Jésus. Disons-leur qu'il existe un baume et un docteur en Galaad. PR 544 2 La lumière est une bénédiction universelle qui répand ses trésors sur un monde ingrat, impie et démoralisé. Il en est de même de la lumière du Soleil de justice. La terre est plongée dans les ténèbres du péché, de la tristesse, de la souffrance; elle doit être éclairée par la connaissance de l'amour de Dieu. La lumière qui émane du trône céleste ne saurait être exclue d'aucune secte, d'aucun rang, d'aucune classe. PR 544 3 Le message d'espérance et de miséricorde doit être proclamé jusqu'aux extrémités du monde. Tous ceux qui le désirent peuvent atteindre la puissance céleste, faire la paix avec Dieu. Les païens ne doivent plus être plongés dans les ténèbres; l'obscurité disparaîtra devant les rayons éclatants du Soleil de justice. PR 544 4 Le Christ a tout fait pour que son Eglise soit un corps transformé, illuminé par la lumière céleste et revêtu de la gloire d'Emmanuel. Son but est que tout chrétien soit environné d'une atmosphère spirituelle de lumière et de paix. Il veut que nos vies reflètent sa propre joie. PR 544 5 "Lève-toi, sois éclairée, car ta lumière arrive, et la gloire de l'Eternel se lève sur toi",32 dit le prophète Esaïe. Le Christ vient avec puissance. Il vient avec sa propre gloire et la gloire de son Père; les saints anges l'escortent. Alors que le monde est plongé dans les ténèbres, la lumière brille dans les demeures des saints. Ceux-ci saisiront les premières lueurs de sa seconde apparition. Une lumière éclatante resplendira de la gloire céleste, et le Christ, le Rédempteur, remplira d'admiration tous ceux qui l'auront servi. Tandis que les méchants s'enfuiront, les disciples du Sauveur se réjouiront en sa présence. PR 545 1 Les rachetés recevront alors l'héritage qui leur avait été promis. Ainsi les desseins de Dieu en faveur d'Israël s'accompliront littéralement. L'homme n'a aucun pouvoir pour annuler les projets divins. Même au milieu des embûches de Satan, ces projets se sont réalisés. Il en fut ainsi pour la maison d'Israël à travers les discordes de la monarchie. Il en est de même avec l'Israël spirituel de nos jours. PR 545 2 Le voyant de Patmos, jetant un regard à travers les âges, vit la restauration d'Israël dans la terre nouvelle. "Après cela, dit-il, je regardai, et voici, il y avait une grande foule, que personne ne pouvait compter, de toute nation, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue. Ils se tenaient devant le trône et devant l'Agneau, revêtus de robes blanches, et des palmes dans leurs mains. Et ils criaient d'une voix forte, en disant: Le salut est à notre Dieu qui est assis sur le trône, et à l'Agneau. Et tous les anges se tenaient autour du trône et des vieillards et des quatre êtres vivants; et ils se prosternèrent sur leurs faces devant le trône, et ils adorèrent Dieu, en disant: Amen! La louange, la gloire, la sagesse, l'action de grâces, l'honneur, la puissance et la force soient à notre Dieu, aux siècles des siècles!" PR 545 3 "Et j'entendis comme une voix d'une foule nombreuse, comme un bruit de grosses eaux, et comme un bruit de forts tonnerres, disant: Alléluia! Car le Seigneur notre Dieu tout-puissant est entré dans son règne. Réjouissons-nous et soyons dans l'allégresse, et donnons-lui gloire." "Il est le Seigneur des seigneurs et le Roi des rois, et les appelés, les élus et les fidèles ... sont avec lui."33 ------------------------Chapitre 60 -- Visions de la gloire future PR 547 1 Dans les jours les plus sombres de son conflit avec le mal, l'Eglise connaissait le plan éternel du Très-Haut. Elle pouvait prévoir au sein des tribulations de ce monde les triomphes futurs, alors que, la lutte terminée, les rachetés prendront possession de la terre promise. Les visions de la gloire à venir, peintes par la main divine, devraient être chères à son Eglise aujourd'hui, alors que s'achève rapidement la tragédie des siècles et que les bénédictions d'en haut sont sur le point d'être pleinement réalisées. PR 547 2 Ils sont nombreux les messages de réconfort adressés à l'Eglise par les prophètes de l'Ancien Testament. "Consolez, consolez mon peuple",1 disait déjà Esaïe de la part de Dieu. Ces paroles étaient acompagnées de visions glorieuses: sources de joie et d'espérance pour tous les croyants au cours des siècles. PR 547 3 Bien que méprisés, persécutés, abandonnés, les enfants de Dieu ont été de tout temps soutenus par les promesses réconfortantes du ciel. Ils ont vu par la foi le moment où le Seigneur accomplirait la promesse faite à son Eglise: "Je ferai de toi un ornement pour toujours, un sujet de joie de génération en génération."2 PR 548 1 L'Eglise militante est souvent appelée à subir l'épreuve et l'affliction, car ce n'est pas sans livrer un dur combat qu'elle remportera la victoire. "Du pain dans l'angoisse", "de l'eau dans la détresse",3 disait le prophète, voilà le lot de tous les croyants. Mais en comptant sur le Tout-Puissant ils ne sauraient être anéantis. "Ainsi parle maintenant l'Eternel, qui t'a créé, ô Jacob! dit encore Esaïe. Celui qui t'a formé, ô Israël! Ne crains rien, car je te rachète, je t'appelle par ton nom: tu es à moi! Si tu traverses les eaux, je serai avec toi; et les fleuves, ils ne te submergeront point; si tu marches dans le feu, tu ne te brûleras pas, et la flamme ne t'embrasera pas. Car je suis l'Eternel, ton Dieu, le saint d'Israël, ton sauveur; je donne l'Egypte pour ta rançon, l'Ethiopie et Saba à ta place. Parce que tu as du prix à mes yeux, parce que tu es honoré et que je t'aime, je donne des hommes à ta place, et des peuples pour ta vie."4 PR 548 2 Le pardon est auprès du Seigneur qui reçoit librement et gratuitement par les mérites de Jésus, notre Sauveur crucifié et ressuscité, tous ceux qui s'approchent de lui. Esaïe entendit encore ces paroles: "C'est moi qui efface tes transgressions pour l'amour de moi, et je ne me souviendrai plus de tes péchés. Réveille ma mémoire, plaidons ensemble, parle toi-même, pour te justifier." "Tu sauras que je suis l'Eternel, ton sauveur, ton rédempteur, le puissant de Jacob."5 PR 548 3 "Il fait disparaître de toute la terre l'opprobre de son peuple", dit encore le prophète. "On les appellera peuple saint, rachetés de l'Eternel." Le Seigneur leur donnera "un diadème au lieu de la cendre, une huile de joie au lieu du deuil, un vêtement de louange au lieu d'un esprit abattu, afin qu'on les appelle des térébinthes de la justice, une plantation de l'Eternel, pour servir à sa gloire." PR 548 4 Réveille-toi! réveille-toi! revêts ta parure, Sion! Revêts tes habits de fête, Jérusalem, ville sainte! Car il n'entrera plus chez toi ni incirconcis ni impur. Secoue ta poussière, lève-toi, Mets-toi sur ton séant, Jérusalem! Détache les liens de ton cou, Captive, fille de Sion! PR 549 1 Malheureuse, battue de la tempête, et que nul ne console! Voici, je garnirai tes pierres d'antimoine, Et je te donnerai des fondements de saphir; Je ferai tes créneaux de rubis, Tes portes d'escarboucles, Et toute ton enceinte de pierres précieuses. Tous tes fils seront disciples de l'Eternel, Et grande sera la prospérité de tes fils. Tu seras affermie par la justice; Bannis l'inquiétude, car tu n'as rien à craindre, Et la frayeur, car elle n'approchera pas de toi. Si l'on forme des complots, cela ne viendra pas de moi; Quiconque se liguera contre toi tombera sous ton pouvoir. ... Toute arme forgée contre toi sera sans effet; Et toute langue qui s'élèvera en justice contre toi, Tu la condamneras. Tel est l'héritage des serviteurs de l'Eternel, Tel est le salut qui leur viendra de moi, Dit l'Eternel. PR 549 2 Revêtue de l'armure de la justice du Christ, l'Eglise se prépare au conflit final. "Belle comme la lune, pure comme le soleil, mais terrible comme des troupes sous leurs bannières",7 elle s'avance dans le monde "en vainqueur et pour vaincre". PR 549 3 L'heure la plus sombre du conflit de l'Eglise avec les puissances du mal est celle qui précédera immédiatement sa délivrance finale. Mais tous ceux qui se confient en Dieu n'ont rien à craindre; car "le souffle des tyrans est comme l'ouragan qui frappe une muraille". Le Seigneur est pour son Eglise "un abri contre la tempête".8 PR 549 4 En ce jour-là, seuls les justes obtiendront la délivrance promise. PR 549 5 Les pécheurs sont effrayés dans Sion, Un tremblement saisit les impies: Qui de nous pourra rester auprès d'un feu dévorant? Qui de nous pourra rester auprès de flammes éternelles? Celui qui marche dans la justice, Et qui parle selon la droiture, Qui méprise un gain acquis par extorsion, Qui secoue les mains pour ne pas accepter un présent, Qui ferme l'oreille pour ne pas entendre des propos sanguinaires, Et qui se bande les yeux pour ne pas voir le mal, Celui-là habitera dans des lieux élevés; Des rochers fortifiés seront sa retraite; Du pain lui sera donné, De l'eau lui sera assurée. PR 550 1 A tous ceux qui lui resteront fidèles, le Seigneur adresse ces paroles: "Va, mon peuple, entre dans ta chambre, et ferme la porte derrière toi; cache-toi pour quelques instants, jusqu'à ce que la colère soit passée. Car voici, l'Eternel sort de sa demeure, pour punir les crimes des habitants de la terre."10 PR 550 2 Les serviteurs de Dieu eurent, en vision, un aperçu de la consternation où seront les hommes qui ne se sont pas préparés à rencontrer le Seigneur. PR 550 3 Voici, l'Eternel dévaste le pays et le rend désert, Il en bouleverse la face et en disperse les habitants. ... Car ils transgressaient les lois, violaient les ordonnances, Ils rompaient l'alliance éternelle. C'est pourquoi la malédiction dévore le pays, ... Les habitants du pays sont consumés. ... La joie des tambourins a cessé, La gaieté bruyante a pris fin, La joie de la harpe a cessé. PR 550 4 Ah! quel jour! Car le jour de l'Eternel est proche: Il vient comme un ravage du Tout-Puissant. ... Les semences ont séché sous les mottes; Les greniers sont vides, Les magasins sont en ruines, Car il n'y a point de blé. Comme les bêtes gémissent! Les troupeaux de boeufs sont consternés, Parce qu'ils sont sans pâturage; Et même les troupeaux de brebis sont en souffrance. PR 550 5 La vigne est confuse, Le figuier languissant; Le grenadier, le palmier, le pommier, Tous les arbres des champs sont flétris... La joie a cessé parmi les fils de l'homme! PR 551 1 "Je souffre au-dedans de mon coeur, s'exclame Jérémie, alors qu'il considère les ruines provoquées par les scènes finales de l'histoire du monde. Le coeur me bat, je ne puis me taire; car tu entends, mon âme, le son de la trompette, le cri de guerre. On annonce ruine sur ruine, car tout le pays est ravagé."13 PR 551 2 "L'homme orgueilleux sera humilié, dit le prophète Esaïe en parlant du jour de la vengeance divine, et le hautain sera abaissé: l'Eternel seul sera élevé ce jour-là. Toutes les idoles disparaîtront. ... En ce jour, les hommes jetteront leurs idoles d'argent et leurs idoles d'or, qu'ils s'étaient faites pour les adorer, aux rats et aux chauves-souris; et ils entreront dans les fentes des rochers et dans les creux des pierres, pour éviter la terreur de l'Eternel et l'éclat de sa majesté, quand il se lèvera pour effrayer la terre."14 PR 551 3 De son côté, voici ce que dit encore le prophète Jérémie: "Je regarde la terre, et voici, elle est informe et vide; les cieux, et leur lumière a disparu. Je regarde les montagnes, et voici, elles sont ébranlées; et toutes les collines chancellent. Je regarde, et voici, il n'y a point d'homme; et tous les oiseaux des cieux ont pris la fuite. Je regarde, et voici, le Carmel est un désert; et toutes ses villes sont détruites, devant l'Eternel." "Malheur! car ce jour est grand; il n'y en a point eu de semblable. C'est un temps d'angoisse pour Jacob; mais il en sera délivré."15 PR 551 4 Le jour de colère réservé aux ennemis de Dieu est en même temps le jour de la délivrance finale de l'Eglise. Le prophète déclare, en parlant d'elle: "Fortifiez les mains languissantes, et affermissez les genoux qui chancellent; dites à ceux qui ont le coeur troublé: Prenez courage, ne craignez point; voici votre Dieu, la vengeance viendra, la rétribution de Dieu; il viendra lui-même, et vous sauvera." PR 551 5 "Il anéantit la mort pour toujours; le Seigneur, l'Eternel, essuie les larmes de tous les visages; il fait disparaître de toute la terre l'opprobre de son peuple, car l'Eternel a parlé."16 Et tandis que le prophète contemple le Seigneur de gloire descendant des cieux avec ses saints anges, pour venir recueillir l'Eglise des derniers temps, il entend les rachetés s'écrier: "Voici, c'est notre Dieu, en qui nous avons confiance; et c'est lui qui nous sauve; c'est l'Eternel, en qui nous avons confiance; soyons dans l'allégresse et réjouissons-nous de son salut."17 PR 552 1 Alors retentit la voix du Fils de Dieu; elle appelle les saints qui dorment dans les tombeaux. Et tandis que le prophète les regarde sortir du lieu où la mort les avait emprisonnés, il s'écrie: "Que tes morts revivent! Que mes cadavres se relèvent! Réveillez-vous et tressaillez de joie, habitants de la poussière! Car ta rosée est une rosée vivifiante, et la terre redonnera le jour aux ombres." "Alors s'ouvriront les yeux des aveugles, s'ouvriront les oreilles des sourds; alors le boiteux sautera comme un cerf, et la langue du muet éclatera de joie."18 PR 552 2 D'après les visions du prophète, ceux qui auront triomphé du péché et du sépulcre se réjouiront en présence de leur Créateur. Ils s'entretiendront librement avec lui, comme l'homme parlait avec Dieu au commencement des âges. "Réjouissez-vous plutôt, leur ordonne le Seigneur, et soyez à toujours dans l'allégresse, à cause de ce que je vais créer; car je vais créer Jérusalem pour l'allégresse, et son peuple pour la joie. Je ferai de Jérusalem mon allégresse, et de mon peuple ma joie; on n'y entendra plus le bruit des pleurs et le bruit des cris." "Aucun habitant ne dira: Je suis malade!" Jérusalem recevra "le pardon de ses iniquités". "Des eaux jailliront dans le désert, et des ruisseaux dans la solitude; le mirage se changera en étang et la terre desséchée en sources d'eaux." "Au lieu de l'épine s'élèvera le cyprès, au lieu de la ronce croîtra le myrte." "Il y aura là un chemin frayé, une route qu'on appellera la voie sainte; nul impur n'y passera; elle sera pour eux seuls; ceux qui la suivront, même les insensés, ne pourront s'égarer." "Parlez au coeur de Jérusalem, et criez-lui que sa servitude est finie, que son iniquité est expiée, qu'elle a reçu de la main de l'Eternel au double de tous ses péchés."19 PR 552 3 Tandis que le prophète contemple les rachetés dans la cité de Dieu, libérés du péché et de toutes les marques de la malédiction, il s'écrie: "Réjouissez-vous avec Jérusalem; faites d'elle le sujet de votre allégresse, vous tous qui l'aimez; tressaillez avec elle de joie." PR 553 1 "On n'entendra plus parler de violence dans ton pays, ni de ravage et de ruine dans ton territoire; tu donneras à tes murs le nom de salut, et à tes portes celui de gloire. Ce ne sera plus le soleil qui te servira de lumière pendant le jour, ni la lune qui t'éclairera de sa lueur; mais l'Eternel sera ta lumière à toujours, ton Dieu sera ta gloire. Ton soleil ne se couchera plus, et ta lune ne s'obscurcira plus; car l'Eternel sera ta lumière à toujours, et les jours de ton deuil seront passés. Il n'y aura plus que des justes parmi ton peuple, ils posséderont à toujours le pays; c'est le rejeton que j'ai planté, l'oeuvre de mes mains pour servir à ma gloire."20 PR 553 2 Le prophète entendit les accents de la musique et des chants célestes, une musique et des chants qu'aucun mortel ne saurait entendre, qu'aucun esprit ne saurait concevoir, sinon en vision: "Les rachetés de l'Eternel retourneront, ils iront à Sion avec chants de triomphe; et une joie éternelle couronnera leur tête; l'allégresse et la joie s'approcheront, la douleur et les gémissements s'enfuiront." "La joie et l'allégresse se trouveront au milieu d'elle, les actions de grâces et le chant des cantiques." "Et ceux qui chantent et ceux qui dansent s'écrient: Toutes mes sources sont en toi." "Ils élèvent leur voix, ils poussent des cris d'allégresse; des bords de la mer, ils célèbrent la majesté de l'Eternel."21 PR 553 3 Dans la nouvelle terre les rachetés s'adonneront aux occupations qui faisaient le bonheur d'Adam et d'Eve. Ce sera l'Eden retrouvé, une vie passée dans les jardins et dans les champs. "Ils bâtiront des maisons et les habiteront; ils planteront des vignes et en mangeront le fruit. Ils ne bâtiront pas des maisons pour qu'un autre les habite, ils ne planteront pas des vignes pour qu'un autre en mange le fruit; car les jours de mon peuple seront comme les jours des arbres, et mes élus jouiront de l'oeuvre de leurs mains."22 PR 553 4 Là, toutes les facultés s'épanouiront, tous les talents se développeront, les plus grandes entreprises prospéreront, les aspirations les plus sublimes se réaliseront, les plus belles ambitions seront atteintes. Et de nouveaux sommets se dresseront toujours devant nous, de nouvelles merveilles s'offriront à notre admiration, de nouvelles vérités se présenteront à notre compréhension, de nouveaux sujets d'études feront appel à nos facultés. PR 554 1 Les prophètes qui contemplèrent ces scènes sublimes désiraient ardemment en comprendre la signification. Ils en faisaient "l'objet de leurs recherches et de leurs investigations, voulant sonder l'époque et les circonstances marquées par l'Esprit de Christ qui était en eux. ... Il leur fut révélé que ce n'était pas pour eux-mêmes, mais pour vous, qu'ils étaient les dispensateurs de ces choses, que vous ont annoncées maintenant ceux qui vous ont prêché l'Evangile."23 PR 554 2 Pour nous qui sommes à la veille de l'accomplissement de ces choses, comme la description de ces événements imminents doit nous paraître grave et digne d'un profond intérêt! Car ce sont eux que les enfants de Dieu ont attendus, souhaités et demandés depuis que nos premiers parents furent chassés du jardin d'Eden. Pèlerins sur cette terre, nous sommes encore dans les ténèbres et le tumulte des activités de ce monde; mais bientôt apparaîtra notre Sauveur qui nous apportera délivrance et repos. Contemplons par la foi cet avenir bienheureux, tel qu'il nous est dépeint de la main de Dieu. Celui qui est mort pour les péchés ouvre toutes grandes les portes du Paradis à tous ceux qui croient en lui. Bientôt, la lutte prendra fin, et la victoire sera remportée. Bientôt, nous verrons celui sur lequel se sont concentrées toutes nos espérances. En sa présence, les épreuves et les souffrances de cette vie nous paraîtront alors bien insignifiantes. PR 554 3 "On ne se rappellera plus les choses passées, elles ne reviendront plus à l'esprit." "N'abandonnez donc pas votre assurance, à laquelle est attachée une grande rémunération. Car vous avez besoin de persévérance, afin qu'après avoir accompli la volonté de Dieu, vous obteniez ce qui vous est promis. Encore un peu, un peu de temps: celui qui doit venir viendra, et il ne tardera pas." "C'est par l'Eternel qu'Israël obtient le salut, un salut éternel; vous ne serez ni honteux, ni confus, jusque dans l'éternité."24 PR 554 4 Levez les yeux! Regardez en haut! Que votre foi augmente sans cesse! Qu'elle vous guide dans l'étroit sentier qui aboutit aux portes de la cité céleste, dans la gloire infinie réservée aux rachetés. "Soyez donc patients, frères, dit l'apôtre Jacques, jusqu'à l'avènement du Seigneur. Voici, le laboureur attend le précieux fruit de la terre, prenant patience à son égard, jusqu'à ce qu'il ait reçu les pluies de la première et de l'arrière-saison. Vous aussi, soyez patients, affermissez vos coeurs, car l'avènement du Seigneur est proche."25 PR 555 1 Les rachetés ne connaîtront d'autre loi que celle du ciel. Ils formeront une famille heureuse et unie; ils seront revêtus de vêtements de louange et d'actions de grâces. Alors retentiront les saintes mélodies des étoiles du matin. Tous les fils de Dieu feront éclater leurs accents joyeux, et Dieu et le Christ proclameront ensemble: "Il n'y aura plus de péché, et la mort aura disparu pour toujours." PR 555 2 "A chaque nouvelle lune et à chaque sabbat, toute chair viendra se prosterner devant moi, dit l'Eternel." "Alors la gloire de l'Eternel sera révélée, et au même instant toute chair la verra." "Le Seigneur, l'Eternel, fera germer le salut et la louange, en présence de toutes les nations." "En ce jour, l'Eternel des armées sera une couronne éclatante et une parure magnifique pour le reste de son peuple." PR 555 3 "L'Eternel a pitié de Sion, il a pitié de toutes ses ruines; il rendra son désert semblable à un Eden, et sa terre aride à un jardin de l'Eternel." "La gloire du Liban lui sera donnée, la magnificence du Carmel et de Saron." "On ne te nommera plus délaissée, on ne nommera plus ta terre, désolation; mais on t'appellera mon plaisir en elle, et l'on appellera ta terre, épouse. ... Comme la fiancée fait la joie de son fiancé, ainsi tu feras la joie de ton Dieu."26